agriculteurs
Question de :
M. Dominique Souchet
Vendée (5e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
M. Dominique Souchet interroge M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la situation des agriculteurs français et les perspectives de soutien à l'agriculture. Il lui demande comment le Gouvernement entend contribuer, à travers la loi de modernisation agricole et la prochaine réforme de la PAC, à inverser le processus de dégradation du revenu de nos agriculteurs, qui a connu en 2009 la baisse la plus forte depuis 60 ans. Comment entend-il redonner aux jeunes agriculteurs des perspectives d'avenir et enrayer la chute du nombre d'exploitants pour que nous puissions maintenir la vitalité de nos territoires ruraux ? Il souhaite connaître selon quelles modalités le Gouvernement envisage de rénover, avec nos partenaires, la préférence communautaire pour que nos agriculteurs ne soient pas exposés à une concurrence extérieure déloyale et puissent continuer à assurer durablement l'indépendance alimentaire de la France et de l'Europe.
Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2010
SOUTIEN À L'AGRICULTURE
M. le président. La parole est à M. Dominique Souchet, pour exposer sa question, n° 895, relative au soutien à l'agriculture.M. Dominique Souchet. Monsieur le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, l'année 2010 s'ouvre pour notre agriculture à la fois sur un constat d'inquiétude et sur des raisons d'espoir.
Le constat, chacun l'a à l'esprit : des revenus en chute libre dans pratiquement toutes les productions ; un nombre croissant d'exploitations surendettées ; l'augmentation préoccupante des demandes de RSA dans de nombreux départements et un bilan de santé de la PAC qui n'est pas à la hauteur de ces inquiétudes et n'ouvre aucune perspective de long terme.
Les raisons d'espoir, c'est le retour du politique. À la faveur notamment de la résistance déterminée et digne d'un mouvement de producteurs de lait dans une série d'États membres, plusieurs gouvernements ont soudain mesuré l'ampleur des dégâts que pouvait entraîner dans le tissu économique agricole une logique de dérégulation généralisée. On a vu réapparaître une volonté politique, une réaction dont la France a été, dont vous avez été, monsieur le ministre, le catalyseur, en efforçant de regrouper les pays les plus favorables à l'agriculture organisée.
Cette attitude a suscité de l'espoir bien au-delà des seuls producteurs de lait : ce sont en fait tous les agriculteurs qui attendent des signes tangibles d'une volonté de régulation. Ils l'attendent dans le cadre de la loi de modernisation agricole, dont ils regrettent que l'examen par le Parlement soit retardé au-delà des élections régionales. Ils l'attendent dans le cadre d'une attitude beaucoup plus ferme de l'Union européenne à l'OMC, à l'heure où les États-Unis mettent en oeuvre le Farm Bill, où le Canada sanctuarise sa production laitière, où la Russie pratique l'intervention à hauteur de 20 % de sa production céréalière. Et ils l'attendent bien évidemment dans le cadre de propositions substantielles pour la nouvelle PAC 2013.
À cet égard, ils se réjouissent, et nous nous réjouissons avec eux, de voir réapparaître dans le vocabulaire de nos responsables politiques, la notion de préférence communautaire, que la Commission n'assumait plus depuis longtemps, alors qu'elle est un des principes fondateurs de la PAC. Le Président de la République, hier soir encore, l'a utilisée. Mais il ne faudrait pas que nous ayons des mots forts et des mesures faibles.
Aussi, monsieur le ministre, comment comptez-vous, avec nos partenaires, revitaliser, actualiser et rénover la préférence communautaire pour en faire à nouveau l'instrument qu'attendent nos agriculteurs pour pouvoir produire et commercialiser dans le cadre d'une concurrence loyale et contrôlée ?
Comment comptez-vous remettre au centre de la réflexion sur la future PAC, non plus une approche dogmatique de la concurrence qui serait désastreuse pour notre agriculture, mais cette préférence communautaire rénovée qu'attendent aussi les consommateurs européens, parce que c'est elle qui conditionne en définitive la sécurité, l'indépendance et la qualité de leur alimentation, de notre alimentation ?
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le député, pour faire face à la crise agricole que nous connaissons, il faut avancer dans trois directions différentes et complémentaires. C'est ce que, avec le Président de la République, le Premier ministre et l'ensemble du Gouvernement, nous essayons de faire depuis plusieurs mois.
La première direction vise à apporter une réponse d'urgence à des producteurs agricoles aux prises, vous l'avez rappelé, avec des situations de trésorerie tout à fait dramatiques. C'est le plan d'urgence annoncé par le Président de la République à Poligny : 1,650 milliard d'euros d'aides et de prêts. Les agriculteurs trouvent dans cette aide des solutions appropriées à leur situation. Plus de 500 millions d'euros de prêts ont déjà été engagés. En outre, des aides sont prévues pour les cotisations MSA et les intérêts d'emprunt peuvent partiellement être pris en charge. Cet ensemble constitue la réponse d'urgence. Jour après jour, je veille avec le médiateur Nicolas Forissier à ce que les aides soient correctement débloquées dans chaque département concerné.
Deuxième direction, les réformes de structure qui sont nécessaires pour aider les producteurs agricoles et leur ouvrir une perspective. Nous ne laisserons tomber aucun agriculteur de notre pays et nous voulons leur ouvrir des perspectives. C'est l'objet de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche qui sera examinée après les élections régionales, ce qui permettra d'avoir un débat plus serein et de rassembler toutes les composantes politiques autour de cet enjeu national. Dans cette loi, nous voulons rééquilibrer les relations entre producteurs, distributeurs et industriels. C'est l'objet de l'obligation de contractualisation qui renforcera le pouvoir des producteurs ; c'est l'objet du renforcement de l'observatoire des prix et des marges qui doit permettre une meilleure répartition de la valeur ajoutée au profit des producteurs. Le Président de la République l'a redit très clairement hier soir : nous sommes allés trop loin dans une répartition de la valeur ajoutée défavorable aux producteurs. Il faut que les producteurs vivent de leurs prix.
Enfin, il faut également une perspective européenne. Depuis six mois, je me bats pour remettre la régulation des marchés au coeur du projet politique européen. Nous continuerons sur la même voie. L'appel de Paris de décembre sera poursuivi dans les faits et les actions concrètes que mènera le Gouvernement français en Europe.
M. le président. La parole est à M. Dominique Souchet.
M. Dominique Souchet. Je souhaite remercier M. le ministre pour son attitude volontariste, en particulier dans le domaine de la régulation des marchés : elle est de nature à rassurer nos agriculteurs dans la période très difficile qu'ils traversent.
Auteur : M. Dominique Souchet
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Alimentation, agriculture et pêche
Ministère répondant : Alimentation, agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2010