- Texte visé : Projet de loi confortant le respect des principes de la République, n° 3649 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par :
- Code concerné : Code pénal
Après le deuxième alinéa de l’article 431‑1 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait d’entraver ou de tenter d’entraver par des pressions ou des insultes l’exercice de la fonction d’enseignant selon les objectifs pédagogiques de l’éducation nationale déterminés par le Conseil supérieur des programmes mentionné à l’article L. 231‑14 du code de l’éducation est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »
Cet amendement des Députés Les Républicains a pour objet de créer un délit d’entrave à la fonction d’enseignant dans le cadre des programmes édictés par l’Éducation nationale et à protéger les enseignants et personnels éducatifs.
Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose : « La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation et à la culture ; l’organisation de l’enseignement public, gratuit et laïc à tous les degrés est un devoir de l’État ». À travers l’établissement d’une école gratuite, obligatoire et laïque, Jules Ferry voulait « faire disparaître la dernière, la plus redoutable des inégalités qui viennent de la naissance, l’inégalité d’éducation », « parce qu’elle empêche l’égalité des droits, c’est-à-dire le fonds même de la démocratie ».
Bâtir une société plus juste et plus démocratique, tel a toujours été l’objectif de la République avec l’école comme premier outil fondateur et émancipateur et la raison comme matière première d’une nation libre, éclairée et citoyenne. « Former la raison, instruire à n’écouter qu’elle, se défendre de l’enthousiasme qui pourrait l’égarer ou l’obscurcir, et se laisser entraîner ensuite à ce qu’elle approuve ; telle est la marche que prescrit l’intérêt de l’humanité, et le principe sur lequel l’instruction publique doit être combinée », ainsi s’exprimait Condorcet, chantre de la raison, cette pierre philosophale, ce socle sur lequel repose notre foi scolaire.
Or, notre école est aujourd’hui, et depuis plusieurs années, fragilisée, menacée. Certains enseignements sont contestés, parfois même refusés, au nom d’idéologies, de croyances religieuses. Le sport, les lettres, les sciences, et plus encore l’histoire et sa fille naturelle, l’instruction civique, sont ainsi régulièrement victimes des assauts obscurantistes, notamment islamistes. Ceux-ci veulent effacer certains pans des programmes, faire taire les professeurs lorsqu’ils évoquent la Shoah, les croisades, les valeurs républicaines, la laïcité, la femme à l’égale de l’homme... Et c’est ainsi qu’ils s’attaquent directement aux enseignants via des menaces, pressions, intimidations, insultes.
Par ailleurs, il convient d’ajouter que près de la moitié des enseignants du second degré interrogés (49 %) affirment s’être déjà autocensurés dans leur enseignement des questions religieuses afin de ne pas provoquer de possibles incidents dans leur classe, soit une hausse de 13 points depuis 2018 (étude Ifop rendue publique le 6 janvier 2021, pour la Fondation Jean-Jaurès et Charlie Hebdo). L’assassinat du professeur d’histoire géographie, Samuel Paty, le 16 octobre 2020 et les circonstances l’ayant précédé ont mis en évidence, de façon incontestable, les failles de notre législation.
Aussi, cet amendement permet-il d’instaurer le délit d’entrave à la liberté d’enseigner, dans le même esprit que les délits d’entrave qui existe en matière de liberté d’expression ou de liberté syndicale.