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Question de :
M. William Dumas
Gard (5e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. William Dumas attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur la loi sur l'eau du 30 décembre 2006 et les milieux aquatiques, et plus particulièrement les compétences des services d'eau potable, d'assainissement collectif et d'assainissement non collectif. En effet, l'assistance technique à l'assainissement exercée par les SATESE, services publics dépendants de la centaine de conseils généraux français, est mis en péril par l'article 73 de la loi sur l'eau (LEMA) et de son décret d'application. La mise en concurrence obligatoire de leurs interventions imposée par le ministère de l'écologie au prétexte des contraintes communautaires dénuées de fondement va pénaliser très lourdement les politiques publiques de l'assainissement sur tout le territoire, à l'heure où la France doit accomplir des efforts considérables pour remettre aux nonnes ses structures d'assainissement. Faute de quoi des condamnations financières d'un montant de plusieurs centaines de millions d'euros pourront leur être infligées par les instances communautaires. C'est dans ce contexte que la loi sur l'eau du 30 décembre 2006 réduit considérablement les marges de manoeuvres des départements qui aident les collectivités dans le domaine de l'eau et de l'assainissement, d'une part en supprimant les concours du FNDAE qu'ils géraient, d'autre part en plaçant leurs missions d'assistance technique dans le champ concurrentiel. Les conséquences de l'article 73 et de l'éviction des SATESE seront multiples : les SATESE vont perdre de 50 à 70 % de leurs missions d'intérêts général qui donnent pourtant satisfaction à l'ensemble des acteurs concernés : collectivités, notamment nos communes rurales, Agence de l'eau, police de l'eau... et ce jusqu'à différents corps de l'État qui sollicitent constamment leur expertise. Ceci va très fortement pénaliser les territoires ruraux et provoquer une perte de données publiques dommageable à la connaissance du fonctionnement du parc épuratoire national.
Réponse en séance, et publiée le 5 décembre 2007
PERSPECTIVES DE LA MISSION D'ASSISTANCE TECHNIQUE
À L'ASSAINISSEMENT EXERCÉE
PAR LES SERVICES DÉPARTEMENTAUX
M. William Dumas. Madame la secrétaire d'État chargée de l'écologie, ma question concerne le projet de décret relatif à l'article 73 de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques.
En effet, l'assistance technique à l'assainissement exercée par les SATESE, services publics dépendant de la centaine de conseils généraux, est mise en péril par ce projet de décret. Comme vous le savez, les départements ont, par le biais des SATESE et des CATER, et en association avec les agences de l'eau, développé depuis de nombreuses années des politiques visant à renforcer la protection de l'eau. Ils garantissent la pertinence des investissements dans ce domaine et le bon fonctionnement des ouvrages réalisés dans nos communes.
Aujourd'hui, cette pratique est remise en cause : les communes urbaines devront faire appel à la concurrence, alors que les communes rurales souhaitant bénéficier de telles prestations devront les rémunérer. La mise en concurrence que ce projet de décret vise à rendre obligatoire au prétexte - à mon sens peu convaincant - de contraintes communautaires va sanctionner très lourdement les politiques publiques d'assainissement sur l'ensemble de notre territoire, au moment où la France doit accomplir des efforts considérables pour mettre aux normes ses structures d'assainissement.
En réduisant de 50 à 70 % les missions d'intérêt général des SATESE, qui donnent pourtant entière satisfaction à l'ensemble des acteurs concernés - qu'il s'agisse des collectivités, notamment des plus petites communes rurales, de l'agence de l'eau, de la police de l'eau, ou encore des différents corps de l'État qui sollicitent leur expertise -, vous prenez le risque de pénaliser les territoires ruraux et de provoquer une perte de données publiques dommageable à la connaissance du parc épuratoire national.
Par ailleurs, en tant que député d'une circonscription rurale, il est de mon devoir de vous alerter sur la charge budgétaire supplémentaire que vous allez imposer aux communes rurales, déjà fortement grevées par le coût des analyses d'eau, en constante augmentation. Il est fort probable que nombre d'entre elles refuseront d'engager des dépenses supplémentaires pour un service jusqu'à présent gratuit.
Madame la secrétaire d'État, vous souhaitez mettre en oeuvre un plan national ambitieux pour le traitement des eaux usées afin que le retard pris par certaines communes soit rattrapé, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir, car la France encourt actuellement une condamnation de la Cour de justice des Communautés européennes pour non-respect de la directive sur les eaux résiduaires urbaines. Or, alors même que vous annoncez cette décision, votre ministère prépare un décret qui se traduira par la suppression de services pourtant indispensables à une politique de l'eau efficace. Chacun s'accorde à reconnaître qu'il s'agit là d'outils essentiels à la mise en oeuvre des politiques d'assainissement, tant dans le domaine technique, d'expertise et de conseil que dans la collecte des données relatives à la pertinence des outils épuratoires.
Je vous demande de bien vouloir prendre en considération les arguments que je viens d'exposer afin que les services publics d'assistance technique des départements puissent poursuivre leur activité dans les conditions actuelles.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur Dumas, le financement des travaux d'eau et d'assainissement des communes rurales et l'organisation de l'assistance technique ont fait l'objet d'un large débat lors de la préparation et de l'examen de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques.
Si cette loi a entériné la disparition du Fonds national de développement des adductions d'eau, déjà effective en métropole depuis 2005, elle a mis en place un nouveau dispositif de financement de la solidarité envers les communes rurales. Le montant des programmes d'intervention des agences de l'eau a été majoré d'un milliard d'euros, soit une dotation supérieure aux sommes précédemment allouées par le FNDAE. La loi sur l'eau précise par ailleurs que les agences et les départements qui interviennent en ce domaine devront contractualiser leurs financements.
Les territoires ruraux ne sont donc pas pénalisés. Les financements au titre de la solidarité envers les communes rurales sont renforcés et le rôle des départements conforté. Les possibilités d'appui par les services d'assistance technique demeurent et sont même étendues à la protection de la ressource, l'assainissement autonome, et l'entretien des cours d'eau.
Si le travail réalisé par les SATESE, les services d'assistance technique aux exploitants de stations d'épuration, est largement apprécié par les collectivités locales et essentiel pour la protection de l'environnement, il faut reconnaître qu'il était réalisé jusqu'à présent dans des conditions litigieuses au regard du droit de la concurrence et du code des marchés publics. Le risque d'un contentieux remettant en cause l'ensemble de l'activité des SATESE étant réel, il convenait de doter ceux-ci d'un cadre juridique stable et sécurisé.
Dans ce but, le Parlement a adopté par voie d'amendement un dispositif comparable à celui mis en place par la loi dite " MURCEF " de 2001 pour l'assistance technique par les services de l'État. L'article 73 érige ainsi les services d'assistance technique en " service d'intérêt économique général " - c'est-à-dire en service public, dans la terminologie européenne. L'article 86-2 du traité de l'Union européenne précise que ces services d'intérêt économique général sont soumis aux règles de la concurrence " dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. "
Sur cette base, l'article 73 de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques précise que les collectivités ne disposant pas de ressources suffisantes pourront faire appel au service départemental d'assistance technique. Dans ce cas, le département aura à en définir le tarif, sans exiger pour autant la répercussion intégrale de ses coûts dans la contribution demandée aux communes. Les autres collectivités pourront toujours solliciter l'intervention du SATESE pour valider le suivi des ouvrages d'épuration des eaux usées, dans la mesure où le conseil général autorise son service à intervenir dans le domaine concurrentiel. Par ailleurs, les collectivités pourront bien entendu bénéficier de l'aide de l'agence de l'eau.
L'arrêté du 22 juin 2007 précise les obligations de validation du suivi des rejets des ouvrages d'épuration des eaux usées. Dans le respect du principe de libre administration des collectivités locales, il revient à la collectivité de définir le prestataire de son choix. Les données ainsi recueillies seront bien entendu accessibles, ce qui contribuera à la transparence de l'information dans le domaine de l'environnement, conformément à la convention d'Aarhus et au décret n° 2002-1187 du 12 septembre 2002.
Compte tenu de ces obligations réglementaires, de la qualité du travail réalisé par les SATESE et de leur proximité, il paraît peu plausible que les collectivités décident brutalement de ne plus faire appel aux services départementaux d'assistance technique pour la validation du suivi de leurs équipements d'épuration.
L'année 2008 permettra la mise en oeuvre des nouvelles modalités d'intervention des services d'assistance technique. Les communes bénéficiant de cette assistance à la fin 2007 pourront continuer à en bénéficier dans les mêmes conditions jusqu'à la fin 2008. Les services d'assistance technique pourront alors, dans un cadre juridique rénové et sécurisé, poursuivre l'action entreprise pour assurer la protection de la qualité des eaux, et contribuer à la réalisation de l'objectif de bon état des eaux prescrit au plan européen.
M. le président. La parole est à M. William Dumas.
M. William Dumas. J'ai bien entendu votre réponse, madame la secrétaire d'État, mais je vous rappelle que les SATESE ont été créés il y a une trentaine d'années au sein des services décentralisés de l'État, que leur service a toujours été accompli en dehors du marché concurrentiel. Manifestement d'intérêt général, ce service s'apparente au service public tel que le définit la Communauté européenne.
Je trouve dommage de mettre fin à un système qui marchait bien. Vous nous dites que les petites communes continueront à bénéficier d'une assistance jusqu'à la fin 2008, mais, étant personnellement confronté, en tant que maire d'une commune rurale, à de gros problèmes en matière d'analyse d'eau - notamment du fait de l'augmentation des coûts, qui fait tripler le budget de certaines communes -, j'ai bien peur que l'on ne s'achemine vers une suppression des SATESE.
Auteur : M. William Dumas
Type de question : Question orale
Rubrique : Départements
Ministère interrogé : Écologie, développement et aménagement durables
Ministère répondant : Écologie, développement et aménagement durables
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 4 décembre 2007