Question orale n° 1009 :
énergie photovoltaïque

13e Législature

Question de : M. Patrice Debray
Haute-Saône (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Patrice Debray attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les conséquences enregistrées par les entreprises du bâtiment, face à l'arrêté du 12 janvier 2010, fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations photovoltaïques. Alors que le tarif 2009 était de 0,60 euro/kWh, il passe à 0,42 euro/kWh pour les toitures photovoltaïques, soit une baisse de 30 %. Pourtant, le projet initial d'arrêté prévoyait une baisse à 0,50 euro/kWh, qui tenait compte de la baisse du prix d'achat des panneaux depuis 2 ans. Le domaine du photovoltaïque était annoncé en pleine expansion. Les entreprises ayant réalisé un CA de 44 millions d'euros en 2008 supportent avec difficulté une baisse de 25 % à 30 % de leur CA accompagnée d'une perte d'un volume de commandes représentant 25 % de leur activité. En conséquence, il lui demande s'il peut lui dire son intention afin d'envisager que ne soit pas exclu du tarif à 0,50 euro/kWh, d'une part, la construction des bâtiments agricoles et industriels traditionnels et, d'autre part, remettre à l'étude par ses services l'arrêté du 12 janvier 2010, pour qu'il ne soit pas rétroactif au 1er novembre 2009.

Réponse en séance, et publiée le 28 avril 2010

ARRÊTÉ DU 12 JANVIER 2010 SUR LES CONDITIONS D'ACHAT DE L'ÉLECTRICITÉ PRODUITE
PAR LES INSTALLATIONS PHOTOVOLTAÏQUES

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Debray, pour exposer sa question, n° 1009.
M. Patrice Debray. Ma question, qui s'adresse à M. Jean-Louis Borloo, absent aujourd'hui, traite des conséquences néfastes enregistrées par les entreprises du bâtiment face à l'arrêté du 12 janvier 2010 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations photovoltaïques.
Alors que le tarif 2009 était de 0,60 euro par kilowattheure, il passe à 0,42 euro par kilowattheure pour les toitures photovoltaïques sur bâtiments neufs, soit une baisse de 30 %. Pourtant, le projet initial d'arrêté prévoyait une baisse à 0,50 euro par kilowattheure, qui tenait compte de la baisse du prix d'achat des panneaux depuis deux ans, soit de l'ordre de 15 à 20 %. Ainsi, non seulement les conséquences de l'arrêté du 12 janvier 2010 sont d'une ampleur sans lien avec la baisse des prix des panneaux photovoltaïques, mais il est, de plus, rétroactif au 1er novembre 2009, ce qui ne pourra qu'aggraver la situation générale du dispositif.
Les conséquences pour l'emploi vont se traduire ainsi : les prix des panneaux français et européens ne seront plus compétitifs et seuls les panneaux en provenance d'Asie vont garder pied sur ce marché. Ainsi, une usine d'assemblage située en Alsace vient d'annoncer sa fermeture. La crise économique qui touche ce secteur d'activité est sans précédent et aucun signe de reprise n'est à noter pour l'instant. Seul le domaine du photovoltaïque était annoncé en pleine expansion. Une entreprise de charpentes métalliques située dans mon département a réalisé un chiffre d'affaires de 44 millions d'euros en 2008. En 2009, elle a enregistré 32 millions d'euros de commandes dont 8 pour des bâtiments destinés à recevoir une couverture photovoltaïque à réaliser en 2010. Si de telles entreprises supportent avec difficulté, comme l'ensemble de la profession du bâtiment, une baisse de 25 à 30 % de leur chiffre d'affaires, elles ne pourront pas supporter sans d'importantes conséquences sur l'emploi une perte d'un volume de commandes représentant 25 % de leur activité présente.
C'est pourquoi, avec de tels tarifs appliqués, tout le développement prévu sera profondément et sans doute durablement entravé, ce qui est, on en conviendra, dramatique dans le contexte économique actuel.
L'arrêté du 12 janvier 2010 prévoit un tarif de 0,50 euro par kilowattheure pour les bâtiments de plus de deux ans que l'on doterait d'une toiture photovoltaïque. Ce surcoût est incompréhensible tout simplement parce que la rénovation d'une toiture existante est beaucoup moins coûteuse que la construction d'un bâtiment neuf. Aussi je le dis, cette mesure, en l'état, empêchera le redémarrage attendu dans le secteur du bâtiment. Finalement, dans un marché actuellement en pleine crise, la baisse du tarif d'achat de l'électricité pour intégrer la baisse du prix d'achat des panneaux stoppera net l'investissement dans les bâtiments neufs, ce qui aboutira à l'effet inverse de celui qui est recherché.
En conséquence, comment le Gouvernement compte-t-il procéder pour, d'une part, ne pas exclure du tarif à 0,50 euro par kilowattheure la construction des bâtiments agricoles et industriels traditionnels et pour, d'autre part, veiller à ce que l'arrêté du 12 janvier 2010 ne soit pas rétroactif au 1er novembre 2009 ? Si nous voulons une activité pérenne en ce domaine, nous devons bien mesurer les conséquences sur l'emploi au moment ou le Président de la République a fixé comme objectif la réindustrialisation indispensable de chaque bassin d'emploi touché par la crise économique, en prenant en compte les populations qui y vivent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État auprès du ministre de l'écologie.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État auprès du ministre de l'écologie. Monsieur Patrice Debray, vous le savez, nous avons connu dans l'énergie solaire une bulle en novembre et décembre 2009. L'engagement financier a brusquement atteint plusieurs dizaines de milliards d'euros. La prise en charge, par les consommateurs d'électricité, de cet engagement généré en seulement deux mois aurait nécessité à elle seule un relèvement significatif du prix de l'électricité de l'ordre de 10 %, ce qui est évidemment impossible.
Le Gouvernement a décidé de prendre des mesures de lutte contre cette nouvelle forme de spéculation, destinées à supprimer les effets d'aubaine et à protéger le pouvoir d'achat des Français. Comme vous l'avez rappelé, le nouvel arrêté tarifaire publié en janvier tient compte de la très forte baisse des prix des panneaux photovoltaïques ces derniers mois : moins 30 à moins 50 %. Il assure une plus juste rémunération au projet solaire quel que soit le secteur. Ce dispositif a été finalisé dans un arrêté publié au Journal officiel du 23 mars 2010. Ainsi, seuls peuvent bénéficier des anciennes conditions tarifaires : premièrement, les installations pour lesquelles le producteur a donné son accord sur la proposition technique et financière de raccordement transmise par le gestionnaire de réseau et a versé avant le 11 janvier 2010 le premier acompte dans les conditions définies par la documentation technique de référence du gestionnaire de réseau ; deuxièmement, les installations pour lesquelles une demande de contrat d'achat a été formulée avant le 1er novembre 2009 ; troisièmement, les installations de puissance inférieure à trente-six kilowatts crête, soit 360 mètres carrés de panneaux, pour lesquelles une demande de contrat d'achat a été formulée avant le 11 janvier 2010 ; quatrièmement, les installations de puissance comprises entre trente-six et 250 kilowatts crête, soit 2 500 mètres carrés de panneaux pour lesquelles une demande de contrat d'achat et une demande complète de raccordement ont été formulées avant le 11 janvier 2010 ; enfin, cinquièmement, les installations de puissance comprises entre trente-six et 250 kilowatts crête pour lesquelles une demande de contrat d'achat a été formulée avant le 11 janvier 2010 et qui remplissent les trois conditions suivantes :
D'abord, l'installation est intégrée au sens de l'arrêté du 10 juillet 2006 à un bâtiment agricole ;
ensuite, l'installation a fait l'objet d'une déclaration préalable ou d'une demande de permis de construire avant le 11 janvier 2010, et le producteur dispose du récépissé mentionné à l'article R 423-3 du code de l'urbanisme ;
Enfin, le producteur dispose d'une attestation du préfet de département sollicité par le producteur au plus tard un mois après l'entrée en vigueur de ces mesures certifiant que, au 11 janvier 2010, le producteur est l'exploitant de la parcelle sur laquelle est situé le bâtiment ou une société détenue majoritairement par la ou les personnes exploitant ladite parcelle à titre individuel ou par l'intermédiaire d'une société d'exploitation agricole, l'exploitant agricole est propriétaire ou usufruitier du bâtiment ou en dispose dans le cadre d'un bail rural ou d'une convention de mise à disposition visée aux articles L. 323-14, L. 411-2 ou L. 411-37 du code rural, le bâtiment est nécessaire au maintien ou au développement de l'exploitation agricole.
Il n'en demeure pas moins le dispositif le plus incitatif au monde.
Selon la commission de régulation de l'énergie, un tarif de 42 centimes d'euro par kilowattheure, soit six à sept fois le prix du marché de l'électricité, permet de donner aux investissements un taux de rentabilité de plus de 10 %. Ce tarif est plus élevé qu'en Allemagne, où l'ensoleillement est pourtant moindre. À titre d'illustration, pour un projet de 250 kilowatts, le consommateur d'électricité apporte chaque année, pendant vingt ans, par sa contribution au service public de l'électricité, un montant financier de 100 000 euros, ce qui est considérable.
Ainsi, le Gouvernement a défini en concertation avec les parlementaires et l'ensemble des acteurs, notamment les représentants du monde agricole, un dispositif qui fait la part des choses de manière équitable.
Sans pour autant occulter les difficultés que rencontrent le monde du bâtiment et celui des entreprises en cette période de crise, on voit tout de même qu'un effort considérable a été réalisé pour réunir les conditions maximales permettant au marché de progresser, et assurer la meilleure coordination possible entre le pouvoir d'achat des consommateurs, le fonctionnement des entreprises et celui du monde agricole.
Mme la présidente. Je vous rappelle, madame la secrétaire d'État, que le temps imparti à la question et à la réponse est de six minutes. Je mesure l'importance du sujet mais je vous remercie de rester dans le cadre imparti.

Données clés

Auteur : M. Patrice Debray

Type de question : Question orale

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Écologie, énergie, développement durable et mer

Ministère répondant : Écologie, énergie, développement durable et mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 avril 2010

partager