Question orale n° 943 :
crédit d'impôt

13e Législature

Question de : M. Michel Ménard
Loire-Atlantique (5e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Michel Ménard attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les différences de traitement concernant les avantages fiscaux liés à l'utilisation des services à la personne, dont sont victimes les retraités non imposables. En effet, il résulte des dernières évolutions apportées au dispositif CESU que, pour une même prestation de service à la personne, les salariés ayant les plus hauts revenus bénéficient d'une réduction fiscale significative pouvant aller jusqu'à 50 % des dépenses supportées, alors que les retraités modestes de plus de 65 ans, non imposables, ne bénéficient d'aucune aide de la sorte. Si les éléments avancés jusqu'ici par le Gouvernement pour expliquer la différenciation introduite dans le dispositif entre actifs (crédit d'impôt) et inactifs (réduction fiscale) peut s'entendre à certains égards, les effets de celle-ci n'en demeurent pas moins totalement inacceptables. Aussi, il lui demande si elle n'entend pas prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à cette injustice fiscale, lui suggérant ainsi d'étendre le bénéfice du crédit d'impôt à toute personne employant un salarié à domicile.

Réponse en séance, et publiée le 24 février 2010

AVANTAGES FISCAUX DES AIDES À LA PERSONNE

M. le président. La parole est à M. Michel Ménard, pour exposer sa question, n° 943, relative aux avantages fiscaux des aides à la personne.
M. Michel Ménard. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et porte sur les différences de traitement concernant les avantages fiscaux liés aux services à la personne.
L'emploi à domicile d'un salarié ouvre droit à une aide fiscale de l'État qui peut prendre deux formes différentes, le crédit d'impôt ou la réduction d'impôt, selon que l'usager est actif ou non. Seul le crédit d'impôt est réellement équitable, puisqu'il bénéficie à tout contribuable, qu'il paie ou non des impôts. Cependant il est réservé aux seuls actifs, c'est-à-dire aux personnes qui travaillent ou sont à la recherche d'un emploi. Les inactifs, les retraités et les personnes en situation de handicap ne peuvent prétendre, pour leur part, qu'à une réduction d'impôt qui ne profite qu'à ceux qui en paient.
Il résulte de ce dispositif une profonde injustice envers les retraités modestes non imposables auxquels les services à la personne coûtent deux fois plus cher qu'à des personnes qui travaillent, et cela même si elles ont des revenus très confortables.
Il s'agit en fait d'une redistribution à l'envers, antisociale, qui suscite beaucoup d'incompréhension : d'une part, la priorité est donnée aux actifs quand, plus que d'autres, les personnes âgées ou handicapées ont besoin d'une aide à domicile ; d'autre part, parmi les retraités, seuls ceux qui disposent des meilleurs revenus bénéficient de l'aide de l'État.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, ce problème a été soulevé des dizaines, voire des centaines de fois, car nous sommes très régulièrement - et à juste titre - interpellés sur le sujet dans nos circonscriptions. J'ai moi-même interrogé à deux reprises Mme Lagarde, mais ses réponses ne m'ont en rien satisfait et méritent donc que l'on y revienne encore.
Vous invoquez en effet les aides déjà perçues par les personnes exclues de ce dispositif, notamment au titre de la dépendance et du handicap. D'ailleurs, ces aides sont essentiellement financées par les départements. Que faut-il comprendre ? Que les retraités ou les personnes handicapées ont bien les moyens de payer une aide à domicile ? Or pour les actifs l'aide fiscale est accordée sans que les revenus soient pris en compte.
Vous invoquez également l'emballement des dépenses budgétaires, lié à cet avantage fiscal sur les services à la personne. Je vous rejoins sur ce point, mais je vous rappelle néanmoins certaines dérives, là encore maintes fois signalées, telles que le coaching, le pressing ou le toilettage canin à domicile, qui ouvrent droit au crédit d'impôt. Trouvez-vous normal que, dans le même temps, des retraités aux revenus modestes doivent renoncer à une aide indispensable, faute de pouvoir en assumer le coût ?
M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le député, je vous remercie de votre question. C'est effectivement un sujet sur lequel vous êtes revenu à plusieurs reprises et qu'il faut étudier lucidement.
D'abord, et très honnêtement, quelqu'un qui reprend une activité a besoin d'aide. Je pense que vous ne le contesterez pas. Une personne qui est en recherche d'activité ou qui a repris le travail, qui constitue un foyer fiscal et a besoin d'aide pour garder ses enfants ne doit pas être abandonnée. En toute lucidité, il me semble nécessaire d'accompagner ces gens en termes de services à la personne. Trop souvent, aussi bien dans votre circonscription que dans les territoires que nous connaissons les uns et les autres, nous avons entendu parler du problème de ceux qui reprenaient une activité et qui, en raison des coûts liés à la garde des enfants et à l'organisation de leur vie de famille, se trouvaient en réalité en situation de perdre de l'argent en travaillant.
Ensuite, s'agissant des personnes âgées, il existe tout de même des dispositifs intéressants et que vous avez d'ailleurs eu l'honnêteté de rappeler. Je pense notamment à l'allocation personnalisée d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes. Au travers de cette prestation, les personnes de situation modeste bénéficient d'une prise en charge publique de leurs dépenses d'aide à domicile qui peut parfois atteindre des niveaux très élevés. Vous qui êtes un élu de terrain, vous le savez très bien. Cette allocation est d'ailleurs exonérée d'impôt sur le revenu, ce qui constitue un effort très important de la puissance publique pour aider notamment les personnes âgées modestes.
Je tiens également à évoquer le chèque emploi service universel, le CESU, qui répond aux besoins des personnes âgées dans la mesure où tout organisme - j'insiste sur ce point - peut désormais, à travers ce nouveau dispositif, participer, sous la forme d'un abondement, au financement de l'emploi d'un salarié au domicile des particuliers.
En outre, un effort a été consenti pendant la crise, notamment en direction des personnes âgées, avec l'envoi à plus d'un million et demi de familles, de chèques emploi service à domicile. Cette démarche, entreprise conjointement avec Brice Hortefeux, représente une aide importante pour les 600 000 ménages qui en ont bénéficié, parmi lesquels figurent essentiellement des personnes âgées.
Surtout, en matière de justice sociale et d'attention aux plus démunis, il existe deux dispositifs qui sont bien plus importants encore que l'aide pour l'emploi à domicile. Il s'agit, d'une part, de la revalorisation du minimum vieillesse, dans des proportions que je qualifierais volontiers d'historiques, puisqu'elles n'avaient jamais été atteintes jusque-là : 25 % d'ici à 2012. Et ce n'est pas un cadeau ; c'est une mesure de justice qui était attendue. D'autre part, nous oeuvrons à l'amélioration du mécanisme d'indexation des pensions, qui était insatisfaisant.
Il y a donc des domaines dans lesquels nous avançons et nous souhaitons agir aussi pour les salariés, sans opposer une catégorie à une autre.
M. le président. La parole est à M. Michel Ménard.
M. Michel Ménard. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, mais vous n'avez pas apporté de réponses satisfaisantes à mes questions.
Le problème est bien d'offrir la possibilité aux retraités non imposables et aux personnes handicapées de bénéficier d'un crédit d'impôt.
Qu'il y ait des mesures spécifiques, notamment l'APA - d'ailleurs à la charge des départements -, c'est une chose ; mais c'en est une autre que des retraités non imposables ne puissent pas bénéficier de cette aide à domicile, ou qu'elle leur coûte deux fois plus cher qu'à des actifs dont certains gagnent beaucoup d'argent.
Cela est profondément injuste, alors que nous savons qu'il existe des retraités modestes qui, bien que ne bénéficiant de l'APA, ont besoin d'une aide à domicile. Il me semble qu'il serait plus utile de les aider que de faire bénéficier des actifs de crédits d'impôt permettant par exemple le toilettage des chiens. Je souhaite donc que ce dossier soit revu pour plus d'équité sociale.

Données clés

Auteur : M. Michel Ménard

Type de question : Question orale

Rubrique : Impôt sur le revenu

Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi

Ministère répondant : Économie, industrie et emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 février 2010

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