allocation équivalent retraite
Question de :
M. Stéphane Demilly
Somme (5e circonscription) - Nouveau Centre
M. Stéphane Demilly attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur les conséquences de la suppression de l'allocation équivalent retraite (AER) depuis le 1er janvier 2009, en application de l'article 132 de la loi de finances pour 2008. Cette allocation était réservée aux demandeurs d'emploi de plus de 50 ans totalisant 160 trimestres d'assurance vieillesse avant l'âge de 60 ans et qui donc avaient bien souvent commencé à travailler très jeunes. Elle permettait de prendre le relais des allocations ASSEDIC, perçues pendant 3 ans, pour constituer un revenu de remplacement pour les bénéficiaires involontairement privés d'emploi, jusqu'à l'âge de la retraite. Les salariés concernés par les licenciements économiques bénéficiaient de cette disposition tout en étant dispensés de recherche d'emploi. La suppression de l'AER va contraindre un grand nombre de personnes à vivre sans allocation jusqu'à leur départ à la retraite, les contraignant à passer d'indemnités d'un maximum de 31,82 € par jour avec l'AER à 14,42 € maximum au titre de l'allocation spécifique de solidarité. La perte de ressources est donc très importante pour elles et les conséquences peuvent se révéler dramatiques, notamment dans le contexte économique et social actuel où le chômage est en forte augmentation et où ces personnes ont très peu de chance de retrouver un emploi. Il lui demande donc quelles dispositions compte prendre le Gouvernement pour remédier à cette situation qui risque de toucher des milliers de bénéficiaires cette année.
Réponse en séance, et publiée le 25 mars 2009
SUPPRESSION DE L'ALLOCATION ÉQUIVALENT RETRAITE
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour exposer sa question n° 578, relative à la suppression de l'allocation équivalent retraite.M. Stéphane Demilly. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. Je souhaite attirer son attention sur les conséquences de la suppression de l'AER, l'allocation équivalent retraite, et ce depuis le 1er janvier 2009, en application de l'article 132 de la loi de finances de 2008.
Cette allocation était réservée aux demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans totalisant 160 trimestres d'assurance vieillesse avant l'âge de soixante ans, et qui avaient donc, bien souvent, commencé à travailler très tôt. Elle prenait le relais des allocations ASSEDIC, perçues pendant trois ans, et constituait donc un revenu de remplacement, jusqu'à l'âge de la retraite, pour les bénéficiaires involontairement privés d'emploi. Les salariés concernés par les licenciements économiques depuis 2005 bénéficiaient également de cette disposition tout en étant dispensés de recherche d'emploi.
La suppression de l'AER va obliger un grand nombre de personnes à vivre sans allocation jusqu'à leur départ à la retraite, les contraignant à passer d'une indemnité maximale de 31,82 euros par jour avec l'AER, à 14,42 euros au plus au titre de l'ASS - l'allocation spécifique de solidarité.
M. Jean Mallot. Eh oui !
M. Stéphane Demilly. La perte de ressources est donc très importante et risque de placer ces personnes en situation de grande précarité. Dans une période de crise où le chômage est en forte augmentation, ces demandeurs d'emploi ont en effet très peu de chance de pouvoir compenser cette perte importante de revenus en retrouvant une activité sur le marché de l'emploi.
Se pose également la question de l'égalité devant cette allocation puisque ceux qui en bénéficiaient déjà avant le 1er janvier 2009 continueront de la percevoir jusqu'à expiration de leurs droits, alors que tous les salariés licenciés qui sont en bout de course de leur indemnisation ASSEDIC ne pourront plus percevoir l'AER à partir du 1er janvier 2009. Ainsi, des salariés, issus de la même entreprise, percevront l'AER s'ils ont quitté l'entreprise entre 2002 et 2005 alors que, s'ils sont partis entre fin 2005 et 2008, ils se verront refuser cette allocation.
Je vais conclure par un exemple : pour un salarié licencié le 3 septembre 2006, à cinquante-cinq ans, le délai de carence sans aucune indemnité étant de trois mois environ, le premier jour d'indemnisation sera donc le 3 décembre 2006, la fin d'indemnisation interviendra au 30 novembre 2009, à l'âge de cinquante-huit ans et trois mois, et la retraite, quant à elle, tombera le 30 septembre 2011. Cela signifie donc vingt et un mois de non-indemnisation - sauf les 430 euros d'ASS si la personne est seule.
M. Jean Mallot. Et voilà !
M. Stéphane Demilly. Ma question est très simple : quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin de remédier à cette situation qui risque de toucher - et qui touche déjà - des milliers de personnes cette année ?
M. le président. La parole est à M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargée du développement de la région capitale.
M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale. Monsieur Stéphane Demilly, votre question porte sur la suppression de l'allocation équivalent retraite. Cette allocation, qui est versée sous condition de ressources, garantit un revenu minimum revalorisé chaque année. Elle tend à garantir au bénéficiaire des ressources égales à 32, 30 euros par jour - environ 980 euros par mois. Le montant perçu varie donc selon les revenus de l'allocataire ou de son conjoint. En 2008, environ 85 000 personnes, dont 30 000 nouveaux bénéficiaires, ont perçu cette allocation. Les allocataires ont, pour la plupart, débuté leur carrière professionnelle de manière précoce, et c'est pourquoi ils sont en majorité âgés de plus de cinquante-cinq ans.
La suppression des entrées dans le dispositif à compter du 1er janvier 2009 a été votée dans le cadre de la loi de finances de 2008. Mais nous tenons à vous garantir que cette disposition ne remet pas en cause les droits des bénéficiaires de l'AER en cours à cette date. En effet, la loi Fillon sur les retraites de 2003 a introduit la possibilité de départs anticipés à la retraite pour les personnes qui n'ont pas soixante ans mais qui ont travaillé longtemps, dispositif que nous avons d'ailleurs pérennisé car c'est une mesure de justice sociale.
L'AER est assortie d'une dispense de recherche d'emploi accordée sur demande : ainsi, la quasi-totalité des bénéficiaires ne sont pas soumis à l'obligation de recherche d'emploi. Or la politique du Gouvernement, c'est justement de cesser de faire des seniors la variable d'ajustement des entreprises comme cela a été le cas pendant trente ans, avec le résultat que l'on sait : la France à l'un des taux d'emploi des plus de cinquante-cinq ans le plus faible de l'Union européenne. C'est pour mettre fin à ce gâchis que nous avons également supprimé la mise à la retraite d'office avant soixante-dix ans, que nous avons créé une offre de service spécifique au sein du pôle emploi pour aider les seniors au chômage, que nous avons fait en sorte de valoriser le travail après soixante ans, et que nous avons demandé aux entreprises et aux branches de conclure des accords en faveur de l'emploi des travailleurs âgés.
Sur le front de l'emploi, la situation est à ce stade maîtrisée pour les seniors malgré la conjoncture actuelle.
M. Jean Mallot. Maîtrisée ?
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Le taux de chômage des plus de cinquante ans est stable entre le troisième et le quatrième trimestre 2008, à 5,1 %, et le taux d'emploi des cinquante-cinq à soixante-quatre ans augmente même légèrement, de 41 % à 42 % sur la même période. Il est important de garder le cap des réformes.
Aujourd'hui, les personnes qui auraient pu bénéficier de l'AER ne sont pas sans ressources : certaines sont en allocation d'assurance et n'auraient disposé que d'une faible AER de complément - en 2006, celle-ci représentait, en moyenne, moins de 7 euros par jour - ; d'autres ont liquidé leurs droits à la retraite ; enfin, d'autres encore remplissent presque toutes les conditions pour bénéficier de l'ASS, soit environ 450 euros par mois.
Cependant, si la situation de l'emploi des seniors venait à se dégrader - ce qui n'est pas actuellement le cas -, nous serions ouverts à une nouvelle réflexion sur le sujet.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour une très courte intervention puisque le délai imparti est déjà dépassé de trente-huit secondes.
M. Stéphane Demilly. Monsieur le secrétaire d'État, vous dites que le marché du travail est stable pour les seniors, mais nous ne devons pas avoir les mêmes statistiques. J'avais voté le dispositif proposé par le Gouvernement parce que je trouvais qu'il était incitatif pour remettre les seniors sur le marché du travail mais, depuis quelques mois, nous vivons une crise extrêmement grave, et il est évident qu'un senior a plus de difficultés qu'un jeune à retrouver une activité professionnelle. Il faut en tenir compte.
M. Jean Mallot. Bien sûr ! Vous avez raison !
M. le président. Je rappelle que l'Assemblée a de nouvelles règles de fonctionnement, et que le temps consacré à une question ne peut dépasser six minutes, y compris la réponse du ministre et celle du député. Je demande donc à tous les intervenants de faire un effort de concision.
Auteur : M. Stéphane Demilly
Type de question : Question orale
Rubrique : Chômage : indemnisation
Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville
Ministère répondant : Emploi
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 17 mars 2009