XVe législature
Session ordinaire de 2017-2018
Séance du jeudi 19 avril 2018
- Présidence de M. François de Rugy
- 1. Immigration maîtrisée, droit d’asile effectif et intégration réussie
- Discussion des articles (suite)
- Article 5 (suite)
- Amendement no630 rectifié
- Mme Élise Fajgeles, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
- M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur
- Amendements nos1098, 139, 535, 296, 634, 237, 816, 698, 92, 297, 140, 239, 596, 484, 1102, 1099, 171, 1100, 1101 et 141
- Rappel au règlement
- Article 5 (suite)
- Rappels au règlement
- Article 5 (suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 5
- Article 6
- M. Alain David
- Mme Clémentine Autain
- Mme Laurence Dumont
- Mme Laurence Vichnievsky
- M. Bruno Fuchs
- Mme Christine Pires Beaune
- Mme Cécile Untermaier
- M. Gilbert Collard
- Mme Stella Dupont
- Mme Jeanine Dubié
- Mme Nadia Essayan
- M. Patrice Verchère
- Mme Elsa Faucillon
- Mme Valérie Rabault
- Mme Marietta Karamanli
- M. Stéphane Mazars
- M. Hervé Saulignac
- M. Ugo Bernalicis
- Mme Danièle Obono
- M. Sébastien Chenu
- M. Gérard Collomb, ministre d’État
- Amendement no908
- M. Pierre Cabaré, suppléant Mme Marielle de Sarnez, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères
- Amendements nos818, 61, 463, 146, 298, 537, 616, 873, 775, 906, 909, 456, 819, 205 et 561
- Article 5 (suite)
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
3e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie (nos 714, 857, 815, 821).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 630 rectifié à l’article 5.
La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour soutenir l’amendement no 630 rectifié.
La loi de 2015 rend difficile de contester devant le tribunal administratif le placement à tort d’un demandeur d’asile en procédure accélérée, même dans le cas d’une erreur de la préfecture ou de l’OFPRA – Office français de protection des réfugiés et apatrides. Nous proposons donc l’écriture suivante de l’article L. 723-2 du CESEDA – code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Dans tous les cas, l’office procède à un examen individuel de chaque demande dans le respect des garanties procédurales prévues au présent chapitre. Il doit [– et non « il peut » –] décider de ne pas statuer en procédure accélérée lorsque cela lui paraît nécessaire pour assurer un examen approprié de la demande », en particulier si le demandeur vient d’un pays dit sûr et qu’il « invoque des raisons sérieuses de penser que son pays d’origine ne peut pas être considéré comme sûr en raison de sa situation personnelle et au regard des motifs de sa demande ». Nous souhaitons, avec cet amendement, que la possibilité de renvoyer un dossier en procédure dite normale en cas d’irrégularité devienne une obligation pour l’OFPRA ou pour la CNDA – Cour nationale du droit d’asile – car en pratique, aujourd’hui, une erreur administrative dans le placement en procédure accélérée est rarement corrigée.
La parole est à Mme Élise Fajgeles, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission.
Nous avons déjà débattu plusieurs fois du placement en procédure accélérée ou normale et je tiens de nouveau à dire qu’il faut faire confiance aux officiers de protection de l’OFPRA et leur laisser une marge d’appréciation. Je pourrais retrouver et vous transmettre le nombre de reclassements en procédure normale, réalisés en fonction des situations individuelles. Je vous demande de retirer cet amendement ; à défaut, ce sera un avis défavorable.
Quelque chose me dit qu’il va être retiré…
La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, pour donner l’avis du Gouvernement.
Également défavorable. Si nous remplacions « peut » par « doit », nous ouvririons un contentieux très important, ce qui n’est pas notre volonté. Je suggère le retrait.
Madame Rilhac, maintenez-vous l’amendement ?
Je le retire.
(Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
(L’amendement no 630 rectifié est retiré.)
Quelle surprise !
La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1098.
Il s’agit d’un amendement d’appel qui vise à renforcer les garanties offertes aux demandeurs d’asile en ajoutant explicitement les demandeurs LGBTI – lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexe – aux catégories identifiées de personnes vulnérables. Certains demandeurs se trouvent en effet dans un état de fragilité et la durée de la procédure doit être compatible avec leur vulnérabilité. La loi du 20 juillet 2015 prévoit que l’OFPRA peut statuer par priorité ou apprécier les demandes présentées par des personnes vulnérables, qui peuvent nécessiter des modalités particulières d’examen. Les personnes LGBTI, du fait du caractère sensible du fond de leur demande, mais aussi du caractère tabou de l’homosexualité et de la transidentité dans leur pays d’origine, ont souvent besoin d’un accompagnement pour les aider à relater les persécutions qu’elles ont subies. Or, de son propre aveu, l’OFPRA n’a encore jamais procédé au reclassement d’un dossier d’une procédure accélérée vers une procédure classique sur la base de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre. Cela signifie que les procédures internes à l’OFPRA peuvent encore être améliorées pour prendre en compte plus efficacement la vulnérabilité des demandeurs LGBTI. C’est pourquoi je propose d’inclure ceux-ci dans la liste des catégories de personnes vulnérables précisée par la loi. Cela permettrait également de faire miroir avec l’organisation des chefs de file thématiques travaillant sur les vulnérabilités à l’OFPRA, dont j’ai déjà souligné la qualité du travail.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Quel est l’avis de la commission ?
Bien entendu, la prise en compte des persécutions à l’encontre des personnes LGBTI nous importe énormément ; c’est dans cet objectif qu’un amendement a été adopté pour exclure de la liste des pays d’origine sûrs ceux qui condamnent ou qui poursuivent l’homosexualité. J’imagine que cela entraînera une véritable évolution dans la pratique de l’OFPRA car – on en a beaucoup parlé avec les agents de protection – certaines personnes étaient bien identifiées comme appartenant à une de ces catégories, bien que provenant de pays d’origine classés comme sûrs. Désormais, au moins, ces pays ne sont plus considérés comme tels. Je pense donc que votre préoccupation sera satisfaite ; au vu de cette évolution de la loi, je vous propose de faire confiance à l’OFPRA et de retirer votre amendement.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Même avis. Je demande le retrait de l’amendement.
À mon avis, il va être retiré…
La parole est à M. Raphaël Gérard.
J’entends vos arguments ; j’ai décidé de faire confiance à l’OFPRA et de retirer l’amendement.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Rires et « Bravo ! » sur les bancs du groupe LR.)
(L’amendement no 1098 est retiré.)
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 139.
L’amendement propose de supprimer l’alinéa 5 de l’article. En effet, le projet de loi donne la possibilité à l’OFPRA d’adresser au demandeur d’asile la convocation à l’entretien individuel et de notifier ses décisions écrites « par tout moyen », ouvrant ainsi la possibilité d’un envoi par voie dématérialisée. Toutefois, au regard de la situation particulière de vulnérabilité des demandeurs d’asile, il ne nous semble pas possible d’apporter les garanties adéquates à de telles notifications, notamment en matière de confidentialité et de droit d’accès à la procédure. Cet amendement prévoit dès lors de supprimer la mention de la possibilité de procéder à la convocation et à la notification par tout moyen, comme le recommande le Défenseur des droits.
(Mme Sylvia Pinel applaudit.)
Quel est l’avis de la commission ?
La commission a adopté des amendements précisément pour garantir que cette notification « par tout moyen » se fasse de façon personnelle. L’exécution de cette exigence suppose certes tout un travail technique, mais celui-ci est largement entamé. En effet, Pascal Brice nous a expliqué en audition que l’OFPRA travaillait à la création d’une plateforme électronique, sachant que les plates-formes d’accueil pour demandeurs d’asile – PADA –, qui assurent aujourd’hui la mission de domiciliation, offrent l’accès à des ordinateurs. L’idée est de garantir une réception personnelle
via
ces plates-formes électroniques, grâce au suivi par les PADA. Avec notre amendement et le travail fait par l’OFPRA, je pense que votre exigence – que je comprends – sera satisfaite. Je vous demande donc de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Même avis : demande de retrait ou avis défavorable.
Madame Dubié, maintenez-vous l’amendement ?
Je le maintiens
(« Ah ! » sur les bancs du groupe LR)
car même si l’OFPRA travaille à améliorer le dispositif dématérialisé, on n’a aucune certitude que ce travail sera achevé au moment de l’entrée en vigueur de la loi.
Mme Dubié ne fait pas confiance au ministre d’État !
La parole est à M. Erwan Balanant.
J’entends les arguments de la rapporteuse sur la création d’un système qui permettrait à l’OFPRA de bien notifier ses décisions aux demandeurs. J’avais déposé un amendement en commission, qui, par je ne sais quelle énigme parlementaire, n’a pas été accepté sur le fondement de l’article 40.
Ah, cela vous arrive donc aussi !
Oui, cela m’arrive aussi ! J’ai été un peu surpris puisque je ne faisais que proposer de conserver ce qui existe déjà, à savoir la lettre recommandée avec accusé de réception, mais cela a été interprété comme une charge.
Bienvenue au club !
Pour revenir au fond, je proposais que le demandeur puisse prendre connaissance des modes de notification et choisir celui qui lui convient : garder la lettre avec accusé de réception s’il a une adresse ; sinon, basculer dans le droit commun, à savoir l’article L. 112-15 du code des relations entre le public et l’administration, qui spécifie : « Lorsque l’administration doit notifier un document à une personne par lettre recommandée, cette formalité peut être accomplie par l’utilisation d’un envoi recommandé électronique (…) ou d’un procédé électronique permettant de désigner l’expéditeur, de garantir l’identité du destinataire et d’établir si le document a été remis. L’accord exprès de l’intéressé doit être préalablement recueilli. »
Merci, monsieur le député.
Le débat va vite avec vous, monsieur le président de l’Assemblée nationale !
(L’amendement no 139 n’est pas adopté.)
La parole est à Mme Nadia Essayan, pour soutenir l’amendement no 535.
Cet amendement est très proche du précédent : « L’office convoque par tout moyen le demandeur à un entretien personnel et s’assure par tout moyen de la réception personnelle de la convocation. » Nous sommes bien conscients de la difficulté à vérifier que la convocation est bien arrivée et des complications que cela peut engendrer ; il faut absolument mettre en place une procédure sûre qui garantisse la bonne réception. Je rejoins Mme Jeanine Dubié sur la nécessité d’adopter ces amendements car au moment de l’application de la loi, on n’aura pas encore ces assurances.
(Mmes Jeanine Dubié et Sylvia Pinel applaudissent.)
Quel est l’avis de la commission ?
L’objectif de l’article – rappelé par plusieurs intervenants, dont moi-même et le ministre d’État – est de réduire le délai de traitement de la demande d’asile car au-delà de six mois cela devient inhumain de ne pas savoir quelle sera sa situation administrative. La notification par écrit, par lettre recommandée avec accusé de réception, fait perdre énormément de temps à l’OFPRA. L’idée est d’en gagner et l’adoption de l’amendement que nous avons déposé permet d’avancer vers cet objectif. Certes, vous avez raison : il faut s’assurer de la bonne réception des notifications, mais lorsqu’on discute avec les officiers de protection, ils affirment que la plupart des personnes qui viennent en entretien ont reçu la convocation par SMS. On ne peut évidemment pas s’en contenter dans la loi, mais les moyens électroniques –
via
une plate-forme électronique ou le téléphone – représentent la meilleure voie pour contacter les demandeurs d’asile. Il me semble donc que les garanties sont préservées. Avis défavorable.
(L’amendement no 535, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Je suis saisi de quatre amendements, nos 296, 634, 237 et 816, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour soutenir l’amendement no 296. Il s’agit de la même question. Nous proposons de substituer aux mots « par tout moyen » les mots « selon le ou les moyens choisis par ce dernier ». Le Conseil d’État lui-même vous a mis en garde au sujet des effets que pourrait avoir cette mesure, car tout dépend des conditions matérielles dans lesquelles vivent les demandeurs d’asile : ils n’ont pas toujours un accès continu aux moyens de communication modernes – téléphone portable, internet.
Voici ce qu’écrit le Conseil d’État : « Le plus grand soin devra être apporté au choix des moyens techniques de sorte qu’une notification par voie dématérialisée ne puisse être opposée que dans la mesure où il est démontré qu’elle a été opérée personnellement et qu’il est possible de garder une trace tant des opérations de notification que de la prise de connaissance par l’intéressé. » Pour satisfaire à cette exigence, il faut que le demandeur puisse choisir lui-même le moyen par lequel il sera tenu informé. Cela nous semble être le minimum. La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour soutenir l’amendement no 634. Dans un objectif de simplification administrative et de célérité des procédures, le projet de loi autorise l’OFPRA à adresser la convocation à l’entretien individuel « par tout moyen ». Cela entraîne une forme d’insécurité juridique, et ne permet de contrôler ni l’envoi ni la réception de la convocation – alors même que l’entretien à l’OFPRA revêt le caractère d’une garantie essentielle à l’instruction d’une demande d’asile.
Par cet amendement, nous proposons de préciser, à l’alinéa 5, que la convocation soit envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception, et « en complément » par tout autre moyen – lettre, SMS, courriel… La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l’amendement no 237. Cet amendement va dans le même sens que les précédents. Il vise à remplacer la formule « par tout moyen » par la formule « par lettre recommandée avec accusé de réception et par tout autre moyen ».
La convocation « par tout moyen » entraîne une insécurité juridique, sachant que les exilés sont vulnérables et souvent matériellement dépourvus. Ils n’ont pas d’accès direct à internet, et partagent souvent des téléphones mobiles. Par ailleurs leurs conditions d’hébergement sont précaires.
Insérer l’expression « par tout moyen » dans la loi revient à refuser de définir les modalités de convocation du demandeur d’asile. Cette formule ne permet pas le contrôle de l’envoi ni de la réception de la convocation, alors même que l’entretien à l’OFPRA est une étape essentielle de l’instruction d’une demande d’asile garantissant le respect des droits de la défense, reconnus tant par le CESEDA que par les directives européennes, la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – et donc par la Cour de justice de l’Union européenne.
Sans définition précise des modalités de convocation, le principe de confidentialité et de personnalité de la convocation ne sera pas garanti. Nous proposons donc, par cet amendement, de conserver la convocation par lettre recommandée avec accusé de réception, en ajoutant les mots « et par tout autre moyen », afin de s’assurer de la bonne réception de la convocation et d’éviter tout contentieux. Sur l’amendement no 296, je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 816. Monsieur le ministre, cet amendement est de la même veine que les précédents, aussi serai-je bref. Je répète simplement que ce mode d’envoi de la convocation ne respecte pas le principe de confidentialité que le Conseil constitutionnel a érigé, par une décision de 2003, au rang de « garantie essentielle du droit d’asile », principe de valeur constitutionnelle qui implique notamment que les demandeurs d’asile bénéficient d’une protection particulière.
Je le répète, le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi écrit : « Le plus grand soin devra être apporté au choix des moyens techniques de sorte qu’une notification par voie dématérialisée ne puisse être opposée que dans la mesure où il est démontré qu’elle a été opérée personnellement et qu’il est possible de garder une trace tant des opérations de notification que de la prise de connaissance par l’intéressé. À défaut, la combinaison d’un délai très bref avec des modalités incertaines de notification pourrait être regardée comme portant atteinte au caractère équitable de la procédure. »
Aux termes de cet amendement de repli, la convocation aux entretiens personnels de l’OFPRA devra être systématiquement envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception. Nous proposons d’ajouter la même exigence pour les différentes notifications envoyées par l’OFPRA, c’est-à-dire les notifications relatives à l’octroi ou au refus de protection, prévues par l’article L. 723-8 du CESEDA, les clôtures, les fins de protection et l’octroi du statut d’apatride en application de l’article L. 812-3 du même code. Ces notifications devront ainsi, elles aussi, être envoyées par lettre recommandée avec accusé de réception, procédé garantissant la confidentialité et permettant de s’assurer de la réception de la notification par le demandeur d’asile. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements en discussion commune ? Avis défavorable, pour les raisons que j’ai déjà développées au sujet des amendements précédents. Ces amendements sont très différents des précédents ! Lisez-les, avant de donner un avis défavorable ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. La parole est à M. Bruno Fuchs. Je comprends bien qu’il est nécessaire de réduire les délais : nous sommes d’accord avec cette logique. Mais si le demandeur n’a pas connaissance de la convocation qui lui a été envoyée, alors le délai est radicalement raccourci ! Un certain nombre de procédures s’éteindront mécaniquement, d’elles-mêmes ; avec une telle méthode, c’est sûr, on réduira non seulement les délais mais aussi le nombre de procédures ! Il a raison ! Madame la rapporteure, vous avez dit que dans la plupart des cas, le destinataire prend déjà connaissance de la convocation par un autre biais que par courrier recommandé. Mais ce n’est pas satisfaisant : il faut que cet autre système fonctionne dans tous les cas, à l’unité près !
Certes, le patron de La Poste a annoncé qu’en 2030 il n’y aura certainement plus de lettres papier. Il faut donc envisager d’autres moyens pour notifier aux demandeurs d’asile leur convocation. Cela étant, il faut que chacun puisse, de façon équitable, faire valoir l’intégralité de ses droits. Or pour s’assurer que le demandeur a bien reçu l’avis, il faut en recueillir la preuve formelle. La parole est à Mme Cécile Untermaier. Ces amendements sont de bon sens. Ils résultent de nos échanges avec l’OFPRA, lequel est tout à fait favorable à cette idée. Ils permettraient d’éviter un nombre de contentieux considérable – et l’on sait combien de contentieux naissent de convocations qui ne sont pas arrivées.
Le groupe Nouvelle Gauche ne comprendrait pas que cette proposition modeste, portant simplement sur le mode de convocation, n’aboutisse pas. Nous sommes vraiment surpris de la résistance que vous opposez à toute amélioration de ce texte. Il ne s’agit pourtant, reconnaissez-le, que d’une proposition bénigne.
Ces quatre amendements, provenant de quatre groupes différents, visent simplement à garantir la réception de la convocation et donc à faciliter le travail de l’OFPRA. Relisez-les sincèrement, et vous donnerez un avis favorable ! Très bien ! La parole est à M. Raphaël Schellenberger. Ces amendements reposent sur un postulat contestable, sur une fausse évidence. Leurs auteurs semblent considérer qu’il est plus facile, aujourd’hui, d’avoir une adresse postale qu’un numéro de téléphone portable : je ne suis pas sûr que ce soit très vrai, notamment pour les demandeurs d’asile.
Monsieur le président de l’Assemblée nationale, je me réjouis de votre présence au perchoir ce soir. Cet après-midi, lorsque vous êtes venu, vous nous avez, entre autres choses, communiqué une information importante : le refus de notre demande d’un scrutin solennel sur ce texte. Ce soir, votre présence incitera peut-être M. le ministre d’État à nous donner enfin les informations que nous demandons depuis le début de l’examen de ce texte à propos du plan de régularisation de masse d’étrangers en situation irrégulière dont a fait état la presse. Nous voulons aussi qu’il nous réponde à propos de l’absence d’étude d’impact sur le regroupement familial, ainsi que sur ce que nous avons découvert cet après-midi, à savoir l’existence d’une stratégie cachée concernant les mineurs étrangers non accompagnés, par le biais d’une nouvelle proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Je vous fais remarquer, monsieur le député, que votre intervention n’était pas vraiment une réponse à la commission ou au Gouvernement sur l’amendement.
La parole est à M. Florent Boudié. Le groupe La République en marche a examiné avec beaucoup d’attention la proposition figurant dans le projet de loi. Lors des auditions coordonnées par Mme la rapporteure, des remarques et des observations ont été faites, qui nous ont permis de creuser le sujet.
Il est bien question ici de l’envoi des convocations, et non des décisions : il me semble qu’il y a sur ce point une confusion. Je le répète : l’alinéa 5 de cet article, que vos amendements visent à modifier, ne porte que sur les convocations de l’OFPRA et non sur ses décisions.
Je rappelle qu’en l’état actuel du droit, si un ressortissant étranger ne se présente pas à l’entretien individuel faute d’avoir eu connaissance de sa convocation, il peut demander à rouvrir son dossier à n’importe quel moment pendant neuf mois. Cette garantie, qui est déjà prévue à l’heure actuelle, est très importante : il faut en tenir compte au moment d’évaluer la disposition proposée par le Gouvernement.
Par ailleurs, cher collègue Fuchs, chaque demandeur d’asile est d’abord accueilli dans une PADA, où il est généralement domicilié pour recevoir l’ensemble des informations, et il est accompagné en permanence par cette PADA.
Compte tenu de la possibilité pour le demandeur de rouvrir son dossier, à n’importe quel moment pendant neuf mois, nous considérons que les garanties sont suffisantes. Quant à la notification des décisions, nous en parlerons tout à l’heure : nous avons obtenu, sur ce point, les garanties qui nous semblaient absolument nécessaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Je mets aux voix l’amendement no 296. (Il est procédé au scrutin.) (L’amendement no 296 n’est pas adopté.) (Les amendements nos 634, 237 et 816, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) C’est désespérant ! La parole est à Mme Sandrine Mörch, pour soutenir l’amendement no 698. Cet amendement vise à aligner les garanties prévues pour la convocation des demandeurs sur celles prévues pour la notification des décisions, à savoir la confidentialité et la réception personnelle par le demandeur. Il est important que celui-ci puisse prouver, s’il n’a pas reçu la convocation, que son absence à l’entretien n’est pas de son fait.
Par ailleurs il faudra veiller qu’il dispose bien du moyen de communication utilisé par l’OFPRA. Il ne faut pas oublier que les demandeurs n’ont pas de compte courant, donc pas d’abonnement téléphonique. Ils utilisent généralement des téléphones à carte, qu’ils perdent parfois ou se font voler en raison de leurs conditions de vie : cela les amène à changer de numéro, ce qu’il faut prendre en compte. Quel est l’avis de la commission ? La notification n’a pas la même valeur juridique, quand il s’agit d’une convocation ou de la transmission d’une décision. Néanmoins, par cohérence avec l’amendement adopté en commission, je donne un avis favorable à votre amendement. Très bien ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Ah ! Ça cache quelque chose ! La parole est à M. Patrick Hetzel. Nous sommes un peu surpris par cette évolution manifeste de la position de la rapporteure et du Gouvernement – de la première plus que du second, en tout cas. Si votre position sur l’ensemble de ce texte évolue, nous aimerions le savoir, madame la rapporteure ! Même chose pour vous, monsieur le ministre : quelle est l’orientation du Gouvernement sur ce texte ? La majorité est plutôt divisée sur ce texte. Essayez-vous, grâce à des amendements de ce type, de la ressouder ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous rappelle que nous attendons toujours une réponse au sujet de la régularisation de 40 000 sans-papiers. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Oui, je vous le demande encore une fois, car Mme Gourault n’a pas voulu nous répondre hier soir : nous répétons que la représentation nationale a le droit d’être informée sur ce point. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Merci, cher collègue. Essayons de nous en tenir aux arguments pour ou contre les amendements en débat !
La parole est à M. Raphaël Schellenberger. Bien sûr pour s’exprimer sur l’amendement ! Le spectacle auquel nous venons d’assister est pour le moins surprenant. Nous comprenons bien, madame la rapporteure, que vous devez donner des gages à la sensibilité néo-socialiste, c’est-à-dire macroniste de gauche, de votre majorité. (Rires et exclamations sur divers bancs des groupes LaREM et NG.) Les socialistes, ils sont dans notre groupe ! Pas ailleurs ! Ce qui nous rassure, c’est que cela commence à se faire au vu et au su de tous : cela n’a plus rien de caché, cela se fait, enfin, dans l’hémicycle. Et peut-être aurons-nous du coup enfin ce soir les réponses aux trois questions que nous vous posons depuis cet après-midi : quid de la régularisation de 10 % des 400 000 étrangers en situation irrégulière sur notre territoire ? Quid de l’étude d’impact sur le regroupement familial ? Quid de la stratégie cachée concernant les mineurs non accompagnés qui déstructurera tout ce que nous sommes en train de construire ce soir ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.) (L’amendement no 698 est adopté.) La parole est à M. Pierre Vatin, pour soutenir l’amendement no 92. Monsieur le ministre d’État, madame la rapporteure, j’espère que cet amendement vous séduira comme le précédent puisqu’il a le même objet. L’article 5 permet à l’OFPRA de notifier les convocations par tout moyen, mais cela n’assure pas le contrôle de l’envoi ni de la réception de la convocation. C’est donc facteur d’insécurité pour le demandeur. Aussi me semble-t-il indispensable que ledit demandeur n’ait pas, le cas échéant, à apporter la preuve de la réception de la convocation ou de sa non-réception. Cet amendement vise à renforcer la protection du demandeur en cas de litige dans le déroulé de la procédure. Quel est l’avis de la commission ? Je ne comprends pas bien ce que vous demandez, cher collègue. Cela me paraît quelque peu compliqué. En effet. Sagesse ! Je ne vois pas quel serait l’intérêt de votre amendement, sachant que l’OFPRA a tout intérêt à garder des traces de l’envoi qu’il a effectué. Avis défavorable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe LR.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Si cet amendement était adopté, il ferait peser sur l’OFPRA la charge de la preuve de l’envoi de la notification. Avis défavorable. (L’amendement no 92 n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 297 qui suit, je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir cet amendement. Monsieur le ministre d’État, vous savez que la question de la langue est essentielle et, en l’occurrence, la possibilité de pouvoir communiquer parfaitement est particulièrement importante. Or il me semble que la rédaction de l’alinéa 6 prête à confusion. En effet, il est prévu que le demandeur puisse s’exprimer « dans la langue de son choix [excellente disposition bien rédigée] ou dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante ». Lors des premiers contacts, au moment du dépôt de dossier, on demande généralement à l’immigré de bien vouloir indiquer quelle langue il choisit, et celui-ci déclare souvent le français dès lors qu’il le parle un peu, même si ce n’est pas un gage de fiabilité.
C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe Nouvelle Gauche, je propose un amendement de clarification prévoyant de maintenir le choix de la langue par le demandeur jusqu’à l’entretien lui-même. Il ne faut pas donner à l’OFPRA la possibilité de choisir une langue qui ne correspondrait pas à celle de la personne concernée. Quel est l’avis de la commission ? Nous aborderons plus précisément le choix de la langue en préfecture à l’article 7. Je vous renvoie au débat que nous aurons alors. Avis défavorable. Vous auriez pu donner un avis sur notre amendement ! Il ne faut pas exagérer ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Monsieur Letchimy, l’amendement est-il maintenu ? Bien sûr. Je mets aux voix l’amendement no 297. (Il est procédé au scrutin.) (L’amendement no 297 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 140, 239, 596 et 484, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 140 et 239 sont identiques.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 140. Le présent projet de loi propose de figer le choix de la langue dans laquelle le demandeur d’asile sera entendu pendant toute la durée de la procédure, y compris en cas de recours devant la CNDA. De mon point de vue, il s’agit d’une restriction notable à l’exercice du droit du demandeur d’asile à être entendu dans une langue qu’il comprend. En effet, un demandeur d’asile peut être amené à déclarer qu’il comprend une langue même s’il ne la maîtrise pas entièrement. Or exposer son histoire, surtout quand elle est douloureuse, et comprendre les subtilités de questions posées au cours d’un entretien en vue d’examiner un besoin de protection supposent une maîtrise linguistique qui va bien au-delà de la simple compréhension de phrases de conversation courante. Le Défenseur des droits estime que les modifications envisagées vont à l’encontre des directives « Procédure » et déplore une nouvelle fois que l’objectif de réduction des délais prime sur l’exercice des droits des demandeurs d’asile. C’est la raison pour laquelle l’amendement propose de limiter cette disposition. La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l’amendement identique no 239. Cet article est en effet, comme l’a dit Mme la rapporteure, en lien avec l’article 7. Ce dernier prévoit que le demandeur d’asile est entendu tout au long de la procédure dans la langue pour laquelle il a manifesté une préférence lors de l’enregistrement de sa demande ou, à défaut, dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante, celle-ci pouvant être identifiée par l’OFPRA ou par la CNDA. Ainsi, le choix de la langue serait fixé pour tout le reste de la procédure lors de l’enregistrement de la demande d’asile, c’est-à-dire au guichet de la préfecture, au terme d’un bref entretien au cours duquel est remis à l’étranger le dossier à envoyer à l’OFPRA. Ce choix ne pourrait être contesté que lors du recours devant la CNDA. Or, lors de cette entrevue en préfecture, le demandeur d’asile n’est pas assisté et, à défaut d’interprète, peut ne pas saisir tous les termes de la question et sa réelle portée. Le projet de loi ne garantit donc pas l’accès effectif du demandeur à la procédure en cas de choix de la langue par l’administration dans la mesure où le critère de connaissance suffisante de la langue, tel que défini par le projet de loi, ne permet pas de s’assurer que le demandeur la comprend et s’exprime clairement dans ladite langue.
Il est donc proposé de reprendre la rédaction du a) du 1. de l’article 12 de la directive 2013/32/UE « Procédure », entrée en vigueur en 2015, car elle est garante d’une procédure équitable et précise que les demandeurs d’asile sont informés des procédures « dans une langue qu’ils comprennent ou dont il est raisonnable de supposer qu’ils la comprennent (…) ». Très bien ! La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour soutenir l’amendement no 596. Cet amendement vise à modifier l’alinéa 6 afin que le demandeur d’asile soit entendu non pas dans une langue dont il a une connaissance supposée suffisante mais bien dans une langue choisie par lui et qu’il comprenne. Certains dialectes ont difficilement des traducteurs à l’OFPRA et, dès lors, celui-ci suppose, au regard de la région d’origine du demandeur, qu’il comprend tel ou tel dialecte principal. Mais ce n’est pas forcément le cas. J’ai rencontré une jeune femme kurde, originaire de Géorgie à qui, faute de mieux, on avait proposé un traducteur de kurde… venant de Turquie, et c’était incompréhensible pour elle. Voilà pourquoi, quand il s’agit de recueillir le récit de vie de quelqu’un et que toutes les nuances langagières ont leur importance, il est nécessaire que la langue soit choisie par l’intéressé.
Je terminerai en apportant une précision à mes collègues du groupe LR, ce qui leur évitera de continuer à poser la question à M. le ministre d’État à propos d’un supposé secret : réécoutez ses propos en ouverture de nos débats, et vous constaterez que c’est lui-même qui a évoqué la possibilité de retravailler la question des mineurs. Mais qui fait la loi ? Ça évolue ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 484. L’administration doit avoir un droit de regard sur les prestations des traducteurs employés par les officines avec lesquels elle travaille ; elle doit s’ériger en autorité capable d’estimer si l’étranger a la connaissance suffisante de la langue : sinon cette disposition risque d’encourager le recours à des traducteurs de manière systématique et de générer des coûts importants. L’OFPRA, qui a souvent recours à des interprètes par l’intermédiaire de prestataires extérieurs, fait face à l’absence de disponibilité de ceux-ci dans de nombreux cas, ce qui ne fait que retarder la procédure. Cet amendement vise à sensibiliser l’État sur le recours auxdits interprètes. Ainsi, les interprètes auxquelles les autorités italiennes ont eu recours au début du mois de mars pour le cas d’étrangers érythréens se sont avérés être des informateurs au service du parti au pouvoir à Asmara ; l’immixtion de cette influence étrangère fait porter à l’administration italienne de lourdes responsabilités au regard de la sécurité de ses concitoyens comme de celle des étrangers accueillis. La France doit éviter d’avoir à faire face à ce cas de figure. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements en discussion commune ? Puisque plusieurs amendements portent sur le sujet, je vais traiter maintenant de cette question de la langue au lieu de le faire à l’article 7, comme je l’avais prévu. Il s’agit en effet de faire gagner du temps à l’OFPRA parce qu’il est très chronophage de lancer la procédure d’interprétariat, sachant qu’actuellement un premier choix linguistique est fait en préfecture, puis un deuxième au moment de la remise du dossier à l’OFPRA et qu’enfin, l’agent de protection choisit de manière encore plus fine. En indiquant le choix final dès l’étape de la préfecture, cela fera gagner énormément de temps – cela se compte en termes de mois. Mais je suis d’accord : il ne faut pas faire d’erreur. Mais l’OFPRA n’y a aucun intérêt puisque si l’entretien est impossible pour des raisons linguistiques, le demandeur devra être convoqué de nouveau. L’intérêt est donc de parvenir à une sélection qualitative des langues dès la préfecture, et l’OFPRA y travaille. Lorsque nous avons reçu les représentants syndicaux, celui de Force Ouvrière a dit qu’il était tout à fait disposé à appuyer la démarche du directeur général Pascal Brice visant à transférer au guichet unique la compétence de l’OFPRA pour choisir les langues d’entretien, et ce doit être fait dans les semaines à venir. Ainsi, il n’y aura pas d’erreur et on gagnera énormément de temps sur la procédure. L’avis est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable. La parole est à M. Pierre-Henri Dumont. Je suis désolé, mais il est nécessaire d’être transparent avec la représentation nationale. (Mouvements divers.) Or j’ai lu ce matin dans un article de Contexte qu’un groupe de travail allait être mis en place avec la majorité, en gage de bienveillance vis-à-vis de son aile gauche. Un nouveau gage de bienveillance après la vague de régularisations massives de 30 000 à 40 000 clandestins déjà accordées. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Et nous, nous faisons preuve de bienveillance en vous écoutant ! Ce groupe de travail viserait à élaborer une proposition de loi qui a priori interdirait la rétention des mineurs. (Mêmes mouvements.) Ce n’est pas le sujet des amendements ! Je pense que c’est complètement le sujet du projet de loi. Non ! Et pour répondre à notre collègue qui nous a interpellés tout à l’heure, comme quoi nous aurions des lubies, qu’il m’excuse de poser une question : monsieur le ministre d’État, pouvez-vous nous confirmer la création de ce groupe de travail interne à La République en marche… En quoi ça vous regarde ? …et la volonté finale, annoncée comme un cadeau offert à son aile gauche, de mettre fin à la rétention des mineurs ? La parole est à M. Bruno Fuchs. J’entends très souvent comme argument qu’il s’agit de gagner du temps. C’est en effet possible, mais à force d’en gagner, on fait des erreurs – même de bonne foi. L’OFPRA peut décider en toute bonne foi d’une langue que le migrant en fait ne comprend pas, qu’il a acceptée sans le savoir, nous avons chacun des exemples en tête. À cet égard, gagner du temps ne va pas dans le sens du respect de la dignité de la personne d’une part, met à mal sa capacité à défendre son dossier d’autre part. Le gain de temps ne peut servir d’argument pour tout. (Les amendements identiques nos 140 et 239 ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 596 et 484, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1102. Cet amendement a pour objet d’inscrire dans la loi une obligation de formation des interprètes qui participent à l’entretien du demandeur d’asile à l’OFPRA.
En effet, comme le rappelle le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés – HCR – : « il est essentiel que l’évaluation des demandes fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre soit menée avec sensibilité et de manière adéquate par des décisionnaires spécifiquement formés quant à ces problématiques. Étant donné les difficultés de fournir des preuves au niveau des demandes relatives à l’orientation sexuelle, l’évaluation de ces demandes repose souvent sur la crédibilité de la requérante ou du requérant ». En ce sens, le rôle de l’interprète dans la verbalisation du récit par le demandeur est absolument fondamental, puisqu’il participe à la mise en forme d’une histoire et d’un parcours de vie dont la crédibilité est ensuite évaluée par l’officier de protection.
L’OFPRA a, depuis quelques années, engagé un travail de formation des officiers de protection, mais également des interprètes, en les conviant à des ateliers de sensibilisation aux thématiques LGBTI.
Pourtant, l’avancée sur laquelle ont débouché les travaux en commission, et qui offre désormais la possibilité pour l’interprète d’être aux côtés du demandeur en cas de vidéoconférence, soulève un certain nombre de difficultés. Il sera désormais beaucoup plus difficile à l’OFPRA de gérer la formation d’interprètes œuvrant pour une multitude de prestataires répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin.
Or l’absence de formation peut entraîner une difficulté supplémentaire : il sera plus difficile au demandeur de verbaliser les persécutions qu’il a pu subir. En effet, l’interprète est souvent, comme le disait notre collègue Cécile Rilhac, issu de la même communauté linguistique ou culturelle que lui. Si, on peut le supposer, sa culture est homophobe ou transphobe, on imagine facilement que le demandeur éprouvera une difficulté particulière à raconter son parcours de vie, du fait du poids de son environnement immédiat comme des phénomènes de culpabilisation en jeu pendant l’entretien avec l’interprète. C’est pourquoi je propose d’inscrire cette obligation de formation dans la loi. Quel est l’avis de la commission ? Comme vous le disiez, des formations existent déjà pour les agents de protection comme pour les interprètes : il faut en effet qu’ils soient sensibilisés à ces questions. En outre, nous vous l’avons déjà dit, un groupe de travail a été mis en place sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Par ailleurs, une charte de l’interprétariat est actuellement en cours de finalisation afin de bien expliquer comment tenir compte de ces enjeux : il me semble par conséquent, cher collègue, que votre préoccupation est entièrement satisfaite.
Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est identique à celui de Mme la rapporteure. Monsieur Gérard, retirez-vous l’amendement ? Je le retire. Oh ! Vous n’avez qu’à le reprendre ! (L’amendement no 1102 est retiré.) La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1099. Cet amendement vise à spécifier la nature des associations pouvant accompagner le demandeur d’asile au cours de son entretien à l’OFPRA.
La rédaction actuelle du projet de loi fait référence aux associations de lutte contre les persécutions fondées sur le sexe, ce qui est redondant avec les associations de défense des droits des femmes déjà listées à l’article L. 723-6 du CESEDA.
Aussi, dans un souci de clarté rédactionnelle, et afin de garantir aux associations luttant contre les violences faites aux personnes transgenres le droit de pouvoir accompagner les demandeurs d’asile, cet amendement propose dans cet article de substituer aux mots : « le sexe », les mots : « l’identité de genre ».
En effet, cette expression-là est reconnue par les principes de Yogyakarta, relatifs à l’application du droit international des droits de l’homme en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre, et qui visent à la protection des personnes LGBTI et à l’interdiction de toute discrimination à leur encontre, conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Parce que le langage est éminemment politique, et parce que la terminologie aujourd’hui utilisée pour désigner les populations LGBTI renvoie aux luttes de longue haleine qu’elles ont menées pour se réapproprier leur identité, il semble plus pertinent d’utiliser le concept d’identité de genre, qui est institutionnalisé sur le plan international et unanimement reconnu par la communauté universitaire. Quel est l’avis de la commission ? Il me semble en effet important que des associations puissent être présentes et assister des demandeurs présentant cette vulnérabilité lors des entretiens à l’OFPRA : l’avis de la commission est favorable. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que Mme la rapporteure. (L’amendement no 1099 est adopté.) La parole est à Mme Nadia Essayan, pour soutenir l’amendement no 171. C’est en fonction de son histoire, de sa famille, de sa famille politique aussi et de ses convictions que chacun prend position sur ce sujet sensible qu’est l’asile. Étant moi-même née réfugiée et l’ayant été pendant trente ans, je ne suis pas toujours la ligne du MODEM, d’ailleurs pas seulement en raison de mon passé mais aussi parce que j’ai l’expérience de l’accompagnement des actuels migrants.
Mon amendement me semble, quoi qu’il en soit, dépasser les lignes partisanes et j’espère qu’il sera adopté. Il vise à ce que l’avocat, ou le représentant de l’association qui accompagne le demandeur d’asile puisse « intervenir tout au long de l’entretien et formuler des observations à son issue. » (M. Ugo Bernalicis applaudit.)
Afin d’assurer un meilleur équilibre entre les parties, le droit à l’intervention d’un avocat est prévu, y compris dans des matières réputées sensibles, comme c’est le cas dans le cadre de la procédure pénale, notamment lors de la garde à vue.
Cet amendement a pour seul objectif de garantir une meilleure compréhension ainsi qu’une collaboration satisfaisante entre le demandeur d’asile et l’officier de protection, afin notamment d’éviter des recours inutiles devant la CNDA.
Lorsque l’on a accompagné des demandeurs d’asile aux différentes étapes de leurs démarches, l’on sait évidemment que cet amendement est nécessaire et que le dispositif qu’il propose devrait même être étendu à la convocation en vue de l’assignation à résidence. Exactement ! En commission des lois, la rapporteure m’a répondu que la présence active de l’avocat ou de l’accompagnant pourrait gêner « la relation intime » qui se crée entre le demandeur d’asile et le juge. Ben voyons ! Mais cette supposée « relation intime » est-elle plus précieuse pour le requérant que le fait d’être accompagné par un conseiller avisé ? L’intervention de l’avocat est prévue dans toutes les procédures pénales : pourquoi ne le serait-elle pas au bénéfice d’un requérant qui n’est qu’un simple demandeur d’asile et dont la vie et l’avenir sont entre les mains de juges ou de préfets qui peuvent avoir une appréciation différente d’un même dossier ? Merci de conclure, madame la députée. C’est donc en faisant appel à votre sens de la justice que je vous demande de voter cet amendement et d’accorder ainsi au demandeur d’asile l’accompagnement qui lui est nécessaire à un moment décisif de son parcours. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR et NG, ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.) Quel est l’avis de la commission ? Chère collègue, vous créez une confusion en parlant de juges et de procédure pénale : les procédures en question à l’OFPRA sont menées par des officiers de protection à qui l’on peut faire une confiance totale pour garantir aux demandeurs la protection maximale dont ils ont besoin. Lorsque l’on assiste à un entretien à l’OFPRA, l’on voit que l’objectif des officiers de protection est bien d’entendre et de comprendre le récit de vie fait par le demandeur d’asile.
Le fait que des avocats et des représentants d’associations puissent assister à l’entretien et formuler des observations à son issue est suffisamment protecteur des droits du demandeur : l’avis de la commission est par conséquent défavorable. Je précise qu’il s’agit bien d’officiers de protection, dont je tiens d’ailleurs à saluer ici le professionnalisme et l’implication. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis de la commission ? Même avis que Mme la rapporteure. La parole est à M. Erwan Balanant. Pour aller dans le sens à la fois de la rapporteure – ou plutôt, car je préfère le terme, de la rapporteuse – et de ma collègue, je salue également, pour avoir assisté à un entretien de l’OFPRA, la qualité du travail de ses officiers de protection. Ils accomplissent un travail extraordinaire : à l’écoute des demandeurs d’asile, ils sont sensibles à leurs problématiques. Ils sont vraiment extraordinaires. Cela ne doit pas interdire que les demandeurs puissent être accompagnés. Aussi, madame la rapporteuse, si vous pouviez vous en remettre à la sagesse de l’assemblée, cela serait magnifique. Mes chers collègues, je vous rappelle que la féminisation des titres a été actée à l’Assemblée nationale et qu’il convient de dire madame la rapporteure. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et LR.) Bravo ! La parole est à M. Ugo Bernalicis. Il paraît que l’on peut également dire madame la rapporteuse. Mais, bon, je ne suis pas sectaire… Cher collègue, je vous prie de répondre à la commission ou au Gouvernement. Si votre intervention concerne un autre sujet, vous la ferez en un autre lieu et à un autre moment. Je réponds donc au Gouvernement et à la rapporteure. Voilà. Pourquoi, madame la rapporteure, alors que notre collègue a défendu son amendement de façon plus que sincère – elle sait de quoi elle parle concrètement et nous avons ressenti son émotion –, faire un parallèle avec la procédure pénale ?
À l’évidence, on est ici dans le cadre d’une procédure administrative, laquelle offre moins de garanties qu’une procédure pénale alors même qu’elle peut avoir pour conséquence une privation de liberté avec un placement en centre de rétention administrative, voire une expulsion. Mme Gourault n’est pas là : elle nous manque ! Ce n’est pas rien que d’être renvoyé dans son pays : une expulsion, ce n’est pas anecdotique et on ne prend pas une telle décision à la légère. Alors oui, il faut pouvoir, lors de ce type d’entretien, apporter des garanties au demandeur.
Oui, la proposition de notre collègue représenterait un progrès. Or tout le monde a envie d’aller dans le sens du progrès. Nous comptons beaucoup de collègues avocats dans cette assemblée : ils savent que la présence d’un avocat n’est pas superflue et qu’elle n’alourdit pas la procédure. J’ose espérer en tout cas qu’ils ne pensent pas le contraire. (L’amendement no 171 n’est pas adopté.)
(Protestations sur les bancs du groupe FI. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.) C’est quoi, ça ? Ça se compte ! Mes chers collègues, il n’y a aucun doute sur le résultat du vote au vu du nombre de mains qui se sont levées.
La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1100. Je vous propose, monsieur le président, de défendre en même temps l’amendement no 1101. Excellente idée ! L’amendement no 1101 propose d’étendre le champ des associations agréées pour accompagner les demandeurs d’asile lors de leur entretien à l’OFPRA aux associations de sensibilisation et de lutte contre le VIH-sida dans les départements, régions et collectivités d’outre-mer, notamment lorsque le fond de la demande a trait à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre.
Cette proposition est née du constat que le tissu associatif dédié aux questions LGBT est très peu développé, en tout cas nettement insuffisant en outre-mer, voire parfois totalement inexistant. En outre, certains territoires ne comptent aucun centre d’accueil pour demandeurs d’asile – c’est le cas en Guyane ou à Mayotte – et les plates-formes d’accueil qui y fonctionnent, comme celles gérées par la Croix-Rouge, ne sont pas forcément à même de prendre en charge les demandeurs d’asile LGBT ni de leur offrir, avec le personnel qualifié requis, un accompagnement approprié.
Or, du fait des phénomènes d’autocensure, de culpabilité ou de dissonance culturelle, les représentations sociales de l’homosexualité et de la transidentité étant très ancrées dans le contexte socioculturel d’origine, il est primordial pour un demandeur d’asile LGBT d’être accompagné par un tiers qui puisse lui apporter conseil et assistance afin de lui permettre de verbaliser son récit et de mettre les mots justes sur les persécutions qu’il a pu subir.
Aussi, dans un contexte insulaire caractérisé par une homophobie latente très marquée, je propose que les associations de lutte contre le VIH-sida, qui sont parmi les seules à accueillir au quotidien les populations LGBT, puissent pallier l’absence d’associations spécifiques. Quel est l’avis de la commission ? Cher collègue, le fait que nous venions d’adopter l’amendement no 1099 qui précise que le demandeur peut, lors de son entretien auprès de l’OFPRA, être accompagné du représentant d’une association de lutte contre les persécutions fondées sur l’identité de genre qui prenne en compte les vulnérabilités spécifiques à cette identité ; me semble satisfaire votre préoccupation.
Je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que Mme la rapporteure. Je demande le retrait : à défaut, avis défavorable. Monsieur Bernalicis, vous souhaitez répondre à la commission ou au Gouvernement ? Vous avez la parole. Je vois que notre collègue Raphaël Gérard, qui est l’auteur des deux amendements en débat, souhaite intervenir. Je lui cède la priorité. Monsieur Bernalicis, c’est moi qui distribue la parole dans cet hémicycle.
Monsieur Gérard, si vous souhaitez répondre à la commission ou au Gouvernement, vous avez la parole. Je retire l’amendement no 1100 mais je maintiens l’amendement no 1101.
(M. Bernalicis lève la main - Exclamations sur les bancs du groupe FI.) (L’amendement no 1100 est retiré.) (L’amendement no 1101 n’est pas adopté.) J’avais demandé la parole, monsieur le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 141. Il est défendu. (L’amendement no 141, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour un rappel au règlement. Au titre de l’article 58, alinéa 1, du règlement. Il me semble, monsieur le président, que nous pourrions conserver un minimum de convivialité et d’humanité dans cet hémicycle.
Je vous ai indiqué que, pour ne pas polluer le débat, je cédais la parole à notre collègue Raphaël Gérard qui souhaitait s’exprimer à nouveau sur ses deux amendements : il en a d’ailleurs retiré un. Il me semble qu’il avait la priorité.
Mais je souhaitais intervenir après lui : or vous avez refusé de me redonner la parole. Nous ne sommes pas à une minute près ! De toute façon, sur ce texte, nous allons être très en retard, puisque vous avez désorganisé le débat. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et LR.) Non, non, non. Si, honnêtement.
Monsieur le président, il n’est pas exclu que vous puissiez faire preuve d’un minimum de discernement. Ce n’est en effet pas du tout exclu. Par ailleurs, je vous rappelle que pour demander la parole, il suffit de lever la main de façon claire. Monsieur le président, il avait levé la main ! Lorsque vous avez indiqué que vous cédiez la parole à M. Gérard, nous avons poursuivi le cours de notre débat. Mais je vous donnerai la parole sans aucun problème lorsque vous souhaiterez répondre à la commission ou au Gouvernement sur un autre amendement.
Je vous fais en outre observer que j’ai largement laissé certains de nos collègues s’exprimer dans des interventions qui n’avaient rien à voir ni avec l’avis de la commission ni avec celui du Gouvernement et qui étaient donc totalement hors sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Comme vous le voyez, ce n’est pas une question de convivialité mais de respect de nos règles. Punition collective ! La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l’amendement no 238. Combinée à une réduction des délais de recours, la nouvelle modalité de notification porterait atteinte au caractère équitable de la procédure, comme l’indique le Conseil d’État dans son avis du 15 février 2018. Elle est par ailleurs contraire à la directive européenne qui dispose que les États membres veillent à une communication écrite des décisions portant sur les demandes de protection internationale. Il est donc proposé de conserver la notification par lettre recommandée avec accusé de réception et d’ajouter « et par tout autre moyen » ; cela permettra de garantir la réception précise et effective de la notification des décisions de l’OFPRA et d’éviter tout contentieux.
J’en profite pour indiquer que tous les pays européens dont la procédure est réduite prévoient l’assistance d’un avocat dès le début de celle-ci. Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà eu ce débat tout à l’heure. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable. La parole est à M. Erwan Balanant. Je trouve que c’est une très bonne idée de la part de l’OFPRA que d’accompagner l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception d’une notification par un moyen électronique. Cependant, si vous supprimez l’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception, je crains que cela n’ouvre une série de contentieux. En effet, les textes sont clairs : l’article L. 112-15 du code des relations entre le public et l’administration précise que la preuve de la réception doit être faite. Je le répète : bien que je trouve que le courrier électronique soit aussi un très bon moyen de notification, surtout quand on sait quelle est la vie des demandeurs d’asile, qui se trouvent souvent dans une situation précaire et ne disposent pas d’adresse postale, si l’on supprime la lettre recommandée avec accusé de réception, cela va donner lieu à des contentieux et freiner les procédures. La parole est à M. Ugo Bernalicis. L’objectif de cet amendement, qui rejoint d’ailleurs des amendements précédents, est de s’assurer que l’information arrive bien à son destinataire. Oui, dans cet hémicycle, on veut qu’une information arrive à son destinataire : n’est-ce pas extraordinaire ? Or nous trouvons que, dans l’état actuel du texte, la formule utilisée est beaucoup trop floue, trop vague, pour que l’on ait la certitude que c’est bien le cas.
La rédaction proposée via l’amendement me semble tout à fait intéressante : cela permettrait d’utiliser à la fois le courrier recommandé avec accusé de réception et un moyen complémentaire. D’ailleurs, de nombreuses administrations fonctionnent de la sorte dans leurs relations avec les usagers : aujourd’hui, l’envoi d’un courrier traditionnel est souvent assorti de celui d’un courriel ou d’un texto. Cela fonctionne très bien.
Tout à l’heure, on nous a expliqué que les personnes migrantes ne disposaient pas forcément d’adresse postale et qu’en conséquence, il était compliqué de leur envoyer un courrier. Mais enfin ! Nous sommes tout de même capables dans ce pays de domicilier des personnes, afin qu’elles puissent recevoir une lettre, sans pour autant qu’elles aient un domicile ! C’est dommage qu’elles n’en aient pas – nous sommes quant à nous pour que l’on accueille les personnes dignement –, mais c’est une autre histoire.
Je le répète : cet amendement me semble tout à fait intéressant. Monsieur le président, ce n’est pas un cours : il faut accélérer ! Il permettrait de développer le numérique cher à la majorité – qui met du « numérique » par-ci, du « numérique » par-là –, tout en s’assurant que l’on recevra bien quelque chose de tangible : un bon vieux courrier avec accusé de réception. (L’amendement no 238 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 142. Il est défendu, monsieur le président. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Je le mets donc aux voix. J’ai demandé la parole, monsieur le président ! Monsieur Schellenberger, vous tenez vraiment à répondre à la commission et au Gouvernement sur cet amendement ? Tout à fait, monsieur le président – mais je n’ai rien à dire de plus ! (Rires et applaudissements.) (L’amendement no 142 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 143. Je voudrais faire une dernière tentative. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG.) Bravo ! Résistez ! Le présent amendement vise à supprimer l’expression « par tout moyen ». Je reste persuadée qu’aujourd’hui, les demandeurs d’asile n’ont pas forcément accès à l’outil informatique, suivant l’endroit où ils se trouvent, et aussi leur capacité à utiliser cet outil. Prévoir une notification « par tout moyen » serait préjudiciable à l’exercice de leurs droits. Quel est l’avis de la commission ? Par cohérence avec ce que j’ai dit précédemment, avis défavorable. Et voilà ! C’est la cohérence de l’incohérence ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Je demande la parole ! Sur l’article 5, je suis saisi par les groupes Nouvelle Gauche et La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je mets maintenant aux voix l’amendement no 143. Rappel au règlement ! J’avais demandé la parole, monsieur le président ! Monsieur Bernalicis, voulez-vous répondre à la commission et au Gouvernement ou faire un rappel au règlement ? Je veux répondre ! Dans ce cas, vous avez la parole pour répondre aux arguments de Mme la rapporteure et de M. le ministre. Ce ne sera pas évident, puisqu’ils se sont contenté de répondre « défavorable ».
Monsieur le président, vous dites que pour demander la parole, il suffit de lever la main, mais encore faudrait-il que vous leviez les yeux pour voir quand nous levons la main ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Ne vous inquiétez pas, cher collègue :… Si, je m’inquiète ! …j’étais tout simplement attentif à votre demande de scrutin public. Super ! Je n’avais donc pas vu que vous leviez la main. Voici ce que je voudrais dire à la représentation nationale : imaginez que demain, on vous explique que les convocations aux auditions et aux réunions de commission se feront « par tout moyen ». (Exclamations et rires sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) C’est déjà ce qui se passe ! Je le sais bien, chers collègues !
Imaginez donc que vous loupiez le texto ou le courriel que l’on vous aura envoyé pour vous en informer : vous ne serez pas contents, parce que vous aurez raté la réunion. Vous demanderez à avoir une preuve que l’on vous a bien envoyé le message. Eh bien, dites-vous que c’est à peu près la même chose pour les demandeurs d’asile – et encore, nous jouissons ici du confort de l’Assemblée nationale. Là, on parle de personnes migrantes qui sont dans la détresse et qui se trouvent sur notre territoire. Qu’est-ce que cela vous coûte d’adopter un amendement de ce genre, qui vise simplement à s’assurer que la personne a bien reçu le message ? C’est scandaleux ! Auriez-vous laissé votre bon sens et votre humanité au vestiaire ? Faites un effort ! (Mme Valérie Rabault applaudit.) La parole est à M. Ian Boucard. Tout cela est un peu contradictoire. Tout à l’heure, Mme Obono nous expliquait, avec raison d’ailleurs, que les réfugiés n’avaient pas toujours de domicile, donc a fortiori de domicile pour recevoir le courrier. Envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception à des gens qui n’ont pas de domicile pour recevoir le courrier ou envoyer un courriel à des gens qui sont sans électricité ou sans moyen de se connecter à l’internet, de toute façon, cela pose problème. Ce problème existe depuis le début, et que l’on adopte ou pas cet article, il se posera encore après. On n’aura fait que pratiquer la dématérialisation des problèmes ! (L’amendement no 143 n’est pas adopté.)
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour soutenir l’amendement no 296. Il s’agit de la même question. Nous proposons de substituer aux mots « par tout moyen » les mots « selon le ou les moyens choisis par ce dernier ». Le Conseil d’État lui-même vous a mis en garde au sujet des effets que pourrait avoir cette mesure, car tout dépend des conditions matérielles dans lesquelles vivent les demandeurs d’asile : ils n’ont pas toujours un accès continu aux moyens de communication modernes – téléphone portable, internet.
Voici ce qu’écrit le Conseil d’État : « Le plus grand soin devra être apporté au choix des moyens techniques de sorte qu’une notification par voie dématérialisée ne puisse être opposée que dans la mesure où il est démontré qu’elle a été opérée personnellement et qu’il est possible de garder une trace tant des opérations de notification que de la prise de connaissance par l’intéressé. » Pour satisfaire à cette exigence, il faut que le demandeur puisse choisir lui-même le moyen par lequel il sera tenu informé. Cela nous semble être le minimum. La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour soutenir l’amendement no 634. Dans un objectif de simplification administrative et de célérité des procédures, le projet de loi autorise l’OFPRA à adresser la convocation à l’entretien individuel « par tout moyen ». Cela entraîne une forme d’insécurité juridique, et ne permet de contrôler ni l’envoi ni la réception de la convocation – alors même que l’entretien à l’OFPRA revêt le caractère d’une garantie essentielle à l’instruction d’une demande d’asile.
Par cet amendement, nous proposons de préciser, à l’alinéa 5, que la convocation soit envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception, et « en complément » par tout autre moyen – lettre, SMS, courriel… La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l’amendement no 237. Cet amendement va dans le même sens que les précédents. Il vise à remplacer la formule « par tout moyen » par la formule « par lettre recommandée avec accusé de réception et par tout autre moyen ».
La convocation « par tout moyen » entraîne une insécurité juridique, sachant que les exilés sont vulnérables et souvent matériellement dépourvus. Ils n’ont pas d’accès direct à internet, et partagent souvent des téléphones mobiles. Par ailleurs leurs conditions d’hébergement sont précaires.
Insérer l’expression « par tout moyen » dans la loi revient à refuser de définir les modalités de convocation du demandeur d’asile. Cette formule ne permet pas le contrôle de l’envoi ni de la réception de la convocation, alors même que l’entretien à l’OFPRA est une étape essentielle de l’instruction d’une demande d’asile garantissant le respect des droits de la défense, reconnus tant par le CESEDA que par les directives européennes, la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – et donc par la Cour de justice de l’Union européenne.
Sans définition précise des modalités de convocation, le principe de confidentialité et de personnalité de la convocation ne sera pas garanti. Nous proposons donc, par cet amendement, de conserver la convocation par lettre recommandée avec accusé de réception, en ajoutant les mots « et par tout autre moyen », afin de s’assurer de la bonne réception de la convocation et d’éviter tout contentieux. Sur l’amendement no 296, je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 816. Monsieur le ministre, cet amendement est de la même veine que les précédents, aussi serai-je bref. Je répète simplement que ce mode d’envoi de la convocation ne respecte pas le principe de confidentialité que le Conseil constitutionnel a érigé, par une décision de 2003, au rang de « garantie essentielle du droit d’asile », principe de valeur constitutionnelle qui implique notamment que les demandeurs d’asile bénéficient d’une protection particulière.
Je le répète, le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi écrit : « Le plus grand soin devra être apporté au choix des moyens techniques de sorte qu’une notification par voie dématérialisée ne puisse être opposée que dans la mesure où il est démontré qu’elle a été opérée personnellement et qu’il est possible de garder une trace tant des opérations de notification que de la prise de connaissance par l’intéressé. À défaut, la combinaison d’un délai très bref avec des modalités incertaines de notification pourrait être regardée comme portant atteinte au caractère équitable de la procédure. »
Aux termes de cet amendement de repli, la convocation aux entretiens personnels de l’OFPRA devra être systématiquement envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception. Nous proposons d’ajouter la même exigence pour les différentes notifications envoyées par l’OFPRA, c’est-à-dire les notifications relatives à l’octroi ou au refus de protection, prévues par l’article L. 723-8 du CESEDA, les clôtures, les fins de protection et l’octroi du statut d’apatride en application de l’article L. 812-3 du même code. Ces notifications devront ainsi, elles aussi, être envoyées par lettre recommandée avec accusé de réception, procédé garantissant la confidentialité et permettant de s’assurer de la réception de la notification par le demandeur d’asile. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements en discussion commune ? Avis défavorable, pour les raisons que j’ai déjà développées au sujet des amendements précédents. Ces amendements sont très différents des précédents ! Lisez-les, avant de donner un avis défavorable ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. La parole est à M. Bruno Fuchs. Je comprends bien qu’il est nécessaire de réduire les délais : nous sommes d’accord avec cette logique. Mais si le demandeur n’a pas connaissance de la convocation qui lui a été envoyée, alors le délai est radicalement raccourci ! Un certain nombre de procédures s’éteindront mécaniquement, d’elles-mêmes ; avec une telle méthode, c’est sûr, on réduira non seulement les délais mais aussi le nombre de procédures ! Il a raison ! Madame la rapporteure, vous avez dit que dans la plupart des cas, le destinataire prend déjà connaissance de la convocation par un autre biais que par courrier recommandé. Mais ce n’est pas satisfaisant : il faut que cet autre système fonctionne dans tous les cas, à l’unité près !
Certes, le patron de La Poste a annoncé qu’en 2030 il n’y aura certainement plus de lettres papier. Il faut donc envisager d’autres moyens pour notifier aux demandeurs d’asile leur convocation. Cela étant, il faut que chacun puisse, de façon équitable, faire valoir l’intégralité de ses droits. Or pour s’assurer que le demandeur a bien reçu l’avis, il faut en recueillir la preuve formelle. La parole est à Mme Cécile Untermaier. Ces amendements sont de bon sens. Ils résultent de nos échanges avec l’OFPRA, lequel est tout à fait favorable à cette idée. Ils permettraient d’éviter un nombre de contentieux considérable – et l’on sait combien de contentieux naissent de convocations qui ne sont pas arrivées.
Le groupe Nouvelle Gauche ne comprendrait pas que cette proposition modeste, portant simplement sur le mode de convocation, n’aboutisse pas. Nous sommes vraiment surpris de la résistance que vous opposez à toute amélioration de ce texte. Il ne s’agit pourtant, reconnaissez-le, que d’une proposition bénigne.
Ces quatre amendements, provenant de quatre groupes différents, visent simplement à garantir la réception de la convocation et donc à faciliter le travail de l’OFPRA. Relisez-les sincèrement, et vous donnerez un avis favorable ! Très bien ! La parole est à M. Raphaël Schellenberger. Ces amendements reposent sur un postulat contestable, sur une fausse évidence. Leurs auteurs semblent considérer qu’il est plus facile, aujourd’hui, d’avoir une adresse postale qu’un numéro de téléphone portable : je ne suis pas sûr que ce soit très vrai, notamment pour les demandeurs d’asile.
Monsieur le président de l’Assemblée nationale, je me réjouis de votre présence au perchoir ce soir. Cet après-midi, lorsque vous êtes venu, vous nous avez, entre autres choses, communiqué une information importante : le refus de notre demande d’un scrutin solennel sur ce texte. Ce soir, votre présence incitera peut-être M. le ministre d’État à nous donner enfin les informations que nous demandons depuis le début de l’examen de ce texte à propos du plan de régularisation de masse d’étrangers en situation irrégulière dont a fait état la presse. Nous voulons aussi qu’il nous réponde à propos de l’absence d’étude d’impact sur le regroupement familial, ainsi que sur ce que nous avons découvert cet après-midi, à savoir l’existence d’une stratégie cachée concernant les mineurs étrangers non accompagnés, par le biais d’une nouvelle proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Je vous fais remarquer, monsieur le député, que votre intervention n’était pas vraiment une réponse à la commission ou au Gouvernement sur l’amendement.
La parole est à M. Florent Boudié. Le groupe La République en marche a examiné avec beaucoup d’attention la proposition figurant dans le projet de loi. Lors des auditions coordonnées par Mme la rapporteure, des remarques et des observations ont été faites, qui nous ont permis de creuser le sujet.
Il est bien question ici de l’envoi des convocations, et non des décisions : il me semble qu’il y a sur ce point une confusion. Je le répète : l’alinéa 5 de cet article, que vos amendements visent à modifier, ne porte que sur les convocations de l’OFPRA et non sur ses décisions.
Je rappelle qu’en l’état actuel du droit, si un ressortissant étranger ne se présente pas à l’entretien individuel faute d’avoir eu connaissance de sa convocation, il peut demander à rouvrir son dossier à n’importe quel moment pendant neuf mois. Cette garantie, qui est déjà prévue à l’heure actuelle, est très importante : il faut en tenir compte au moment d’évaluer la disposition proposée par le Gouvernement.
Par ailleurs, cher collègue Fuchs, chaque demandeur d’asile est d’abord accueilli dans une PADA, où il est généralement domicilié pour recevoir l’ensemble des informations, et il est accompagné en permanence par cette PADA.
Compte tenu de la possibilité pour le demandeur de rouvrir son dossier, à n’importe quel moment pendant neuf mois, nous considérons que les garanties sont suffisantes. Quant à la notification des décisions, nous en parlerons tout à l’heure : nous avons obtenu, sur ce point, les garanties qui nous semblaient absolument nécessaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Je mets aux voix l’amendement no 296. (Il est procédé au scrutin.) (L’amendement no 296 n’est pas adopté.) (Les amendements nos 634, 237 et 816, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) C’est désespérant ! La parole est à Mme Sandrine Mörch, pour soutenir l’amendement no 698. Cet amendement vise à aligner les garanties prévues pour la convocation des demandeurs sur celles prévues pour la notification des décisions, à savoir la confidentialité et la réception personnelle par le demandeur. Il est important que celui-ci puisse prouver, s’il n’a pas reçu la convocation, que son absence à l’entretien n’est pas de son fait.
Par ailleurs il faudra veiller qu’il dispose bien du moyen de communication utilisé par l’OFPRA. Il ne faut pas oublier que les demandeurs n’ont pas de compte courant, donc pas d’abonnement téléphonique. Ils utilisent généralement des téléphones à carte, qu’ils perdent parfois ou se font voler en raison de leurs conditions de vie : cela les amène à changer de numéro, ce qu’il faut prendre en compte. Quel est l’avis de la commission ? La notification n’a pas la même valeur juridique, quand il s’agit d’une convocation ou de la transmission d’une décision. Néanmoins, par cohérence avec l’amendement adopté en commission, je donne un avis favorable à votre amendement. Très bien ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Ah ! Ça cache quelque chose ! La parole est à M. Patrick Hetzel. Nous sommes un peu surpris par cette évolution manifeste de la position de la rapporteure et du Gouvernement – de la première plus que du second, en tout cas. Si votre position sur l’ensemble de ce texte évolue, nous aimerions le savoir, madame la rapporteure ! Même chose pour vous, monsieur le ministre : quelle est l’orientation du Gouvernement sur ce texte ? La majorité est plutôt divisée sur ce texte. Essayez-vous, grâce à des amendements de ce type, de la ressouder ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous rappelle que nous attendons toujours une réponse au sujet de la régularisation de 40 000 sans-papiers. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Oui, je vous le demande encore une fois, car Mme Gourault n’a pas voulu nous répondre hier soir : nous répétons que la représentation nationale a le droit d’être informée sur ce point. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Merci, cher collègue. Essayons de nous en tenir aux arguments pour ou contre les amendements en débat !
La parole est à M. Raphaël Schellenberger. Bien sûr pour s’exprimer sur l’amendement ! Le spectacle auquel nous venons d’assister est pour le moins surprenant. Nous comprenons bien, madame la rapporteure, que vous devez donner des gages à la sensibilité néo-socialiste, c’est-à-dire macroniste de gauche, de votre majorité. (Rires et exclamations sur divers bancs des groupes LaREM et NG.) Les socialistes, ils sont dans notre groupe ! Pas ailleurs ! Ce qui nous rassure, c’est que cela commence à se faire au vu et au su de tous : cela n’a plus rien de caché, cela se fait, enfin, dans l’hémicycle. Et peut-être aurons-nous du coup enfin ce soir les réponses aux trois questions que nous vous posons depuis cet après-midi : quid de la régularisation de 10 % des 400 000 étrangers en situation irrégulière sur notre territoire ? Quid de l’étude d’impact sur le regroupement familial ? Quid de la stratégie cachée concernant les mineurs non accompagnés qui déstructurera tout ce que nous sommes en train de construire ce soir ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.) (L’amendement no 698 est adopté.) La parole est à M. Pierre Vatin, pour soutenir l’amendement no 92. Monsieur le ministre d’État, madame la rapporteure, j’espère que cet amendement vous séduira comme le précédent puisqu’il a le même objet. L’article 5 permet à l’OFPRA de notifier les convocations par tout moyen, mais cela n’assure pas le contrôle de l’envoi ni de la réception de la convocation. C’est donc facteur d’insécurité pour le demandeur. Aussi me semble-t-il indispensable que ledit demandeur n’ait pas, le cas échéant, à apporter la preuve de la réception de la convocation ou de sa non-réception. Cet amendement vise à renforcer la protection du demandeur en cas de litige dans le déroulé de la procédure. Quel est l’avis de la commission ? Je ne comprends pas bien ce que vous demandez, cher collègue. Cela me paraît quelque peu compliqué. En effet. Sagesse ! Je ne vois pas quel serait l’intérêt de votre amendement, sachant que l’OFPRA a tout intérêt à garder des traces de l’envoi qu’il a effectué. Avis défavorable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe LR.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Si cet amendement était adopté, il ferait peser sur l’OFPRA la charge de la preuve de l’envoi de la notification. Avis défavorable. (L’amendement no 92 n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 297 qui suit, je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir cet amendement. Monsieur le ministre d’État, vous savez que la question de la langue est essentielle et, en l’occurrence, la possibilité de pouvoir communiquer parfaitement est particulièrement importante. Or il me semble que la rédaction de l’alinéa 6 prête à confusion. En effet, il est prévu que le demandeur puisse s’exprimer « dans la langue de son choix [excellente disposition bien rédigée] ou dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante ». Lors des premiers contacts, au moment du dépôt de dossier, on demande généralement à l’immigré de bien vouloir indiquer quelle langue il choisit, et celui-ci déclare souvent le français dès lors qu’il le parle un peu, même si ce n’est pas un gage de fiabilité.
C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe Nouvelle Gauche, je propose un amendement de clarification prévoyant de maintenir le choix de la langue par le demandeur jusqu’à l’entretien lui-même. Il ne faut pas donner à l’OFPRA la possibilité de choisir une langue qui ne correspondrait pas à celle de la personne concernée. Quel est l’avis de la commission ? Nous aborderons plus précisément le choix de la langue en préfecture à l’article 7. Je vous renvoie au débat que nous aurons alors. Avis défavorable. Vous auriez pu donner un avis sur notre amendement ! Il ne faut pas exagérer ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Monsieur Letchimy, l’amendement est-il maintenu ? Bien sûr. Je mets aux voix l’amendement no 297. (Il est procédé au scrutin.) (L’amendement no 297 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 140, 239, 596 et 484, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 140 et 239 sont identiques.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 140. Le présent projet de loi propose de figer le choix de la langue dans laquelle le demandeur d’asile sera entendu pendant toute la durée de la procédure, y compris en cas de recours devant la CNDA. De mon point de vue, il s’agit d’une restriction notable à l’exercice du droit du demandeur d’asile à être entendu dans une langue qu’il comprend. En effet, un demandeur d’asile peut être amené à déclarer qu’il comprend une langue même s’il ne la maîtrise pas entièrement. Or exposer son histoire, surtout quand elle est douloureuse, et comprendre les subtilités de questions posées au cours d’un entretien en vue d’examiner un besoin de protection supposent une maîtrise linguistique qui va bien au-delà de la simple compréhension de phrases de conversation courante. Le Défenseur des droits estime que les modifications envisagées vont à l’encontre des directives « Procédure » et déplore une nouvelle fois que l’objectif de réduction des délais prime sur l’exercice des droits des demandeurs d’asile. C’est la raison pour laquelle l’amendement propose de limiter cette disposition. La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l’amendement identique no 239. Cet article est en effet, comme l’a dit Mme la rapporteure, en lien avec l’article 7. Ce dernier prévoit que le demandeur d’asile est entendu tout au long de la procédure dans la langue pour laquelle il a manifesté une préférence lors de l’enregistrement de sa demande ou, à défaut, dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante, celle-ci pouvant être identifiée par l’OFPRA ou par la CNDA. Ainsi, le choix de la langue serait fixé pour tout le reste de la procédure lors de l’enregistrement de la demande d’asile, c’est-à-dire au guichet de la préfecture, au terme d’un bref entretien au cours duquel est remis à l’étranger le dossier à envoyer à l’OFPRA. Ce choix ne pourrait être contesté que lors du recours devant la CNDA. Or, lors de cette entrevue en préfecture, le demandeur d’asile n’est pas assisté et, à défaut d’interprète, peut ne pas saisir tous les termes de la question et sa réelle portée. Le projet de loi ne garantit donc pas l’accès effectif du demandeur à la procédure en cas de choix de la langue par l’administration dans la mesure où le critère de connaissance suffisante de la langue, tel que défini par le projet de loi, ne permet pas de s’assurer que le demandeur la comprend et s’exprime clairement dans ladite langue.
Il est donc proposé de reprendre la rédaction du a) du 1. de l’article 12 de la directive 2013/32/UE « Procédure », entrée en vigueur en 2015, car elle est garante d’une procédure équitable et précise que les demandeurs d’asile sont informés des procédures « dans une langue qu’ils comprennent ou dont il est raisonnable de supposer qu’ils la comprennent (…) ». Très bien ! La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour soutenir l’amendement no 596. Cet amendement vise à modifier l’alinéa 6 afin que le demandeur d’asile soit entendu non pas dans une langue dont il a une connaissance supposée suffisante mais bien dans une langue choisie par lui et qu’il comprenne. Certains dialectes ont difficilement des traducteurs à l’OFPRA et, dès lors, celui-ci suppose, au regard de la région d’origine du demandeur, qu’il comprend tel ou tel dialecte principal. Mais ce n’est pas forcément le cas. J’ai rencontré une jeune femme kurde, originaire de Géorgie à qui, faute de mieux, on avait proposé un traducteur de kurde… venant de Turquie, et c’était incompréhensible pour elle. Voilà pourquoi, quand il s’agit de recueillir le récit de vie de quelqu’un et que toutes les nuances langagières ont leur importance, il est nécessaire que la langue soit choisie par l’intéressé.
Je terminerai en apportant une précision à mes collègues du groupe LR, ce qui leur évitera de continuer à poser la question à M. le ministre d’État à propos d’un supposé secret : réécoutez ses propos en ouverture de nos débats, et vous constaterez que c’est lui-même qui a évoqué la possibilité de retravailler la question des mineurs. Mais qui fait la loi ? Ça évolue ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 484. L’administration doit avoir un droit de regard sur les prestations des traducteurs employés par les officines avec lesquels elle travaille ; elle doit s’ériger en autorité capable d’estimer si l’étranger a la connaissance suffisante de la langue : sinon cette disposition risque d’encourager le recours à des traducteurs de manière systématique et de générer des coûts importants. L’OFPRA, qui a souvent recours à des interprètes par l’intermédiaire de prestataires extérieurs, fait face à l’absence de disponibilité de ceux-ci dans de nombreux cas, ce qui ne fait que retarder la procédure. Cet amendement vise à sensibiliser l’État sur le recours auxdits interprètes. Ainsi, les interprètes auxquelles les autorités italiennes ont eu recours au début du mois de mars pour le cas d’étrangers érythréens se sont avérés être des informateurs au service du parti au pouvoir à Asmara ; l’immixtion de cette influence étrangère fait porter à l’administration italienne de lourdes responsabilités au regard de la sécurité de ses concitoyens comme de celle des étrangers accueillis. La France doit éviter d’avoir à faire face à ce cas de figure. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements en discussion commune ? Puisque plusieurs amendements portent sur le sujet, je vais traiter maintenant de cette question de la langue au lieu de le faire à l’article 7, comme je l’avais prévu. Il s’agit en effet de faire gagner du temps à l’OFPRA parce qu’il est très chronophage de lancer la procédure d’interprétariat, sachant qu’actuellement un premier choix linguistique est fait en préfecture, puis un deuxième au moment de la remise du dossier à l’OFPRA et qu’enfin, l’agent de protection choisit de manière encore plus fine. En indiquant le choix final dès l’étape de la préfecture, cela fera gagner énormément de temps – cela se compte en termes de mois. Mais je suis d’accord : il ne faut pas faire d’erreur. Mais l’OFPRA n’y a aucun intérêt puisque si l’entretien est impossible pour des raisons linguistiques, le demandeur devra être convoqué de nouveau. L’intérêt est donc de parvenir à une sélection qualitative des langues dès la préfecture, et l’OFPRA y travaille. Lorsque nous avons reçu les représentants syndicaux, celui de Force Ouvrière a dit qu’il était tout à fait disposé à appuyer la démarche du directeur général Pascal Brice visant à transférer au guichet unique la compétence de l’OFPRA pour choisir les langues d’entretien, et ce doit être fait dans les semaines à venir. Ainsi, il n’y aura pas d’erreur et on gagnera énormément de temps sur la procédure. L’avis est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable. La parole est à M. Pierre-Henri Dumont. Je suis désolé, mais il est nécessaire d’être transparent avec la représentation nationale. (Mouvements divers.) Or j’ai lu ce matin dans un article de Contexte qu’un groupe de travail allait être mis en place avec la majorité, en gage de bienveillance vis-à-vis de son aile gauche. Un nouveau gage de bienveillance après la vague de régularisations massives de 30 000 à 40 000 clandestins déjà accordées. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Et nous, nous faisons preuve de bienveillance en vous écoutant ! Ce groupe de travail viserait à élaborer une proposition de loi qui a priori interdirait la rétention des mineurs. (Mêmes mouvements.) Ce n’est pas le sujet des amendements ! Je pense que c’est complètement le sujet du projet de loi. Non ! Et pour répondre à notre collègue qui nous a interpellés tout à l’heure, comme quoi nous aurions des lubies, qu’il m’excuse de poser une question : monsieur le ministre d’État, pouvez-vous nous confirmer la création de ce groupe de travail interne à La République en marche… En quoi ça vous regarde ? …et la volonté finale, annoncée comme un cadeau offert à son aile gauche, de mettre fin à la rétention des mineurs ? La parole est à M. Bruno Fuchs. J’entends très souvent comme argument qu’il s’agit de gagner du temps. C’est en effet possible, mais à force d’en gagner, on fait des erreurs – même de bonne foi. L’OFPRA peut décider en toute bonne foi d’une langue que le migrant en fait ne comprend pas, qu’il a acceptée sans le savoir, nous avons chacun des exemples en tête. À cet égard, gagner du temps ne va pas dans le sens du respect de la dignité de la personne d’une part, met à mal sa capacité à défendre son dossier d’autre part. Le gain de temps ne peut servir d’argument pour tout. (Les amendements identiques nos 140 et 239 ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 596 et 484, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1102. Cet amendement a pour objet d’inscrire dans la loi une obligation de formation des interprètes qui participent à l’entretien du demandeur d’asile à l’OFPRA.
En effet, comme le rappelle le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés – HCR – : « il est essentiel que l’évaluation des demandes fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre soit menée avec sensibilité et de manière adéquate par des décisionnaires spécifiquement formés quant à ces problématiques. Étant donné les difficultés de fournir des preuves au niveau des demandes relatives à l’orientation sexuelle, l’évaluation de ces demandes repose souvent sur la crédibilité de la requérante ou du requérant ». En ce sens, le rôle de l’interprète dans la verbalisation du récit par le demandeur est absolument fondamental, puisqu’il participe à la mise en forme d’une histoire et d’un parcours de vie dont la crédibilité est ensuite évaluée par l’officier de protection.
L’OFPRA a, depuis quelques années, engagé un travail de formation des officiers de protection, mais également des interprètes, en les conviant à des ateliers de sensibilisation aux thématiques LGBTI.
Pourtant, l’avancée sur laquelle ont débouché les travaux en commission, et qui offre désormais la possibilité pour l’interprète d’être aux côtés du demandeur en cas de vidéoconférence, soulève un certain nombre de difficultés. Il sera désormais beaucoup plus difficile à l’OFPRA de gérer la formation d’interprètes œuvrant pour une multitude de prestataires répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin.
Or l’absence de formation peut entraîner une difficulté supplémentaire : il sera plus difficile au demandeur de verbaliser les persécutions qu’il a pu subir. En effet, l’interprète est souvent, comme le disait notre collègue Cécile Rilhac, issu de la même communauté linguistique ou culturelle que lui. Si, on peut le supposer, sa culture est homophobe ou transphobe, on imagine facilement que le demandeur éprouvera une difficulté particulière à raconter son parcours de vie, du fait du poids de son environnement immédiat comme des phénomènes de culpabilisation en jeu pendant l’entretien avec l’interprète. C’est pourquoi je propose d’inscrire cette obligation de formation dans la loi. Quel est l’avis de la commission ? Comme vous le disiez, des formations existent déjà pour les agents de protection comme pour les interprètes : il faut en effet qu’ils soient sensibilisés à ces questions. En outre, nous vous l’avons déjà dit, un groupe de travail a été mis en place sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Par ailleurs, une charte de l’interprétariat est actuellement en cours de finalisation afin de bien expliquer comment tenir compte de ces enjeux : il me semble par conséquent, cher collègue, que votre préoccupation est entièrement satisfaite.
Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est identique à celui de Mme la rapporteure. Monsieur Gérard, retirez-vous l’amendement ? Je le retire. Oh ! Vous n’avez qu’à le reprendre ! (L’amendement no 1102 est retiré.) La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1099. Cet amendement vise à spécifier la nature des associations pouvant accompagner le demandeur d’asile au cours de son entretien à l’OFPRA.
La rédaction actuelle du projet de loi fait référence aux associations de lutte contre les persécutions fondées sur le sexe, ce qui est redondant avec les associations de défense des droits des femmes déjà listées à l’article L. 723-6 du CESEDA.
Aussi, dans un souci de clarté rédactionnelle, et afin de garantir aux associations luttant contre les violences faites aux personnes transgenres le droit de pouvoir accompagner les demandeurs d’asile, cet amendement propose dans cet article de substituer aux mots : « le sexe », les mots : « l’identité de genre ».
En effet, cette expression-là est reconnue par les principes de Yogyakarta, relatifs à l’application du droit international des droits de l’homme en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre, et qui visent à la protection des personnes LGBTI et à l’interdiction de toute discrimination à leur encontre, conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Parce que le langage est éminemment politique, et parce que la terminologie aujourd’hui utilisée pour désigner les populations LGBTI renvoie aux luttes de longue haleine qu’elles ont menées pour se réapproprier leur identité, il semble plus pertinent d’utiliser le concept d’identité de genre, qui est institutionnalisé sur le plan international et unanimement reconnu par la communauté universitaire. Quel est l’avis de la commission ? Il me semble en effet important que des associations puissent être présentes et assister des demandeurs présentant cette vulnérabilité lors des entretiens à l’OFPRA : l’avis de la commission est favorable. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que Mme la rapporteure. (L’amendement no 1099 est adopté.) La parole est à Mme Nadia Essayan, pour soutenir l’amendement no 171. C’est en fonction de son histoire, de sa famille, de sa famille politique aussi et de ses convictions que chacun prend position sur ce sujet sensible qu’est l’asile. Étant moi-même née réfugiée et l’ayant été pendant trente ans, je ne suis pas toujours la ligne du MODEM, d’ailleurs pas seulement en raison de mon passé mais aussi parce que j’ai l’expérience de l’accompagnement des actuels migrants.
Mon amendement me semble, quoi qu’il en soit, dépasser les lignes partisanes et j’espère qu’il sera adopté. Il vise à ce que l’avocat, ou le représentant de l’association qui accompagne le demandeur d’asile puisse « intervenir tout au long de l’entretien et formuler des observations à son issue. » (M. Ugo Bernalicis applaudit.)
Afin d’assurer un meilleur équilibre entre les parties, le droit à l’intervention d’un avocat est prévu, y compris dans des matières réputées sensibles, comme c’est le cas dans le cadre de la procédure pénale, notamment lors de la garde à vue.
Cet amendement a pour seul objectif de garantir une meilleure compréhension ainsi qu’une collaboration satisfaisante entre le demandeur d’asile et l’officier de protection, afin notamment d’éviter des recours inutiles devant la CNDA.
Lorsque l’on a accompagné des demandeurs d’asile aux différentes étapes de leurs démarches, l’on sait évidemment que cet amendement est nécessaire et que le dispositif qu’il propose devrait même être étendu à la convocation en vue de l’assignation à résidence. Exactement ! En commission des lois, la rapporteure m’a répondu que la présence active de l’avocat ou de l’accompagnant pourrait gêner « la relation intime » qui se crée entre le demandeur d’asile et le juge. Ben voyons ! Mais cette supposée « relation intime » est-elle plus précieuse pour le requérant que le fait d’être accompagné par un conseiller avisé ? L’intervention de l’avocat est prévue dans toutes les procédures pénales : pourquoi ne le serait-elle pas au bénéfice d’un requérant qui n’est qu’un simple demandeur d’asile et dont la vie et l’avenir sont entre les mains de juges ou de préfets qui peuvent avoir une appréciation différente d’un même dossier ? Merci de conclure, madame la députée. C’est donc en faisant appel à votre sens de la justice que je vous demande de voter cet amendement et d’accorder ainsi au demandeur d’asile l’accompagnement qui lui est nécessaire à un moment décisif de son parcours. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR et NG, ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.) Quel est l’avis de la commission ? Chère collègue, vous créez une confusion en parlant de juges et de procédure pénale : les procédures en question à l’OFPRA sont menées par des officiers de protection à qui l’on peut faire une confiance totale pour garantir aux demandeurs la protection maximale dont ils ont besoin. Lorsque l’on assiste à un entretien à l’OFPRA, l’on voit que l’objectif des officiers de protection est bien d’entendre et de comprendre le récit de vie fait par le demandeur d’asile.
Le fait que des avocats et des représentants d’associations puissent assister à l’entretien et formuler des observations à son issue est suffisamment protecteur des droits du demandeur : l’avis de la commission est par conséquent défavorable. Je précise qu’il s’agit bien d’officiers de protection, dont je tiens d’ailleurs à saluer ici le professionnalisme et l’implication. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis de la commission ? Même avis que Mme la rapporteure. La parole est à M. Erwan Balanant. Pour aller dans le sens à la fois de la rapporteure – ou plutôt, car je préfère le terme, de la rapporteuse – et de ma collègue, je salue également, pour avoir assisté à un entretien de l’OFPRA, la qualité du travail de ses officiers de protection. Ils accomplissent un travail extraordinaire : à l’écoute des demandeurs d’asile, ils sont sensibles à leurs problématiques. Ils sont vraiment extraordinaires. Cela ne doit pas interdire que les demandeurs puissent être accompagnés. Aussi, madame la rapporteuse, si vous pouviez vous en remettre à la sagesse de l’assemblée, cela serait magnifique. Mes chers collègues, je vous rappelle que la féminisation des titres a été actée à l’Assemblée nationale et qu’il convient de dire madame la rapporteure. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et LR.) Bravo ! La parole est à M. Ugo Bernalicis. Il paraît que l’on peut également dire madame la rapporteuse. Mais, bon, je ne suis pas sectaire… Cher collègue, je vous prie de répondre à la commission ou au Gouvernement. Si votre intervention concerne un autre sujet, vous la ferez en un autre lieu et à un autre moment. Je réponds donc au Gouvernement et à la rapporteure. Voilà. Pourquoi, madame la rapporteure, alors que notre collègue a défendu son amendement de façon plus que sincère – elle sait de quoi elle parle concrètement et nous avons ressenti son émotion –, faire un parallèle avec la procédure pénale ?
À l’évidence, on est ici dans le cadre d’une procédure administrative, laquelle offre moins de garanties qu’une procédure pénale alors même qu’elle peut avoir pour conséquence une privation de liberté avec un placement en centre de rétention administrative, voire une expulsion. Mme Gourault n’est pas là : elle nous manque ! Ce n’est pas rien que d’être renvoyé dans son pays : une expulsion, ce n’est pas anecdotique et on ne prend pas une telle décision à la légère. Alors oui, il faut pouvoir, lors de ce type d’entretien, apporter des garanties au demandeur.
Oui, la proposition de notre collègue représenterait un progrès. Or tout le monde a envie d’aller dans le sens du progrès. Nous comptons beaucoup de collègues avocats dans cette assemblée : ils savent que la présence d’un avocat n’est pas superflue et qu’elle n’alourdit pas la procédure. J’ose espérer en tout cas qu’ils ne pensent pas le contraire. (L’amendement no 171 n’est pas adopté.)
(Protestations sur les bancs du groupe FI. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.) C’est quoi, ça ? Ça se compte ! Mes chers collègues, il n’y a aucun doute sur le résultat du vote au vu du nombre de mains qui se sont levées.
La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1100. Je vous propose, monsieur le président, de défendre en même temps l’amendement no 1101. Excellente idée ! L’amendement no 1101 propose d’étendre le champ des associations agréées pour accompagner les demandeurs d’asile lors de leur entretien à l’OFPRA aux associations de sensibilisation et de lutte contre le VIH-sida dans les départements, régions et collectivités d’outre-mer, notamment lorsque le fond de la demande a trait à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre.
Cette proposition est née du constat que le tissu associatif dédié aux questions LGBT est très peu développé, en tout cas nettement insuffisant en outre-mer, voire parfois totalement inexistant. En outre, certains territoires ne comptent aucun centre d’accueil pour demandeurs d’asile – c’est le cas en Guyane ou à Mayotte – et les plates-formes d’accueil qui y fonctionnent, comme celles gérées par la Croix-Rouge, ne sont pas forcément à même de prendre en charge les demandeurs d’asile LGBT ni de leur offrir, avec le personnel qualifié requis, un accompagnement approprié.
Or, du fait des phénomènes d’autocensure, de culpabilité ou de dissonance culturelle, les représentations sociales de l’homosexualité et de la transidentité étant très ancrées dans le contexte socioculturel d’origine, il est primordial pour un demandeur d’asile LGBT d’être accompagné par un tiers qui puisse lui apporter conseil et assistance afin de lui permettre de verbaliser son récit et de mettre les mots justes sur les persécutions qu’il a pu subir.
Aussi, dans un contexte insulaire caractérisé par une homophobie latente très marquée, je propose que les associations de lutte contre le VIH-sida, qui sont parmi les seules à accueillir au quotidien les populations LGBT, puissent pallier l’absence d’associations spécifiques. Quel est l’avis de la commission ? Cher collègue, le fait que nous venions d’adopter l’amendement no 1099 qui précise que le demandeur peut, lors de son entretien auprès de l’OFPRA, être accompagné du représentant d’une association de lutte contre les persécutions fondées sur l’identité de genre qui prenne en compte les vulnérabilités spécifiques à cette identité ; me semble satisfaire votre préoccupation.
Je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que Mme la rapporteure. Je demande le retrait : à défaut, avis défavorable. Monsieur Bernalicis, vous souhaitez répondre à la commission ou au Gouvernement ? Vous avez la parole. Je vois que notre collègue Raphaël Gérard, qui est l’auteur des deux amendements en débat, souhaite intervenir. Je lui cède la priorité. Monsieur Bernalicis, c’est moi qui distribue la parole dans cet hémicycle.
Monsieur Gérard, si vous souhaitez répondre à la commission ou au Gouvernement, vous avez la parole. Je retire l’amendement no 1100 mais je maintiens l’amendement no 1101.
(M. Bernalicis lève la main - Exclamations sur les bancs du groupe FI.) (L’amendement no 1100 est retiré.) (L’amendement no 1101 n’est pas adopté.) J’avais demandé la parole, monsieur le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 141. Il est défendu. (L’amendement no 141, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour un rappel au règlement. Au titre de l’article 58, alinéa 1, du règlement. Il me semble, monsieur le président, que nous pourrions conserver un minimum de convivialité et d’humanité dans cet hémicycle.
Je vous ai indiqué que, pour ne pas polluer le débat, je cédais la parole à notre collègue Raphaël Gérard qui souhaitait s’exprimer à nouveau sur ses deux amendements : il en a d’ailleurs retiré un. Il me semble qu’il avait la priorité.
Mais je souhaitais intervenir après lui : or vous avez refusé de me redonner la parole. Nous ne sommes pas à une minute près ! De toute façon, sur ce texte, nous allons être très en retard, puisque vous avez désorganisé le débat. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et LR.) Non, non, non. Si, honnêtement.
Monsieur le président, il n’est pas exclu que vous puissiez faire preuve d’un minimum de discernement. Ce n’est en effet pas du tout exclu. Par ailleurs, je vous rappelle que pour demander la parole, il suffit de lever la main de façon claire. Monsieur le président, il avait levé la main ! Lorsque vous avez indiqué que vous cédiez la parole à M. Gérard, nous avons poursuivi le cours de notre débat. Mais je vous donnerai la parole sans aucun problème lorsque vous souhaiterez répondre à la commission ou au Gouvernement sur un autre amendement.
Je vous fais en outre observer que j’ai largement laissé certains de nos collègues s’exprimer dans des interventions qui n’avaient rien à voir ni avec l’avis de la commission ni avec celui du Gouvernement et qui étaient donc totalement hors sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Comme vous le voyez, ce n’est pas une question de convivialité mais de respect de nos règles. Punition collective ! La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l’amendement no 238. Combinée à une réduction des délais de recours, la nouvelle modalité de notification porterait atteinte au caractère équitable de la procédure, comme l’indique le Conseil d’État dans son avis du 15 février 2018. Elle est par ailleurs contraire à la directive européenne qui dispose que les États membres veillent à une communication écrite des décisions portant sur les demandes de protection internationale. Il est donc proposé de conserver la notification par lettre recommandée avec accusé de réception et d’ajouter « et par tout autre moyen » ; cela permettra de garantir la réception précise et effective de la notification des décisions de l’OFPRA et d’éviter tout contentieux.
J’en profite pour indiquer que tous les pays européens dont la procédure est réduite prévoient l’assistance d’un avocat dès le début de celle-ci. Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà eu ce débat tout à l’heure. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable. La parole est à M. Erwan Balanant. Je trouve que c’est une très bonne idée de la part de l’OFPRA que d’accompagner l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception d’une notification par un moyen électronique. Cependant, si vous supprimez l’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception, je crains que cela n’ouvre une série de contentieux. En effet, les textes sont clairs : l’article L. 112-15 du code des relations entre le public et l’administration précise que la preuve de la réception doit être faite. Je le répète : bien que je trouve que le courrier électronique soit aussi un très bon moyen de notification, surtout quand on sait quelle est la vie des demandeurs d’asile, qui se trouvent souvent dans une situation précaire et ne disposent pas d’adresse postale, si l’on supprime la lettre recommandée avec accusé de réception, cela va donner lieu à des contentieux et freiner les procédures. La parole est à M. Ugo Bernalicis. L’objectif de cet amendement, qui rejoint d’ailleurs des amendements précédents, est de s’assurer que l’information arrive bien à son destinataire. Oui, dans cet hémicycle, on veut qu’une information arrive à son destinataire : n’est-ce pas extraordinaire ? Or nous trouvons que, dans l’état actuel du texte, la formule utilisée est beaucoup trop floue, trop vague, pour que l’on ait la certitude que c’est bien le cas.
La rédaction proposée via l’amendement me semble tout à fait intéressante : cela permettrait d’utiliser à la fois le courrier recommandé avec accusé de réception et un moyen complémentaire. D’ailleurs, de nombreuses administrations fonctionnent de la sorte dans leurs relations avec les usagers : aujourd’hui, l’envoi d’un courrier traditionnel est souvent assorti de celui d’un courriel ou d’un texto. Cela fonctionne très bien.
Tout à l’heure, on nous a expliqué que les personnes migrantes ne disposaient pas forcément d’adresse postale et qu’en conséquence, il était compliqué de leur envoyer un courrier. Mais enfin ! Nous sommes tout de même capables dans ce pays de domicilier des personnes, afin qu’elles puissent recevoir une lettre, sans pour autant qu’elles aient un domicile ! C’est dommage qu’elles n’en aient pas – nous sommes quant à nous pour que l’on accueille les personnes dignement –, mais c’est une autre histoire.
Je le répète : cet amendement me semble tout à fait intéressant. Monsieur le président, ce n’est pas un cours : il faut accélérer ! Il permettrait de développer le numérique cher à la majorité – qui met du « numérique » par-ci, du « numérique » par-là –, tout en s’assurant que l’on recevra bien quelque chose de tangible : un bon vieux courrier avec accusé de réception. (L’amendement no 238 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 142. Il est défendu, monsieur le président. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Je le mets donc aux voix. J’ai demandé la parole, monsieur le président ! Monsieur Schellenberger, vous tenez vraiment à répondre à la commission et au Gouvernement sur cet amendement ? Tout à fait, monsieur le président – mais je n’ai rien à dire de plus ! (Rires et applaudissements.) (L’amendement no 142 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 143. Je voudrais faire une dernière tentative. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG.) Bravo ! Résistez ! Le présent amendement vise à supprimer l’expression « par tout moyen ». Je reste persuadée qu’aujourd’hui, les demandeurs d’asile n’ont pas forcément accès à l’outil informatique, suivant l’endroit où ils se trouvent, et aussi leur capacité à utiliser cet outil. Prévoir une notification « par tout moyen » serait préjudiciable à l’exercice de leurs droits. Quel est l’avis de la commission ? Par cohérence avec ce que j’ai dit précédemment, avis défavorable. Et voilà ! C’est la cohérence de l’incohérence ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Je demande la parole ! Sur l’article 5, je suis saisi par les groupes Nouvelle Gauche et La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je mets maintenant aux voix l’amendement no 143. Rappel au règlement ! J’avais demandé la parole, monsieur le président ! Monsieur Bernalicis, voulez-vous répondre à la commission et au Gouvernement ou faire un rappel au règlement ? Je veux répondre ! Dans ce cas, vous avez la parole pour répondre aux arguments de Mme la rapporteure et de M. le ministre. Ce ne sera pas évident, puisqu’ils se sont contenté de répondre « défavorable ».
Monsieur le président, vous dites que pour demander la parole, il suffit de lever la main, mais encore faudrait-il que vous leviez les yeux pour voir quand nous levons la main ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Ne vous inquiétez pas, cher collègue :… Si, je m’inquiète ! …j’étais tout simplement attentif à votre demande de scrutin public. Super ! Je n’avais donc pas vu que vous leviez la main. Voici ce que je voudrais dire à la représentation nationale : imaginez que demain, on vous explique que les convocations aux auditions et aux réunions de commission se feront « par tout moyen ». (Exclamations et rires sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) C’est déjà ce qui se passe ! Je le sais bien, chers collègues !
Imaginez donc que vous loupiez le texto ou le courriel que l’on vous aura envoyé pour vous en informer : vous ne serez pas contents, parce que vous aurez raté la réunion. Vous demanderez à avoir une preuve que l’on vous a bien envoyé le message. Eh bien, dites-vous que c’est à peu près la même chose pour les demandeurs d’asile – et encore, nous jouissons ici du confort de l’Assemblée nationale. Là, on parle de personnes migrantes qui sont dans la détresse et qui se trouvent sur notre territoire. Qu’est-ce que cela vous coûte d’adopter un amendement de ce genre, qui vise simplement à s’assurer que la personne a bien reçu le message ? C’est scandaleux ! Auriez-vous laissé votre bon sens et votre humanité au vestiaire ? Faites un effort ! (Mme Valérie Rabault applaudit.) La parole est à M. Ian Boucard. Tout cela est un peu contradictoire. Tout à l’heure, Mme Obono nous expliquait, avec raison d’ailleurs, que les réfugiés n’avaient pas toujours de domicile, donc a fortiori de domicile pour recevoir le courrier. Envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception à des gens qui n’ont pas de domicile pour recevoir le courrier ou envoyer un courriel à des gens qui sont sans électricité ou sans moyen de se connecter à l’internet, de toute façon, cela pose problème. Ce problème existe depuis le début, et que l’on adopte ou pas cet article, il se posera encore après. On n’aura fait que pratiquer la dématérialisation des problèmes ! (L’amendement no 143 n’est pas adopté.)