Question orale n° 205 :
DOM-ROM : Mayotte

14e Législature

Question de : M. Ibrahim Aboubacar (Mayotte - Socialiste, écologiste et républicain)

M. Ibrahim Aboubacar interroge M. le ministre de l'intérieur sur la conception que les pouvoirs publics ont du département de Mayotte et souhaite s'assurer que l'ensemble des administrations de l'État tiennent compte des dimensions départementales et régionales de ce département, qu'il sera ainsi répertorié par l'ensemble des organismes publics qui dressent les comptes publics, les statistiques publiques et plus généralement qui produisent les expertises des politiques publiques. Il souhaite également des précisions sur le calendrier prévu par le Gouvernement pour traiter de la situation administrative de ce département-région et la concertation indispensable qu'il compte mener avec les élus de Mayotte pour avancer sur ce chantier.

Réponse en séance, et publiée le 20 mars 2013

STATUT TERRITORIAL DE MAYOTTE

Mme la présidente. La parole est à M. Ibrahim Aboubacar, pour exposer sa question, n° 205, relative au statut territorial de Mayotte.
M. Ibrahim Aboubacar. Madame la présidente, monsieur le ministre, depuis le 31 mars 2011, Mayotte a accédé au statut de département et région d'outre-mer, devenant ainsi, outre-mer, la première collectivité unique relevant de l'article 73 de la Constitution.
Au 1er janvier 2014, cette évolution va se prolonger par la transformation de l'île en région ultrapériphérique de l'Union européenne. Ce processus continu, qui répond à une revendication des Mahorais vieille de cinquante-cinq ans, s'est accéléré depuis les accords sur l'avenir de Mayotte du 27 janvier 2000. Il a été conclu en 2009, sur la base du pacte pour la départementalisation de Mayotte du 17 décembre 2008.
Conçu pour être une collectivité unique expérimentale, précurseur des nouveaux modèles de département d'outre-mer, le statut de Mayotte appelle encore des clarifications, qu'il s'agisse de l'organisation administrative ou, dans un certain nombre d'autres matières, du régime applicable. Des questions majeures, comme la fiscalité locale, la structuration des ressources des collectivités locales, la répartition de leurs compétences, la dimension régionale de ce département, le processus d'intégration des agents des fonctions publiques dans le droit commun, restent encore à préciser, car ces questions étaient restées en suspend lors des étapes de 2004 et de 2009. Sur la fonction publique, l'actualité sociale est là pour nous rappeler le problème, avec le mouvement déclenché hier par les instituteurs.
À la veille de l'échéance du 1er janvier 2014 et au moment où vient en débat le projet de loi sur la décentralisation, pouvez-vous nous préciser la conception que les pouvoirs publics ont du département de Mayotte ? Pouvez-vous nous assurer que l'ensemble des administrations de l'État tiendront compte de sa double dimension départementale et régionale, et qu'il sera répertorié par l'ensemble des organismes publics qui dressent les statistiques et qui mènent les expertises des politiques publiques ?
Pouvez-vous nous indiquer selon quel calendrier la situation administrative de ce département-région de Mayotte se décantera et quand le Gouvernement lancera la concertation avec les élus de Mayotte, indispensable pour conduire à bien ce chantier loin d'être achevé ? Concrètement, il y va de l'inscription de ce territoire dans l'ensemble des politiques publiques de notre pays et de la prise en compte à leur juste valeur des défis de son développement économique, social et environnemental.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Que voilà une question facile, monsieur le député ! Comment répondre en quelques minutes aux défis rencontrés par Mayotte ? Je vous réponds en tout cas avec plaisir car je connais votre souci de défendre l'avenir de Mayotte, devenu département d'outre-mer depuis 2011, et c'est tout à fait légitimement que vous interpellez le Gouvernement pour connaître l'action de l'ensemble des administrations publiques dans la mise en oeuvre des politiques publiques en faveur de ce jeune département confronté à de très grandes difficultés et pas seulement celle de l'immigration clandestine.
Vous souhaitez, d'abord, vous assurer que l'ensemble des administrations de l'État tient compte des dimensions départementale et régionale de ce département. Le Gouvernement fournit un effort budgétaire important - 738 millions d'euros en 2013 - qui doit permettre l'évolution statutaire, sociale et économique de Mayotte, en donnant les moyens nécessaires aux administrations pour répondre pleinement aux besoins très importants du département. Je pense aux domaines essentiels que sont la santé, la protection sociale et l'éducation, mais aussi la justice, l'agriculture ou encore les transports. Des référents outre-mer, nommés dans tous les ministères, travaillent en concertation avec les services de mon collègue Victorin Lurel pour mesurer les besoins et mettre en oeuvre l'organisation locale la plus adaptée.
Par ailleurs, je puis vous indiquer que les organismes publics chargés de préparer ou d'accompagner les politiques publiques ont pris en compte, dans le cadre de la départementalisation, toutes les informations utiles au développement de Mayotte. Ainsi l'INSEE a mis en place les enquêtes et analyses nécessaires aux administrations de l'État, afin de mieux mesurer les besoins du département et d'adapter leur organisation et le rythme de développement de leurs services. Les résultats du recensement de la population de Mayotte, accompli en 2012, permettront notamment de mieux mesurer l'évolution du département.
Vous souhaitez également avoir des précisions quant au calendrier prévu par le Gouvernement pour traiter de la situation administrative de Mayotte. L'application du droit commun y nécessite un travail exceptionnel d'adaptation des lois et règlements qui, entrepris dès 2011, se poursuivra dans les prochains mois à un rythme soutenu. Par exemple, dès 2014 la fiscalité de droit commun sera étendue à Mayotte afin, notamment, de donner aux collectivités locales les moyens de mener une politique publique efficace, au plus près des besoins des citoyens.
Enfin, vous soulignez à juste titre la nécessaire concertation à mener avec les élus de Mayotte pour avancer sur ce chantier. Je puis vous assurer que c'est une préoccupation constante du Gouvernement, et plus spécialement de Victorin Lurel. Les collectivités locales rencontrent de très grandes difficultés que la solidarité nationale doit prendre en compte. Les recettes des communes seront augmentées à partir de 2014. L'effort de compensation budgétaire en faveur du conseil général de Mayotte afin de permettre la poursuite de la mise en oeuvre des politiques publiques produira, je l'espère, ses meilleurs effets par la concertation avec les élus locaux, qui sont associés aux priorités d'actions et à la définition des mesures à entreprendre.
Les défis sont nombreux dans les domaines qui concernent mon ministère, qu'il s'agisse de la sécurité, de l'immigration ou, plus particulièrement, la situation que vivent les clandestins qui se trouvent sur l'île depuis très longtemps. J'aurai l'occasion de me rendre, cette année sans doute, dans ce territoire et d'y évoquer toutes ces questions avec vous. En tout cas, sachez que le Gouvernement est à vos côtés pour affronter ces défis considérables.

Données clés

Auteur : M. Ibrahim Aboubacar (Mayotte - Socialiste, écologiste et républicain)

Type de question : Question orale

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 mars 2013

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