régime social des indépendants
Question de :
M. Jean-Pierre Balligand
Aisne (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. Jean-Pierre Balligand alerte M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur la situation de nombreux entrepreneurs affiliés au régime social des indépendants (RSI). Ces personnes ont souvent créé elles-mêmes leur propre emploi et leurs revenus ne dépendent que de leur capacité à conserver une activité régulièrement bénéficiaire. Or les cotisations du RSI atteignent parfois des montants tels que le revenu finalement disponible peut être sensiblement inférieur au salaire minimum. Il lui demande donc ce qu'il a l'intention de faire pour remédier à cette situation. Il lui demande en particulier s'il a étudié la possibilité de faire en sorte que les prélèvements du RSI correspondent mieux aux revenus des cotisants. En effet, comme le montre le rapport du RSI pour 2006, les prélèvements sont proportionnellement plus faibles pour les affiliés disposant des revenus les plus importants que pour les revenus les plus faibles. À titre d'exemple, le pourcentage de revenu prélevé pour les cotisants ayant un revenu compris entre 25 000 et 30 000 euros était cette année-là supérieur d'environ 10 points à celui des cotisants dont le revenu est compris entre 60 000 et 65 000 euros. Si une certaine dégressivité est normale pour les régimes de protection sociale, il demande donc s'il ne serait pas possible de réduire celle-ci. De même, il souhaite savoir s'il a étudié la possibilité de solliciter davantage la contribution sociale de solidarité sur les sociétés pour financer le régime, dans la mesure où les entreprises qui acquittent cette contribution, c'est-à-dire celles dont le chiffre d'affaires hors taxes est supérieur à 760 000 €, bénéficient du tissu économique dense que constituent les indépendants et ont donc intérêt à sa préservation. À plus court terme, il lui demande si le RSI ne pourrait pas mettre en place un système temporaire de report de ses prélèvements, moyennant le cas échéant le paiement d'un intérêt. La situation économique actuelle fragilise en effet particulièrement la trésorerie des très petites entreprises, ce qui met en péril leur survie. Permettre aux TPE de surmonter ce cap permettrait ainsi d'éviter une dégradation encore plus importante de l'emploi et donc des comptes sociaux.
Réponse en séance, et publiée le 3 juin 2009
ASSIETTE DES COTISATIONS DU
RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS
M. Jean-Pierre Balligand. De nombreux petits commerçants ne passeront pas l'automne. La situation de nombreux entrepreneurs affiliés au régime social des indépendants est inquiétante. Ces personnes ont souvent créé elles-mêmes leur propre emploi, et leurs revenus ne dépendent que de leur capacité à conserver une activité régulièrement bénéficiaire. Or les cotisations du RSI atteignent parfois des montants tels que le revenu finalement disponible peut être sensiblement inférieur au salaire minimum. Je souhaite donc connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour remédier à cette situation. Les analyses, dans chaque département, des directeurs et responsables sont très inquiétantes.
En particulier, la possibilité de faire en sorte que les prélèvements du RSI correspondent mieux aux revenus des cotisants a-t-elle été étudiée ? En effet, comme le montre le rapport du RSI pour 2006, les prélèvements sont proportionnellement plus faibles pour les affiliés disposant des revenus les plus importants que pour les revenus les plus modestes. À titre d'exemple, le pourcentage de revenu prélevé pour les cotisants ayant un revenu compris entre 25 000 et 30 000 euros était cette année-là supérieur d'environ dix points à celui des cotisants dont le revenu est compris entre 60 000 et 65 000 euros. Même si une certaine dégressivité est normale, ne serait-il pas possible de la réduire ?
De même, avez-vous étudié la possibilité de solliciter davantage la contribution sociale de solidarité des sociétés pour financer le régime ? En effet, les entreprises qui acquittent cette contribution, c'est-à-dire celles dont le chiffre d'affaires hors taxe est supérieur à 760 000 euros, bénéficient du tissu économique dense constitué par les indépendants, et ont donc intérêt à sa préservation.
Enfin, à plus court terme, le RSI ne pourrait-il pas mettre en place un système temporaire de report de ses prélèvements, moyennant - le cas échéant - le paiement d'un intérêt ? La situation économique actuelle fragilise en effet particulièrement la trésorerie des très petites entreprises, ce qui met en péril leur survie. Permettre aux très petites entreprises de surmonter ce cap permettrait ainsi d'éviter une dégradation encore plus importante de l'emploi et donc des comptes sociaux.
M. le président. La parole est à Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Vous vous souciez d'un sujet très important pour le Gouvernement : la situation des travailleurs indépendants.
Vous jugez souhaitable que les cotisations sociales correspondent autant que possible aux revenus du travailleur indépendant. Les régularisations de cotisations interviennent de manière décalée, au cours de l'année suivante, ce qui, en cas de hausse ou de baisse importante des revenus, peut être source de problèmes. C'est pourquoi, depuis 2004, les travailleurs indépendants sont autorisés à demander en cours d'année un ajustement de leurs cotisations afin d'éviter des régularisations importantes. De plus, le statut d'auto-entrepreneur, ouvert depuis le 1er janvier 2009 aux travailleurs indépendants dont le chiffre d'affaires est inférieur selon les cas à 32 000 ou 80 000 euros, permet aussi d'éviter les à-coups.
S'agissant de la dégressivité des taux de prélèvement, il est vrai qu'on peut se demander si les écarts entre les différentes tranches de revenus, qui résultent de règles historiques, demeurent pertinents. Le Gouvernement a d'ores et déjà pris des mesures, notamment dans le cadre du statut d'auto-entrepreneur : le prélèvement y est strictement proportionnel dans la tranche de chiffre d'affaires que j'ai mentionnée. Cela dit, ce dispositif, qui ne concerne qu'une partie des travailleurs indépendants, ne règle pas tous les problèmes : le Gouvernement est donc prêt à y travailler à partir des travaux d'expertise déjà menés, en collaboration avec les régimes des indépendants et avec le Parlement.
Vous vous interrogez également sur l'opportunité d'une augmentation de la contribution sociale de solidarité des sociétés - communément appelée C3S - pour alimenter le régime social des indépendants. Comme vous le savez, cet impôt joue depuis sa création un rôle fondamental, puisqu'il assure une solidarité entre les entreprises les plus grosses et les indépendants, artisans et commerçants, via le financement partiel de leur régime social. Le niveau actuel de la C3S est suffisant pour équilibrer le régime social des indépendants. Le Gouvernement estime donc que cet équilibre ne doit être bouleversé ni dans un sens ni dans l'autre, et que le niveau de la C3S doit rester inchangé.
Quant à la politique de recouvrement du régime social des indépendants, je rappelle que le Gouvernement a pris en mars dernier des mesures importantes pour aider les entreprises en difficulté. Les instructions données sont claires : elles sont axées sur la fourniture d'une réponse rapide, assortie d'engagements précis et adaptée à chacune des situations. Des délais peuvent ainsi être accordés par les organismes sociaux, dans des conditions qui ont été largement facilitées. Ces instructions sont valables pour les URSSAF et pour le régime social des indépendants.
Il est vrai que certains travailleurs indépendants ont pu avoir quelques difficultés, liées à la mise en place de la nouvelle organisation qui leur est consacrée : l'interlocuteur social unique. Il s'agit d'une réforme d'ampleur, qui a nécessité que l'on rapproche les pratiques et les systèmes d'information de plusieurs régimes ; des problèmes imprévus ont été rencontrés. Le Gouvernement suit de près les organismes afin de les aider à les résoudre au plus vite et à réduire les désagréments causés aux travailleurs indépendants. Je tiens d'ailleurs à saluer l'effort fourni par les différentes caisses, qui a permis le retour, dès 2009, à une situation quasi normale, donnant sa pleine mesure à la simplification que représente pour ces professions l'interlocuteur social unique.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.
M. Jean-Pierre Balligand. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Le problème, c'est que les travailleurs indépendants ne peuvent bénéficier du fonds social que lorsqu'ils sont à la limite du dépôt de bilan et de la cessation d'activité. Les situations intermédiaires, c'est-à-dire celles des personnes qui ont environ 32 000 ou 35 000 euros de revenu annuel, ne sont pas prises en compte.
Pour les très petites entreprises, je pense en particulier à ces commerces en milieu rural, qui font à la fois boulangerie, épicerie, etc., et qui sont bien souvent, dans une commune, le dernier à subsister, la situation devient dramatique. Les élus comme les commerçants sont très inquiets, et je me fais leur porte-parole. Je pense qu'il faut une consigne du Gouvernement pour que le fonds soit saisi plus rapidement, sans attendre que ces entreprises soient au bord de la cessation d'activité. Il s'agit de personnes qui ont envie de travailler, et qui travaillent, mais dont les revenus sont insuffisants et sur qui pèsent des prélèvements trop importants.
Auteur : M. Jean-Pierre Balligand
Type de question : Question orale
Rubrique : Sécurité sociale
Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville
Ministère répondant : Budget, comptes publics et fonction publique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2009