centres hospitaliers
Question de :
M. Marcel Bonnot
Doubs (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Marcel Bonnot attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la réorganisation des pôles de santé en Franche-Comté, plus spécialement sur le nord de la Franche-Comté où demeure le centre hospitalier régional Belfort-Montbéliard (CHBM), réorganisation qui, sous l'absolue autorité de l'ARS, paraît aller à contresens de l'importance et de la qualité de l'activité de ce centre, des données sociologiques et démographiques du nord de la Franche-Comté et du malade. En effet la stratégie de cette réorganisation tend semble-t-il à renforcer l'impact du CHU de Besançon bien que remarquable, et permettre à ce dernier d'envisager des mutualisations avec Dijon. Une forme de centralisation s'installe au profit du CHU bisontin et au détriment du CHBM. L'exemple de la réorganisation du service d'oncologie du CHBM en est une illustration : c'est le chef de service du CHU de Besançon qui dirige l'ensemble des deux pôles. Des médecins "pigistes" venant de Besançon amènent le patient à connaître six médecins différents pour huit cycles de chimiothérapie. Cette volonté absolue de n'avoir pour la Franche-Comté qu'un seul pôle ancré au CHU de Besançon dans les différentes disciplines ne procède nullement de l'intérêt du patient et de l'évolution attendue d'un espace de santé donné. Aussi il lui demande, alors que la réforme Hôpital, patient, santé et territoire n'est pas reconnaissable dans cette réorganisation, les mesures qui peuvent être prises pour endiguer la folle épopée d'une réorganisation qui se met en place au détriment d'un espace de santé digne de ce nom en Franche-Comté.
Réponse en séance, et publiée le 29 février 2012
RÉORGANISATION DES PÔLES DE SANTÉ EN FRANCHE-COMTÉ
M. le président. La parole est à M. Marcel Bonnot, pour exposer sa question, n° 1756, relative à la réorganisation des pôles de santé en Franche-Comté.M. Marcel Bonnot. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, porte sur la réorganisation des pôles de santé en Franche-Comté, plus spécialement sur le Nord-Franche-Comté où est installé le centre hospitalier régional Belfort-Montbéliard. Cette réorganisation, placée sous l'autorité absolue - je dirai même messianique - de l'ARS, paraît aller à contresens, eu égard à l'importance et à la qualité de l'activité de ce centre, sans oublier les données sociologiques et démographiques du Nord-Franche-Comté et l'intérêt des malades.
En effet, la stratégie de cette réorganisation tend, semble t il, à renforcer le CHU de Besançon, certes remarquable à plus d'un titre, et permettre à ce dernier d'envisager des mutualisations avec un centre plus important, en l'espèce celui de Dijon. Ainsi, une forme de centralisation s'installe au profit du CHU bisontin et au détriment du centre hospitalier Belfort-Montbéliard. Or il ne faut pas opposer les deux centres.
L'exemple de la réorganisation du service d'oncologie du centre hospitalier Belfort-Montbéliard est une illustration de la stratégie choisie : c'est le chef de service du CHU de Besançon qui dirige l'ensemble des deux pôles. Des médecins viennent de Besançon, ce qui amène le patient à connaître six médecins différents pour huit cycles de chimiothérapie !
Cette volonté absolue de n'avoir pour la Franche-Comté qu'un seul pôle, ancré au CHU de Besançon, dans les différentes disciplines, ne procède nullement de l'intérêt du patient ni de l'évolution attendue d'un espace de santé donné. Il faut savoir, pour reprendre l'exemple de l'oncologie, que le service dédié à cette spécialité au CHBM reçoit davantage de patients que celui du CHU. Le triangle Belfort-Montbéliard-Héricourt représente du reste 320 000 habitants, contre 150 000 à Besançon. Le chef du service concerné, qui est resté en place jusqu'à une date récente, faisait davantage de recherche clinique que son collègue du CHU bisontin. C'est donc un contresens sur toute la ligne ! Encore une fois, cette réorganisation ne va pas dans l'intérêt du patient.
J'ajoute que nous allons hériter d'un centre hospitalier médian disposant d'un plateau technique de pointe. Le ministre de la santé a validé ce projet - ce dont je le remercie, comme tous mes collègues élus du Nord-Franche-Comté, quelle que soit leur sensibilité - et apporté 68 millions pour la première tranche. Ce projet risque fort de ne devenir qu'une belle coquille vide et de n'attirer aucun des praticiens de haute volée que mérite ce nouveau centre hospitalier médian.
Madame la secrétaire d'État chargée de la santé, alors que la réforme impulsée par la loi hôpital, patients, santé et territoire n'est pas reconnaissable dans ces modifications, pouvez-vous m'indiquer quelles mesures peuvent être prises pour endiguer la folle épopée d'une réorganisation qui se met en place au détriment d'un espace de santé digne de ce nom en Franche-Comté ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la santé.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Xavier Bertrand, qui m'a priée de vous transmettre sa réponse
Il faut tout d'abord souligner l'importance du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, qui constitue le pôle de santé de référence de toute l'aire urbaine Nord-Franche-Comté et dessert à ce titre un bassin de vie de 330 000 habitants. L'offre de soins est complète et l'établissement dispose, comme cela est confirmé dans le nouveau plan régional de santé, de toutes les autorisations nécessaires à des prises en charges importantes.
La qualité de ses prestations sera encore renforcée par les investissements importants actuellement mis en oeuvre, avec la mise en chantier du site médian, qui regroupera en un lieu unique l'ensemble des spécialités de médecine, chirurgie et obstétrique. L'État, convaincu de l'importance de ce projet, apportera, ainsi que vous l'avez remarqué, une aide de près de 69 millions d'euros sur un investissement global de 270 millions d'euros.
Les difficultés rencontrées par la Franche-Comté sont celles d'une région qui doit optimiser les ressources rares que sont les compétences médicales. En effet, l'anesthésie-réanimation, la pédiatrie et plusieurs spécialités chirurgicales présentent d'ores et déjà ou présenteront à cet égard des déficits importants sur plusieurs spécialités fragiles : le CHBM sera confronté dans les années qui viennent à de nombreux départs de médecins. L'objectif doit donc être de développer, par le biais des coopérations entre établissements de la région, des partenariats permettant d'adapter les organisations à ces situations et de maintenir sur les centres hospitaliers de référence les spécialités nécessaires à la prise en charge de la population.
Dans ce contexte, le centre hospitalier régional universitaire de Besançon et le CHBM ont vocation à être complémentaires. Le CHBM constitue le centre de référence pour les patients de l'aire urbaine Nord-Franche-Comté ; à ce titre, il doit pouvoir proposer un certain nombre de spécialités, qu'il offre aujourd'hui aux patients mais qu'il doit sécuriser pour l'avenir.
De son côté, le CHRU de Besançon est l'unique CHU de la région. Il exerce à ce titre une mission particulière dans l'organisation à l'échelle régionale d'une offre de santé de pointe sur des spécialités rares, de même que dans le domaine de la recherche médicale et de la formation des étudiants en médecine.
Enfin, cette organisation régionalisée permet aussi de rendre attractive l'organisation médicale en cancérologie. La mise en oeuvre de la fédération médicale CHU-CHBM en radiothérapie a ainsi permis d'attirer récemment deux nouveaux radiothérapeutes, alors même que la spécialité est en difficulté à l'échelle nationale et que la région présentait cinq postes vacants en 2010. L'organisation régionale de l'activité d'oncologie médicale a permis de passer de deux oncologues médicaux exerçant en Franche-Comté en 2008 à dix-sept aujourd'hui.
Il faut saluer le projet immobilier en cours, qui permettra à l'institut régional fédératif du cancer de disposer d'un nouveau bâtiment regroupant l'ensemble des activités de cancérologie. Pour cette opération de 59 millions d'euros, l'État apportera, là aussi, une aide de 31,5 millions. Dans le cadre de l'organisation régionale de la santé en Franche-Comté, l'agence régionale de santé veillera à ce que le CHRU travaille en synergie avec le CHBM. La gradation des soins et la coopération entre établissements apparaissent comme le gage d'une prise en charge de qualité de l'ensemble des patients de Franche-Comté.
M. le président. La parole est à M. Marcel Bonnot.
M. Marcel Bonnot. Madame la secrétaire d'État, nous sommes d'accord pour optimiser et mutualiser les ressources rares. Mais de là à placer le CHMB, avec ses disciplines générales, mais aussi l'oncologie et le reste, sous la tutelle du CHU de Besançon, y compris lorsque les activités sont plus importantes dans le Nord-Franche-Comté qu'à Besançon, il n'en est pas question !
Les deux radiothérapeutes que vous avez évoqués sont des médecins volants. Si vous prenez connaissance de la presse régionale, qui traite abondamment du sujet, vous verrez qu'il ne se passe pas une semaine sans que cette pseudo-réorganisation soit l'objet de critiques véhémentes - et fondées, car tout se fait au détriment d'une véritable médecine, dans un espace hospitalier et géographique donné, et à l'encontre de l'intérêt des patients. Mutualiser, oui ; mettre sous tutelle, sous prétexte de réorganisations censées procéder de l'intérêt de tous, non, car ce n'est pas vrai !
Auteur : M. Marcel Bonnot
Type de question : Question orale
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Travail, emploi et santé
Ministère répondant : Travail, emploi et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 février 2012