Question orale n° 1022 :
matériel de transports

13e Législature

Question de : M. Alain Bocquet
Nord (20e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Alain Bocquet attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des transports sur "l'industrie ferroviaire du Nord-Pas-de-Calais et la sous-traitance : problème des commandes publiques traitées à l'étranger".

Réponse en séance, et publiée le 12 mai 2010

INDUSTRIE FERROVIAIRE DU NORD-PAS-DE-CALAIS

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bocquet, pour exposer sa question, n° 1022, relative à l'industrie ferroviaire du Nord-Pas-de-Calais.
M. Alain Bocquet. Madame la ministre, lors du débat sur l'industrie qui s'est déroulé à l'initiative des députés communistes, M. Estrosi n'avait pas manqué d'affirmations fortes ; il faudrait que les actes suivent. On en est loin ainsi qu'en témoigne la situation de l'industrie ferroviaire du Nord-Pas-de-Calais.
Première région ferroviaire de France, le Nord-Pas-de-Calais concentre 30 % de l'activité nationale, 10 000 emplois et 1 milliard de chiffre d'affaires. Avec le pôle de compétitivité i-Trans, l'Agence ferroviaire européenne, la prochaine extension universitaire du Mont-Houy, technopole axée sur les transports, et le projet de zone ferroviaire porté par la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut que je préside, nos territoires pourraient voir venir. Pourtant, l'inquiétude s'installe chez les salariés, de l'ouvrier au cadre, d'Alstom ou de Bombardier, les deux constructeurs du Valenciennois, et chez les sous-traitants.
Les commandes affluent : commandes de rames de TER issues de onze régions françaises et de la SNCF pour 15 milliards d'euros, et de RER pour l'Île-de-France à hauteur de 2,5 milliards d'euros. Ces commandes s'appuient sur l'argent public, celui des contribuables ou des usagers. Il est donc inadmissible que, dans une recherche de rentabilité à courte vue, les constructeurs le détournent de l'emploi local et de nos territoires. Cap à l'Est de l'Europe ! C'est le nouveau credo des constructeurs ferroviaires en quête de travail à bas coût. En conséquence, on supprime des emplois chez nous alors qu'on devrait en créer, et beaucoup !
Déréférencées, nos PME restent sur le carreau ainsi que le montre la production du PHD, le TER à deux niveaux : quarante voitures par mois annoncées en Tchéquie et en Pologne et 8 milliards d'euros, de quoi faire vivre notre tissu de PMI au lieu de le jeter dans la récession. Peu importe pourvu que ça rapporte ! Alstom vient d'annoncer des résultats records : plus 10 % de bénéfice net, soit 1,22 milliard d'euros, pour le dernier exercice 2009-2010 ; plus 5 % sur le chiffre d'affaires, tout cela en supprimant 5 000 emplois et en faisant bondir de 11 % les dividendes des actionnaires !
Quant au fret ferroviaire, il est en crise : la gare de triage de Somain, qui représente 400 emplois directs, est menacée de mort lente, et les 230 emplois du constructeur douaisien Arbel Fauvet Rail sont près d'être supprimés avec la liquidation de cette entreprise pourtant à la pointe de l'innovation. Des sociétés comme Mécastamp à Hénin-Beaumont, Amesco à Vieux-Condé, les Forges de Fresnes sont en difficulté. Et combien d'autres que menace le sort de la société amandinoise Delos, liquidée avec cinquante emplois à la clé ?
Devant ces réalités, l'État reste l'arme au pied. Il ne suffît pas d'effets d'annonce, telle la promesse de 7 milliards d'euros pour la relance du fret ferroviaire ou celle de privilégier la fabrication française. Concrètement, rien ne vient alors que c'est, pour les entreprises, une question de survie et de semaines. Il y a urgence à engager l'autorité du Gouvernement dans la remise en ordre de l'industrie ferroviaire : la responsabilité de l'État est en cause quand la mobilisation de commandes et de fonds publics joue contre les entreprises et salariés de notre pays.
Quelles dispositions urgentes le Gouvernement va-t-il prendre pour relancer le fret ferroviaire et permettre à nos bassins d'emploi et PME de tirer profit de l'envol de l'activité voyageurs, nourri de l'argent public ? Dans le Valenciennois, qui concentre 8 000 salariés du ferroviaire, Alstom et Bombardier devraient être les moteurs d'un essor créateur de richesse et d'emplois stables. Or c'est le contraire qui se produit actuellement. Votre réponse est attendue.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Christian Estrosi, qui aurait été certainement heureux, tout comme moi, de saluer l'importance et la qualité du pôle ferroviaire de la région Nord-pas-de-Calais.
Vous l'avez rappelé, les carnets de commande des acteurs français de la filière ont fortement progressé ces dernières années, notamment dans le domaine des passagers, et de nombreux signes indiquent que la demande en France ne devrait pas faiblir, à la faveur en particulier des projets lancés par le Grenelle de l'environnement.
Nous partageons tout à fait votre sentiment que les grands donneurs d'ordre français, Alstom en l'occurrence, devraient avoir tout avantage à se préoccuper aussi de la pérennité et de la qualité, pour ainsi dire, de l'écosystème organisé autour d'eux avec les sous-traitants, afin de bâtir une économie durable et des relations sur le long terme, tout en satisfaisant les besoins des clients, en particulier la SNCF et ses voyageurs.
Je voudrais vous indiquer que Christian Estrosi et moi-même, comme l'ensemble du Gouvernement, sommes impliqués dans une autre approche de cet important sujet. Il s'agit de l'obtention de la réciprocité dans les dialogues internationaux et en particulier dans nos relations à l'intérieur de l'OMC avec des pays comme la Chine, le Canada ou l'Inde.
Nous mettons en oeuvre la même approche, visant à faire travailler ensemble les entreprises françaises donneurs d'ordres et leurs sous-traitants, pour l'intervention à l'international. Très souvent d'ailleurs, les représentants des entreprises du Nord-Pas-de-Calais concernées par ce domaine m'accompagnent dans un certain nombre de déplacements.
À ce titre, M. Christian Estrosi, à la demande du Président de la République, a souhaité nommer récemment, dans la foulée des États généraux de l'industrie, un médiateur de la sous-traitance, M. Jean-Claude Volot, qui intervient dans le cadre du type de situations que vous évoquiez, éventuellement à l'international.
Le Gouvernement connaît la situation très difficile de plusieurs entreprises de l'industrie ferroviaire dans le Nord-Pas-de-Calais - je pense à Arbel Fauvet Rail - dont la liquidation a été prononcée cette semaine par le tribunal de commerce. L'État est attentif au sort des salariés. Les zones d'emploi de Valenciennes et Douai ont, à ce titre, été rendues éligibles au contrat de transition professionnelle, qui permet un accompagnement au retour à l'emploi très renforcé pour ces salariés.
Notons enfin que dans le cadre de l'Emprunt national, 150 millions d'euros seront affectés au transport ferroviaire du futur. À cet égard le pôle de compétitivité l-Trans, basé à Valenciennes, a un rôle majeur à jouer pour répondre aux enjeux nationaux et internationaux des transports innovants.

Données clés

Auteur : M. Alain Bocquet

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Industrie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mai 2010

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