armée
Question de :
M. Philippe Folliot
Tarn (1re circonscription) - Union des démocrates et indépendants
M. Philippe Folliot attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants, sur la question de la reconnaissance des victimes d'essais nucléaires. Selon certaines associations, la reconnaissance des victimes d'essais nucléaires serait en bonne voie. En effet, les tribunaux débouteraient le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) afin de revoir certains dossiers pour une indemnisation. Par ailleurs, trois amendements ont été adoptés par l'Assemblée nationale dans le cadre de la loi de programmation militaire stipulant d'une part qu'en cas de refus d'indemnisation le CIVEN devra expliciter en quoi le risque est négligeable et motiver son refus, d'autre part que le demandeur pourra être présent ou se faire représenter par un tiers lors de l'instruction de la demande d'indemnisation et enfin, le CIVEN devra rendre compte de ses travaux auprès des deux assemblées et deux fois par an. Néanmoins, sur 840 dossiers seuls 11 auraient obtenu une indemnisation. Plusieurs questions se posent : les dossiers rejetés seront-ils réétudiés ? La loi ne tenant compte que du préjudice subi par la victime, que compte-t-il faire concernant l'épouse et les ayants droits ? À quelle date apparaîtra la mise en oeuvre des modifications de la loi ? Il lui demande donc quelles sont les intentions du Gouvernement sur ces questions.
Réponse publiée le 22 avril 2014
Le Gouvernement suit avec la plus grande attention le dossier relatif aux conséquences sanitaires des essais nucléaires français et a, notamment, décidé l'indemnisation des personnes atteintes de maladies radio-induites provoquées par les essais nucléaires réalisés par la France, entre 1960 et 1996, au Sahara et en Polynésie française. La loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, et le décret n° 2010-653 du 11 juin 2010 pris pour son application, ont ainsi créé un régime de réparation intégrale des préjudices subis par les victimes des essais nucléaires français, quel que soit leur statut (civils ou militaires, travailleurs sur les sites d'expérimentations et populations civiles, ressortissants français ou étrangers). Ce cadre juridique permet à toute personne atteinte d'une pathologie radio-induite figurant parmi les vingt-et-une maladies listées en annexe du décret du 11 juin 2010, complété par le décret du 30 avril 2012, de constituer un dossier de demande d'indemnisation. Cette liste des pathologies a été élaborée à l'aide des travaux les plus récents, menés par le Comité scientifique des Nations unies pour l'étude des effets des rayonnements ionisants (UNSCEAR). La demande doit comporter les éléments attestant de la présence du requérant, au cours de périodes déterminées, dans l'une des zones géographiques de retombées de rayonnements ionisants, conformément à l'article 2 de la loi du 5 janvier 2010 précitée. Les ayants droit des victimes décédées avant la promulgation de cette loi, soit avant le 5 janvier 2010, peuvent également solliciter une indemnisation dans un délai de 5 ans à compter de cette promulgation. Toutefois, leur demande ne peut être déposée qu'au nom de la victime décédée, pour ses propres préjudices, et non au titre des préjudices des ayants droit. Ceux-ci ont néanmoins la possibilité de demander la réparation de leur propre préjudice selon les règles de droit commun. Il convient d'observer que la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale (LPM) a étendu à toute personne atteinte de l'une de ces pathologies, et ayant résidé ou séjourné sur la globalité du territoire de la Polynésie française, entre le 2 juillet 1966 et le 31 décembre 1998, la possibilité de solliciter une indemnisation. Au regard de cette évolution, il sera procédé à un nouvel examen des demandes d'indemnisation ayant fait l'objet d'une décision de rejet sur la base des délimitations concernant la Polynésie française par l'article 2 de la loi du 5 janvier 2010 dans sa version antérieure. De plus, en application de l'article 54 de la LPM, les ayants droit des personnes mentionnées à l'article 1er de la loi du 5 janvier 2010 décédées avant le 18 décembre 2013 disposent d'un délai de 5 ans à compter de cette date afin de déposer une demande d'indemnisation. Tous les dossiers de demande d'indemnisation sont instruits au cas par cas par le comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) afin d'éviter d'instaurer une automaticité de la réparation, contraire au droit de la responsabilité. Si les conditions de l'indemnisation sont réunies, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité, à moins qu'au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition, le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable. La loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 n'a aucunement remis en cause ce dernier principe. Deux décisions récentes de la cour administrative d'appel de Lyon, en date du 20 février 2014, ont ainsi confirmé le bien fondé du rejet de demandes d'indemnisation prononcé sur cette base. Par ailleurs, il est à noter que la LPM a élevé le CIVEN au rang d'autorité administrative indépendante, dotée d'un rôle décisionnel en matière d'indemnisation, et inséré dans la loi du 5 janvier 2010 des dispositions relatives à la composition de cet organisme, aux modalités de désignation de ses membres et d'exercice de leur mandat, propres à garantir son indépendance. Le CIVEN sera ainsi désormais constitué de 9 membres, nommés par décret, parmi lesquels au moins 5 médecins, dont l'un d'entre eux sera proposé par les associations représentatives de victimes, après avis conforme du Haut Conseil de la santé publique. Le CIVEN sera présidé par un conseiller d'État ou par un magistrat de la Cour de cassation, qui aura qualité pour agir en justice au nom du comité. Le requérant aura quant à lui la possibilité de défendre sa demande devant le CIVEN, en personne ou par l'intermédiaire d'un représentant. Par conséquent, lorsqu'aura été publié le décret d'application qu'appelle cette modification de la loi du 5 janvier 2010, il ne reviendra plus au ministre de la défense de décider d'attribuer ou non des indemnisations aux demandeurs sur le fondement des recommandations du CIVEN, mais au CIVEN lui-même de statuer sur les demandes. Il est précisé que le décret en Conseil d'État qui abrogera et remplacera le décret du 11 juin 2010 afin de prendre en compte les nouvelles orientations introduites par la LPM est en cours d'élaboration.
Auteur : M. Philippe Folliot
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Anciens combattants
Ministère répondant : Défense
Dates :
Question publiée le 11 février 2014
Réponse publiée le 22 avril 2014