construction aéronautique
Question de :
Mme Monique Iborra
Haute-Garonne (6e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Mme Monique Iborra attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi sur la vente des usines d'Airbus et d'EADS prévue dans le plan Power 8. Les repreneurs européens potentiels pour ces sites, notamment, en France les sites de Méaultes et de Saint-Nazaire, qui pourraient être repris par Latécoère, n'ont pas encore une taille critique suffisante pour absorber sans dommages une reprise si précipitée qui les ferait passer du stade de grosse PME à celui de grande entreprise. En outre, nos partenaires anglais et allemands retardent actuellement au maximum la vente de leurs propres sites, mettant notre industrie en situation d'être la seule à réaliser ces ventes, en contradiction avec l'esprit de répartition des efforts qui a été annoncé lors du plan Power 8. De plus, la baisse continue du dollar, provoquant des annonces de délocalisations chez EADS, mais aussi chez Dassault, rend aussi moins compétitifs pour les repreneurs les sites installés en Europe. Enfin, il faut noter qu'un candidat supplémentaire à la reprise s'est positionné, il s'agit de l'entreprise américaine Spirit, quinze fois plus importante que Latécoère, faisant courir un risque de faire passer nos usines aéronautiques sous contrôle d'un compatriote de Boeing. Devant cette situation à haut risque pour l'industrie aéronautique française, ses emplois et son savoir-faire, elle lui demande de lui indiquer si le Gouvernement pense qu'il est opportun de vendre les sites français, et, dans la négative, les moyens que l'État français actionnaire compte mettre en oeuvre pour faire valoir sa position auprès d'EADS.
Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2007
PERSPECTIVES DE L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE
M. le président. La parole est à Mme Monique Iborra, pour exposer sa question, n° 59, relative aux perspectives de l'industrie aéronautique.Mme Monique Iborra. Monsieur le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur, ma question, qui s'adresse à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, porte sur la vente des usines d'Airbus et d'EADS prévue dans le plan Power 8.
Les repreneurs européens potentiels pour ces sites - notamment, en France les sites de Meaultes et de Saint-Nazaire, qui pourraient être repris par Latécoère - n'ont pas encore une taille critique suffisante pour absorber sans dommages une reprise précipitée qui les ferait passer du stade de grosses PME à celui de grandes entreprises. Nos partenaires anglais et allemands retardent actuellement la vente de leurs propres sites, mettant notre industrie en situation d'être la seule à réaliser ces ventes, ce qui est en contradiction avec l'esprit de répartition des efforts annoncé lors du plan Power 8.
De plus, la baisse continue du dollar, provoquant des annonces de délocalisations non seulement chez EADS, mais aussi chez Dassault, rend aussi moins compétitifs pour les repreneurs les sites installés en Europe.
En outre, il faut noter qu'un candidat supplémentaire à la reprise s'est positionné : l'entreprise américaine Spirit, ancienne filiale de Boeing rachetée par le groupe canadien Onex en 2005. Cette entreprise américaine est quinze fois plus importante que Latécoère, ce qui risque de faire passer nos usines aéronautiques sous contrôle d'un compatriote de Boeing.
Devant cette situation à haut risque pour l'industrie aéronautique française, ses emplois et son savoir-faire, je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, de m'indiquer si le Gouvernement pense qu'il est opportun de vendre les sites français et, dans la négative, quels sont les moyens que l'État français actionnaire compte mettre en oeuvre pour faire valoir sa position auprès d'EADS.
Enfin, j'aimerais savoir où en sont vos contacts avec les dirigeants d'EADS pour ce qui concerne les délocalisations annoncées et qui semblent, hélas ! se confirmer, lesquelles, dès le début de l'année 2007 étaient prévisibles, redoutées et dénoncées par les élus locaux, notamment par le président du conseil régional Midi-Pyrénées, soucieux du devenir de l'industrie aéronautique dans notre région, et en particulier de ses sous-traitants.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. Madame la députée, le plan Power 8 d'Airbus vise, vous le savez, au-delà des économies indispensables à la compétitivité de l'entreprise, à permettre à celle-ci de s'organiser avec l'ensemble de la filière de sous-traitance pour répondre au mieux aux opportunités commerciales qui s'ouvrent à elle. Je tiens à relever les succès commerciaux, dont il faut se réjouir, qui sont enregistrés mois après mois concernant la livraison des A320 et des A380, en attendant les futurs A350. Dans les vingt années à venir, pas moins de 20 000 à 30 000 aéronefs devront être livrés dans le monde. Le carnet de commandes d'Airbus et de ses sous-traitants laisse augurer une hausse des deux tiers de la production d'ici à 2010 grâce aux A320 et A380 ; juste derrière se profilent les A350, qui assureront vingt à trente ans de production et appellent dès aujourd'hui les investissements nécessaires.
Un tel niveau de commandes, un tel succès, impose de nouveaux modes de production. Il est indispensable qu'Airbus puisse s'appuyer sur un ou plusieurs sous-traitants de rang 1, qui pourront aider l'ensemble de la filière à se structurer et à se renforcer tout en l'entraînant vers les succès commerciaux auxquels elle peut prétendre. C'est dans cette perspective que se situe la cession de certains sites sur lesquels postulent des sous-traitants français de qualité. Pour aider les entreprises de l'aéronautique française à saisir les marchés qui s'ouvrent à elles, le Premier ministre a annoncé il y a quelques semaines à Marignane, où je l'accompagnais, la mobilisation de 1,5 milliard d'euros sur les cinq années à venir. Ce plan vise à aider la filière à se renforcer en l'accompagnant dans ses démarches stratégiques, en finançant sa capacité d'innovation et en facilitant ses opérations financières. C'est par ces moyens d'accompagnement propres à donner aux donneurs d'ordres et aux sous-traitants français les ressources nécessaires à sa compétitivité que le Gouvernement entend aider son industrie à faire face de manière structurelle aux aléas conjoncturels qui peuvent se présenter.
Pour ce qui est du cas spécifique de Latécoère, je puis vous assurer de la détermination du Gouvernement à examiner de manière très attentive et très suivie l'offre de reprise qu'il a présentée. Nous y travaillons de concert avec lui.
Quant aux délocalisations, vous savez bien qu'elles sont en partie liées aux taux anormalement sous-évalués de certaines monnaies étrangères. La concertation et la persuasion doivent être aujourd'hui mises en oeuvre pour obtenir un réajustement : c'est tout l'engagement du Président de la République lors de ses récents déplacements en Chine ou aux États-unis.
M. le président. La parole est à Mme Monique Iborra.
Mme Monique Iborra. Monsieur le secrétaire d'État, je crains que votre réponse ne puisse satisfaire les milliers d'employés qui, malgré les succès d'Airbus et d'EADS que vous signalez, s'attendent à être licenciés. Rappelons qu'il s'agit de 10 000 suppressions d'emplois... Nulle part vous n'en avez fait mention ; vous n'avez parlé que des succès.
Votre réponse, j'ose le dire, monsieur le secrétaire d'État, n'est pas à la hauteur de la situation, elle est partielle. Encore une fois, ce sont les effets d'annonce qui priment sur les réalisations concrètes. Encore une fois, le Président de la République déçoit, lui qui s'était fait le champion de la lutte contre les délocalisations pendant la campagne. Les Français jugeront. Il est vrai que nous n'en sommes plus à une promesse près qui n'aura pas été tenue. Il s'agit de l'avenir de notre industrie aéronautique ; encore une fois, aucune réponse concrète n'est apportée par le Gouvernement !
Auteur : Mme Monique Iborra
Type de question : Question orale
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, finances et emploi
Ministère répondant : Économie, finances et emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 décembre 2007