Question orale n° 1606 :
médecins

13e Législature

Question de : Mme Sandrine Hurel
Seine-Maritime (11e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Sandrine Hurel alerte M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la désertification médicale en milieu rural. L'est du département de la Seine-Maritime, zone rurale qui s'étend de la région dieppoise au pays de Bray en passant par la vallée de la Bresle, est particulièrement touchée par la diminution de l'offre de soins et des services publics de santé. La densité médicale y est une des plus faibles de France. De nombreux médecins généralistes en fin d'activité ne sont pas remplacés ; ainsi plusieurs jours sont nécessaires avant de pouvoir consulter. Le délai d'attente pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste est de plusieurs mois, deux à trois mois au minimum pour un dermatologue, plus de six mois pour un ophtalmologue. Les services d'urgence à la population s'éloignent progressivement de ce territoire. Plusieurs projets de maisons de santé pluridisciplinaires sont en cours de réalisation dans plusieurs cantons pour pallier ce manque. Celle de Neufchâtel-en-Bray, qui verra le jour dans quelques mois, a mis plusieurs années à se concrétiser, les subventions de l'État n'étant pas celles qui avaient été promises au début des travaux. D'autres projets comme à Blangy-sur-Bresle ou à Forges-les-Eaux sont en réflexion. Elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour enrayer cette désertification médicale en milieu rural. Aussi, elle aimerait connaître ses intentions en matière de subventions venant de l'État concernant ces maisons de santé.

Réponse en séance, et publiée le 7 décembre 2011

OFFRE DE SOINS EN SEINE-MARITIME

Mme la présidente. La parole est à Mme Sandrine Hurel, pour exposer sa question, n° 1606, relative à l'offre de soins en Seine-Maritime.
Mme Sandrine Hurel. Ma question porte sur un phénomène auquel malheureusement beaucoup de nos concitoyens vivant en milieu rural sont aujourd'hui confrontés, je veux parler de la désertification médicale et donc de l'inéquité territoriale dans le secteur de la santé, qui s'ajoute, hélas, à l'injustice sociale.
Dans mon département de Seine-Maritime, et plus spécialement dans les zones rurales du pays de Bray et de la vallée de la Bresle, l'accès aux soins est de plus en plus difficile. Cela s'ajoutant aux mesures injustes prises par votre gouvernement en matière de santé, aux franchises médicales, aux déremboursements de médicaments, aux taxes sur les mutuelles, il ne fait pas bon être malade dans nos campagnes !
Dans plusieurs cantons de ce territoire, les médecins généralistes partant à la retraite sont rarement remplacés. Aussi, lorsque vous êtes malade, vous devez parfois attendre plusieurs jours avant de pouvoir consulter. Certains cabinets refusent même, par manque de places, les patients qui ne sont pas des habitués, et bien souvent les nouveaux habitants galèrent pour trouver un médecin référent.
La situation est la même en ce qui concerne les spécialistes, puisqu'il faut au minimum trois mois pour obtenir un rendez-vous chez un dermatologue et plus de six mois pour être reçu chez un ophtalmologue. Quelle réponse apportez-vous à cette dégradation ?
Idem pour les services d'urgence, qui s'éloignent progressivement. À cause de la suppression de nombreux services dans les hôpitaux de proximité, comme ceux de Neufchâtel-en-Bray et d'Eu, les urgences du CHU de Rouen sont débordées.
Une des solutions au problème de la désertification médicale en milieu rural est la création de maisons de santé pluridisciplinaires. À Neufchâtel-en-Bray, le projet a été lancé il y a plus de cinq ans et n'a toujours pas abouti. La région et le département apportent leur concours financier. L'État, qui devait financer les travaux à hauteur de 600 000 euros puis a revu ses chiffres à la baisse, à 300 000 euros, vient finalement d'envoyer aux élus une notification de subvention au titre du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire plafonnée à 100 000 euros. On est passé de 600 000 à 100 000 euros !
M. André Chassaigne. C'est scandaleux !
Mme Sandrine Hurel. D'autres projets de maisons de santé sont en cours d'élaboration dans les cantons de Blangy-sur-Bresle et de Forges-les-Eaux, mais là encore reste la question épineuse du financement.
Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour enrayer rapidement la désertification médicale en milieu rural ? Quelles aides est-il en mesure de garantir aux différents projets de maisons de santé ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé. Madame la députée, le problème de la démographie médicale est un sujet sur lequel le Gouvernement est très mobilisé. De nombreuses mesures ont été prises, que je rappellerai brièvement.
Nous avons tout d'abord relevé le numerus clausus. Le nombre d'étudiants autorisés à poursuivre leurs études a doublé en dix ans. Ils sont ainsi passés de 3 700 en 1999 à 6 200 en 2005 et 7 400 en 2011. Les places supplémentaires sont affectées en priorité aux territoires sous-dotés.
Nous avons ensuite organisé une meilleure répartition des étudiants entre les différentes spécialités au sein des régions, en adaptant le nombre de spécialistes formés en fonction des besoins exprimés par les agences régionales de santé.
Nous avons par ailleurs créé des contrats d'engagement de service public pour les étudiants et internes. À ce jour, sur les 400 contrats offerts en 2010-2011 - 200 pour les étudiants et 200 pour les internes -, près de 150 ont été signés avec, parmi les signataires, deux diplômés qui s'installeront en fin d'année. Pour assurer la montée en charge de ce dispositif, 400 nouveaux contrats ont été offerts à la rentrée 2011.
En ce qui concerne la médecine générale, des mesures ont été prises afin de mieux la valoriser et de structurer une véritable filière universitaire ; c'est, en tout, plus de 250 enseignants de médecine générale et 70 chefs de clinique qui ont pris leurs fonctions.
S'agissant, ensuite, des mesures améliorant les conditions d'exercice et favorisant l'installation et la coordination des prises en charge, il faut bien sûr évoquer la création des maisons de santé pluridisciplinaires, pour lesquelles nous avons créé un statut spécifique souple et adapté, celui de société interprofessionnelle de soins ambulatoires, la SISA. Au total, 231 maisons de santé pluridisciplinaires et pôles de santé pluridisciplinaires seront en fonctionnement d'ici à la fin de l'année.
Pour la Seine-Maritime, le développement de maisons de santé est en effet l'un des aspects majeurs de la solution. Le projet de maison de santé de Neufchâtel-en-Bray est emblématique de la méthode choisie par le Gouvernement pour régler la question de la démographie médicale. En partenariat avec les élus locaux et en appui des professionnels de santé, comme vous l'avez rappelé, l'État a accompagné sur le moyen terme ce projet ambitieux et pluriprofessionnel.
La dynamique s'est établie entre les professionnels de santé au sein de la maison de santé, qui commence aujourd'hui à attirer de nouveaux médecins. Ainsi, sur les dix médecins généralistes de la maison, cinq sont d'anciens stagiaires. La maison de Neufchâtel expérimente aussi les nouveaux modes de rémunération. Les projets sont parfois longs à émerger, mais c'est à ce prix qu'on enclenche une dynamique qui permet de rendre un territoire de nouveau attractif pour les professionnels.
Cette stratégie se met en place dans l'ensemble de la Seine-Maritime, non seulement à Forges-les-Eaux et à Blangy-sur-Bresle, mais aussi à Aumale ou Londinières. Dans le département, une dizaine de projets de ce type sont aujourd'hui en cours et se trouvent à différents niveaux d'avancement, certains étant au stade de la conception, d'autres déjà en phase de réalisation.
M. André Chassaigne. Qui paie ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Sandrine Hurel.
Mme Sandrine Hurel. Madame la secrétaire d'État, vous qualifiez d'" emblématique " le projet de maison de santé de Neufchâtel-en-Bray, mais vous ne répondez pas à la question que je vous ai posée sur la baisse de son financement. Je rappelle que le financement de l'État est passé de 600 000 euros à 100 000. Je regrette que vous n'apportiez pas de réponse à cette question essentielle.

Données clés

Auteur : Mme Sandrine Hurel

Type de question : Question orale

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Travail, emploi et santé

Ministère répondant : Travail, emploi et santé

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 novembre 2011

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