Question orale n° 434 :
hôpitaux

13e Législature

Question de : M. Bernard Lesterlin
Allier (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Bernard Lesterlin indique à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative que c'est avec colère et désappointement qu'il veut dénoncer la situation désastreuse et inacceptable que connaît actuellement l'hôpital de Montluçon (Allier), situation qui est malheureusement à l'image du délitement général du système français de santé publique. L'hôpital de Montluçon est inscrit dans un plan de retour à l'équilibre budgétaire pour 2012. Au départ, cet établissement devait connaître une restructuration en trois phases sur décision de son prédécesseur. Par mesure de restrictions budgétaires, il a fallu se limiter à deux phases en réduisant la surface dévolue à chaque service, au détriment de l'accueil des patients. Pour satisfaire aux mesures d'économie préconisées par son ministère, des lits d'hospitalisation complète ont été fermés et des postes titulaires n'ont pas été remplacés, suite à des départs en retraite, disponibilités ou mutations. La problématique naît en 2002-2003 avec le départ de plusieurs médecins. Cette situation touche particulièrement les urgentistes, les radiologues, les chirurgiens et les cardiologues, même si, depuis quelques semaines, trois nouveaux cardiologues sont arrivés dans le cadre du groupement de coopération sanitaire (GCS) signé avec la clinique du groupe « Vitalia » dont le capital est détenu par le fonds d'investissement américain « Black stone ». Celui-ci, confronté à la crise financière dès le début de l'année, a annoncé la revente des quelques 50 cliniques qu'il détient en France. Sa première question est la suivante: peut-on sérieusement contractualiser avec un groupe à seule vocation financière dont la stratégie ne relève que du critère de profitabilité et non de la prise en charge médicale ? Un autre sujet d'inquiétude pour les centres hospitaliers de la taille de celui de Montluçon (bassin de 150 000 patients) est la tarification à l'activité à 100 %. Comme il le lui a dit, le départ de plusieurs praticiens s'est effectué dans un environnement de pénurie médicale et n'est pas étranger au recrutement en 2005, sur proposition du président du conseil d'administration, d'une direction collectivement inadéquate. Comme il l'a déjà évoqué avec elle il y a quelques semaines, il est urgent qu'elle nomme un directeur général capable de sortir cet hôpital de l'ornière. Sa deuxième question est : quand cette nomination interviendra-t-elle ? Son action sera réduite à néant devant un déficit cumulé (3 M€ en 2006, 8 M€ en 2007 et à nouveau 8 M€ prévus en 2008, soit une vingtaine de millions), qu'il faut financer. Faute d'aide significative de l'État, cet établissement, qui est le premier centre hospitalier d'Auvergne après le CHRU de Clermont-Ferrand, ne pourra plus assumer sa mission de service public. Sa troisième question est : quelle est la part du déficit que l'État prendra à sa charge ? Reviendra-t-elle sur la T2A à 100 % pour les établissements de cette taille et, en l'occurrence, ce sera sa quatrième et dernière question : quelles mesures concrètes entend-elle prendre pour permettre à la nouvelle direction de redresser l'activité qui semble être le seul critère qu'elle considère comme pertinent ? Ce n'est ni la création des agences régionales sanitaires (ARS), ni le plan de retour à l'équilibre tel qu'il vient d'être signé par le centre hospitalier, ni la signature du GCS de cardiologie avec la clinique privée, ni le non-remplacement des personnels qui vont apurer plus de 20 millions d'euros de déficit cumulé. Il la remercie des réponses qu'elle voudra bien lui apporter.

Réponse en séance, et publiée le 10 décembre 2008

SITUATION DE L'HÔPITAL DE MONTLUÇON DANS L'ALLIER

M. le président. La parole est à M. Bernard Lesterlin, pour exposer sa question, n° 434, relative à la situation de l'hôpital de Montluçon dans l'Allier.
M. Bernard Lesterlin. Madame la ministre de la santé, je souhaite vous faire part de la colère et du désarroi des Montluçonnais, qui dénoncent avec moi la situation désastreuse et inacceptable que connaît actuellement l'hôpital de Montluçon, situation qui est malheureusement à l'image du délitement général du système de santé publique français - peut-être en pire.
L'hôpital de Montluçon est inscrit dans un plan de retour à l'équilibre budgétaire pour 2012. Au départ, cet établissement devait connaître une restructuration en trois phases, sur décision de votre prédécesseur M. Douste-Blazy. Par mesures de restrictions budgétaires, il a fallu se limiter à deux phases en réduisant la surface dévolue à chaque service, au détriment de l'accueil des patients. Pour satisfaire aux mesures d'économie préconisées par votre ministère, des lits d'hospitalisation complète ont été fermés et des postes titulaires n'ont pas été remplacés, suite à des départs en retraite, disponibilités ou mutations.
Le problème est née en 2002-2003 avec le départ de plusieurs médecins, en particulier des urgentistes, des cardiologues et des chirurgiens, même si trois nouveaux cardiologues sont arrivés il y a quelques semaines, dans le cadre du groupement de coopération sanitaire signé avec la clinique du groupe Vitalia, dont le capital est détenu par le fonds d'investissement américain Black Stone. Celui-ci, confronté à la crise financière dès le début de l'année, a tout simplement annoncé la revente des quelque cinquante cliniques qu'il détient en France. Peut-on sérieusement contractualiser avec un groupe à vocation financière dont la stratégie relève du seul critère de profitabilité et non de la prise en charge médicale ?
Autre sujet d'inquiétude pour les centres hospitaliers de la taille de celui de Montluçon - bassin d'environ 150 000 patients - : la tarification à l'activité à 100 %. Le départ de plusieurs praticiens s'est effectué dans un environnement de pénurie médicale et n'est pas étranger au recrutement en 2005, sur proposition du président du conseil d'administration du centre hospitalier, d'un management collectivement inadéquat. Comme je l'ai déjà évoqué avec vous il y a quelques semaines, il est urgent que vous nommiez un directeur général capable de sortir cet hôpital de l'ornière. Quand cette nomination interviendra-t-elle ?
L'action de celui-ci risque cependant d'être réduite à néant face au déficit cumulé d'une vingtaine de millions d'euros : 3 millions en 2006, 8 millions en 2007, à nouveau 8 millions prévus en 2008. Faute d'aide significative de la part de l'État, cet établissement, le premier centre hospitalier d'Auvergne après le CHRU de Clermont-Ferrand, ne pourra plus assumer sa mission de service public.
Quelle est la part du déficit que l'État prendra à sa charge ? Reviendrez-vous sur la tarification à l'activité à 100 % pour les établissements de cette taille ? Enfin, quelles mesures concrètes entendez-vous prendre pour permettre à la nouvelle direction de redresser l'activité, qui semble être le seul critère que vous jugiez pertinent ?
M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Lesterlin, c'est à juste titre que vous exprimez votre vive préoccupation quant à la situation financière du centre hospitalier de Montluçon. Cet établissement connaît effectivement une nette dégradation financière : l'exercice 2008 devrait s'achever avec un déficit de 8 millions d'euros, comparable à celui de 2007.
Face à cette situation, un certain nombre de mesures qui devraient contribuer au redressement progressif de l'établissement ont été prises.
Tout d'abord, comme vous l'avez rappelé, un groupement de coopération sanitaire a été constitué, le 1er août, entre le centre hospitalier de Montluçon, la polyclinique Saint François-Saint Antoine et cinq cardiologues libéraux exerçant dans cette clinique. Opérationnel depuis le 1er septembre, ce groupement vient d'être renforcé par l'arrivée de nouveaux praticiens au centre hospitalier, ce qui améliore l'accès aux soins cardiologiques sur le territoire et permet de mieux garantir la permanence des soins.
En ce qui concerne la direction de cet établissement, que vous souhaitez voir renouvelée, je vous précise que l'emploi fonctionnel de directeur est vacant depuis le 1er décembre. La procédure de recrutement va être ouverte. Le centre national de gestion va publier la fiche de poste et recueillir les candidatures.
Pendant cette période transitoire, la directrice adjointe assurera l'intérim. Le nouveau directeur aura pour mission prioritaire d'entreprendre le redressement de l'établissement.
Compte tenu de ses difficultés financières, un contrat de retour à l'équilibre a été préparé entre l'agence régionale de l'hospitalisation d'Auvergne et l'établissement. Il sera soumis à la délibération des instances dans les prochains jours. Ce contrat prévoit différentes actions portant à la fois sur la maîtrise des charges et le développement des recettes. Le fonctionnement de plusieurs services, tels que l'hémodialyse, le pôle mère-enfant et le bloc opératoire, doit pouvoir être amélioré. Il en est de même des pratiques de codage de l'activité dont dépend le financement de l'établissement, du développement de l'activité du GCS de cardiologie et de la facturation au patient. L'ouverture, depuis le 1er décembre, d'une unité de court séjour gériatrique devrait continuer à fluidifier le fonctionnement du service de médecine. Le redéploiement de lits vers des activités de soins de suite et de réadaptation pourra être envisagé en 2009.
Vous l'aurez noté : les voies d'amélioration sont importantes. Les premiers résultats sont attendus dès 2009. Dans l'immédiat, afin d'accompagner l'établissement pour la fin de l'exercice 2008, nous lui avons attribué une aide exceptionnelle de 5 millions d'euros, somme non négligeable. Cette aide est évidemment la contrepartie de mesures d'adaptation indispensables que je viens d'évoquer.
Je tiens à vous dire qu'il n'y a pas de mesures d'économies à l'hôpital public. La progression des dépenses hospitalières est constante. Je ne me lasserai pas de répéter que nous avons les dépenses les plus élevées du monde en ce domaine, et elles vont enregistrer encore une augmentation de 3,1 %. Je m'en réjouis d'autant plus que le contexte économique est très difficile.
Peut-on dès lors parler d'un délitement de l'hôpital public ? Je ne suis pas d'accord. L'hôpital public français est de qualité. Je visite au moins quatre établissements hospitaliers publics par semaine, et je peux vous dire que l'hôpital public français doit être fier de lui, de ses équipes, de son niveau d'équipement et de la qualité de ses structures.
Quant à la tarification à l'activité, elle est centrée autour du malade. C'est lui qui détermine, en fonction de ses besoins, le niveau de financement. Auparavant, nous avions une dotation forfaitaire : quand un malade arrivait en novembre et qu'il n'y avait plus d'argent pour l'opérer, on ne l'opérait plus. Maintenant, avec la tarification à l'activité, nous mettons le malade et ses besoins au coeur des préoccupations de l'hôpital. Je vous assure que la T2A n'a absolument pas réduit le niveau de financement de l'hôpital. Elle nous a permis de redistribuer les moyens de financement entre les hôpitaux, en fonction des services qu'ils apportent aux malades.

Données clés

Auteur : M. Bernard Lesterlin

Type de question : Question orale

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Santé, jeunesse, sports et vie associative

Ministère répondant : Santé, jeunesse, sports et vie associative

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 décembre 2008

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