produits pétroliers
Question de :
M. Jean-Luc Pérat
Nord (24e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 13 novembre 2008
TAXATION DES BÉNÉFICES DE TOTAL
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Pérat, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Jean-Luc Pérat. Monsieur le Premier ministre, le groupe pétrolier Total a dégagé un bénéfice net supérieur à 4 milliards d'euros au troisième trimestre 2008, ce qui représente une hausse de 35 %. Vous avez déclaré il y a quelques jours à la presse : " Demander plus d'efforts à Total reviendrait à lui mettre un sac de pierres sur le dos. "
Justement, les Français en ont eux aussi plein le dos de devoir payer leur carburant si cher alors même que le prix du baril de pétrole connaît des baisses importantes, mais qui ne se traduisent pas dans les mêmes proportions à la pompe. En effet, nos concitoyens l'ont appris comme nous, depuis le record historique du 11 juillet dernier, le cours du pétrole a perdu plus de 60 % de sa valeur, passant de 117 à 46 euros environ. Comme Mme la ministre de l'économie il y a deux jours sur France Inter, nous réclamons donc des explications à l'industrie pétrolière.
Mon collègue Christian Eckert vous l'avait déjà fait remarquer : les députés socialistes ont apporté leur soutien au projet de loi sur le Grenelle de l'environnement, dans l'espoir que les intentions affichées seraient déclinées concrètement lors de l'examen du Grenelle II et leur financement assuré, s'agissant notamment des transports.
Cédant à notre pression, vous avez rétabli le dispositif de la prime transport, pleinement justifié afin d'inciter à la mobilité. Je vous rappelle que, pour une personne à revenus modestes obligée de se rendre à son travail en voiture ou en deux-roues, ce poste représente une dépense importante qui grève son pouvoir d'achat.
Nous aussi, nous voulons que les entreprises réalisent des bénéfices, mais, s'agissant de Total, n'oublions pas que nos concitoyens ont le dos large, et que cette multinationale en profite suffisamment pour pouvoir supporter quelques pierres supplémentaires.
La situation actuelle nous fournit l'occasion de faire appel à la solidarité de ceux qui en ont les moyens, puisqu'ils engrangent des bénéfices colossaux. Ainsi, selon les chiffres dont nous disposons aujourd'hui, Total a enregistré près de 11 milliards de bénéfices cumulés depuis le début de l'année.
À quand une taxe exceptionnelle sur ces super-profits, au bénéfice de tous nos concitoyens, qui souffrent déjà quotidiennement, et dont la situation risque encore de s'aggraver ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.
M. Patrick Roy. Et des profits pétroliers ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation. Monsieur le député, votre éloge de la taxation des bénéfices des entreprises montre que la révolution culturelle n'est pas vraiment en marche au Parti socialiste ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) En tout cas, elle n'aura pas lieu ce week-end au congrès de Reims ! (Même mouvement.)
Voici la réalité : le groupe Total est une entreprise française multinationale, qui réalise 90 % de son activité hors de nos frontières. Que souhaitez-vous ? Que cette entreprise réalise toute son activité en France, pour y extraire du pétrole qui n'y existe pas ?
M. Albert Facon. Qu'elle paye ses impôts en France !
M. Christian Bataille. Il faut faire baisser les prix !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Souhaitez-vous que nous la fassions fuir de notre pays par des mesures qui nuisent à la compétitivité de notre industrie ? (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La réalité, c'est que le Gouvernement a, depuis plusieurs mois, interpellé les compagnies pétrolières. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Avec Christine Lagarde, nous avons réuni tous les acteurs de la filière à Bercy l'hiver dernier, et les pétroliers se sont engagés. (" Ah ! " sur les bancs du groupe SRC.)
M. Albert Facon. Ils ont cru au père Noël !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Je rappelle que Total finance à hauteur de 170 millions d'euros la prime à la cuve, que le Gouvernement a relevée de 150 à 200 euros cette année, permettant ainsi aux ménages les moins favorisés de bénéficier de l'aide de l'État pour acquitter leur facture pétrolière.
Ensuite, le Premier ministre a en effet souhaité instaurer une aide supplémentaire afin de permettre aux ménages de financer leurs transports : la contribution transport.
M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas la question ! Expliquez-nous pourquoi les entreprises pétrolières ne payent pas l'impôt !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. L'idée est d'étendre le dispositif jusqu'alors réservé à l'Île-de-France en respectant la spécificité des cas et en laissant chaque entreprise s'adapter à la situation.
M. Maxime Gremetz. Parlez-en à la Cour des comptes !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Enfin, nous restons vigilants, monsieur le député : le Président de la République réunira dans les jours qui viennent les compagnies pétrolières (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) afin qu'elles mettent à exécution l'engagement qu'elles ont toujours pris : contribuer au financement de la facture pétrolière. Elles l'ont déjà fait en investissant, je l'ai rappelé, 170 millions d'euros au titre de l'aide à la cuve.
M. Maxime Gremetz. Arrêtez ! C'est scandaleux !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Ce n'est pas par des caricatures (Exclamations sur les bancs du groupe GDR) et par des taxations d'un autre âge que nous favoriserons l'investissement industriel dans notre pays ! (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)
M. Patrick Roy. Profits scandaleux, Gouvernement complice !
Auteur : M. Jean-Luc Pérat
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Industrie et consommation
Ministère répondant : Industrie et consommation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 novembre 2008