sécurité sociale
Question de :
M. Serge Letchimy
Martinique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. Serge Letchimy rappelle à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services que le problème des travailleurs indépendants prend une acuité particulière outre-mer, pour au moins deux séries de raisons. Tout d'abord, s'agissant des prestations familiales, alors que celles-ci ont été étendues tardivement aux ETI d'outre-mer, la mesure de mise en application subordonne le versement des prestations à la justification du paiement des cotisations échues. Tel n'est pas le cas en droit commun. Il convient que soient précisées les raisons de ce traitement inégalitaire. Ensuite, le principe d'égalité dans le bénéfice des prestations et avantages liés au paiement des cotisations n'est pas respecté outre-mer, dans la mesure où les ressortissants des DOM ne peuvent bénéficier en fait des avantages accordés à leurs homologues métropolitains notamment les séjours en maison de convalescence ou de retraite. Il est souhaitable qu'une réflexion s'engage sur cette question, afin que soient définies des solutions permettant de mettre un terme à cette situation d'inégalité.
Réponse en séance, et publiée le 8 mai 2009
FONCTIONNEMENT DES RÉGIMES DE PROTECTION SOCIALE DES EMPLOYEURS ET TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS D'OUTRE-MER
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Letchimy, pour exposer sa question, n°687, relative au fonctionnement des régimes de protection sociale des employeurs et travailleurs indépendants d'outre-mer.M. Serge Letchimy. Madame la secrétaire d'État chargée de la famille, vous savez l'importance des TPE dans les départements d'outre-mer. Elles représentent en effet, quelque 90 % des entreprises et 60 % d'entre elles n'ont pas de salariés - et n'emploient donc que des travailleurs indépendants. Je rappelle en outre qu'on compte 25 à 30 % de chômeurs dans ces départements.
Il s'agit pour nous de savoir comment restaurer la confiance et l'initiative face à une vraie injustice. On peut en effet déplorer un véritable dysfonctionnement en matière de cotisations sociales et de régime fiscal.
Ainsi, en matière de cotisations à l'assurance maladie, les taux ne sont pas uniformes. Le taux des cotisations qui relèvent de la CGSS est de 0,75 % pour un salarié et de 6,45 % pour un travailleur indépendant. Les indemnités journalières, ne seront perçues qu'à partir du 90e jour, pour 35 à 40 euros en moyenne. Pour les allocations familiales, les travailleurs indépendants ne les perçoivent pas suivant les régimes. En ce qui concerne les cotisations de formation professionnelle, ces travailleurs indépendants les paient mais ne voient pas de programme qui lui soit dédié. Pour ce qui est des cotisations retraite, les versements sont réalisés à des caisses nationales en métropole. Ainsi, les travailleurs indépendants en question ne peuvent-ils profiter de leur maison de retraite.
Et puis, ces travailleurs ne bénéficient pas des oeuvres sociales liées aux cotisations : prêts sociaux, établissements de cures, centres de soins.
Comment le Gouvernement compte-t-il remédier à cette situation, sachant qu'en Martinique, par exemple, il existe 10 000 entreprises sans salarié de ce type ? Si l'on octroyait un régime correct à ces travailleurs indépendants, 50 % de ces entreprises individuelles pourraient recruter un salarié, ce qui représenterait 5 000 emplois créés. Comprenez l'importance de ce sujet pour nous, et mon souhait d'obtenir une réponse concrète de votre part.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. Monsieur le député, le Gouvernement attache beaucoup d'importance à l'égalité de traitement entre les travailleurs indépendants d'outre-mer et ceux résidant en métropole.
L'harmonisation des prestations familiales entre l'outre-mer et la métropole a été mise en oeuvre dès les années soixante-dix. Cet effort s'est accentué à compter de 1990 et s'est achevé en 2006. Les montants des prestations familiales servies dans les DOM sont désormais identiques à ceux applicables en métropole.
Toutefois, certaines prestations font l'objet de conditions d'attribution ou de versement spécifiques. Ces spécificités s'expliquent par le contexte économique et social particulier de l'outre-mer. La recherche de la parité absolue avec la métropole ne manquerait pas de remettre en cause certaines dispositions, actuellement plus favorables aux allocataires d'outre-mer.
Les travailleurs indépendants d'outre-mer sont effectivement soumis à l'obligation de produire un justificatif de paiement des cotisations sociales échues, afin de bénéficier du versement de leurs prestations familiales. Cette obligation s'explique par le taux de recouvrement des cotisations en outre-mer qui se révèle bien inférieur à celui observé en métropole. Cette obligation a été introduite en 1986 parallèlement à l'extension des prestations familiales. Elle a été imposée par le législateur afin de s'assurer que les travailleurs indépendants d'outre-mer contribuaient au financement de la protection sociale.
Précisons que pour un travailleur indépendant qui a convenu d'un plan d'apurement de ses dettes sociales et qui le respecte, la condition d'être à jour de ses cotisations est considérée comme acquise et ouvre dès lors le bénéfice des prestations familiales.
Vous évoquez aussi la situation d'inégalité dont seraient victimes les travailleurs indépendants d'outre-mer, en ce qui concerne les séjours en maison de convalescence ou de retraite. Pourtant, le taux de bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie parmi les personnes de soixante-quinze ans et plus est beaucoup plus élevé outre-mer qu'en métropole : il est quasiment double en Guadeloupe, et quasiment triple à la Réunion.
En ce qui concerne l'offre médico-sociale, je vous rappelle que des plans de rattrapage ont été conclus en mars dernier en Guadeloupe et en Martinique, afin de créer 2 250 places d'accueil de personnes âgées supplémentaires d'ici à 2013.
J'appelle enfin votre attention sur les récentes dispositions relatives aux tarifs plafonds applicables aux établissements hébergeant des personnes âgées. Aux termes de ces dispositions inscrites dans l'arrêté du 26 février 2009, les tarifs se trouvent désormais majorés de 20 % en outre-mer.
Dans ces conditions, la situation des travailleurs indépendants d'outre-mer est comparable à celle de leurs homologues de métropole.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Letchimy.
M. Serge Letchimy. Permettez-moi, madame la secrétaire d'État, de vous exprimer mon désaccord. Le décret n° 92-1434 du 30 décembre 1992 auquel vous avez fait allusion est un décret injuste qui ne respecte pas le cadre de l'application de la loi en métropole et en outre-mer, et qui est considérablement pénalisant. C'est injuste d'obliger les travailleurs indépendants d'outre-mer à produire des documents qui ne sont pas demandés aux entreprises individuelles de métropole. À cet égard, votre réponse ne me convient pas.
Deuxièmement, les travailleurs indépendants dont je parle possèdent une entreprise dont ils sont eux-mêmes salariés. Comment se fait-il qu'on leur applique un taux de cotisation à l'assurance maladie de 6,40 %, alors que le taux appliqué à un salarié normal se situe à 1,25 % ? Comment expliquer qu'ils ne bénéficient des indemnités journalières qu'à partir du quatre-vingt-dixième jour d'arrêt ?
Madame la secrétaire d'État, je vous propose donc d'approfondir le sujet dans le cadre d'une mission d'étude ou parlementaire - à votre gré - afin de faire un point général sur la situation. Cela nous permettrait d'échanger et de trouver des solutions durables à une situation de discrimination.
Auteur : M. Serge Letchimy
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Commerce, artisanat, petites et moyennes entreprises, tourisme et services
Ministère répondant : Commerce, artisanat, petites et moyennes entreprises, tourisme et services
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 avril 2009