Question orale n° 426 :
université de médecine

13e Législature

Question de : M. Claude Leteurtre
Calvados (3e circonscription) - Nouveau Centre

M. Claude Leteurtre alerte Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation des postes de chef de clinique des universités et assistants hospitaliers universitaires à la faculté de médecine de Caen. Alors que le numerus clausus en première année de médecine a été augmenté pour faire face à la pénurie de médecins, alors que, d'autre part, la région Basse-Normandie, et plus particulièrement les départements de la Manche et de l'Orne, ont une démographie médicale qui compromet l'avenir, les postes universitaires de fin d'études n'ont pas été modifiés. C'est ainsi qu'un interne a quatre fois plus de chances d'avoir un poste de clinicat à Paris qu'à Caen ! Cette situation n'est plus acceptable, alors que tout le monde s'accorde à dire qu'il est plus que temps de lutter contre la désertification médicale. Comment veut-on que les reçus de l'internat choisissent de faire leur spécialité en province alors qu'ils savent, dès le départ, que la carrière universitaire leur est fermée ? Sa question est simple : il demande si le Gouvernement entend, enfin, redéployer les postes de chef de clinique des universités et d'assistants hospitaliers universitaires en fonction des besoins réels de la démographie médicale.

Réponse en séance, et publiée le 10 décembre 2008

INSUFFISANCE DES POSTES UNIVERSITAIRES À LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CAEN

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre, pour exposer sa question, n° 426, relative à l'insuffisance des postes universitaires à la faculté de médecine de Caen.
M. Claude Leteurtre. Ma question s'adressait Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, mais je suis ravi que ce soit Mme Roselyne Bachelot-Narquin qui me réponde. En effet, et je prends mon collègue Jacques Domergue à témoin, il y a longtemps que je dis que la santé est sous la tutelle des universités, et ce depuis vingt-cinq ans. Une décision dans le domaine universitaire a donc des conséquences directes sur l'implantation des médecins dans une région comme la Basse-Normandie. Ma question touche du doigt le problème puisqu'elle concerne le nombre de chefs de clinique et d'assistants hospitaliers universitaires à la faculté de médecine de Caen.
Alors que le numerus clausus en première année de médecine a été augmenté pour faire face à la pénurie de médecins et que la région Basse-Normandie, plus particulièrement les départements de la Manche et de l'Orne, a une démographie médicale qui compromet l'avenir, les postes universitaires de fin d'études n'ont pas été modifiés. C'est ainsi qu'un interne a quatre fois plus de chance d'avoir un poste de clinicat à Paris qu'à Caen !
Une telle situation n'est plus acceptable alors que tout le monde s'accorde à dire qu'il est plus que temps de lutter contre la désertification médicale. Comment veut-on que les reçus de l'internat choisissent de faire leur spécialité en province alors qu'ils savent, dès le départ, que la carrière universitaire leur est fermée, ou tout au moins que la voie sera plus étroite ? Cela a une conséquence directe sur l'installation future des jeunes médecins généralistes et spécialistes puisqu'il est établi que 80 % de ces jeunes diplômés s'installent dans la région où ils ont fait leur fin d'études.
Ma question est donc claire, madame la ministre : afin de montrer qu'il se préoccupe réellement de l'égalité entre les territoires et de l'efficacité de la lutte contre la désertification territoriale, le Gouvernement entend-il redéployer les postes de chefs de clinique des universités et d'assistants hospitaliers universitaires en fonction des besoins réels de la démographie médicale, et non pas en fonction des besoins des services des grands CHU ?
M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Leteurtre, je tiens tout d'abord à excuser ma collègue Valérie Pecresse, qui ne peut venir ce matin en raison d'un déplacement dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Mais c'est un sujet évidemment très important et que nous pilotons ensemble.
En prenant l'exemple de la faculté de médecine de Caen, vous avez souhaité attirer l'attention de la ministre de l'enseignement supérieur sur la situation des postes de chefs de clinique des universités et assistants hospitaliers universitaires. Il est vrai, comme vous l'avez fort justement souligné, que la densité médicale dans la région Basse-Normandie est considérablement plus faible que la moyenne nationale puisqu'elle n'atteint que 206 médecins pour 100 000 habitants.
C'est la raison pour laquelle le numerus clausus de Caen a été relevé de 5 % en 2008 alors qu'il a été proportionnellement diminué en Île-de-France. Cela s'inscrit dans une action que j'entends mener de façon très ferme. Nous allons en effet augmenter le numerus clausus globalement, mais nous ne le ferons pas dans les mêmes proportions dans tous les CHU parce que nous constatons que 70 % des étudiants s'installent ultérieurement dans la région où ils ont accompli leurs études. Je veux disposer ainsi d'un levier pour influer sur l'évolution de la démographie médicale.
Par ailleurs, le ministère de l'enseignement supérieur, en lien avec le ministère de la santé, est en train de répondre à ce grand problème du post-internat que vous avez soulevé. Le post-internat a deux objectifs : donner une formation complémentaire aux jeunes médecins et participer à l'enseignement des étudiants de deuxième cycle des études médicales. Cette dernière mission incombe aux chefs de clinique. Mais tous n'ont pas besoin d'être chef de clinique pour acquérir le complément de formation nécessaire avant leur installation. Nous nous sommes donc engagés dans une réforme du post-internat en offrant la possibilité de créer, à côté des postes de chefs de clinique en centre hospitalier universitaire, des postes d'assistants-spécialistes. Le ministère de la santé entend ainsi, dès 2009, répondre à la disparité que vous dénoncez.
Enfin, pour atténuer les inégalités entre les territoires que vous soulignez, Valérie Pécresse et moi-même avons décidé de mener une politique active de rééquilibrage du numerus clausus et de l'examen national classant sur l'ensemble du territoire pour redistribuer des places, de régions traditionnellement sur-dotées comme l'Île-de-France, vers des régions traditionnellement sous-dotées comme la Basse-Normandie. Les responsables des autorités de santé locales, doyens d'UFR de médecine et directeurs de CHU, sont, eux aussi, fortement engagés à mener, en concertation avec le président de l'université, une révision des effectifs annuelle en prenant en compte le post-internat.
Je sais que ce problème crucial de la démographie médicale vous tient particulièrement à coeur, monsieur Leteurtre, et que vous vous êtes souvent exprimé sur ce sujet à travers de nombreuses interventions. Il faut trouver les solutions en actionnant toutes sortes de leviers : la formation des médecins, la valorisation de la filière de médecine générale et la création d'agences régionales de santé qui vont constituer le guichet unique des aides, mais aussi l'établissement, sur le mode non opposable, de schémas territoriaux d'organisation de la santé, le développement des coopérations entre professionnels de santé et des modes alternatifs de rémunération. Nous devons utiliser tout cela. Nous en débattrons plus longuement dans le cadre de l'examen du projet de loi " Hôpital, patients, santé et territoires ". Mais la formation initiale des médecins est évidemment un sujet crucial, et je vous remercie de l'avoir évoqué.
M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre.
M. Claude Leteurtre. Je suis d'autant plus ravi d'avoir eu affaire à Mme la ministre de la santé qu'elle a parfaitement décrit les conséquences du dispositif existant. Mon collègue Guénhaël Huet étant présent, je salue le travail qui a été fait dans la Manche : vous y êtes venue, madame la ministre, signer des contrats pour la Basse-Normandie afin d'encourager les collectivités locales à résoudre ce problème.
J'entends bien les pétitions de principe sur ce sujet, mais vous me permettrez d'insister sur la gravité de la question de la démographie médicale. L'Observatoire national de la démographie médicale, présidé par l'excellent professeur Berland met, comme par hasard, à l'ordre du jour l'avenir dans la région PACA en 2012, et tire la sonnette d'alarme. Or l'urgence ne se situe pas a priori dans cette région. C'est pourquoi je souligne que certains hôpitaux périphériques, et certaines universités de province qui n'ont pas démérité même si elles ne peuvent se targuer de l'ancienneté de celle de Montpellier, ont absolument besoin de voir leurs postes d'internat augmenter. Les assistants-spécialistes régionaux - qui ne sont pas universitaires - constituent, comme vous l'avez dit, une bonne réponse, mais la formation universitaire est, elle aussi importante.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Bien sûr !

Données clés

Auteur : M. Claude Leteurtre

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement supérieur

Ministère interrogé : Enseignement supérieur et recherche

Ministère répondant : Enseignement supérieur et recherche

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 9 décembre 2008

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