viticulture
Question de :
Mme Marie-Line Reynaud
Charente (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Mme Marie-Line Reynaud attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le recouvrement de l'aide complémentaire à la restructuration du vignoble charentais. En 1999, le Gouvernement a mis en place un plan d'adaptation de la viticulture charentaise comportant un volet structurel ainsi que des mesures conjoncturelles. Parmi ces mesures, figurait une aide financière de 1 500 euros par hectare, versée aux viticulteurs au titre des campagnes 1998-1999 et 1999-2000, pour les inciter à une reconversion de leur vignoble vers le vin de pays. Cette aide a été déclarée illégale par la Commission européenne en 2001. Suite à un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes de décembre 2002, le Gouvernement exige, six ans après, le reversement de l'aide en cause, majorée des intérêts courant depuis la date de son versement. Aujourd'hui, 631 viticulteurs de Charente sont concernés, pour un montant total qui s'élève à 1,7 million d'euros. Les responsables viticoles charentais, refusant d'admettre une telle mesure, ont constitué un collectif destiné à organiser la défense les viticulteurs concernés et auquel ces derniers ont adhéré massivement. Le monde entier fait face actuellement à la pire crise économique de son histoire. La récession mondiale va induire une baisse de la consommation et donc des exportations de cognac, pineaux et autres vins de pays charentais. La décision de l'État risque de mettre en grande difficultés financières certaines des 631 exploitations concernées. De plus, ce ne sont pas les professionnels qui ont commis une faute, mais bien l'État. C'est donc à ce dernier d'assumer ces responsabilités. En conséquence, elle souhaite savoir si le Gouvernement entend mettre en oeuvre une véritable concertation afin de trouver une solution satisfaisante pour tous et pour ne pas faire supporter l'obligation de remboursement de l'aide par les viticulteurs concernés. Il lui demande si le Gouvernement va maintenir ou non sa décision d'exiger le remboursement de cette aide.
Réponse en séance, et publiée le 5 juin 2009
REMBOURSEMENT DE L'AIDE COMPLÉMENTAIRE À LA RESTRUCTURATION DU VIGNOBLE CHARENTAIS
M. le président. La parole est à Mme Marie-Line Reynaud, pour exposer sa question, n° 741, relative au remboursement de l'aide complémentaire à la restructuration du vignoble charentais.Mme Marie-Line Reynaud. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, je souhaite appeler votre attention sur le recouvrement de l'aide complémentaire à la reconversion du vignoble charentais, question à laquelle j'associe Mme Quéré.
En 1999, le Gouvernement a mis en place un plan d'adaptation de la viticulture charentaise comportant des mesures conjoncturelles pour aider la région viticole à se sortir de la crise sans précédent qu'elle connaissait.
Parmi ces mesures, une aide financière de 1 500 euros par hectare fut versée aux viticulteurs au titre des campagnes 1998-1999 et 1999-2000 pour les inciter à une reconversion de leur vignoble en vin de pays.
Cette aide a été déclarée illégale par la Commission européenne en 2001. Suite à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes de décembre 2002, votre Gouvernement exige, six ans après, par l'intermédiaire de l'organisme payeur Viniflhor, le remboursement de l'aide en cause, majoré des intérêts courant depuis dix ans.
Aujourd'hui, 631 viticulteurs sont concernés, pour un montant total à rembourser qui s'élève à 1,7 million d'euros, avec des situations très disparates d'un viticulteur à l'autre.
Les responsables viticoles charentais, refusant d'admettre une telle mesure, ont constitué un collectif le 26 janvier dernier, auquel 624 vignerons ont adhéré et qui vise à organiser la défense contre le remboursement de cette aide. Le 24 avril dernier, ce collectif a déposé un recours devant le tribunal administratif.
Des recours hiérarchiques vous ont été adressés par chacun des viticulteurs concernés, afin que vous reveniez sur votre décision. Plusieurs rencontres ont eu lieu, mais, à ce jour, vous n'avez fait aucune proposition satisfaisante.
Le monde fait face actuellement à l'une des pires crises économiques et financières de son histoire. La récession mondiale induit une baisse de la consommation et donc une diminution des exportations de Cognac, de Pineau et de vins de pays charentais. Votre décision risque de mettre en grande difficulté certaines des 631 exploitations concernées. Les viticulteurs n'ont commis aucune faute ; c'est donc à l'État d'assumer ses responsabilités.
En janvier dernier, en réponse à une question sur les aides aux pêcheurs versées par le Gouvernement en 2006, vous aviez déclaré : " S'agissant du remboursement éventuel des aides versées via le FPAP, je répète qu'il n'interviendra, le cas échéant, qu'étalé sur plusieurs années et en fonction de la situation de chaque entreprise. "
Par conséquent, je souhaite savoir si votre Gouvernement entend mettre en oeuvre, comme vous l'avez fait pour les pêcheurs, une véritable concertation et faire des propositions afin de trouver une solution satisfaisante pour ne pas faire supporter aux viticulteurs concernés l'obligation de remboursement de l'aide. Maintiendrez-vous votre décision d'exiger le remboursement de cette aide par les viticulteurs charentais ?
M. le président. La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame la députée, vous dites " votre " Gouvernement. Si l'opposition est sans son rôle, je vous rappelle que le Gouvernement de la France est dans l'obligation d'appliquer une décision de justice.
Pour ma part, depuis deux ans je gère en permanence des crises qui nous conduisent à accompagner, proposer des soutiens. À chaque fois, le Gouvernement - et c'est son rôle - doit vérifier que ces aides sont bien compatibles avec les règlements communautaires que nous avons acceptés par ailleurs.
Je connais plusieurs cas pour lesquels ce dialogue préalable avec la Commission n'a pas toujours eu lieu comme il aurait dû. Voilà comment cette aide, qui fait l'objet d'une demande de remboursement, est en cause aujourd'hui.
Je vous rappelle que cette aide consistait en un supplément national 1 524,49 euros à l'aide communautaire à la reconversion du vignoble charentais en vin de pays, accordée à un moment où les ventes de Cognac étaient en très forte baisse. Elle a été versée par l'Onivins à 681 viticulteurs, pour un montant total de 1 229 706 euros.
Effectivement, cette aide a été déclarée illégale par la Commission en septembre 2000.
Depuis ce moment, le ministère de l'agriculture et de la pêche a engagé toutes les voies de recours et a poursuivi les négociations avec la Commission pour tenter de trouver une issue qui permet d'éviter que des viticulteurs qui ont fait un effort de diversification soient pénalisés.
La France a notamment porté le contentieux devant la Cour de justice des Communautés européennes. Celle-ci a cependant confirmé la position de la Commission par un arrêt du 12 décembre 2002. Aujourd'hui, il n'y a donc plus aucune voie de recours contre la décision, qui est pleinement exécutoire.
En cas de non-exécution, la Commission européenne peut saisir à nouveau la Cour de justice et obtenir la condamnation de la France, d'une part au paiement d'une pénalité, d'autre part à des astreintes journalières importantes. Les viticulteurs doivent aussi rembourser les intérêts de retard qui courent depuis la date du versement. La réglementation communautaire est, en effet, extrêmement claire : les intérêts sont indissociables du remboursement de l'aide versée.
Contrairement à ce que vous avez indiqué, mes services se concertent très étroitement et régulièrement avec les responsables de la viticulture charentaise pour étudier les modalités pratiques du recouvrement, en prenant en compte la situation de chacun. J'ai également chargé un haut fonctionnaire d'une mission de médiation.
Je peux vous assurer que la situation des viticulteurs sera examinée au cas par cas, comme nous l'avons fait dans d'autres cas, pour rechercher chaque fois que c'est possible des adaptations, par exemple des étalements, afin de minimiser l'impact négatif de cette décision de la Commission.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Line Reynaud.
Mme Marie-Line Reynaud. Monsieur le ministre, je suis très heureuse que vous soyez là pour répondre à ma question.
De nombreux gouvernements, qu'ils soient de droite ou de gauche, ont souvent octroyé des aides à l'agriculture euro incompatibles.
La réponse que vous me donnez est partiellement insatisfaisante pour les viticulteurs charentais.
Par ailleurs, je souhaiterais que vous me fassiez parvenir par écrit la réponse que vous venez de me faire.
Auteur : Mme Marie-Line Reynaud
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et pêche
Ministère répondant : Agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2009