Question orale n° 708 :
protection

13e Législature

Question de : M. Bernard Derosier
Nord (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Bernard Derosier attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur les conditions d'application de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, et en particulier sur son article 27 qui a créé le fonds national de financement de la protection de l'enfance au sein de la caisse nationale des allocations familiales. L'objet de ce fonds consiste à compenser les charges résultant pour les départements de la mise en oeuvre des dispositions de la présente loi selon des critères nationaux et des modalités fixées par décret. Ce fonds n'a, à ce jour, pas encore été mis en place, faute de décrets d'application. Par conséquent, les charges nouvelles résultant de la loi pour les départements ne bénéficient d'aucun mécanisme de compensation et l'absence de financement nouveau se traduit par des difficultés à mettre en oeuvre la réforme de la protection de l'enfance dans toutes ses dimensions. Pourtant, les obligations nouvelles posées par la loi nécessitent des moyens supplémentaires pour sécuriser la procédure de recueil, d'évaluation et de traitement de l'information préoccupante, pour développer la prévention précoce et pour accélérer la diversification des modes de prise en charge. Il lui rappelle que le montant évoqué lors de débats parlementaires en 2007 pour alimenter le fonds était de l'ordre de 150 millions d'euros. Mais, compte-tenu du contexte budgétaire, l'avenir du fonds national de financement de la protection de l'enfance paraît incertain. Aussi, il lui demande de bien vouloir l'informer du calendrier envisagé pour la parution desdits décrets d'application et lui préciser le montant qui sera attribué au fonds.

Réponse en séance, et publiée le 3 juin 2009

DÉCRETS D'APPLICATION DE LA
LOI SUR LA PROTECTION DE L'ENFANCE

M. le président. La parole est à M. Bernard Derosier, pour exposer sa question, n° 708, relative aux décrets d'application de la loi sur la protection de l'enfance.
M. Bernard Derosier. Je voudrais évoquer la loi du 5 mars 2007, qui a réformé la protection de l'enfance. Cette loi a fait, à l'Assemblée et au Sénat, l'objet d'un certain consensus entre la majorité et l'opposition ; elle était défendue, madame la ministre, par l'un de vos prédécesseurs, M. Philippe Bas.
M. Bas avait pris l'initiative d'introduire dans ce texte, par amendement, un article 27 créant un Fonds national de financement de la protection sociale. Il considérait qu'il fallait compenser les charges qui résulteraient, pour les départements, de la mise en oeuvre des dispositions de cette loi selon des critères nationaux et des modalités fixées par décret.
Or, à ce jour, c'est-à-dire vingt-sept mois après la promulgation de la loi, le décret permettant l'application de cet article 27 n'est toujours pas paru. Les charges et obligations nouvelles existent pourtant, et elles nécessitent des moyens supplémentaires pour sécuriser la procédure de recueil, pour évaluer et traiter les informations dites " préoccupantes ". Cela peut sauver des enfants !
L'absence de ces moyens a été dénoncée par M. Bas lui-même, redevenu conseiller d'État. Dans un article récent, publié par la Gazette des communes, il considérait qu'il n'était pas normal que ces décrets d'application n'aient pas encore été publiés.
Je voudrais donc, madame la secrétaire d'État, que vous puissiez me rassurer, ainsi que mes collègues parlementaires ou présidents de conseils généraux qui, pour certains, rencontrent des difficultés à mettre en oeuvre les dispositions de cette loi.
M. le président. La parole est à Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance est, de l'avis de tous, une réforme sans précédent. Elle repose sur la notion centrale de prévention et vise à identifier avec davantage d'efficacité les enfants en danger.
Cette loi est le fruit d'une large concertation avec les conseils généraux, les associations et les services de l'État, et le Gouvernement est très attaché à sa mise en oeuvre. Bien qu'elle soit d'application immédiate pour l'essentiel de ses dispositions, nous veillons à ce que les textes d'application soient pris dans les meilleurs délais, avec une exigence de qualité, en s'assurant notamment qu'ils soient applicables et conformes aux réalités du terrain.
À ce jour, quatre textes ont été pris.
Le décret du 19 décembre 2008 a pour objet de fixer la nature et les modalités de transmission des informations préoccupantes recueillies par les cellules départementales aux observatoires départementaux de la protection de l'enfance et à l'Observatoire national de l'enfance en danger.
Le décret du 30 décembre 2008, relatif au placement des mineurs et à la mesure judicaire d'aide à la gestion du budget familial, organise la nouvelle procédure dénommée " mesure judicaire d'aide à la gestion du budget familial " : lorsque les prestations familiales ne sont pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants, et que l'accompagnement en économie sociale et familiale n'apparaît pas suffisant, le juge peut ordonner qu'elles soient, en tout ou partie, versées à une personne physique ou morale qualifiée, dite " déléguée aux prestations familiales ".
Conformément aux dispositions de la loi qui prévoient une formation, initiale et continue, commune à tous les professionnels au contact avec des enfants - magistrats, travailleurs sociaux, enseignants, personnels des polices et de la gendarmerie, médecins, personnels médicaux et paramédicaux, personnels d'animation sportive, culturelle et de loisirs, etc. -, deux décrets organisent les modalités de cette formation. Il s'agit du décret du 30 juillet 2008 relatif à la formation des cadres territoriaux en charge de la protection de l'enfance, et d'un décret, en cours de publication, relatif à la formation des professionnels qui travaillent dans le domaine de la protection de l'enfance.
S'agissant des moyens consacrés à la protection de l'enfance, l'État est au rendez-vous à travers tous les dispositifs qui relèvent de sa compétence : financement des réseaux d'aide et d'appui à la parentalité, et financement du groupement d'intérêt public " Enfance en danger " qui traite notamment les appels du numéro 119, service d'accueil téléphonique de l'enfance en danger.
Je comprends naturellement le souhait des départements de disposer d'un financement supplémentaire. La création, par voie d'amendement, du Fonds de financement de la protection de l'enfance, va dans ce sens, mais il ne s'agit que d'un outil au service d'une politique, et son volume éventuel est sans commune mesure avec les 5,8 milliards d'euros dépensés par les conseils généraux en la matière.
Ce n'est donc pas à la lumière du seul décret instituant le Fonds de financement de la protection de l'enfance que l'action que nous menons doit être appréciée, mais à l'aune des avancées concrètes constatées sur le terrain.
M. le président. La parole est à M. Bernard Derosier.
M. Bernard Derosier. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, d'avoir énuméré les quatre décrets publiés. Je suis même en mesure de vous dire que le dernier décret que vous citez a été publié le 20 mai 2009.
Tel n'était cependant pas l'objet de ma question. Il manque un cinquième décret, celui qui permettrait l'application de l'article 27 de la loi, créant le Fonds national de financement de la protection de l'enfance. Je constate que vous n'apportez aucune réponse sur ce point, et je le regrette.
C'est là que se joue aujourd'hui la réussite ou l'échec de ce dispositif. Si les départements consacrent bien, comme vous l'avez dit, plusieurs milliards d'euros à la protection de l'enfance, ce dispositif nouveau nécessite des moyens - moyens qui manquent actuellement aux départements.
J'attends donc, avec une impatience équivalente à celle qui m'animait avant votre réponse, la publication de ce décret. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Données clés

Auteur : M. Bernard Derosier

Type de question : Question orale

Rubrique : Enfants

Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville

Ministère répondant : Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2009

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