fonctionnement
Question de :
Mme George Pau-Langevin
Paris (21e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Mme George Pau-Langevin interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur les conséquences des suppressions de postes dans les collèges et lycées. À Paris, la moyenne de suppression de postes en lycées est de l'ordre de 3 %, mais les inégalités entre arrondissements sont frappantes : les arrondissements du nord-est sont les plus durement touchés. Elle lui demande donc quelle est la justification de ces mesures drastiques et comment il entend conserver, voire améliorer, la qualité de l'enseignement sur le territoire parisien, et en particulier sur les quartiers du nord-est parisien.
Réponse en séance, et publiée le 11 juin 2008
SUPPRESSIONS DE POSTES D'ENSEIGNANTS À PARIS.
M. le président. La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour exposer sa question, n° 328, relative à la suppression de postes d'enseignants à Paris.Mme George Pau-Langevin. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, avec les parents et les enseignants de ma circonscription, ainsi qu'avec ma collègue Danièle Hoffman-Rispal, députée du XXe arrondissement de Paris, ici présente, je voudrais vous alerter sur les conséquences de la suppression de postes d'enseignants et de personnels encadrants sur tout le territoire parisien, mais particulièrement dans les quartiers du nord-est. La situation très grave de ces territoires nous révolte.
Pour les lycées, à Paris, les suppressions de postes s'élèvent en moyenne à environ 3 % des effectifs totaux, mais les inégalités entre les arrondissements sont frappantes et elles ne correspondent pas, selon nous, à des différences d'évolution de la population scolaire. Ainsi, alors que des arrondissements parisiens tels que le XVIe ou le VIIIe voient leurs effectifs peu modifiés, les XVIIIe, XIXe et XIe arrondissements perdent entre 6 et 8 % de leur personnel, et le XXe arrondissement perd trois postes.
Pour les collèges, la situation est la même : les arrondissements du nord-est parisien sont sacrifiés. Alors que le taux moyen de suppressions de postes est de 2 %, les XVIIIe, XIXe arrondissements enregistrent une perte de 4 % de leurs effectifs et le XXe arrondissement perd 10 postes.
L'arbitrage que vous avez ainsi effectué, monsieur le ministre, creuse les inégalités sur le territoire parisien et encourage un mouvement de désertion des établissements scolaires en difficulté vers les collèges et lycées plus favorisés.
Vous avez indiqué que la réduction du nombre d'enseignants et de personnels d'encadrement, comme les conseillers principaux d'éducation, répondait à une évolution de la démographie scolaire. Or nous constatons que vos décisions ne sont pas adaptées aux réalités de l'évolution de la population de chaque territoire. En effet, les personnels sacrifiés le sont dans des établissements qui, soit fonctionnent déjà à plein, soit gagnent des élèves.
Nous savons que le nombre de postes n'est pas tout, comme vous le dites souvent, mais nous constatons aussi que ces postes permettent le soutien et le suivi personnalisé des élèves, le dédoublement des classes. Grâce à eux, une attention optimale peut être portée à chacun.
En outre, vous le savez, l'est parisien accueille des populations diversifiées dont les enfants issus des classes populaires et défavorisées éprouvent un besoin particulier d'encadrement et de suivi. Ce territoire accueille également beaucoup de jeunes d'origine étrangère dont le français n'est pas la langue maternelle.
La situation du collège-lycée Voltaire, est particulièrement choquante puisqu'il subira, à la rentrée 2008, une baisse de sa dotation horaire de 103 heures. Des classes devaient être supprimées, certaines ont été rétablies mais amputées en nombre d'heures de cours ; huit postes d'enseignants ont été supprimés, puis finalement trois postes ont été partiellement rétablis ; un conseiller principal d'éducation sera remplacé par des assistants d'éducation qui n'ont ni les mêmes fonctions ni les mêmes compétences ! Tout cela n'est pas admissible dans ce lycée qui joue un rôle social important.
À l'école maternelle de la rue de la Cour-des-Noues, dans le XXe arrondissement, les parents ont appris la fermeture d'une classe maternelle. Alors que 234 enfants sont inscrits dans cette école, la moyenne actuelle de 29 enfants par classe passera après cette fermeture à 33, alors que les inspecteurs recommandent de ne pas dépasser 30.
À l'école Pierre Fonçin, toujours dans le XXe arrondissement, la situation est encore pire. Alors que l'ouverture d'une classe de petite section de maternelle y était programmée pour la rentrée 2008 et que les infrastructures avaient été réalisées par la Ville de Paris, on nous apprend que cette école ne va pas ouvrir. Il s'agit, une nouvelle fois, de dépenses publiques engagées en pure perte, et d'une atteinte à la mixité sociale car, bien évidemment, les parents qui pourront choisir d'inscrire leurs enfants ailleurs sont les parents les plus aisés.
Monsieur le ministre, qu'est-ce qui justifie des mesures aussi drastiques ? Hier soir, au conseil d'arrondissement, nous nous demandions ce que le XXe avait bien pu faire à l'éducation nationale pour être traité de la sorte ! Comment comptez-vous agir pour que soit maintenue la qualité du service public de l'enseignement sur tout le territoire parisien, et notamment au nord-est ?
La situation des jeunes est souvent évoquée et ils sont souvent critiqués ; mais que faisons-nous pour leur assurer l'égalité des chances ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.
M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Madame George Pau-Langevin, je comprends vos préoccupations, mais je voudrais répondre en restant le plus objectif possible. Au demeurant, le CDEN, le conseil départemental de l'éducation nationale, se tient la semaine prochaine et des ajustements ont toujours lieu à la dernière minute. Je pense en particulier aux cas des écoles maternelles que vous citiez. Les chiffres que vous nous donniez, s'ils sont vrais, ne sont pas acceptables : nous verrons donc comment les choses se présentent.
Je voudrais toutefois faire un portrait plus complet de la situation. À la prochaine rentrée, la baisse nette des moyens pour le second degré dans l'ensemble de l'académie de Paris est de 73 emplois, ce qui représente 0,8 % des personnels des collèges et lycées parisiens. Ce n'est pas rien, mais il faut relativiser ce chiffre car cette diminution de moyens doit être mise en perspective avec la baisse des effectifs d'élèves. Ainsi, à Paris, à la rentrée 2008, le nombre d'heures d'enseignement consacrées à un élève sera le même que celui des deux rentrées précédentes.
Les disparités que vous dénoncez sont vraies. Elles reflètent les évolutions des effectifs d'élèves attendus dans chaque établissement. Et à Paris, comme vous le savez, la situation est extrêmement mouvante. Ainsi, nous constatons une forte baisse du nombre des élèves dans le nord-est parisien, en particulier les XIe, XVIIIe et XIXe arrondissements. Les raisons de ces évolutions sont souvent étrangères à l'éducation nationale. La baisse d'effectifs entre les rentrées 2008 et 2006 devrait s'élever à 3 % dans ces arrondissements, alors que, sur la même période, elle est d'un peu moins de 2 % pour l'ensemble de l'académie. Les disparités sont donc relativement importantes entre des territoires très proches les uns des autres, et on constate une très grande mobilité des familles.
À côté des suppressions de postes, il convient également de tenir compte des créations - car nous créons des postes là où nous avons plus d'élèves -, de sorte que la diminution nette pour les collèges dans les XVIIIe et XIXe arrondissements est inférieure à celle que vous indiquez, et qu'elle se limite à 2 % dans le XXe arrondissement.
Mais je ne veux pas rester sourd aux demandes des élus et nous serons très attentifs à la situation des établissements de ces territoires, en particulier des établissements où le public est le plus fragile, je pense aux primo-arrivants.
Pour les " constats de rentrée " - ce sera partiellement le cas dès la semaine prochaine avec le CDEN et plus complètement, en tout cas, à la fin du mois d'août et au début du mois de septembre - je prends l'engagement que nous ajusterons notre offre éducative aux effectifs d'élèves accueillis. Je le dis, en particulier, pour ce qui concerne la maternelle que vous évoquiez, madame Pau-Langevin : j'en prends l'engagement devant vous - vous me le rappellerez si jamais l'inspecteur d'académie de Paris devait l'oublier.
Quant à la qualité de l'enseignement, elle s'améliore. Je rappelle que nous avons mis spécifiquement mis en place dans les quartiers qui en ont besoin des dispositifs favorisant la réussite. L'accompagnement éducatif sera ainsi étendu à tous les collèges à la rentrée 2008 sous forme d'aide aux devoirs et d'actions culturelles ou sportives. Le dispositif expérimental de réussite scolaire au lycée permettra de mettre en place dans les lycées Bergson et Rabelais, et au lycée professionnel Armand Carrel, trois établissements du secteur, un accompagnement sur les quatre thèmes suivants : l'aide au travail scolaire ; l'entraînement aux épreuves des examens ; l'élaboration et l'approfondissement du projet d'orientation ; la préparation à la poursuite d'études supérieures.
Nous nous sommes donc vraiment consacrés à ces établissements auxquels vous faisiez allusion. L'ensemble de ce dispositif s'inscrit, concernant les collèges, dans le cadre des quatre réseaux " Ambition réussite " créés depuis la rentrée 2006, et qui sont tous situés dans le nord-est parisien.
Bref, pour ce qui est des disparités les plus criantes, si elles sont avérées, ce que nous vérifierons, nous les corrigerons.
Par ailleurs, étant donné la baisse des effectifs, et l'effort consenti dans le cadre des divers dispositifs d'accompagnement éducatif ou d'aide aux lycées et des réseaux " Ambition réussite ", on ne peut pas dire que les arrondissements que vous défendez soient en particulière déshérence sur le plan éducatif.
Auteur : Mme George Pau-Langevin
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement secondaire
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère répondant : Éducation nationale
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juin 2008