Question orale n° 383 :
maladies professionnelles

13e Législature

Question de : M. Henri Jibrayel
Bouches-du-Rhône (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Henri Jibrayel rappelle à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité qu'en avril dernier, Monsieur Jean Le Garrec lui a remis un rapport intitulé « propositions pour une réforme nécessaire et juste » relatif au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Dans sa lettre de mission à Monsieur le Garrec, il a souligné un certain nombre de difficultés liées à l'instruction des dossiers et notamment la traçabilité des expositions à l'amiante et l'instruction des demandes concernant les salariés d'entreprises aujourd'hui disparus. La proposition numéro 1 du rapport préconisait de mettre en place dès le troisième trimestre 2008, une mission de très haut niveau, confiée à un préfet, qui sera chargé de faire dans chaque région, avec les acteurs locaux, un point sur l'application de la réglementation, sur les sites abandonnés et d'envisager les mesures à prendre. Si ce dispositif marque une avancée non négligeable dans le traitement de certains dossiers, il ne règle pas la situation des salariés dont l'entreprise a disparu. C'est le cas de l'ex-usine Arkéma de l'Estaque, dans les Bouches-du-Rhône, qui n'existe plus aujourd'hui et dont le site est en cours de dépollution. Dans ce cas précis, les salariés, avant même de prétendre à une quelconque indemnisation, se trouvent dans l'obligation de faire reconnaître le site sur lequel ils ont travaillé durant plusieurs années. Est-il normal, alors que de nombreux salariés sont atteints par la maladie et que malheureusement un décès soit survenu, que ce soit à eux d'apporter la preuve d'utilisation d'amiante. Aujourd'hui, ces anciens salariés ont déposé un recours auprès du tribunal administratif, contraints de faire la preuve de l'utilisation de l'amiante avec des attestations « sur l'honneur » ! Pire encore, le rapport de Monsieur Le Garrec préconise de ne rien faire jusqu'en 2010 et ensuite d'instruire les dossiers non plus par site, mais par métier. Et en attendant ! Il lui demande combien de temps il va encore falloir attendre pour que l'État prenne ses responsabilités.

Réponse en séance, et publiée le 8 octobre 2008

CONCLUSIONS DU RAPPORT SUR LA CESSATION ANTICIPÉE D'ACTIVITÉ DES TRAVAILLEURS DE L'AMIANTE

M. le président. La parole est à M. Henri Jibrayel, pour exposer sa question, n° 383, relative aux conclusions du rapport sur la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
M. Henri Jibrayel. Ma question s'adresse à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, qui a été destinataire, en avril dernier, d'un rapport de M. Jean Le Garrec intitulé " Propositions pour une réforme nécessaire et juste " relatif au dispositif de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante.
Dans sa lettre de mission à M. Le Garrec, le ministre du travail soulignait certaines difficultés liées à l'instruction des dossiers, notamment la traçabilité des expositions à l'amiante et le traitement des demandes concernant les salariés d'entreprises aujourd'hui disparues.
La première proposition du rapport préconisait de mettre en place, dès le troisième trimestre 2008, une mission de très haut niveau confiée à un préfet. Dans chaque région et avec les acteurs locaux, ce dernier serait chargé de faire le point sur l'application de la réglementation et sur les sites abandonnés, et de proposer des mesures.
Si ce dispositif marque une avancée non négligeable dans le traitement de certains dossiers, il ne règle pas la situation des salariés dont l'entreprise a disparu. C'est le cas de l'ancienne usine Arkema de l'Estaque, dans les Bouches-du-Rhône, qui n'existe plus aujourd'hui et dont le site est en cours de dépollution. Dans ce cas précis, les salariés, avant même de prétendre à une quelconque indemnisation, se trouvent dans l'obligation de faire reconnaître le site sur lequel ils ont travaillé durant plusieurs années.
Est-il normal que ce soit aux salariés d'apporter la preuve de l'utilisation de l'amiante, alors que nombre d'entre eux sont atteints par la maladie et qu'un décès est malheureusement survenu ? Ces anciens salariés, qui ont déposé un recours auprès du tribunal administratif, sont contraints de faire la preuve de l'utilisation de l'amiante en fournissant des attestations sur l'honneur. Pire encore : le rapport de M. Le Garrec préconise de ne rien faire jusqu'en 2010, date à partir de laquelle les dossiers ne seront plus instruits par sites mais par métiers. Et en attendant ? Combien de temps va-t-il encore falloir attendre pour que l'État prenne ses responsabilités ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, qui est retenu par d'autres obligations.
Le rapport de Jean Le Garrec, remis au mois d'avril, contient des dispositions qui visent à améliorer le dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Il propose notamment d'abandonner en 2010 le système qui permet aux salariés des entreprises inscrites sur une liste d'accéder au bénéfice de la cessation anticipée d'activité. Jean Le Garrec préconise de remplacer cette liste d'entreprises par une liste de métiers. Les salariés exerçant ou ayant exercé un des métiers figurant sur cette dernière pourraient demander à bénéficier de l'allocation de cessation anticipée d'activité.
Ce système serait plus juste, car il permettrait à des personnes réellement exposées de bénéficier du dispositif. Les services des différents ministères concernés travaillent à la constitution d'une première liste qui fera l'objet d'une concertation. En attentant, bien évidemment, le dispositif actuel subsiste.
Votre question porte aussi sur les suites réservées à la proposition de Jean Le Garrec concernant la mise en place d'une mission chargée de faire le point sur l'application de la réglementation et sur les sites abandonnés. Un outil de recensement des sites existe. Le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a identifié environ 300 sites ayant potentiellement utilisé de l'amiante.
Cette liste a été élaborée à partir d'un rapport du BRGM, de la base de données BASIAS et des données des DRIRE. Ces données sont disponibles sur le site du BRGM pour la quasi-totalité des départements. La base de données BASIAS recense l'ensemble des sites industriels abandonnés ou potentiellement pollués. Une seconde base de données, BASOL, recense les sites et les sols pollués - ou potentiellement pollués - appelant une action à titre curatif ou préventif. Ces bases sont accessibles sur Internet ; l'objectif est d'assurer une meilleure diffusion de ces listes.
S'agissant de l'application de la réglementation, un groupe de travail " amiante et fibres " a été mis en place conjointement par les ministères de la santé, du travail et de l'environnement, en janvier 2008. L'inspection générale de l'administration poursuit sa mission sur l'application de la réglementation dans le secteur du bâtiment. Différents services - au premier rang desquels l'inspection du travail et les caisses régionales - poursuivent également leur action.
Vous appelez l'attention de Xavier Bertrand sur les difficultés de certains salariés malades à obtenir une indemnisation. Les salariés malades et les ayants droit de salariés décédés peuvent obtenir réparation intégrale de leur préjudice, à partir du moment où la maladie de ces personnes est reconnue d'origine professionnelle et occasionnée par l'amiante. Il revient au Fonds d'indemnisation des travailleurs de l'amiante, mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale de 2001, de prendre en charge les maladies d'origine professionnelle occasionnées par l'amiante et reconnues par la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à M. Henri Jibrayel.
M. Henri Jibrayel. Merci, monsieur le secrétaire d'État. Hélas, la dernière partie de votre intervention n'apporte pas de réelle réponse aux personnes atteintes de la maladie mais ayant travaillé sur un site non reconnu. C'est précisément le cas des salariés de l'usine Arkema que j'ai évoqués. Cette usine a existé mais n'est pas répertoriée dans les bases de données dont vous parlez ; les salariés et leurs ayants droit doivent effectuer des recherches et ils sont toujours dans l'expectative. Excusez-moi, mais vous ne m'en avez pas vraiment apporté de réponse de l'État en ce qui concerne cette usine particulière.

Données clés

Auteur : M. Henri Jibrayel

Type de question : Question orale

Rubrique : Risques professionnels

Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille et solidarité

Ministère répondant : Travail, relations sociales, famille et solidarité

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 7 octobre 2008

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