Question orale n° 458 :
redevances de gestion et d'utilisation des fréquences radioélectriques

13e Législature

Question de : M. Joël Giraud
Hautes-Alpes (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Joël Giraud attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la redevance des réseaux de radios gérés par des associations qui jouent un grand rôle dans l'accomplissement des missions de secours en montagne, de l'alerte à la mise en place des secours, en rapport étroit avec les services de l'État (peloton de gendarmerie de haute montagne et compagnie républicaine de sécurité). La mise en oeuvre de ces moyens d'alerte et de secours est de plus en plus considérée par la jurisprudence comme une obligation de moyens à laquelle les professionnels de la montagne doivent répondre pour assurer la sécurité de leurs clients. Ces réseaux sont principalement utilisés pour déclencher les secours pour l'ensemble des pratiquants. Or, jusqu'à présent, et avant le décret n° 2007-1532 paru au Journal officiel le 27 octobre 2007, les associations étaient exonérées de la redevance domaniale de mise à disposition. En vigueur au 1er janvier 2009, l'application du montant de la redevance serait en mesure de mettre en difficulté l'ensemble des six associations gérant ces réseaux de radio dans l'ensemble du massif alpin français. Compte tenu que ces réseaux accomplissent des missions du service public de secours, il lui demande si elle est prête à donner une base juridique et de droit français, voire européen, à ce dispositif en n'oubliant pas de considérer les spécificités des territoires. La mission de sécurité et l'alerte des secours ne s'identifient pas seulement à un territoire défini. Le massif des Alpes, en le citant par exemple, couvrent de nombreuses zones transfrontalières et plusieurs massifs européens. Plusieurs décisions issues du Grenelle I ont débouché par la validation d'enjeux et de coopérations transfrontaliers comme outil de pilotage. Il voudrait savoir si le Gouvernement compte donner des éléments de projets concrets, afin d'harmoniser la sécurité des secours dans une cohérence européenne.

Réponse en séance, et publiée le 7 janvier 2009

REDEVANCE D'UTILISATION DES FRÉQUENCES RADIOÉLECTRIQUES EN MONTAGNE

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour exposer sa question, n° 458.
M. Joël Giraud. Ma question porte sur les problèmes que pose la redevance perçue pour les réseaux de radio en montagne.
Créés par les professionnels, ces réseaux jouent un rôle important dans l'accomplissement des missions de secours en montagne, de l'alerte à la mise en place des secours, en concertation étroite avec les services de l'État - pelotons de gendarmerie de haute montagne et compagnies républicaines de sécurité de montagne.
Les professionnels font ainsi bénéficier tous les pratiquants de la possibilité d'alerte et participent le cas échéant aux opérations de secours ; ils sont donc, à ces deux titres, collaborateurs occasionnels des services de secours.
De fait, jusqu'à un décret publié au Journal Officiel le 27 octobre 2007, les associations gestionnaires étaient exonérées de la redevance domaniale de mise à disposition de fréquence en leur qualité de collaborateur du service public. Mais une procédure de recouvrement entamée en 2008 met en grande difficulté les six associations qui gèrent ces réseaux dans le massif alpin français. Face à l'augmentation de leurs charges, qui avaient parfois décuplé, les responsables envisageaient même de fermer les réseaux le 31 décembre.
J'ai récemment appris, sans avoir reçu de réponse formelle ni à ma lettre ni à ma question écrite sur ce sujet, que M. le Premier ministre avait apporté au problème une solution provisoire qui ne dispense nullement de me répondre la ministre de l'économie et des finances, laquelle a la tutelle de l'agence nationale des fréquences radioélectriques. En effet, la suspension - et non l'annulation - de ce titre de recette de l'ANFR ne garantit en rien l'avenir des installations. Sans un engagement plus durable de l'État, les associations ne pourront assurer le maintien de ces réseaux. Seul un nouveau décret modifiant les dispositions du décret de 2007 apporterait une solution satisfaisante.
La situation est paradoxale : dans certains secteurs, les services publics ne peuvent organiser leurs opérations de secours que par l'intermédiaire de ces installations. Par ailleurs, les avantages d'un réseau ouvert, en complément du réseau fermé de la gendarmerie, sont unanimement reconnus par les pratiquants et professionnels de la montagne. En outre, les agents des parcs nationaux de montagne ou de l'ONF utilisent également ces réseaux pour accomplir leurs missions scientifiques, mais aussi leurs missions de police, et pour assurer leur sécurité lors de leurs déplacements.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, le principe de l'exonération dont bénéficiaient ces réseaux au titre des missions de service public de secours qu'ils assurent sera-t-il confirmé par une base réglementaire qui garantira la pérennité de ces installations en modifiant le décret de 2007 pour revenir à la situation antérieure ?
D'autre part, les missions de sécurité ne se limitant pas au territoire national, puisque le massif des Alpes, par exemple, couvre de nombreuses zones transfrontalières, plusieurs massifs européens seraient concernés par une réorganisation des dispositifs.
Je vous remercie donc de me préciser comment le Gouvernement - ce problème concerne également Mme la ministre de l'intérieur - compte assurer une organisation concertée des secours sur chaque versant des massifs transfrontaliers.
M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le député, permettez-moi tout d'abord de saluer votre engagement en tant qu'élu de la montagne. Sur ces questions, je sais quelle vigilance vous exercez, notamment au sein de l'association nationale des élus de montagne, à laquelle je suis moi-même très attaché.
Le décret du 24 octobre 2007 relatif aux redevances d'utilisation des fréquences radioélectriques dues par les titulaires d'autorisations d'utilisation de fréquences limite les exonérations aux services d'aide médicale d'urgence des établissements publics hospitaliers et aux services d'incendie et de secours. Dans un contexte de rareté croissante du spectre, il convient de bien valoriser cette ressource hertzienne afin d'inciter à une meilleure utilisation de celle-ci. L'État se doit de gérer correctement ses actifs immatériels, parmi lesquels figurent les fréquences hertziennes.
En outre, ce décret a permis de corriger une dérive constatée depuis la parution de l'arrêté du 27 décembre 1996, à savoir l'accroissement du nombre de réseaux se prévalant d'un régime de sécurité civile pour échapper au paiement de la redevance.
Cependant, le Gouvernement est bien conscient des difficultés qui résultent de l'application de ce décret pour certaines associations intervenant dans le domaine de la sécurité civile : le paiement de la redevance domaniale de mise à disposition de fréquences peut constituer pour elles une charge financière lourde à supporter. Pour cette raison, nous réfléchissons à la mise en place de mesures correctrices.
Dans l'attente d'une solution globale pérenne permettant de traiter l'ensemble des situations, le Premier ministre vient de décider de suspendre le recouvrement de la redevance due pour 2008 au bénéfice des associations intervenant dans le domaine de la sécurité civile lorsqu'il apparaît que les fréquences mises à leur disposition sont indispensables à leurs activités.
Pour répondre à votre question concernant le long terme, je vous précise que le Gouvernement veillera à ce que les structures intervenant dans le domaine de la sécurité civile ne supportent pas de charge supplémentaire liée au paiement de leur redevance de mise à disposition lorsque elles n'ont pas d'autres solutions que d'utiliser ces fréquences. Une réflexion globale sera ainsi engagée pour permettre de répondre aux attentes de l'ensemble des organismes assurant des missions de sécurité civile, notamment de secours en montagne, potentiellement exposés à de grandes difficultés du fait du paiement de la redevance.
Je prends l'engagement, monsieur le député, de vous apporter des éléments complémentaires à mesure que le Gouvernement avancera dans sa réflexion.
M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.
M. Joël Giraud. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse sur ces questions, que vous connaissez bien vous aussi. Mais je dois insister sur la nécessité d'associer pour une large part la représentation nationale, notamment le groupe montagne de l'Assemblée nationale, à ces réflexions. Si une telle concertation avait eu lieu en amont du décret de 2007, nous ne serions pas dans la situation totalement ubuesque que nous connaissons aujourd'hui. Je vous rappelle en effet que, sans l'action des réseaux associatifs, des zones entières ne seraient plus couvertes par les secours en montagne. Il importe à présent de mener une réflexion concertée afin de réparer une erreur dont les conséquences sont dramatiques pour la sécurité en montagne.

Données clés

Auteur : M. Joël Giraud

Type de question : Question orale

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi

Ministère répondant : Économie, industrie et emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 janvier 2009

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