allocations familiales
Question de :
M. Dominique Tian
Bouches-du-Rhône (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Dominique Tian attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité sur les fraudes en matière d'allocations familiales. Chaque année, les caisses d'allocations familiales distribuent, au nom de l'État et des conseils généraux, près de 66 milliards d'euros de prestations sociales (allocations familiales, aide au logement, minima sociaux). Plus de 10 millions de personnes en sont bénéficiaires. Selon le dernier bilan de la caisse nationale des allocations familiales (CNAF), les fraudes connaissent une augmentation sans précédent, due en partie à une politique offensive de contrôles et à la création d'un fichier national des bénéficiaires. Pourtant en juin 2008, le rapport de la Cour des Comptes portant sur la certification des comptes du régime général de sécurité sociale de 2007 signalait « l'absence de fichier national des allocataires » et regrettait que les procédures de contrôle se limitent au périmètre de « la CAF géographiquement compétente ». Très régulièrement, la presse relève des cas de fraudes dus à cette absence de fichier national. Ainsi un homme de la région de Limoges, il y a six mois, a déposé douze dossiers sous douze identités différentes, d'après de faux documents établis sur d'authentiques cartes d'identité. Par ailleurs, la Cour des comptes a souligné les limites du système informatique de la CAF. Des carences d'interfaces ont été observées entre les applications SIAS, dédiée à l'action sociale, CRISTAL, en charge des prestations légales, et MAGIC, traitant des comptabilités. À la suite de l'audit informatique détaillé de SIAS, il apparaît que « les montants calculés par le logiciel sont modifiables sans trace et que le calcul et la comptabilisation des charges à payer présentent un risque d'erreur élevé ». Aussi, à l'heure où de sérieux efforts de bonne gestion s'avèrent nécessaires pour faire face à la dégradation des comptes sociaux et de la dette, il lui demande de bien vouloir lui indiquer ce qu'il entend proposer pour renforcer et rationaliser les contrôles portant sur les prestations servies par les CAF.
Réponse en séance, et publiée le 8 octobre 2008
LUTTE CONTRE LA FRAUDE AUX ALLOCATIONS FAMILIALES
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour exposer sa question, n° 389, relative à la lutte contre la fraude aux allocations familiales.M. Dominique Tian. Madame la secrétaire d'État chargée de la solidarité, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les fraudes en matière d'allocations familiales.
Chaque année, les caisses d'allocations familiales distribuent, au nom de l'État et des conseils généraux, près de 66 milliards d'euros de prestations sociales, dont plus de 10 millions de personnes sont bénéficiaires. Selon le dernier bilan de la Caisse nationale des allocations familiales, les constatations de fraudes connaissent une augmentation sans précédent, due en partie à une politique offensive de contrôles et à la création d'un fichier national des bénéficiaires.
Pourtant, en juin 2008, le rapport de la Cour des comptes portant sur la certification des comptes du régime général de sécurité sociale de 2007 signalait " l'absence de fichier national des allocataires " et regrettait que les procédures de contrôle se limitent au périmètre de " la CAF géographiquement compétente ". La Cour des comptes estimait notamment que le montant des doubles paiements et des indus causés par l'absence de fichier national des allocataires et l'absence de relations avec les régimes spéciaux s'élevait au minimum à 60 millions d'euros, l'évaluation minimale des risques de non-détection d'erreur dus à l'absence de fiabilité des procédures de contrôle internes pour la gestion technique approchant, pour les seuls cas énumérés, la somme de 200 millions d'euros. En fait le montant réel est très probablement bien supérieur.
Très régulièrement, la presse relève des cas de fraudes dus à cette absence de fichier national. Ainsi, il a été établi qu'il y a six mois, un homme avait déposé douze dossiers sous douze identités différentes, d'après de faux documents établis sur la base de plusieurs cartes d'identité.
Par ailleurs, la Cour des comptes a souligné les limites du système informatique de la Caisse nationale d'allocations familiales, et des carences ont été observées à plusieurs reprises dans le système CRISTAL. À la suite de l'audit informatique, il apparaît que " les montants calculés par le logiciel sont modifiables sans trace et que le calcul et la comptabilisation des charges à payer présentent un risque d'erreur élevé ". Ainsi, à l'heure où de sérieux efforts de bonne gestion s'avèrent nécessaires pour faire face à la dégradation des comptes sociaux et de la dette, l'exemple de la caisse d'allocations familiales des Alpes-Maritimes, fermée du 24 septembre au 31 octobre 2008 pour faire face à des problèmes d'organisation bien connus donne une très mauvaise image de la gestion des CAF.
Je ne peux donc qu'être inquiet, quelques mois avant la mise en place du RSA, qui va provoquer une surcharge de travail, de ce problème d'organisation. J'aimerais donc savoir, madame la secrétaire d'État, ce que compte faire le Gouvernement pour améliorer le management de la CNAF mais aussi renforcer et rationaliser les contrôles sur les prestations servies par les CAF.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur le député, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser M. Xavier Bertrand, retenu par d'autres obligations.
Nous connaissons votre engagement dans la lutte contre la fraude sociale. Pour la majorité de nos concitoyens, la fraude est insupportable car elle porte atteinte à l'intégrité de notre pacte social. C'est pourquoi la branche famille s'est engagée depuis plus de deux ans dans une politique active de lutte contre la fraude. En 2007, ce sont plus de 6 500 fraudes représentant un montant de 58,5 millions d'euros qui ont été détectées. Ces premiers résultats sont encourageants et doivent être poursuivis.
Diverses mesures mises en place devraient permettre à l'avenir d'améliorer encore le taux de détection des fraudes et les sanctions qui vont avec. Je pense, par exemple, au dispositif sur la prise en compte du train de vie, qui a donné aux contrôleurs les moyens de traiter les cas de personnes dont le patrimoine et le train de vie ne sont pas conformes aux ressources déclarées ; je pense aussi au droit de communication mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, qui facilite désormais des échanges des CAF avec de nouveaux partenaires - La Poste, EDF ou les opérateurs de téléphonies -, ou encore à l'intensification des contrôles inopinés que Xavier Bertrand a demandé à la CNAF par un courrier d'octobre 2007.
D'autres mesures sont en projet, mais devraient trouver à s'appliquer rapidement. Ainsi, pour améliorer ses données sur les titres de séjour et mieux contrôler la régularité du séjour des allocataires étrangers, la CNAF projette de mettre en place un échange dématérialisé avec les préfectures dans le cadre du projet " Grégoire ", à l'horizon 2011.
Comme vous le soulignez, un grand nombre d'actions doivent encore être menées à bien afin notamment d'atteindre l'objectif d'obtenir une certification des comptes de la CNAF par la Cour des comptes. Dans cette optique, Xavier Bertrand a demandé à la CNAF que le référentiel national des bénéficiaires, c'est-à-dire le fichier national et unique des allocataires, puisse être déployé et opérationnel dans les meilleurs délais. D'une façon générale, le renforcement des contrôles sera un objectif prioritaire de la prochaine convention d'objectifs et de gestion entre l'État et la CNAF, dont la négociation est en cours.
S'agissant des contrôles sur pièces, le PLFSS pour 2009 contient une disposition qui vise à réglementer la production d'attestations sur l'honneur. Elles devront désormais être produites de manière exceptionnelle et être précédées par un entretien avec l'agent chargé du contrôle.
Pour lutter efficacement contre les fraudes, il faut aussi déployer un dispositif de sanctions efficace. Heureusement, les fraudeurs sont poursuivis même s'il demeure des marges de progrès, je vous l'accorde. Ainsi, dans le cas que vous soulevez, le fraudeur au RMI a, pour un montant de 170 000 euros perçus entre 2001 et 2008, fait l'objet de poursuites pénales et il a été mis en examen. La fraude concernait une dizaine de CAF, dont celle de Limoges, qui l'ont découverte à l'occasion de l'opération de certification des NIR. Ainsi que je l'ai déjà souligné, ce genre de fraude devrait disparaître avec la mise en place du répertoire national des bénéficiaires.
Le renforcement de la lutte contre les fraudes est une préoccupation permanente. La LFSS pour 2008 a donc institué une expérimentation de deux ans créant une nouvelle sanction administrative en cas de fraude aux aides personnelles au logement : la suppression du service de ces prestations pendant une durée d'un an maximum. Cette mesure est encore trop récente pour que des statistiques puissent être recueillies, mais il ne fait pas de doute que cette nouvelle sanction devrait constituer une arme efficace contre les fraudes.
Une autre mesure dans le cadre du PLFSS pour 2009 va permettre de faciliter le recouvrement des indus, même si, dans certains cas, ils ne sont pas la résultante d'une fraude caractérisée. Nous souhaitons instaurer le principe de compensation interfonds. Ainsi, lorsqu'une personne aura indûment perçu une prestation familiale - par exemple des allocations familiales du fonds national des prestations familiales -, il sera possible de compenser ce trop perçu, en versant moins d'aides au logement, lesquelles relèvent d'un autre fonds, le fonds national des aides au logement.
Voilà, monsieur le député, ce que je peux vous préciser sur les actions déjà engagées et ce que nous envisageons pour renforce la lutte contre les fraudeurs, notamment au travers du budget pour 2009 qui sera bientôt examiné par votre assemblée.
Auteur : M. Dominique Tian
Type de question : Question orale
Rubrique : Prestations familiales
Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille et solidarité
Ministère répondant : Travail, relations sociales, famille et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 octobre 2008