Question orale n° 1408 :
tribunaux de grande instance

14e Législature

Question de : Mme Carole Delga
Haute-Garonne (8e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Carole Delga appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice au sujet du tribunal de grande instance (TGI) de Saint-Gaudens. La réforme de la carte judiciaire de 2008 a supprimé le TGI de Saint-Gaudens ainsi que le tribunal de commerce (TC) de Saint-Gaudens et les a regroupés au sein des tribunaux de grande instance et tribunaux de commerce de Toulouse. Néanmoins, depuis le 1er septembre 2014, la réouverture du TGI de Saint-Gaudens est effective, cette mesure a permis d'offrir plus de proximité et d'accessibilité pour le service public de la justice en Haute-Garonne. Afin de poursuivre cet effort visant à offrir aux citoyens une justice plus accessible et de meilleure qualité, elle lui demande l'ouverture d'un poste de juge d'instruction au sein du TGI de Saint-Gaudens qui en est aujourd'hui dépourvu. Or la charge de travail à l'instruction va croissante depuis la réouverture du TGI de Saint-Gaudens. Pour la juridiction, l'absence de juge d'instruction implique une dilution des fonctions civiles entre plusieurs magistrats pour soulager le magistrat délégué à l'instruction. En outre, cela conduit à une paralysie assez rapide du fonctionnement des audiences correctionnelles : sur quatre magistrats du TGI, un juge ne peut pas siéger dans les affaires pour lesquelles il est intervenu, le juge d'instruction ne peut pas non plus siéger pour les affaires qu'il a instruites. Enfin, le contentieux des mineurs (assistance éducative et pénale) se traite essentiellement à Toulouse, à l'exception des audiences foraines ayant lieu à Saint-Gaudens, ce qui ne permet pas le désengorgement du tribunal. Pourvoir le poste de juge d'instruction à Saint-Gaudens permettrait de répondre à un besoin réel au niveau du TGI de Saint-Gaudens mais aussi celui de Toulouse, puisque ce juge, occupé à 35 % par l'instruction, pourrait être délégué à hauteur de 65 % par ordonnance, sur le contentieux des mineurs. À ce titre, elle le remercie de lui indiquer si la création de ce poste et envisageable.

Réponse en séance, et publiée le 27 avril 2016

JUGE D'INSTRUCTION AU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-GAUDENS
Mme la présidente. La parole est à Mme Carole Delga, pour exposer sa question, n°  1408, relative au juge d'instruction au tribunal de grande instance de Saint-Gaudens.

Mme Carole Delga. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

« Où la justice décline, la société déchoit », écrivait Émile de Girardin. La réforme de la carte judiciaire de 2008 a supprimé le tribunal de grande instance – TGI – de Saint-Gaudens, créant, pour les habitants du Comminges, un éloignement de près de deux heures par rapport au tribunal de grande instance de Toulouse. Cette décision inique de Rachida Dati a été modifiée par le Président de la République, le Premier ministre et la garde des sceaux : depuis le 1er septembre 2014, la réouverture du tribunal de Saint-Gaudens est effective ; cette mesure a amélioré la proximité et l’accessibilité du service public de la justice en Haute-Garonne.

Toutefois, le poste de juge d’instruction localisé au TGI de Saint-Gaudens n’est toujours pas pourvu. Sans juge d’instruction, la juridiction fonctionne avec un juge non spécialisé, destiné initialement au service civil et délégué à l’instruction. Il en va de même pour le greffe. La charge de travail croissante en matière d'instruction depuis la réouverture du tribunal de grande instance de Saint-Gaudens justifie la création d’un poste de juge d’instruction. À ce titre, un magistrat dont le service habituel est celui des affaires familiales a dû être délégué à l’instruction, ce qui demande un effort de formation supplémentaire, le contraint à rendre la justice dans des domaines très disparates et le soumet à une surcharge de travail évidente.

Pour la juridiction, l’absence de juge d’instruction implique une dilution des fonctions civiles, notamment des affaires familiales, entre plusieurs magistrats pour soulager celui qui a été délégué contre son gré à l’instruction, ainsi qu'une paralysie assez rapide du fonctionnement des audiences correctionnelles. La situation s’est considérablement aggravée avec la fin du mandat du juge de proximité, non remplacé depuis novembre 2015.

Pourvoir le poste de juge d’instruction à Saint-Gaudens permettrait de répondre en une seule fois à un besoin réel du TGI de Saint-Gaudens mais aussi de celui de Toulouse, car ce juge, occupé à 35 % par l’instruction, pourrait être délégué à hauteur de 65 %, par ordonnance de M. le président de la cour d’appel de Toulouse, au contentieux des mineurs. En effet, l’un des juges des enfants toulousains traite pour 70 % de son temps des affaires d’assistance éducative et pénale de mineurs exclusivement domiciliés sur le ressort du TGI de Saint-Gaudens.

Il convient également de noter que le juge des enfants toulousain est actuellement contraint de tenir, entre deux et trois fois par mois, des audiences foraines au TGI de Saint-Gaudens pour les dossiers d’assistance éducative. Par ailleurs, le tribunal pour enfants de Toulouse connaît une surcharge d’activité conséquente. Or, si le poste de juge d’instruction de Saint-Gaudens était pourvu et se voyait attribuer le contentieux de juge des enfants du ressort par délégation, le tribunal de grande instance de Toulouse serait allégé des contentieux des mineurs.

Ainsi, avec la création d’un poste de juge d’instruction au TGI de Saint-Gaudens, les objectifs de proximité de la justice et de maîtrise des coûts de personnel judiciaire pourraient être atteints par une seule et même action, en pleine conformité avec les enjeux de la justice du XXIe siècle.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Madame la députée, vous avez appelé l'attention du garde des sceaux sur la situation de l'instruction au tribunal de grande instance de Saint-Gaudens. Depuis sa réouverture, un poste de juge d'instruction est en effet localisé au tribunal de grande instance de Saint-Gaudens mais, faute de candidat, il n'est actuellement pas pourvu. Le garde des sceaux mesure l'importance des difficultés analogues à celles que vous décrivez, puisque 450 à 500 postes de magistrats sont vacants dans les juridictions.

Comme vous le savez, le Gouvernement a engagé une politique volontariste de recrutement mais, compte tenu des délais de formation des auditeurs de justice – trente et un mois – l'effet de ces mesures est mécaniquement étalé dans le temps. Il subsiste donc nécessairement des postes vacants dans nombre de juridictions, dont le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens, où, sur six magistrats localisés au siège, un poste – celui de juge d'instruction – est vacant.

Cependant, le premier président de la cour d'appel de Toulouse dispose actuellement de sept magistrats placés, qu'il peut affecter dans l'ensemble des juridictions du ressort de la cour, selon les besoins, et ce nombre sera porté à huit au 1er septembre prochain.

Pour ce qui est du poste de la juridiction des mineurs, que vous évoquez également, la situation est toute autre. Le TGI de Toulouse a une compétence départementale en matière de justice des mineurs, de sorte qu'il n'est pas possible à un juge du tribunal de Saint-Gaudens de connaître de ce contentieux. Comme vous le rappelez, le juge pour enfants de Toulouse tient cependant des audiences foraines à Saint-Gaudens, ce qui permet d'éviter des déplacements parfois onéreux pour des familles en difficulté.

Soyez assurée, madame la députée, que le garde des sceaux a conscience de la problématique que connaît le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens et des difficultés résultant de la vacance du poste de juge d'instruction. Ses efforts, lors des prochains mouvements de magistrats, continueront à porter sur la réduction des vacances de postes et, j’imagine, tout particulièrement pour le cas que vous nous avez signalé.

Données clés

Auteur : Mme Carole Delga

Type de question : Question orale

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 avril 2016

partager