Question orale n° 1411 :
taxe professionnelle

13e Législature

Question de : M. Michel Liebgott
Moselle (10e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Michel Liebgott interroge M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur le transfert de la part départementale de la taxe d'habitation vers les intercommunalités sises sur deux départements, dans le cadre de la suppression de la taxe professionnelle prévue par la loi de finances pour 2010 et modifiée par la loi de finances pour 2011. La suppression de la taxe professionnelle instaurée par la loi de finances pour 2010 a obligé le Gouvernement à mettre en place un nouveau système de financement, intégrant notamment plusieurs transferts de fiscalité entre les collectivités locales, afin de rendre cette réforme théoriquement neutre pour ces dernières. Ainsi, à partir du 1er janvier 2011, le produit de la part départementale de la taxe d'habitation doit être versé au bloc communal pour compenser en partie la perte de taxe professionnelle. Conséquence de ce transfert, les abattements décidés jusqu'à présent par les départements seront remplacés par ceux votés dans les communes ou les intercommunalités. Étant donné que ces abattements étaient très différents selon les collectivités et que cela pouvait engendrer des différences notables pour les contribuables, le Gouvernement, dans le cadre de l'article 59 de la loi de finances pour l'exercice 2011, et compte tenu de l'intervention juste et légitime des associations d'élus à ce sujet, a rédigé un amendement visant à rendre neutre ces disparités à l'intérieur du périmètre d'une intercommunalité d'un même département. Or il s'avère que cette disposition gouvernementale ne permettrait pas de rendre neutre la réforme fiscale pour les intercommunalités qui s'étendent sur deux départements. En effet, si l'un des départements avait voté d'importants abattements à la base pour la taxe d'habitation et si l'autre avait opté pour une politique différente, le mécanisme instauré par la loi ne prévoit de différenciation et oblige à l'instauration d'un taux uniforme dans le périmètre de l'intercommunalité. C'est précisément le cas de la communauté de communes du Pays-Haut, représentant 25 000 habitants répartis dans huit communes, situées pour six d'entre elles en Moselle et pour deux d'entre elles en Meurthe-et-Moselle. Les élus de cette communauté de communes et les maires des huit communes adhérentes sont particulièrement attachés à ce que cette réforme soit totalement neutre pour les contribuables. Ils se refusent à ce qu'elle aboutisse à des disparités fiscales intracommunautaires, ce qui pourrait nuire plus fortement au pouvoir d'achat des uns que des autres, ce qui ne renforcerait pas de ce fait le sentiment d'appartenir à une même communauté de vie. Le président de cette intercommunalité a récemment interpellé le préfet de Lorraine à ce sujet lequel a indiqué que les textes ne prévoyaient pas de dispositif dans ce cas de figure et que seule l'initiative Gouvernementale pourrait y pallier. Aussi, il lui demande quel système le Gouvernement entend mettre en place pour rendre neutre la réforme fiscale pour les contribuables dans ce cas d'espèce, qui ne doit vraisemblablement pas être unique en France.

Réponse en séance, et publiée le 1er avril 2011

CONDITIONS DE TRANSFERT DE LA PART DÉPARTEMENTALE DE LA TAXE D'HABITATION VERS LES INTERCOMMUNALITÉS SISES SUR DEUX DÉPARTEMENTS

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Liebgott., pour exposer sa question, n° 1411, relative aux conditions de transfert de la part départementale de la taxe d'habitation vers les intercommunalités sises sur deux départements.
M. Michel Liebgott. Ma question porte sur ce qui est manifestement un vide juridique résultant de la suppression de la taxe professionnelle, instaurée par la loi de finances pour 2010.
Cette suppression a obligé le Gouvernement à mettre en place un nouveau système de financement, intégrant notamment plusieurs transferts de fiscalité entre les collectivités locales, afin de rendre cette réforme théoriquement neutre pour ces dernières.
Ainsi, à partir du 1er janvier 2011, le produit de la part départementale de la taxe d'habitation doit être versé au bloc communal pour compenser en partie la perte de taxe professionnelle.
Conséquence de ce transfert, les abattements décidés jusqu'à présent par les départements seront remplacés par ceux votés dans les communes ou les intercommunalités. Étant donné que ces abattements étaient très différents selon les collectivités et que cela pouvait engendrer des différences notables pour les contribuables, le Gouvernement, dans le cadre de l'article 59 de la loi de finances pour 2011 et compte tenu de l'intervention de nombreuses associations d'élus sur le sujet, a rédigé un amendement visant à rendre neutre ces disparités à l'intérieur du périmètre d'une intercommunalité d'un même département.
Or il s'avère que cette disposition gouvernementale ne permet pas de rendre neutre la réforme fiscale pour les intercommunalités qui s'étendent sur deux départements, alors même que nous sommes dans le même pays.
En effet, si l'un des deux départements a voté d'importants abattements à la base pour la taxe d'habitation et si l'autre a opté pour une politique différente, le mécanisme instauré par la loi ne prévoit pas de différenciation et il oblige à l'instauration d'un taux uniforme dans le périmètre de l'intercommunalité.
Le mécanisme est valable pour l'ensemble du pays, mais je vais vous citer un exemple concret de ma circonscription : la communauté de communes du Pays-Haut-Val-d'Alzette, représentant 27 000 habitants répartis dans huit communes, situées pour six d'entre elles en Moselle et pour deux d'entre elles en Meurthe-et-Moselle. Il s'agit d'ailleurs d'une opération d'intérêt national qui a été décidée par le Président de la République.
Les élus de cette communauté de communes et les maires des huit communes adhérentes sont particulièrement attachés à ce que cette réforme soit totalement neutre pour les contribuables. Ils se refusent à ce qu'elle aboutisse à des disparités fiscales intracommunautaires, ce qui pourrait nuire plus fortement au pouvoir d'achat des uns que des autres, et ce qui ne renforcerait pas de ce fait le sentiment d'appartenir à une même communauté de vie. J'ajoute que nous sommes face à un pays unique : le Luxembourg.
Le président de cette intercommunalité a récemment interpellé le préfet de Lorraine à ce sujet, lequel a répondu - très justement d'ailleurs - que les textes ne prévoyaient pas de dispositif dans ce cas de figure et que seule l'initiative gouvernementale ou parlementaire pourrait y palier.
C'est pourquoi je vous demande quel système le Gouvernement entend mettre en place pour rendre neutre la réforme fiscale pour les contribuables dans ce cas d'espèce, qui n'est pas unique en France, loin s'en faut. Je ne vois pas pourquoi les gens seraient défavorisés parce qu'ils sont issus d'une intercommunalité qui est transdépartementale.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Monsieur le député Liebgott, veuillez excuser François Baroin qui ne peut malheureusement vous répondre personnellement et qui m'a confié le soin de le faire.
Vous avez évoqué la suppression de la taxe professionnelle et la réforme de l'architecture de la fiscalité locale qui en a découlé. Vous avez détaillé le dispositif mis en place et évoqué la question des transferts. Ensuite, vous avez posé la question de la neutralité.
Afin de laisser le temps aux communes d'ajuster leur politique d'abattement, le Gouvernement a, dans un premier temps, décidé de repousser d'un mois, jusqu'au 1er novembre 2010, le délai laissé aux assemblées délibérantes pour prendre, le cas échéant, de telles délibérations.
Dans un second temps, afin de garantir la neutralité de la réforme, François Baroin a proposé, lors de la discussion de la loi de finances pour 2011, un mécanisme qui corrige les effets du transfert de la part départementale pour le calcul de chacun des abattements communaux et intercommunaux de taxe d'habitation, et ce dans l'immense majorité des situations.
Par suite, aucune modification des abattements existant localement n'est nécessaire pour garantir sa neutralité pour les ménages. Les communes et intercommunalités qui avaient d'ores et déjà délibéré sur ce point ont disposé d'un délai exceptionnel, jusqu'au 1er décembre 2010, pour revenir, si elles le souhaitaient, sur leurs délibérations.
S'agissant plus particulièrement des intercommunalités qui s'étendent sur deux départements, l'article 1411 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2011, précise que dans cette situation la correction de l'abattement intercommunal est effectuée séparément pour chaque partie du territoire de l'établissement public de coopération intercommunale appartenant à chacun des départements, afin que le transfert de la part départementale de taxe d'habitation demeure neutre pour les contribuables concernés. Il y a donc bien neutralité.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Liebgott.
M. Michel Liebgott. Le Gouvernement a entendu les arguments des associations d'élus et il y a répondu par le biais de l'article 59 de la loi de finances pour 2011. En revanche, il n'entend pas les revendications des contribuables de deux départements différents qui subissent, de fait, une situation inéquitable résultant de la loi de finances votée en 2011.
Nous demandons et redemanderons qu'une future loi de finances revienne sur ces inégalités transdépartementales.
Nous vivons dans le même pays. Il n'y a pas de différences entre les départements.
Nous envisageons donc, pour l'année qui vient, soit de déposer un amendement parlementaire pour modifier la loi de finances, soit de demander au Gouvernement de prendre en compte cet élément, puisque cela ne semble pas être le cas aujourd'hui.

Données clés

Auteur : M. Michel Liebgott

Type de question : Question orale

Rubrique : Impôts locaux

Ministère interrogé : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État

Ministère répondant : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 22 mars 2011

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