Question orale n° 413 :
droits de succession

13e Législature

Question de : M. Jean-Yves Cousin
Calvados (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jean-Yves Cousin attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sur les importantes difficultés financières que rencontrent certaines personnes lors du règlement des droits de succession, lorsque l'actif est principalement constitué de titres. En effet, les droits de succession sont calculés sur la valeur des titres au jour du décès, ces droits devant être payés dans les six mois. Ces personnes sont donc contraintes de mettre en vente des titres qui, par rapport à leur évaluation, subissent en ce moment une perte de 50 à 60 %. Compte tenu de cette situation, il demande s'il serait possible qu'il soit tenu compte de cette situation exceptionnelle pour permettre de calculer les droits, non pas au décès, mais en prenant la valeur au jour de la vente dans la mesure où cette vente est rendue nécessaire pour le paiement desdits droits.

Réponse en séance, et publiée le 3 décembre 2008

DATE D'ÉVALUATION DES TITRES EN CAS DE VENTE POUR LE PAIEMENT DES DROITS DE SUCCESSION

M. le président. La parole est à Jean-Yves Cousin, pour exposer sa question, n° 413, relative à la date d'évaluation des titres en cas de vente pour le paiement des droits de succession.
M. Jean-Yves Cousin. Madame la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, la crise financière originaire des États-Unis a touché l'ensemble de l'économie mondiale. Partie du dépôt de bilan de la banque Lehman Brothers, elle a eu un effet de domino sur les banques américaines, puis européennes et mondiales. Le dépôt de bilan de Lehman Brothers a entraîné une crise de confiance qui s'est transformée en crise de défiance : le cours des bourses a chuté de manière sévère.
Certaines familles détiennent des valeurs boursières ou des titres qui représentent une part de leurs économies. Or, en France, la crise a soulevé la question du règlement des droits de succession. En effet, lorsque des personnes détenant des titres viennent à décéder, les droits de succession sont calculés sur la valeur des titres au jour du décès, mais doivent être payés dans un délai de six mois. Pour s'en acquitter, certaines familles sont obligées de vendre des titres et ont parfois subi une perte de 50 % entre le moment de l'évaluation et celui de la vente réelle du titre. Le titre peut valoir 100 au jour du décès et la famille peut le vendre 60 quelques mois plus tard pour payer les droits de succession : elle doit alors payer des droits sur 40, c'est-à-dire sur une valeur fictive. Dans cette hypothèse, l'impôt est payé sur une valeur qui est supérieure au prix réellement perçu par la famille.
En conséquence, je vous remercie de bien vouloir m'indiquer, madame la secrétaire d'État, s'il ne serait pas possible que l'administration tienne compte de cette situation exceptionnelle pour permettre de calculer les droits dus non pas au jour du décès, mais en prenant en compte la valeur au jour de la vente, dans la mesure où cette vente est rendue nécessaire par le paiement des droits.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui m'a chargée d'apporter des éléments de réponse sur une question qui concerne de nombreuses familles, étant donné la situation financière que vous avez brillamment rappelée.
Conscients que le paiement des droits de succession peut être un obstacle à la conservation du patrimoine au sein de la famille, les pouvoirs publics, dans le cadre de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, ont souhaité alléger les droits de mutation à titre gratuit. Ces dispositions, qui s'appliquent aux successions ouvertes depuis le 22 août 2007, permettent d'exonérer 95 % des successions, conformément aux engagements du Président de la République.
Cela étant, les droits de mutation par décès sont, en principe, perçus sur la valeur vénale des biens à la date de la transmission telle qu'elle figure dans la déclaration estimative souscrite par les héritiers, sous réserve du contrôle ultérieur de l'administration. Pour éviter de nombreuses difficultés entre les redevables et l'administration, le législateur a institué des bases légales d'évaluation pour certains biens. Ainsi, conformément aux dispositions de l'article 759 du code général des impôts, pour les valeurs mobilières françaises et étrangères de toutes natures admises aux négociations sur un marché réglementé, le capital servant de base à la liquidation ou au paiement des droits de mutation à titre gratuit est déterminé par le cours moyen au jour de la transmission qui constitue le fait générateur. L'article 18 de la loi de finances de 2004 a complété cette mesure en permettant, pour les successions, de retenir également la moyenne des trente derniers cours qui précèdent la transmission.
La proposition de déroger à ces règles en période de crise financière, en retenant la valeur de liquidation, ne peut être suivie, car elle serait contraire aux règles du droit civil en vertu desquelles les héritiers non renonçant sont réputés propriétaires des biens héréditaires au jour du décès. Par ailleurs, cette proposition ferait supporter au Trésor public le risque de la dépréciation de l'actif postérieurement à la transmission, sans l'associer à l'augmentation de la valeur des biens qui peut également survenir au cours de la même période.
Pour autant, s'agissant du recouvrement des droits de succession, il convient de rappeler que le décret du 6 mai 2005 a permis d'aménager la réglementation en vigueur en matière de paiement différé ou fractionné en étendant, notamment, le champ des garanties pouvant être admises en contrepartie de ces modes de paiement. Ces dispositions bénéficient aux demandes de paiement fractionné ou différé formalisées lors des déclarations de succession déposées depuis le 15 mai 2005. Dans ce cadre, en période de baisse des valeurs d'actifs, les demandes de crédit de paiement seront examinées avec bienveillance.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Cousin.
M. Jean-Yves Cousin. Je comprends, tout en la regrettant, la réponse de Mme la secrétaire d'État, qui s'appuie sur un article du code civil. Je remercie cependant le Gouvernement d'agir sur les modes de paiement, et d'apporter ainsi un peu de souplesse dans ce domaine.

Données clés

Auteur : M. Jean-Yves Cousin

Type de question : Question orale

Rubrique : Donations et successions

Ministère interrogé : Budget, comptes publics et fonction publique

Ministère répondant : Budget, comptes publics et fonction publique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 décembre 2008

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