Question orale n° 1605 :
incendies

13e Législature

Question de : M. Henri Nayrou
Ariège (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Henri Nayrou attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur les difficultés, rencontrées par de nombreux maires de sa circonscription, concernant l'adaptation des réseaux d'eau aux exigences de la défense contre l'incendie. L'attente de cette nouvelle réglementation met sérieusement en difficultés les départements et les services départementaux d'incendie et de secours et laissent les maires ruraux assumer seuls une responsabilité pénale sans leur donner les moyens techniques, opérationnels, juridiques et financiers nécessaires. Aussi il souhaite connaître ses intentions quant à la révision des prescriptions actuelles pour les adapter à la réalité des besoins des services de secours et des finances des collectivités.

Réponse en séance, et publiée le 7 décembre 2011

ADAPTATION DES RÉSEAUX D'EAU
À LA DÉFENSE CONTRE L'INCENDIE

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Nayrou, pour exposer sa question, n° 1605, relative à l'adaptation des réseaux d'eau à la défense contre l'incendie.
M. Henri Nayrou. Je souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les difficultés rencontrées par de nombreux maires de ma circonscription ariégeoise et, au-delà, par les élus de la montagne française, dont j'ai été le président durant deux années. Ces difficultés concernent l'adaptation des réseaux d'eau aux exigences de la défense contre l'incendie, la fameuse DECI, défense extérieure contre l'incendie.
Monsieur le ministre, il ne me semble utile ni de reprendre la litanie des nombreuses questions écrites ou orales émanant des parlementaires des deux assemblées, questions qui témoignent de la dure réalité du problème, ni de relever que les maires attendent toujours la nouvelle réglementation maintes fois annoncée, qui avait été promise par le Gouvernement après la loi de modernisation de la sécurité civile de 2004. Je vous rappelle que cette réforme devait supprimer trois circulaires de 1951, 1957 et 1967. Il est temps d'arrêter de tourner en rond !
Si je devais vous convaincre de l'urgence de la situation, je ne donnerais pour exemple que le cas d'un élu d'une commune de 800 habitants répartis dans 22 hameaux, au potentiel fiscal de 371 000 euros, qui, soucieux de protéger ses administrés et de se mettre en conformité avec la loi, attend depuis plusieurs mois la validation du schéma communal de défense extérieure. Il s'agit d'une commune de ma circonscription, et même de mon canton.
La pré-étude de ce schéma, établi aux normes actuelles sans toutefois respecter la distance des 400 mètres du point de défense, nécessiterait l'achat et l'installation de sept cuves de soixante mètres cubes chacune pour un montant global de 145 000 euros. Dans les villages, l'implantation de ces réservoirs doit pallier l'impossibilité d'implanter des bornes d'incendie, pour cause de débit insuffisant au regard de la circulaire du 10 décembre 1951 complétée par la circulaire du 9 août 1967.
En attendant, le maire engage sa responsabilité en cas de sinistre, alors que la compétence eau a été transférée à un syndicat intercommunal. En conséquence, il refuse des permis de construire, alors que l'une de ses priorités est d'accueillir de nouveaux habitants afin de revitaliser son espace rural.
À titre indicatif, sachez qu'il devra consacrer le quart de son budget d'investissement à cette seule opération, dans le contexte financier fragile qui est celui des communes rurales et sans garantie que les travaux prévus respectent les futures normes.
Par ailleurs, outre les communes, les départements et les services départementaux d'incendie n'ont plus les éléments nécessaires pour remplir leurs missions de conseil et de contrôle.
Devant l'urgence pressante de la situation et après m'avoir indiqué le nouveau calendrier de parution des divers textes officiels, pouvez-vous, monsieur le ministre, me dire, premièrement, si les reports successifs de parution de la nouvelle réglementation ont permis aux services de prendre en compte l'ensemble de cette problématique pour les communes rurales à habitat dispersé, deuxièmement, si les réponses que l'on pourra m'apporter sont concrètement de nature à rassurer tous ces élus ruraux dont la responsabilité serait indûment engagée en cas de drame et, troisièmement, si ces communes peuvent espérer une aide financière de l'État à l'heure de faire face a ces nouvelles obligations ?
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales.
M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous prie tout d'abord, monsieur le député, de bien vouloir excuser l'absence de M. Claude Guéant, qui ne peut être présent ce matin.
Les règles d'implantation et de gestion des points d'eau servant à la défense contre l'incendie dans les communes suscitent de nombreuses difficultés de mise en oeuvre, depuis plusieurs dizaines d'années, vous l'avez rappelé. Jusqu'alors, les règles reposaient sur des cadres juridiques et techniques imprécis et anciens, dont, principalement, une circulaire remontant à 1951.
Face à la demande des élus, le Gouvernement s'est engagé, lors de la discussion de la loi de modernisation de la sécurité civile en 2004, à moderniser ces règles en profondeur.
Cette réforme complexe, engagée en 2005, mais déjà tentée, sans succès, par trois fois depuis quarante ans, s'est appuyée sur des expérimentations menées sur le terrain qui ont donné de bons résultats. Elle ambitionne un recadrage du domaine en précisant les compétences et rôles respectifs des intervenants en la matière, en particulier les communes ou les services départementaux d'incendie et de secours. Elle se décline en trois niveaux de règles : un cadre législatif et réglementaire national, des règlements départementaux de la défense extérieure contre l'incendie et des schémas communaux ou intercommunaux.
L'enjeu est d'avoir une approche réaliste de la défense extérieure contre l'incendie. Ainsi, les nouvelles règles comportent une fourchette de débit ou de volume en eau devant être disponibles, ajustée par les acteurs concernés en fonction des circonstances locales, dans le cadre de concertations obligatoires menées au niveau départemental ou communal.
Cette année, la réforme a connu, je le rappelle, une avancée décisive avec la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit du 17 mai 2011. Celle-ci fixe le nouveau cadre législatif de la défense extérieure contre l'incendie dans le code général des collectivités territoriales. L'édifice est complété par la possibilité d'un transfert volontaire du pouvoir de police spéciale du maire vers le président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. Ainsi a-t-on répondu à une demande forte de l'Association des maires de France.
Le projet de décret d'application de la loi sera adressé à l'Association des maires de France et à la Fédération nationale des collectivités concédantes et soumis, pour avis, à la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, à la Commission consultative d'évaluation des normes, puis au Conseil d'État.
Disons aussi, monsieur le député, pour vous répondre de façon très précise, que cette réforme ambitionne de ne plus laisser les maires des communes rurales seuls face à ces compétences et à ces responsabilités particulièrement complexes. Au-delà de la promotion des intercommunalités, que je viens d'évoquer, les services d'incendie et de secours sont replacés dans un rôle de conseiller technique auprès des élus. Ils vont participer à un nouveau partenariat adapté et intelligent pour la sécurité des populations, un partenariat sans maximalisme ni minimalisme, où chacun comprend les contraintes des autres.
Élus, experts et autres acteurs concernés, tels les gestionnaires de réseaux, doivent bâtir ensemble un subtil équilibre qui concilie les exigences de la sécurité collective et la nécessité absolue de maîtriser les dépenses publiques. Les outils juridiques et techniques portés par la réforme, que je vous ai sommairement présentés, permettront d'y parvenir.

Données clés

Auteur : M. Henri Nayrou

Type de question : Question orale

Rubrique : Sécurité publique

Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Ministère répondant : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 novembre 2011

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