Question orale n° 918 :
Cambodge

13e Législature

Question de : Mme Chantal Brunel
Seine-et-Marne (8e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Mme Chantal Brunel attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la situation des députés de l'opposition cambodgienne. Trois députés cambodgiens du parti Sam rainsy ont perdu leur immunité parlementaire au cours de l'année 2009, dont l'un pour la deuxième fois en quelques mois. C'est une décision grave. Or il semble que les faits reprochés, chaque fois d'une importance très relative, constituent autant de prétextes qui permettent de limiter l'expression d'opinions contraires à celles de la coalition majoritaire. Ceci est d'autant plus grave que le parti Sam rainsy est le seul parti d'opposition représenté à l'assemblée nationale cambodgienne. Le Cambodge est, après la Chine, le pays d'Asie qui reçoit de la France les sommes les plus importantes au titre de l'aide au développement. Alors que notre pays a toujours pris soin de diriger ses aides financières au profit de la démocratisation du pays, elles demande ce que compte faire le Gouvernement au sujet de ces trois députés, en vue d'améliorer le processus démocratique au Cambodge.

Réponse en séance, et publiée le 29 janvier 2010

SITUATION DES DÉPUTÉS CAMBODGIENS DE L'OPPOSITION

Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Brunel, pour exposer sa question, n° 918.
Mme Chantal Brunel. En tant que présidente du groupe d'amitié France-Cambodge, je souhaite appeler l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le cas de trois députés cambodgiens du parti d'opposition qui ont perdu leur immunité parlementaire au cours de l'année 2009. Je veux parler de Mme Mu Sochua, de M. Ho Vann et de M. Sam Rainsy, ce dernier étant privé de cette immunité pour la deuxième fois en quelques mois.
Pour nous, députés français, la perte de l'immunité parlementaire est une décision grave. Or il semble que les faits reprochés à ces parlementaires, à chaque fois d'une importance très relative, constituent autant de prétextes pour limiter l'expression d'opinions contraires à celles de la coalition majoritaire au pouvoir. Cette situation est d'autant plus regrettable que le parti de Sam Rainsy est le seul parti d'opposition représenté à l'Assemblée nationale cambodgienne.
Le Cambodge est, après la Chine, le pays d'Asie qui reçoit de la France les sommes les plus importantes au titre de l'aide au développement. Notre pays ayant toujours pris soin de diriger ses aides financières au profit de la démocratisation du pays, que compte faire le Gouvernement au sujet de ces trois députés ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame Chantal Brunel, permettez-moi de rappeler quelques éléments de contexte : le parti de Sam Rainsy - le PSR - est, avec le parti des droits de l'homme de M. Kem Sokha, la principale force d'opposition au Cambodge. Il a ainsi recueilli 22 % des voix aux dernières législatives et occupe un cinquième des sièges à l'Assemblée.
Nous rappelons solennellement, devant votre assemblée, toute l'importance que le Gouvernement attache au respect des droits fondamentaux des parlementaires, partout dans le monde. De ce point de vue, la situation du PSR ne peut, bien évidemment, que préoccuper le gouvernement français.
Rappelons quelques faits. Le président du PSR, Sam Rainsy, a été accusé de propos calomnieux en février 2009. Condamné à une amende par le Comité national électoral, il a perdu son immunité parlementaire à la suite de son refus initial de payer. Son immunité a été rétablie ultérieurement, après paiement de l'amende. Le 25 octobre 2009, M. Sam Rainsy a abattu une borne frontalière en signe de protestation contre les travaux de démarcation de la frontière avec le Vietnam. Il est donc de nouveau sous le coup d'une inculpation, mais, cette fois-ci, pour destruction de biens publics et incitation à la haine raciale, ce qui lui a valu une nouvelle levée de son immunité. Résidant actuellement en France, il a refusé de se présenter à l'audience du 27 janvier, considérant que son procès revêtait un caractère politique.
Toujours en 2009, plusieurs députés du PSR ont également été déférés à la justice. M. Ho Vann et Mme Mu Sochua ont été accusés de diffamation par des membres du Gouvernement et de hauts cadres de l'armée, et leur immunité parlementaire a effectivement été levée le 22 juin 2009. Si M. Ho Vann a été acquitté le 24 septembre 2009, en revanche, Mme Mu Sochua a été condamnée au paiement d'une amende en première instance, peine confirmée en appel. Elle a soumis son cas à la Cour suprême. À l'heure où nous parlons, aucun de ces deux députés n'a recouvré son immunité parlementaire, mais ils participent aux travaux de l'Assemblée.
À chacun de ces épisodes, nous avons manifesté notre préoccupation et notre inquiétude face à la récurrence des poursuites pour diffamation visant à lever l'immunité des députés de l'opposition. Nous ne pouvons pas accepter ces pratiques, qui relèvent de l'intimidation. Notre ambassade à Phnom Penh, en liaison avec nos partenaires de l'Union européenne, saisit toutes les occasions pour rappeler aux autorités cambodgiennes notre attachement au respect du débat démocratique
Aujourd'hui, nous ne pouvons que nous inquiéter de la qualité de ce débat au Cambodge, qu'il s'agisse de la représentation de l'opposition dans les commissions parlementaires ou des poursuites judiciaires engagées par le Gouvernement à l'encontre de représentants des partis politiques, de la société civile ou de la presse.
Enfin, le 1er décembre dernier, lorsque le Conseil des droits de l'homme a examiné la situation au Cambodge, nous avons rappelé l'importance que nous attachons au respect du pluralisme politique et à la liberté d'expression dans ce pays, en déplorant cette multiplication des levées d'immunité parlementaire.
En un mot, Mme Brunel, nous sommes très attentifs à cette situation et nous la surveillons très activement.
Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d'État, je me permets de vous rappeler que le temps consacré à chaque question est de six minutes. Celui-ci étant épuisé, je ne puis, hélas ! redonner la parole à Mme Brunel.

Données clés

Auteur : Mme Chantal Brunel

Type de question : Question orale

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes

Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2010

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