Question orale n° 1247 :
politique de la santé

13e Législature

Question de : M. Philippe Vigier
Eure-et-Loir (4e circonscription) - Nouveau Centre

M. Philippe Vigier attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les inquiétudes suscitées par les dispositions prévues par l'ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale. Ces dispositions prévoient que lorsque la totalité ou une partie de la phase pré-analytique d'un examen de biologie médicale - ce qui inclut l'acte de prélèvement lui-même - ne peut être réalisée dans le laboratoire de biologie médicale, elle ne peut l'être que dans un établissement de santé, au domicile du patient, ou dans des lieux permettant la réalisation de cette phase par un professionnel de santé, sous la responsabilité d'un biologiste médical et conformément aux procédures qu'il détermine. Aux termes des dispositions de l'ordonnance, la liste et les caractéristiques de ces lieux sont déterminées par décret en Conseil d'État et les catégories de professionnels de santé habilités à réaliser cette phase sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. Or le projet de décret du Conseil d'État exclut les cabinets d'infirmières et d'infirmiers libéraux de la liste des établissements de santé habilités à intervenir dans la phase pré-analytique, ce qui signifie très concrètement qu'ils ne seront plus autorisés à procéder à des prises de sang au sein de leurs cabinets, tandis qu'il sera toujours possible d'en effectuer au domicile des patients et dans les laboratoires d'analyses médicales. Aussi, dans un souci d'égal accès aux soins, il souhaite savoir si le Gouvernement envisage de réintroduire les cabinets d'infirmiers et d'infirmières libéraux dans la liste des établissements de santé habilités à intervenir dans la phase pré-analytique.

Réponse en séance, et publiée le 2 février 2011

INTERVENTION DES CABINETS D'INFIRMIERS LIBÉRAUX
DANS LA PHASE PRÉ-ANALYTIQUE
D'UN EXAMEN DE BIOLOGIE MÉDICALE

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Vigier, pour exposer sa question, n° 1247.
M. Philippe Vigier. Madame la secrétaire d'État chargée de la santé, ma question porte sur les inquiétudes suscitées chez les infirmiers libéraux par les dispositions prévues par l'ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale.
À la suite du rapport rendu en 2008 par la mission Ballereau, la loi Hôpital, patients, santé et territoires a prévu une réorganisation complète de la profession de biologiste médical.
Madame Berra, vous êtes médecin, vous savez donc parfaitement que la phase pré-analytique est essentielle en matière de biologie médicale. Dans la mesure du possible, cette phase doit se dérouler dans un laboratoire d'analyses médicales, mais il n'est pas toujours possible d'y effectuer les prélèvements.
L'ordonnance a prévu que la phase pré-analytique pourrait être réalisée dans les établissements de santé ainsi qu'au domicile des patients. Quelle n'a pas été notre surprise lorsque nous avons appris que le Conseil d'État envisageait d'exclure les cabinets d'infirmières et d'infirmiers libéraux de la liste des lieux où cette phase pré-analytique pourrait être effectuée ! C'est à n'y rien comprendre ! En effet, ce type d'acte est réalisé quotidiennement dans les cabinets des infirmières et des infirmiers libéraux : en milieu rural, plus de 70 % des prélèvements y sont effectués.
C'est pourquoi nous tenions à vous alerter sur ce point, madame la secrétaire d'État, car il ne peut s'agir que d'un oubli. S'il n'était pas réparé, les efforts consentis par la profession infirmière en vue de l'accréditation - qui est une très bonne chose - seraient annihilés. Les cabinets des infirmières et infirmiers libéraux sont équipés de tout le matériel nécessaire pour que ces actes puissent se réaliser dans les meilleures conditions. J'ajoute que, si l'on excluait ces cabinets des lieux où la phase de pré-analyse peut être réalisée, les patients devraient se rendre dans un laboratoire. Or, dans ce secteur, le maillage du territoire est incomplet, en raison de la profonde restructuration que connaissent actuellement les laboratoires d'analyse médicale. Les patients devraient donc faire des dizaines de kilomètres, ce qui entraînerait des coûts très élevés, liés notamment aux déplacements nécessitant un VSL. Je n'ose donc imaginer les conséquences d'une telle décision.
Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement doit veiller à ce que le Conseil d'État ne commette pas un tel impair, qui serait fort préjudiciable à la profession d'infirmier libéral, maillon indispensable de la chaîne des soins, en raison non seulement des prélèvements sanguins effectués par les infirmiers, mais aussi de l'ensemble des soins qu'ils délivrent. Cette profession mérite une reconnaissance, et cette reconnaissance passe notamment par la mention des cabinets infirmiers dans la liste établie par le Conseil d'État.
M. Olivier Jardé. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé. Monsieur Vigier, vous attirez mon attention sur le fait que, dans les dispositions prévues par l'ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale, il est prévu qu'en cas de non-réalisation de la phase pré-analytique d'un examen de biologie médicale - ce qui inclut l'acte de prélèvement - dans un laboratoire de biologie médicale, il est nécessaire de faire en sorte qu'elle puisse être effectuée dans un établissement de santé, au domicile du patient ou dans des lieux permettant la réalisation de cette phase par un professionnel de santé sous la responsabilité d'un biologiste médical.
Il est vrai que, dans la mesure où ces lieux sont déterminés par décret en Conseil d'État et où ce projet de décret exclut les cabinets d'infirmiers et d'infirmières libéraux, ceux-ci ne seraient plus autorisés à procéder à des prises de sang au sein de leur cabinet, alors même qu'il leur serait toujours possible de les effectuer au domicile des patients et dans les laboratoires d'analyses médicales. Cette approche est motivée dans son principe par un objectif de qualité, mais il apparaît que cette restriction, qui remet en cause le maillage des lieux de prélèvement, pourrait nuire à l'accès aux soins, en particulier lorsque les centres sont situés en zone relativement isolée, et risque de favoriser les prélèvements à domicile, ce qui irait à l'encontre de l'objectif de maîtrise des dépenses.
Une réflexion est en cours pour que la possibilité d'effectuer les prélèvements soit à nouveau accordée à l'ensemble des professionnels ou des structures qui le souhaitent, notamment les centres de santé, les maisons de santé, les centres de santé infirmiers ou les centres de PMI. En revanche, afin de répondre aux exigences de qualité définies dans le cadre de la réforme de la biologie, cette possibilité d'effectuer des prélèvements devra être strictement encadrée dans le respect de l'ordonnance. Il conviendra donc d'établir une convention signée avec un laboratoire de biologie médicale, afin de définir les modalités de contrôle de la prescription par le biologiste, la façon dont il peut intervenir sur le site, ainsi que les modalités de prélèvement et de transmission des échantillons. Cette possibilité devrait permettre de concilier l'exigence de qualité avec l'objectif de l'accès aux soins, notamment dans les zones fragiles.
Le ministère de la santé souhaite clarifier cette disposition, en insistant toutefois sur la concertation avec les représentants non seulement des biologistes, mais aussi des médecins cliniciens et, bien entendu, des infirmiers.
M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier. Madame la secrétaire d'État, j'ai bien compris que nous étions sur la bonne voie. Toutefois, si une convention doit être conclue entre les professionnels de santé infirmiers et les laboratoires d'analyses médicales, qu'en sera-t-il du domicile des patients, où les examens pourront également être réalisés ? Il convient donc d'être très prudent ; à domicile, les prélèvements peuvent être réalisés par un médecin, une infirmière ou un biologiste. Mais encore une fois, nous sommes sur la bonne voie et je compte sur vous pour que nous progressions.

Données clés

Auteur : M. Philippe Vigier

Type de question : Question orale

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : Travail, emploi et santé

Ministère répondant : Travail, emploi et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 janvier 2011

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