Question orale n° 44 :
établissements d'accueil

13e Législature

Question de : Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont
Haute-Vienne (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont interroge Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur la situation des personnes âgées dont l'état de santé ne leur permet plus de rester à leur domicile. Devenues très dépendantes, ces personnes doivent être placées en EHPAD mais ne peuvent assumer le coût de cet hébergement qui pèse très lourd sur les familles dont le pouvoir d'achat ne cesse de s'éroder et sur la solidarité départementale en ce qui concerne les personnes admises à l'aide sociale. Aussi, lui demande-t-elle de lui préciser quelle solution le Gouvernement entend apporter à ce problème.

Réponse en séance, et publiée le 5 décembre 2007

AIDE DE L'ÉTAT AUX PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES PLACÉES EN ÉTABLISSEMENTS

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, pour exposer sa question, n° 44, relative à l'aide de l'État aux personnes âgées dépendantes placées en établissements.
Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Madame la secrétaire d'État chargée de la solidarité, si, avec la création de l'allocation personnalisée d'autonomie, les conseils généraux ont pu apporter une réponse adaptée au maintien à domicile des personnes âgées, question qu'ils avaient en général largement anticipée, le dispositif atteint aujourd'hui ses limites.
Nous sommes désormais confrontés au problème de la sortie du domicile des personnes lourdement dépendantes, pour lesquelles la seule solution adaptée est l'accueil en EHPAD. Cet accueil est essentiellement à la charge des résidents qui, à titre d'exemple, doivent, dans mon département, mais il doit en être ainsi partout, assumer, personnellement ou par le biais de leurs obligés alimentaires, des coûts mensuels de 1 600 euros environ, totalement disproportionnés avec le niveau moyen des retraites et des revenus. Or cette grande dépendance relève d'une prise en charge non pas médico-sociale, mais purement médicale. Il s'agit bien là d'une question de santé publique.
Le Président de la République, au cours de sa campagne, avait annoncé la création d'un cinquième risque de protection sociale. Or les annonces faites il y a quelques semaines, qui semblent très largement faire appel au système assuranciel privé et, encore une fois, à la solidarité locale ne peuvent manquer de nous inquiéter tant elles portent le risque fort d'une prise en charge à plusieurs vitesses.
Aussi ma question est-elle simple : le Gouvernement envisage-t-il réellement d'apporter rapidement une réponse à la situation du " quatrième âge ", qui relève à l'évidence de la solidarité nationale, afin que nos aînés, quels que soient l'endroit où ils vivent et leurs capacités contributives, connaissent une fin de vie digne ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Madame Pérol-Dumont, en France, l'espérance de vie s'accroît d'un trimestre chaque année. C'est une chance pour chacun d'entre nous, mais cette amélioration de la longévité s'accompagne également d'une augmentation sensible du nombre de personnes âgées dépendantes. D'ores et déjà, plus d'un million de personnes bénéficient de l'APA.
Devant nous se dresse donc un défi que nous devons relever collectivement. En effet, entre 2005 et 2015, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans devrait doubler, passant ainsi de un à deux millions. Pour relever ce défi, nos orientations sont claires : laisser le libre choix aux familles entre le maintien à domicile et l'entrée en établissement. Mais cette dernière peut entraîner des conséquences importantes tant sur le plan humain que sur le plan financier.
C'est pourquoi vous pointez du doigt à juste titre, madame la députée, la question du reste à charge en EHPAD. C'est une vraie question car il peut devenir difficilement supportable pour bon nombre de personnes âgées. Avec une retraite moyenne d'environ 1 100 euros et un coût moyen en établissement de 1 500 euros, l'hébergement en établissement fait peser de lourdes charges sur les épaules de nos aînés. Lorsque leurs ressources sont insuffisantes, ils peuvent bénéficier de l'aide sociale à l'hébergement, même si je n'ignore pas que celle-ci est conditionnée à l'obligation alimentaire et qu'elle peut parfois faire l'objet d'une récupération sur succession.
Cependant, plusieurs dispositifs récemment mis en place visent à maîtriser le reste à charge acquitté par son bénéficiaire ou sa famille. Le décret du 30 octobre 2007 permet ainsi à l'assurance maladie de couvrir une partie des frais financiers supportés antérieurement par les usagers. Je vous rappelle également que, depuis la loi DALO du 5 mars 2007, tous les établissements agréés à l'aide sociale éligible au prêt locatif social peuvent bénéficier d'un taux de TVA réduit à 5,5 %, ce qui engendre mécaniquement une baisse significative du tarif dépendance. Enfin, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a permis de mettre en oeuvre un plan de soutien à l'investissement dans les EHPAD.
D'ores et déjà, je peux vous indiquer que 250 millions de crédits d'investissement ont été débloqués afin de permettre la modernisation des places existantes et d'accélérer la construction de nouvelles places sans que cela pèse sur le reste à charge. En outre, et c'est tout l'intérêt de cette somme, ces 250 millions d'euros vont faire levier sur d'autres financements. Ainsi, pour un euro versé, quatre euros seront engagés par les différents partenaires financeurs.
Cependant, la réflexion ne s'arrête pas là, à mon sens. Il me semble, par exemple, que les prestations d'animation et de service social ne devraient plus, à terme, peser sur le tarif acquitté par l'usager. Dans le cadre du chantier sur le cinquième risque, récemment ouvert par le Président de la République, la question des charges qui n'ont plus vocation, à terme, à peser sur l'usager sera étudiée.
Quel est notre objectif ? Il s'agit de rendre plus cohérents les différents dispositifs de compensation de la perte d'autonomie, de pérenniser leur financement, et d'assurer à toutes et à tous, quels que soient leur degré de dépendance et leur lieu de résidence, un traitement équitable propre à garantir la meilleure autonomie possible et tenant compte de la situation de chacun.
Soyez assurée, madame la députée, que j'y serai très attentive, ainsi que mon collègue Xavier Bertrand. Nous nous investirons fortement sur cette question.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.
Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Je vous remercie pour votre réponse, madame la secrétaire d'État. À l'évidence, nous faisons les mêmes constats. Cela étant, et même si elle laisse entrevoir des avancées que je ne nie pas, votre réponse n'est pas de nature à me rassurer totalement.
Une enquête récente, dont la presse s'est fait l'écho vendredi dernier, confirme que huit Français sur dix se sentent très concernés par la question du vieillissement et qu'ils jugent, à bon droit, me semble-t-il, que l'État doit prendre en charge la dépendance, singulièrement pour les plus démunis. En effet, un malade hospitalisé ne finance ni le coût de la construction de l'hôpital ni le personnel hospitalier. Or tel est bien le cas actuellement pour les résidents des EHPAD, qui supportent partiellement ces coûts.
Cette situation n'est pas tenable, ni pour nos aînés ni pour leurs enfants, eux-mêmes vieillissants et donc confrontés à une baisse de leur pouvoir d'achat qui ampute leurs possibilités contributives. Cette situation n'est pas supportable non plus pour les départements. En effet, lors de la création de l'APA, la charge était répartie pour moitié entre l'État et les conseils généraux. Or elle pèse désormais pour 70 % sur les budgets départementaux. On voit bien les limites du dispositif.
Madame la secrétaire d'État, l'allongement de la durée de la vie est un défi majeur. J'espère que, dans les semaines à venir, le Gouvernement fera des propositions offensives en la matière.

Données clés

Auteur : Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont

Type de question : Question orale

Rubrique : Personnes âgées

Ministère interrogé : Solidarité

Ministère répondant : Solidarité

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 4 décembre 2007

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