Question orale n° 398 :
prêts

13e Législature

Question de : Mme Nicole Ameline
Calvados (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Mme Nicole Ameline attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, au sujet de deux entreprises de sa circonscription, internationales par leur marché et leur structure de financement, Nxp et Eurocel, qui connaissent des difficultés économiques importantes qui appellent une observation et une question. Nous voyons se développer dans le monde économique des logiques financières, plus qu'économiques, et se perdre en partie l'esprit d'entreprise, et par là-même la responsabilité sociale. La crise financière internationale pose avec acuité cette question et s'oppose à notre vision européenne d'une mondialisation régulée, encadrée, dans laquelle les flux financiers servent le long terme et l'économie durable. Le Président de la République a posé avec force les principes d'une nouvelle éthique de la mondialisation. Il faut développer des règles, encourager des fonds souverains européens et réorienter le crédit vers l'investissement et l'innovation. La volonté de la France existe. L'Union européenne doit mobiliser ses moyens et ses marges de manoeuvre, notamment dans le cadre de l'innovation et de la recherche. Elle lui demande quelles mesures concrètes on peut espérer, afin d'éviter que nos entreprises ne soient confrontées, de manière chronique, à une précarité financière insupportable et contre-productive.

Réponse en séance, et publiée le 8 octobre 2008

ACCÈS AU CRÉDIT DES ENTREPRISES

M. le président. La parole est à Mme Nicole Ameline, pour exposer sa question, n°398, relative à l'accès au crédit des entreprises.
Mme Nicole Ameline. Dans ma circonscription, deux entreprises de dimension internationale connaissent des difficultés, au point que 473 licenciements sont actuellement envisagés. La première, NXP, conçoit des semi-conducteurs dans un marché très tendu. La seconde, Eurocel, implantée à Dives-sur-mer, fabrique des feuilles de cuivre - un secteur d'activité dans lequel la concurrence asiatique est redoutable. En 2006, Mitsui l'a cédée à un fonds d'investissement.
Dans l'une comme dans l'autre, la crise internationale a révélé avec acuité le déclin progressif de l'esprit d'entreprise et de la responsabilité sociale au profit d'une logique financière.
Le Président de la République et le Gouvernement se sont engagés à promouvoir une mondialisation mieux régulée où les flux financiers seraient au service d'une économie durable.
À court terme, quelles mesures d'accompagnement social et industriel pouvons-nous envisager pour ces deux entreprises ? Au-delà de ces seuls exemples, qui me sont chers, la Banque européenne d'investissement, qui dispose d'importantes marges de manoeuvre en matière de recherche et d'innovation, pourra-t-elle intervenir ? Pourquoi ne pas consolider les fonds souverains européens ? En somme, quelles dispositions le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour parer au plus pressé ?
M. le président. La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Madame la députée, je sais combien vous êtes attachée depuis longtemps à la défense des industries de votre circonscription. Plus largement, vous m'interrogez sur les moyens que le Gouvernement met en oeuvre pour aider nos entreprises à surmonter les difficultés actuelles.
Au plan local, d'abord, je rappelle qu'Eurocel, spécialisée dans la fabrication de feuilles de cuivre électrodéposées, compte 77 salariés sur son site de Dives-sur-mer. Elle a fait l'objet d'une cession en février 2007 et, aujourd'hui, les actionnaires souhaitent se désengager en procédant à la liquidation à l'amiable de l'entreprise et au licenciement collectif du personnel.
L'État sera particulièrement attentif à la qualité du plan de sauvegarde de l'emploi qui sera mis en oeuvre par la direction de l'entreprise et au respect des obligations sociales et environnementales auxquelles elle sera soumise en se désengageant du site de Dives-sur-Mer.
La société NXP, quant à elle, évolue dans le contexte particulièrement difficile des semiconducteurs. C'est dans le cadre d'un rapprochement avec STMicroelectronics qu'un plan de restructuration touchant environ 4 500 emplois dans le monde a été mis en place, le site le plus touché étant celui de Caen. Je puis vous assurer que le Gouvernement met tout en oeuvre pour que le maximum d'activité, et donc, d'emplois soit préservé sur ce site. Dans cette perspective, la situation de ces deux entreprises continuera à faire l'objet d'un suivi attentif, en liaison constante avec vous, madame, qui êtes très investie sur ces dossiers et avez particulièrement appelé l'attention du Gouvernement sur le devenir des bassins d'emploi concernés.
Au-delà de ces cas spécifiques, vous vous interrogez à juste titre sur l'action que nous pouvons mener pour tenter de pallier les conséquences, parfois très douloureuses, de la mondialisation et de la concurrence, qui sont aujourd'hui la norme dans le monde. Le Président de la République a eu l'occasion de souligner, dans son discours du 25 septembre dernier, la nécessité de tirer toutes les conclusions de la crise financière actuelle.
S'agissant des conclusions morales, la question des modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs et de leur encadrement doit être abordée ce matin en conseil des ministres. Il y a, d'une part, la proposition faite par la présidente du MEDEF, d'autre part, l'action du Gouvernement si celui-ci considère que les propositions émanant de l'organisation patronale sont insuffisantes. Le conseil des ministres, qui a lieu en ce moment même, devrait apporter certains éclairages en ce domaine. Ne doutez pas de la détermination du Gouvernement et de la représentation parlementaire pour tirer les conséquences de la transgression de la morale élémentaire et de l'éthique qui doivent être la norme dans le monde de l'entreprise.
Pour ce qui concerne les conclusions tirées par le Président en matière de régulation internationale, vous avez eu raison d'employer ce terme, car la liberté du marché ne peut fonctionner qu'à partir d'un cadre de régulation juridique, ce qui n'a pas vraiment été le cas, celui-ci s'étant révélé particulièrement inadapté dans le domaine qui nous préoccupe aujourd'hui. L'activité des agences de notation, qui ont manifestement sous-estimé certains risques, doit être mieux encadrée, tout comme l'activité des opérateurs non régulés qui interviennent sur les marchés. Les nouvelles règles devront avoir pour effet d'amortir les chocs, et non de les intensifier, comme cela s'est récemment - et dramatiquement - produit.
En revanche, le système bancaire français se révèle être parmi les plus résistants à la crise financière. Cependant, inséré dans le système financier mondial, il peut être affecté ponctuellement par la faillite d'autres grands établissements. En tout état de cause, le cas de Dexia a montré la détermination du Gouvernement et du Président de la République à garantir sa sécurité et sa continuité.
L'objectif est clair : au-delà de la préservation de notre système financier, il s'agit bien de protéger les épargnants et les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises, des conséquences de la crise actuelle. Comme l'a annoncé le Président de la République, l'État ne permettra pas que des déposants perdent de l'argent parce qu'un établissement financier viendrait à faire défaut. C'est la garantie que l'ensemble des déposants français verront leur argent préservé.
Concernant les entreprises, l'un des principaux enjeux consiste à faire en sorte qu'elles ne souffrent pas de restrictions de crédit susceptibles de menacer leurs investissements et leur effort d'innovation. C'est pourquoi la semaine dernière - et plus précisément vendredi dernier - le Président de la République, au cours d'une réunion à laquelle j'ai assisté, a arbitré les dernières modalités d'un plan de soutien au financement des PME, qui permettra d'accroître à hauteur de 21 milliards d'euros les prêts accordés aux PME, afin qu'elles puissent maintenir leur capacité à investir.
À cet égard, le milliard d'euros supplémentaire que la loi TEPA, que vous avez votée l'année dernière, a permis d'injecter dans les fonds propres des PME au travers de sa mesure connue sous le nom d'ISF-PME, montre que, dès l'année dernière, conforter les fonds propres des PME était l'une des préoccupations majeures du Gouvernement.
S'agissant de l'innovation et de la recherche, la mise en place d'un crédit d'impôt recherche simplifié et amplifié est l'un des acquis de l'action gouvernementale. Aujourd'hui, c'est le plus puissant de tous les dispositifs de soutien à la recherche et au développement dans les entreprises de l'OCDE et, dans ce domaine, nous escomptons des retombées.
Concernant les actions menées par le Gouvernement depuis qu'il est en place, j'ajouterai, pour être exhaustif, le recentrage de l'activité d'OSEO par la fusion des différentes agences de financement et une nouvelle enveloppe de 1,5 milliard d'euros sur trois ans allouée aux pôles de compétitivité.
Tels sont les éléments de l'action offensive que le Gouvernement, sous l'impulsion du Président, a menée depuis plus d'un an.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Ameline.
Mme Nicole Ameline. Monsieur le secrétaire d'État, je suis sensible à l'action personnelle que vous menez au service des PME. Nous avons confiance dans la réactivité du Gouvernement et dans le soutien que le ministère de l'industrie et le secrétariat d'État chargé des PME apportent aux deux entreprises que j'ai citées. À l'avenir, j'attends beaucoup du contrôle renforcé des cessions d'entreprises lorsqu'elles sont cédées à des fonds d'investissement, lesquels sont souvent des sociétés écrans. Il faut que l'éthique européenne soit mieux mise en oeuvre au service du développement économique durable.

Données clés

Auteur : Mme Nicole Ameline

Type de question : Question orale

Rubrique : Banques et établissements financiers

Ministère interrogé : Industrie et consommation

Ministère répondant : Industrie et consommation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 octobre 2008

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