Question orale n° 323 :
baux d'habitation

13e Législature

Question de : M. Philippe Morenvillier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Philippe Morenvillier attire l'attention de Mme la ministre du logement et de la ville sur les difficultés que peuvent rencontrer les propriétaires privés en raison de loyers impayés par leurs locataires. Il souhaiterait, à ce titre, prendre l'exemple d'un couple de retraités aux revenus modestes demeurant dans sa circonscription. Après leur départ en retraite, ils ont fait l'acquisition d'une maison d'habitation située en face de leur domicile pour la destiner à la location. En 1999, un bail a été signé avec une personne qui a rapidement cessé de payer ses loyers et les charges. En 2003, le tribunal d'instance de Toul, dont ils ont obtenu la résiliation du contrat, a condamné le locataire à payer les arriérés ainsi qu'une indemnité d'occupation mensuelle de 277,38 euros. En 2007, la cour d'appel de Nancy a confirmé cette décision et les sommes dues aux propriétaires s'élevaient à près de 12 000 euros. À ce jour, l'intéressé n'a effectué aucun versement. Or les demandeurs ont dû dépenser près de 13 000 euros dans cette affaire, entre les dépenses d'avocat, l'avance pour rembourser les charges impayées et surtout pour la remise en état du logement (estimée à plus de 6 000 euros). Les manquements du locataire et les délais de procédure ont placé les propriétaires dans une situation financière particulièrement délicate, les revenus du couple n'excédant pas 1 500 euros. Aujourd'hui, très inquiets sur leur avenir, ils ont souhaité sensibiliser les acteurs de la politique du logement sur cette situation. Ils estiment en effet que de tels incidents peuvent dissuader un grand nombre de petits investisseurs privés, dont la principale motivation est de constituer un capital immobilier complémentaire de leurs revenus financiers et à transmettre à leurs héritiers. Il souhaite donc connaître les mesures que le Gouvernement a prises ou souhaite prendre pour répondre à leurs inquiétudes.

Réponse en séance, et publiée le 4 juin 2008

PRÉVENTION ET TRAITEMENT DES LOYERS IMPAYÉS

M. le président. La parole est à Philippe Morenvillier, pour exposer sa question, n° 323, relative à la prévention et au traitement des loyers impayés.
M. Philippe Morenvillier. Mme la ministre du logement et de la ville, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés que peuvent rencontrer les propriétaires privés en raison de loyers impayés.
Permettez-moi de prendre l'exemple d'un couple de retraités aux revenus modestes demeurant dans ma circonscription. Leur cas particulier illustre parfaitement la situation que viennent nous soumettre de nombreux propriétaires aux revenus modestes dans nos permanences d'élus, de maire ou de député.
Après leur départ en retraite, ces deux personnes ont fait l'acquisition d'une maison d'habitation située en face de leur domicile pour la destiner à la location. Cet achat était surtout destiné à leur apporter un complément de revenu et à constituer un capital à transmettre à leurs enfants.
En 1990, un bail a été signé avec une personne qui avait pourtant apporté toutes les garanties, mais elle a rapidement cessé de payer les loyers et les charges. En 2003, le tribunal d'instance de Toul, dont ils ont obtenu la résiliation du contrat, a condamné le locataire à payer les arriérés ainsi qu'une indemnité d'occupation mensuelle de 277 euros. En 2007, la cour d'appel de Nancy a confirmé cette décision. Les sommes dues aux propriétaires s'élevaient à près de 12 000 euros.
S'il a bien quitté les lieux, l'intéressé n'a, à ce jour, effectué aucun versement. Or les demandeurs ont dû dépenser près de 13 000 euros dans cette affaire, entre les dépenses d'avocat, l'avance pour rembourser les charges impayées et, surtout, les frais pour la remise en état du logement, qui est estimée à plus de 6 000 euros. Les manquements du locataire et les délais de procédure ont placé les propriétaires dans une situation financière particulièrement délicate, car les revenus du couple n'excèdent pas 1 500 euros.
Aujourd'hui, très inquiets sur leur avenir, ils ont souhaité sensibiliser les acteurs de la politique du logement à cette situation. Ils estiment en effet que de tels incidents peuvent dissuader un grand nombre de petits investisseurs privés, qui jouent eux aussi un rôle important dans le développement de l'offre locative.
Le 11 décembre dernier, à Vandoeuvre-lès-Nancy, en Meurthe-et-Moselle, le Président de la République a pris des engagements forts en faveur de ces propriétaires et je sais que vous travaillez activement sur un projet qui traduira concrètement cette volonté. Pouvez-vous m'apporter, madame la ministre, des précisions sur les orientations principales de cette réforme ?
M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Monsieur le député, je vous remercie de cette question, qui est très importante.
De tels incidents handicapent la politique du logement car ils peuvent décourager les propriétaires privés. Nous nous préoccupons vraiment de cette difficulté car les petits propriétaires qui ont mis leur bien en location, souvent pour améliorer leur retraite, peuvent se retrouver dans une situation économique dramatique. Le problème ne concerne heureusement que 5 à 6 % des logements mis en location mais l'effet est épouvantable et de nombreux logements qui devraient être sur le marché n'y sont pas. Bref, même si le cas que vous ont exposé vos administrés, n'est heureusement pas très fréquent, les conséquences n'en sont pas moins terribles. Dites-leur bien en tout cas que le ministre est très sensibilisé à leur problème.
Vous attirez donc mon attention sur les difficultés que peuvent rencontrer les propriétaires bailleurs privés en raison de loyers impayés. Vous avez raison de rappeler, à l'appui de l'exemple édifiant que vous citez, que certaines situations sont inacceptables.
La question des risques d'impayés locatifs est essentielle pour améliorer les rapports entre propriétaires et locataires. Nous devons progresser sur ce sujet pour davantage sécuriser les bailleurs et encourager les petits investisseurs privés.
Je souhaite, en premier lieu, vous rappeler une mesure, adoptée lors de l'examen du projet de loi sur le pouvoir d'achat, à l'initiative du président de la commission des affaires sociales du Sénat. Il s'agit de la généralisation du versement de l'allocation de logement en tiers payant. Il était déjà prévu que les bailleurs ou les prêteurs puissent percevoir l'allocation de logement en tiers payant à la condition que l'allocataire soit d'accord. L'article 11, en vigueur depuis février 2008, généralise ce paiement en tiers payant pour l'allocation de logement à l'instar de ce qui existe pour l'aide personnalisée au logement dans le parc social. Cette faculté, désormais proposée aux propriétaires privés qui hésitent parfois à se lancer dans la location à des publics disposant de faibles ressources, est donc de nature à les rassurer et les encourager.
Par ailleurs, la mise en oeuvre de la garantie des risques locatifs, consécutive à la convention signée entre l'État et les représentants du 1 % logement le 20 décembre 2006, a permis la mise en place d'un système d'assurance contre les risques d'impayés de loyers permettant de couvrir un très large public.
Ce dispositif d'assurance, souscrit volontairement par le bailleur, apporte les garanties suivantes : une couverture en cas d'impayés de loyer pendant toute la durée du bail avec un plafond de garantie de 2 300 euros par mois, la prise en charge des détériorations immobilières du fait du locataire à son départ, dans la limite d'un plafond de 7 700 euros par logement et avec une franchise d'un mois de loyer plus les charges, ainsi que la gestion automatique du recouvrement des loyers impayés pour le compte du bailleur, sans aucune avance des frais de procédure.
Le Président de la République, à Vandoeuvre-lès-Nancy, a souhaité un système plus ambitieux pour que, comme il l'a lui-même annoncé, soit mise en oeuvre une assurance contre les risques d'impayés de loyers qui concernent l'ensemble des propriétaires et des locataires.
Une mission portant sur l'extension de ce dispositif a été confiée par Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, et moi-même, à Mme Sabine Baïetto-Beysson, directrice générale de l'ANAH, et à M. Bernard Beguin, directeur d'Equité Generali France. Leur rapport nous a été remis le 9 avril dernier. Ses conclusions font actuellement l'objet d'une concertation avec l'ensemble des partenaires concernés, dans la perspective d'arrêter les mesures à prendre par le Gouvernement. Ces mesures seront dans le projet de loi que je pense présenter au conseil des ministres dans le courant de mois de juin et qui devrait être discuté au Parlement à l'automne prochain.
Dites bien à vos administrés, monsieur le député, que nous sommes très conscients de ces difficultés et que nous devons absolument arriver à les résoudre.
M. le président. La parole est à Philippe Morenvillier
M. Philippe Morenvillier. Je vous remercie pour ces précisions, madame la ministre.
C'est une réforme qui est particulièrement attendue, tant par les locataires que par les propriétaires. Il était donc important que nos concitoyens sachent que le Gouvernement est mobilisé sur ce sujet.
Au regard du nombre de dossiers qui nous sont soumis dans nos mairies et nos circonscriptions, je pense que l'ensemble des députés et des maires seront très attentifs à ce texte et aux mesures que vous proposerez.

Données clés

Auteur : M. Philippe Morenvillier

Type de question : Question orale

Rubrique : Baux

Ministère interrogé : Logement et ville

Ministère répondant : Logement et ville

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juin 2008

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