dopage
Question de :
M. François Rochebloine
Loire (3e circonscription) - Nouveau Centre
M. François Rochebloine souhaiterait attirer l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des sports sur la lutte contre le dopage. En effet, malgré les efforts constants des gouvernements successifs et de certaines instances fédérales sportives, cette lutte s'avère complexe à mettre en oeuvre. Reconnaissant qu'il s'agit là d'un véritable fléau que seule une action déterminée et inscrite dans la durée pourra permettre d'enrayer, il constate qu'aujourd'hui seules quelques disciplines font l'objet de contrôles renforcés, ce qui conduit à les exposer à une médiatisation à outrance. Considérant que cette politique publique suppose un large engagement des pouvoirs publics, aussi bien au plan national qu'international, il lui demande de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement ainsi que les moyens qu'il compte mettre en oeuvre pour favoriser une approche réellement efficace et pertinente de la lutte contre le dopage.
Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2007
LUTTE CONTRE LE DOPAGE
M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question, n° 76, relative à la lutte contre le dopage.M. François Rochebloine. Je voudrais attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'État chargé des sports, sur un certain nombre d'enjeux liés à la lutte contre le dopage.
Dans le cadre de la discussion budgétaire pour 2008, nous avons collectivement, toutes sensibilités politiques confondues, souligné l'apport essentiel, en termes de santé, d'une politique publique qui combattrait réellement ce véritable fléau qu'est le dopage. À ce titre, nous savons qu'il ne saurait y avoir de politique sportive digne de ce nom en l'absence d'effort soutenu et constant de la part des pouvoirs publics et des instances sportives.
Fort heureusement, tous les gouvernements successifs ont ces dernières années oeuvré en ce sens, même si une politique efficace contre le dopage peut s'avérer complexe à mettre en oeuvre. Bien souvent, et je le déplore depuis longtemps, il est trop facile de pointer du doigt certaines disciplines sportives, plus exposées que d'autres sur un plan médiatique, ce qui conduit, hélas, à mettre en difficulté des sportifs et parfois même à briser des carrières sur de simples allégations ou dénonciations, avant même d'avoir pu démontrer la réalité des faits.
Bien souvent, en effet, c'est toute une discipline qui se trouve menacée, comme on a pu le voir avec le cyclisme professionnel, alors qu'il conviendrait au contraire d'encourager tous les acteurs qui luttent pour assainir les compétitions et préserver les épreuves qui, au-delà du sport, constituent de grands rendez-vous de la vie nationale - je pense notamment au Tour de France et au Dauphiné libéré. Pour éviter des distorsions dans le traitement de la lutte contre le dopage, il convient de mettre en place des procédures adaptées, assurant le respect des règles du sport mais garantissant également les droits des sportifs.
S'agissant de l'évolution des moyens accordés aux fédérations sportives pour le suivi médical complet des athlètes de haut niveau et des espoirs, nous avons, là encore, pu exprimer des inquiétudes, considérant en effet qu'il est sans doute trop tôt pour l'État de se désengager dans ce domaine. Certes, on ne peut ignorer la question des sources de financement de la lutte contre le dopage. Aussi, il ne serait pas inutile de lancer sur ce thème une réflexion poussée, destinée à responsabiliser l'ensemble des acteurs, des sportifs eux-mêmes et des fédérations. Ainsi, la création d'une autorité indépendante dotée de la personnalité morale, l'Agence française de lutte contre le dopage, l'AFLD, par la loi n° 2006-405 du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection des sportifs, constitue indéniablement une réelle avancée.
Cependant, nos inquiétudes demeurent quant aux moyens financiers qui peuvent être dégagés pour le financement de cette agence ou pour le soutien qu'il conviendrait d'apporter aux fédérations sportives. Dans la mesure où 94 % du budget de l'Agence dépend de financements ministériels, il est évident que c'est l'État qui détient les leviers de toutes les actions qu'elle peut mettre en oeuvre. La faible augmentation des crédits laisse redouter un manque de volontarisme de la part de l'État, à un moment où il conviendrait au contraire de conforter la place de l'AFLD.
Nous souhaitons donc que cette agence obtienne de l'État les moyens nécessaires à son fonctionnement, de manière aussi à lui assurer la reconnaissance et la crédibilité qui lui permettra d'assumer ses nombreuses missions. L'Agence doit être au coeur de la vie sportive, toujours accessible, et être l'opérateur indépendant de référence dans le dispositif français de lutte contre le dopage.
Les enjeux immédiats, aussi bien au plan national qu'international, doivent inciter le Gouvernement à afficher une ambition forte et une politique cohérente en ce domaine, ce qui passera d'abord et avant tout par des actes. Nous ne comprendrions pas que l'on en reste seulement à l'énoncé de grands principes au niveau ministériel, sans se donner les moyens d'une lutte efficace et pertinente sur le terrain.
Aussi, monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais connaître vos intentions sur ce sujet d'importance.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des sports.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. Sur les 9 000 contrôles réalisés en France en 2006, 20 % l'ont été dans le cyclisme, soit deux fois plus que dans l'athlétisme et trois fois plus que dans le football.
Au regard du nombre de licenciés - 105 000 pour le cyclisme, 173 000 pour l'athlétisme et 1,851 million pour le football -, les chiffres sont encore plus éloquents : le cyclisme a été contrôlé trois fois plus que l'athlétisme et cinquante fois plus que le football. Étant le sport le plus contrôlé, le cyclisme est, presque mécaniquement, celui où l'on rencontre le plus grand nombre de contrôles positifs. De même, c'est celui où le retentissement des affaires est de loin le plus grand, et l'on y parle plus souvent de ces affaires que des résultats sportifs.
La lutte contre le dopage nécessite une vigilance de tous les instants. Les substances utilisées par les tricheurs évoluent avec les avancées d'une recherche médicale peu scrupuleuse. Les enjeux extra-sportifs associés à une victoire sont de plus en plus colossaux, et les jeunes reçoivent des images désastreuses de leurs champions et des moyens qu'ils utilisent. Une adaptation à cette évolution rapide est donc nécessaire.
C'est pourquoi, vous n'êtes pas sans le savoir, Roselyne Bachelot-Narquin a organisé à Paris, les 22 et 23 octobre derniers, une conférence internationale sur la lutte contre le dopage dans le cyclisme. Les participants à ce sommet international ont conclu qu'au-delà des méthodes classiques de détection directe de l'usage de substances dopantes, de nouvelles méthodes, fondées sur la détection indirecte, seraient mises en oeuvre dès 2008. Le monde du cyclisme sera le pilote de ce projet novateur, qui concerne ce que l'on a appelé le passeport biologique : le sportif sera suivi dès la première heure, et un contrôle pourra intervenir pour toute variation physiologique sensible, laquelle signifie un risque de dopage. Il est prévu qu'un bilan de cette expérimentation soit tiré à l'automne de 2008 et que celle-ci ne soit réalisée, au départ, que dans le cyclisme.
S'agissant de la lutte contre les trafics, et face à un bilan insuffisant des affaires judiciaires récentes, un projet de loi sera soumis au Parlement au cours du premier semestre de 2008, afin de renforcer les incriminations pénales. Les comportements illicites relevant de la notion de trafic de produits dopants - importation, exportation, transport et détention - constitueront dorénavant des délits.
Enfin, pour ce qui concerne la prévention, essentielle pour promouvoir la valeur exemplaire du geste sportif notamment auprès des jeunes, un groupe de pilotage national a été chargé d'élaborer une stratégie cohérente et pertinente de prévention des conduites dopantes. Celle-ci visera en premier lieu à identifier les axes et les thématiques de recherche pour améliorer l'efficacité des actions préventives et, en second lieu, à établir des lignes directrices en matière de formation initiale et continue des acteurs de la prévention - éducateurs sportifs, professionnels de la santé et enseignants.
À cet égard, le projet d'augmentation de la pratique du sport pour les enfants scolarisés permettra de dégager du temps pour des actions de formation auprès de ce public. Cette stratégie fera l'objet d'une présentation lors du premier trimestre de 2008.
Enfin, monsieur le député, vous avez évoqué l'Agence française de lutte contre le dopage, l'AFLD. Vous connaissez les sommes que nous lui octroyons : 7,3 millions d'euros. En effet, 94 % proviennent du ministère, mais les crédits globaux affectés à la lutte contre le dopage dans le projet de loi de finances pour 2008 s'élèvent à 22,4 millions d'euros. Toutefois, je vous l'accorde, il faut encore augmenter les moyens de l'AFLD pour améliorer le contrôle, le suivi et l'indépendance de la lutte contre le dopage.
M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.
M. François Rochebloine. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, des réponses que vous venez de nous apporter, mais j'aimerais avoir quelques précisions supplémentaires. Tout d'abord, je ne peux que me réjouir d'apprendre que vous considérez que l'AFLD a besoin, pour être plus efficace, de moyens supplémentaires. Je remarque toutefois que vous parlez toujours des mêmes disciplines sportives : le cyclisme, l'athlétisme, le football. J'aimerais que l'on parle un peu d'autres sports, comme le tennis, le golf, ou encore le rugby, que vous connaissez bien ! Les dirigeants, dans le domaine du cyclisme et de l'athlétisme, ont pris leurs responsabilités, et je suis quelque peu agacé lorsque ces disciplines sont mises au banc des accusés. Je ne vous fais pas de reproche, monsieur le secrétaire d'État, mais je voudrais que toutes les disciplines soient traitées de la même manière.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. le secrétaire d'État chargé des sports. Je suis entièrement d'accord avec vous, monsieur le député. S'agissant du rugby, je vous rassure : sur les 200 contrôles qui ont été effectués lors de la Coupe du monde, aucun ne s'est avéré positif. Cela montre que le contrôle s'exerce aussi dans le rugby.
M. François Rochebloine. Et le tennis ?
M. le secrétaire d'État chargé des sports. Concernant le tennis, les sportifs français sont très contrôlés, mais, comme pour le cyclisme, nous n'avons aucune prise sur ce qui se passe dans les autres pays.
M. François Rochebloine. Comme en témoigne l'affaire Puerto !
Auteur : M. François Rochebloine
Type de question : Question orale
Rubrique : Sports
Ministère interrogé : Sports
Ministère répondant : Sports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 décembre 2007