Question orale n° 866 :
transports maritimes

13e Législature

Question de : M. François de Rugy
Loire-Atlantique (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. François de Rugy attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur l'état des projets d'autoroutes de la mer entre la France et l'Espagne. En effet, la signature d'une déclaration ministérielle franco-espagnole sur le sujet le 27 février 2009 prévoyait la mise en place fin 2009 de deux autoroutes de la mer sur l'axe Atlantique, une première reliant Saint-Nazaire à Gijon et une autre reliant Saint-Nazaire à Vigo et Vigo à Le Havre. Le 6 janvier dernier le port de Saint-Nazaire a inauguré le poste n° 4 du terminal roulier de Montoir-en-Bretagne, qui doit permettre le développement des autoroutes de la mer. L'ouverture de la première autoroute de la mer par l'armateur Louis Dreyfus est donc prévue pour le printemps mais, contrairement aux trois départs par jour initialement envisagés, il n'est prévu que trois rotations par semaine. Il est pourtant évident que ces autoroutes maritimes offrent une solution très efficace, rentable et beaucoup moins polluante que le transport routier tout en permettant le désengorgement des grands axes européens. Affichés comme une des priorités de l'Union européenne en matière de transports, ces axes maritimes doivent être favorisés par la puissance publique. En effet, pour être efficaces, de tels projets doivent inciter les transporteurs à transférer leurs marchandises par la mer plutôt que par la route, notamment en offrant un service moins onéreux. De plus, comme le préconise le rapport sur le sujet rendu en mai 2009, il est nécessaire que l'offre maritime soit très régulière (au moins un départ par jour) pour modifier le schéma logistique des transporteurs routiers. Il apparaît clairement que le manque d'ambition du projet de liaison Saint Nazaire-Gijon risque de nuire à son efficacité, une masse critique étant nécessaire. Il lui demande donc de préciser l'état des projets d'autoroutes de la mer de l'arc Atlantique et le dispositif d'incitation que l'État entend mettre en oeuvre pour assurer leur réel développement.

Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2010

AUTOROUTES DE LA MER ENTRE LA FRANCE ET L'ESPAGNE

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour exposer sa question, n° 866, relative aux autoroutes de la mer entre la France et l'Espagne.
M. François de Rugy. Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, une déclaration ministérielle franco-espagnole signée le 27 février 2009 prévoyait l'ouverture fin 2009 de deux autoroutes de la mer sur les côtes atlantiques : l'une doit relier Saint-Nazaire à Gijón, l'autre Saint-Nazaire à Vigo, puis Vigo au Havre.
Le 6 janvier dernier, le port de Nantes-Saint-Nazaire a inauguré le poste 4 du terminal roulier de Montoir-de-Bretagne, destiné à permettre le développement des autoroutes de la mer. L'armateur Louis Dreyfus doit ouvrir une première autoroute au printemps. Mais, au lieu des trois départs par jour initialement envisagés, trois rotations par semaine seulement sont prévues.
Les autoroutes de la mer sont très efficaces, rentables et, surtout, beaucoup moins polluantes que le transport routier ; en outre, elles permettent de désengorger les grands axes européens. Nul n'ignore les nuisances qu'entraîne le transport routier par camion, en particulier sur l'axe franco-espagnol, lequel compte plusieurs points noirs, dont Bordeaux et le passage des Pyrénées. Ces axes maritimes, qui constituent l'une des priorités affichées de l'Union européenne en matière de transports, doivent donc être favorisés par la puissance publique.
En effet, pour être efficaces, de tels projets doivent inciter les transporteurs à transférer leurs marchandises par la mer plutôt que par la route, notamment en leur offrant un service moins onéreux.
De plus, comme le précise M. Henri de Richemont dans un rapport remis en mai 2009, l'offre maritime doit être très régulière - au moins un départ par jour - pour modifier concrètement le schéma logistique des transporteurs routiers. Le manque d'ambition du projet de liaison entre Saint-Nazaire et Gijón risque donc de nuire à son efficacité, qui suppose une masse critique.
Une telle incohérence m'amène à vous demander de préciser clairement l'état d'avancement des projets d'autoroutes de la mer sur les côtes atlantiques, ainsi que la position du Gouvernement. Êtes-vous prêt à soutenir véritablement l'ouverture des autoroutes de la mer entre Saint-Nazaire et l'Espagne ? Par quels dispositifs incitatifs le Gouvernement entend-il assurer leur développement ?
M. le président. La parole est à M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Il n'y a pas d'incohérence, monsieur de Rugy, mais bel et bien une volonté politique. Mais s'il est facile de faire des discours sur les autoroutes de la mer - j'en ai moi-même fait beaucoup -, il est plus difficile de passer à l'acte.
Il s'agit d'assurer le report modal sur l'axe franco-espagnol, en effet caractérisé par des passages délicats dans la région de Bordeaux, mais aussi en Poitou-Charentes et plus au nord. Nous envisageons du reste de faire de même sur l'axe méditerranéen, sur la façade est de l'Espagne, ainsi qu'entre la France et l'Italie.
Nous sommes donc convenus, vous l'avez rappelé, d'ouvrir une liaison entre le port de Nantes-Saint-Nazaire - où je viens de nommer un nouveau directeur - et celui de Gijón, avec Louis Dreyfus, armateur, et un groupe italien, puis une autre liaison avec Vigo. Dans un second temps, Saint-Nazaire sera relié à Algésiras.
La difficulté réside dans le choix du dispositif juridique adapté. En effet, malgré tous mes efforts, et ceux de la France, depuis plusieurs années, l'Union européenne peine à mettre de l'ordre dans son système : doit-elle apporter sa contribution sous la forme d'une aide au démarrage ou d'une aide à l'investissement ? Un navire doit-il être considéré comme une infrastructure, à l'instar d'une autoroute ? L'aide doit-elle être apportée au démarrage seulement, ou plus sur une plus longue période ?
Pour notre part, nous avons décidé, avec les Espagnols, d'instaurer une aide au démarrage et de la compléter par le programme classique de l'Union européenne, le programme Marco Polo ; nous avons réussi à convaincre l'Europe d'assouplir l'aide communautaire.
Vous l'avez rappelé, l'accord a été signé ; les services de Nantes-Saint-Nazaire et Gijón doivent débuter au printemps. D'ici un mois, nous disposerons de l'aide communautaire et l'Union européenne donnera, je l'espère, son accord aux aides d'État qu'apportent la France et l'Espagne. Ensuite, vous devrez ratifier un accord par voie législative entre la France et l'Espagne. L'objectif est le printemps prochain. Pour ce qui est de la liaison avec Algésiras, tout devrait être fait au début de l'année prochaine.
Enfin, vous avez raison, monsieur de Rugy : pour réussir, il faut un " effet-fréquence ". À cette fin, une rotation par jour au moins est souhaitable. Nous commencerons par trois par semaine, soit la moitié de ce qui est souhaitable ; je souhaite que nous parvenions très rapidement à l'effet-fréquence, qui seul permet un report modal massif.
M. le président. La parole est à M. François de Rugy.
M. François de Rugy. En effet, il est parfois difficile de passer du discours à l'acte. Mais cela est possible si l'on fait preuve de volonté : par exemple, l'autoroute des estuaires, autoroute terrestre, a été ouverte et est en grande partie gratuite. Lorsque l'on crée ainsi des conditions de concurrence déloyales, il ne faut pas s'étonner que la voie terrestre soit préférée !
Certes, il est difficile de trouver le dispositif juridique adapté ; mais les conditions de concurrence jouent également un rôle. Ainsi, si de nombreuses portions d'autoroute terrestre n'étaient pas gratuites, notamment entre l'Espagne et Bordeaux, le projet d'autoroute de la mer serait sans doute bien plus facile à réaliser.

Données clés

Auteur : M. François de Rugy

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports par eau

Ministère interrogé : Écologie, énergie, développement durable et mer

Ministère répondant : Écologie, énergie, développement durable et mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2010

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