demandeurs d'asile
Question de :
M. Michel Destot
Isère (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. Michel Destot attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur les conséquences de la mise en place de la régionalisation de la demande d'asile. En effet, dans la région Rhône-Alpes, seules deux préfectures sont habilitées à recevoir les dépôts de demande d'asile : celle du Rhône et celle de l'Isère. De ce fait, on assiste à une augmentation très importante du nombre de dossiers déposés en Isère. Il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures que le Gouvernement entend prendre en vue de mettre en oeuvre les engagements de notre pays, notamment en ce qui concerne l'accueil et l'hébergement des demandeurs d'asile.
Réponse en séance, et publiée le 8 juin 2011
CONSÉQUENCES DE LA RÉGIONALISATION DE L'ACCUEIL
DES DEMANDEURS D'ASILE
M. Michel Destot. Monsieur le ministre de l'Intérieur, ma question porte sur les conséquences de la politique de régionalisation de l'accueil des demandeurs d'asile mise en place par le Gouvernement.
Ainsi, en Rhône-Alpes, depuis le 20 avril 2010, seules deux préfectures sur les huit de la région sont habilitées à recevoir les demandes d'asile : celle du Rhône et celle de l'Isère.
Les associations et les élus nous font régulièrement part de leurs plus vives inquiétudes concernant les problématiques d'hébergement et d'accompagnement social des demandeurs d'asile. Vous n'êtes pas sans savoir que la France a pris des engagements internationaux et européens pour l'accueil des réfugiés. Or, de nombreuses familles se sont retrouvées à la rue avec des enfants en bas âge, faute de prise en charge en centres d'accueil de demandeurs d'asile - CADA -, les autres dispositifs d'hébergement d'urgence étant chroniquement surchargés et incapables de faire face à une demande croissante qui ne devrait pas leur incomber.
De plus, sur le plan administratif, alors que le nombre de dossiers déposés auprès de la préfecture de l'Isère a augmenté de façon considérable et que la sociologie des demandeurs d'asile a changé, notamment du fait de l'arrivée de familles avec enfants, le nombre de structures d'hébergement est loin d'avoir connu la même évolution. Il en est malheureusement de même pour les personnels en charge de l'instruction de ces dossiers, aujourd'hui dans l'incapacité de répondre correctement à toutes les demandes qui leur sont soumises. En témoignent les files d'attente de plus en plus longues devant les portes de la Préfecture, certains n'hésitant même plus à passer la nuit dehors pour être, au matin, les premiers au guichet. En témoignent également les procédures judiciaires intentées devant le tribunal administratif de Grenoble pour obtenir le simple droit de déposer un dossier, après une dizaine de tentatives infructueuses.
Les conséquences de cette insuffisance de moyens étatiques pour accueillir convenablement les demandeurs d'asile génèrent des occupations illicites de sites qui, en plus de fragiliser les populations concernées, ne manquent pas de troubler l'ordre public et le quotidien des riverains. Cela entraîne également des dépenses importantes pour la collectivité qui a dû se mobiliser en urgence pour faire face aux besoins de première nécessité de ces populations en relais de l'État. Ce sont ainsi plus de 300 000 euros que la ville de Grenoble a dû débloquer pour le seul hiver 2010/2011, ce qui n'est pas du ressort des collectivités locales.
Quelles sont donc, monsieur le ministre, les mesures que vous entendez prendre pour répondre aux conséquences de cette politique de régionalisation de l'accueil des demandeurs d'asile ?
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Monsieur le député Michel Destot, votre question illustre les difficultés considérables qui peuvent surgir lors la mise en place du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile.
La régionalisation de l'admission au séjour des demandeurs d'asile était destinée à mieux régler les problèmes d'hébergement et d'accompagnement social. Compte tenu de la taille de la région Rhône-Alpes et du nombre de demandeurs d'asile, trois plateformes d'accueil y ont été créées, dans l'Isère, dans le Rhône et dans la Loire.
Dans ce contexte, 128 places de centre d'accueil pour demandeurs d'asile ont été créées au 1er juillet 2010 dans la région. Une certain nombre de demandeurs d'asile ont par ailleurs été hébergés dans d'autres départements que ceux de la région.
L'État a engagé des moyens financiers importants puisque la région Rhône-Alpes a bénéficié, en 2010, d'un montant total de 47,3 millions d'euros, dont 24,8 millions ont été attribués aux CADA et 22,5 millions pour l'hébergement d'urgence, ce qui démontre que les places réservées aux demandeurs d'asile en CADA ne suffisent pas.
Enfin, votre question renvoie à la problématique plus générale de la pression qui s'exerce aujourd'hui sur notre système d'asile. Le nombre de demandeurs d'asile ne cesse d'augmenter et il faut traiter les dossiers plus rapidement, ce qui a incité le Premier ministre à renforcer, dès le début de l'année, les postes au sein de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides - OFPRA - et de la CADA.
Nous devrons par ailleurs mettre au point un dispositif pour mieux repérer les demandes infondées ou dilatoires. Je m'entretenais récemment de cette question avec le Haut Commissaire aux réfugiés des Nations-unies, M. Guterres : le problème est européen et il sera traité jeudi prochain par le conseil des ministres des affaires intérieures à Luxembourg. Dans tous les pays d'Europe, l'afflux est tel que nous avons du mal à traiter les dossiers de ceux dont les demandes sont les plus légitimes et qui ont besoin d'une réponse urgente, en exécution de notre tradition d'accueil mais aussi de l'application des conventions internationales.
C'est à une réforme structurelle que vous nous invitez. Nous y sommes engagés.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Destot.
M. Michel Destot. Dois-je comprendre, monsieur le ministre, que vous autorisez M. le préfet de région, M. Carenco, à élargir à d'autres départements que le Rhône et l'Isère, ces dispositifs d'accueil et que pour les points les plus urgents, nous pourrons affecter prioritairement les moyens de l'État dans ce domaine pour relayer les collectivités locales qui sont prêtes à jouer le jeu dès lors que l'État financerait davantage ?
Auteur : M. Michel Destot
Type de question : Question orale
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration
Ministère répondant : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 31 mai 2011