XVe législature
Session ordinaire de 2018-2019
Séance du lundi 03 décembre 2018
- Présidence de M. Marc Le Fur
- 1. Programmation 2018-2022 et réforme de la justice
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
2e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente-cinq.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (nos 1349, 1396).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 42 bis.
La parole est à M. Xavier Breton, pour un rappel au règlement.
Je le formule au titre de l’article 58, alinéa 1, de notre règlement, relatif à l’organisation des débats.
Je m’étonne quelque peu des conditions dans lesquelles la réunion de la commission des lois vient de se tenir. Comme elle l’avait annoncé, la présidente de la commission a fait une intervention liminaire très courte pour laisser le temps aux questions. Or la réunion a été interrompue en plein milieu sans que nous puissions aller au bout des questions, alors même qu’il avait été indiqué tout à l’heure, lorsque nous avons évoqué l’organisation de nos débats, qu’il serait possible que nos travaux dans l’hémicycle reprennent un peu plus tard qu’à vingt et une heures trente.
Nous devons nous interroger sur ce que cela implique pour l’image de notre assemblée, sachant que la commission des lois du Sénat avait annoncé une audition identique à celle à laquelle nous venons de procéder. Il y va du sérieux de nos travaux. Le manque de rigueur de notre commission d’enquête sur l’affaire Benalla nous a déjà ridiculisés : il était apparu très clairement que la majorité était à la solde du Gouvernement. En l’espèce, le Gouvernement a fixé à nouveau les règles du jeu, empêchant que l’on puisse poser toutes les questions.
Je voudrais donc que la présidente de la commission des lois nous explique quelles sont ses intentions lorsqu’elle provoque des réunions de commission qui ne remplissent que très partiellement leur mission d’information à notre égard et à l’égard de nos concitoyens. La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour un rappel au règlement. Je viens de rater l’intervention de M. Breton, car je ne suis pas revenu assez rapidement de l’audition du ministre de l’intérieur et du secrétaire d’État par la commission des lois. Voilà dans quelles conditions nous travaillons ! De nombreux collègues sont encore dans la salle de réunion, et la présidente de la commission des lois ne peut pas répondre à M. Breton parce qu’elle s’exprime en ce moment devant les caméras, à l’issue de l’audition. Je ne dis pas que telle n’est pas sa place ; c’est précisément sa place, mais que faisons-nous ici dans l’hémicycle ? Je propose que nous suspendions la séance jusqu’à ce que tous nos collègues aient pu rejoindre l’hémicycle. Nous ne sommes tout de même pas à dix minutes près ! Cela ne nous empêchera pas de reprendre nos débats sereinement ! Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
J’ai dit tout à l’heure que nous étions, dans cet hémicycle, de la chair à canon, que l’on nous appelait à venir à telle heure à tel endroit comme si nous étions les obligés du Gouvernement ou de la majorité. Oh, c’est bon ! En l’espèce, nous avons été non pas de la chair à canon, mais les seconds rôles sympathiques d’un plan de communication plus ou moins bien ficelé. Voilà ce que nous avons fait pendant une heure et demie ! Tout cela pour griller la priorité au Sénat ! Je ne trouve pas les mots justes pour vous exprimer à quel point tout cela est lamentable ! Cette organisation de nos travaux est du grand n’importe quoi ! Je demande, monsieur le président, que la séance soit suspendue non pas pour deux, mais pour dix minutes au moins, le temps que tous nos collègues puissent rejoindre l’hémicycle. Très bien ! La séance est suspendue pour deux minutes. (La séance, suspendue à vingt et une heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-trois.) La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour un rappel au règlement. Je le formule au titre de l’article 58.
Je souscris entièrement aux propos de Xavier Breton. J’ai vraiment eu l’impression d’assister à une séance de communication, et nous sommes tous frustrés de ne pas avoir pu poser les questions que nous souhaitions poser.
Néanmoins, mon intervention concerne avant tout le travail parlementaire. À midi, j’étais dans un avion, et certains d’entre nous se trouvaient sans doute dans un autre moyen de transport. Nous travaillons sans interruption depuis seize heures, et nous avons plusieurs heures de débat devant nous. Ce n’est pas acceptable, monsieur le président ! Je ne suis pas un représentant syndical, mais on dépasse les bornes ! Il ne faut pas se plaindre de la grogne qui s’exprime dans le pays ! Il faut respecter les gens ! Et je crois qu’il faudrait commencer par respecter les parlementaires ! Je demande donc une suspension de séance de trois quarts d’heure, pour que nous puissions dîner ! Tout de même ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) C’est juste ! Mon pauvre chéri ! Respectez les parlementaires ! Mon cher collègue, nous nous passons de dîner ou de déjeuner ; cela m’est arrivé à de multiples reprises, et cela arrivera encore. Tel n’est pas le sujet, et les circonstances sont un peu particulières. Il est tout à fait de l’ordre du possible de s’organiser au sein d’un groupe pour se relayer.
Je m’étonne quelque peu des conditions dans lesquelles la réunion de la commission des lois vient de se tenir. Comme elle l’avait annoncé, la présidente de la commission a fait une intervention liminaire très courte pour laisser le temps aux questions. Or la réunion a été interrompue en plein milieu sans que nous puissions aller au bout des questions, alors même qu’il avait été indiqué tout à l’heure, lorsque nous avons évoqué l’organisation de nos débats, qu’il serait possible que nos travaux dans l’hémicycle reprennent un peu plus tard qu’à vingt et une heures trente.
Nous devons nous interroger sur ce que cela implique pour l’image de notre assemblée, sachant que la commission des lois du Sénat avait annoncé une audition identique à celle à laquelle nous venons de procéder. Il y va du sérieux de nos travaux. Le manque de rigueur de notre commission d’enquête sur l’affaire Benalla nous a déjà ridiculisés : il était apparu très clairement que la majorité était à la solde du Gouvernement. En l’espèce, le Gouvernement a fixé à nouveau les règles du jeu, empêchant que l’on puisse poser toutes les questions.
Je voudrais donc que la présidente de la commission des lois nous explique quelles sont ses intentions lorsqu’elle provoque des réunions de commission qui ne remplissent que très partiellement leur mission d’information à notre égard et à l’égard de nos concitoyens. La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour un rappel au règlement. Je viens de rater l’intervention de M. Breton, car je ne suis pas revenu assez rapidement de l’audition du ministre de l’intérieur et du secrétaire d’État par la commission des lois. Voilà dans quelles conditions nous travaillons ! De nombreux collègues sont encore dans la salle de réunion, et la présidente de la commission des lois ne peut pas répondre à M. Breton parce qu’elle s’exprime en ce moment devant les caméras, à l’issue de l’audition. Je ne dis pas que telle n’est pas sa place ; c’est précisément sa place, mais que faisons-nous ici dans l’hémicycle ? Je propose que nous suspendions la séance jusqu’à ce que tous nos collègues aient pu rejoindre l’hémicycle. Nous ne sommes tout de même pas à dix minutes près ! Cela ne nous empêchera pas de reprendre nos débats sereinement ! Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
J’ai dit tout à l’heure que nous étions, dans cet hémicycle, de la chair à canon, que l’on nous appelait à venir à telle heure à tel endroit comme si nous étions les obligés du Gouvernement ou de la majorité. Oh, c’est bon ! En l’espèce, nous avons été non pas de la chair à canon, mais les seconds rôles sympathiques d’un plan de communication plus ou moins bien ficelé. Voilà ce que nous avons fait pendant une heure et demie ! Tout cela pour griller la priorité au Sénat ! Je ne trouve pas les mots justes pour vous exprimer à quel point tout cela est lamentable ! Cette organisation de nos travaux est du grand n’importe quoi ! Je demande, monsieur le président, que la séance soit suspendue non pas pour deux, mais pour dix minutes au moins, le temps que tous nos collègues puissent rejoindre l’hémicycle. Très bien ! La séance est suspendue pour deux minutes. (La séance, suspendue à vingt et une heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-trois.) La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour un rappel au règlement. Je le formule au titre de l’article 58.
Je souscris entièrement aux propos de Xavier Breton. J’ai vraiment eu l’impression d’assister à une séance de communication, et nous sommes tous frustrés de ne pas avoir pu poser les questions que nous souhaitions poser.
Néanmoins, mon intervention concerne avant tout le travail parlementaire. À midi, j’étais dans un avion, et certains d’entre nous se trouvaient sans doute dans un autre moyen de transport. Nous travaillons sans interruption depuis seize heures, et nous avons plusieurs heures de débat devant nous. Ce n’est pas acceptable, monsieur le président ! Je ne suis pas un représentant syndical, mais on dépasse les bornes ! Il ne faut pas se plaindre de la grogne qui s’exprime dans le pays ! Il faut respecter les gens ! Et je crois qu’il faudrait commencer par respecter les parlementaires ! Je demande donc une suspension de séance de trois quarts d’heure, pour que nous puissions dîner ! Tout de même ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) C’est juste ! Mon pauvre chéri ! Respectez les parlementaires ! Mon cher collègue, nous nous passons de dîner ou de déjeuner ; cela m’est arrivé à de multiples reprises, et cela arrivera encore. Tel n’est pas le sujet, et les circonstances sont un peu particulières. Il est tout à fait de l’ordre du possible de s’organiser au sein d’un groupe pour se relayer.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l’amendement no 1377, tendant à la suppression de l’article.
Le présent article prévoit la représentation obligatoire du justiciable par un avocat devant le Conseil d’État ou la chambre criminelle de la Cour de cassation.
Si nous approuvons l’idée que chaque justiciable puisse être assisté par un avocat, l’article risque de créer une entrave dans l’accès au juge pour des personnes qui, ne bénéficiant pas de l’aide juridictionnelle, devraient payer elles-mêmes, en plus de l’avocat qui les a assistées devant les juridictions du fond, un avocat pour former un pourvoi devant le Conseil d’État et la Cour de cassation.
Pour mener à bien l’idée d’une représentation obligatoire, il faut revoir le barème actuel de l’aide juridictionnelle. À titre d’exemple, en dessous de 1 000 euros par mois, les frais de justice sont intégralement pris en charge par l’État pour un individu sans personne à charge ; les autres, qui touchent parfois juste un peu plus de 1 000 euros, n’ont pas droit à la prise en charge à 100 % par l’aide juridictionnelle.
Nous savons que le Gouvernement travaille sur ce sujet : dont acte mais, en attendant, et à défaut de modification du barème, les dispositions de l’article apparaissent dissuasives, et elles priveraient certaines personnes de l’accès au juge. La parole est à M. Didier Paris, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission. Je dois à la vérité de reconnaître que cet amendement a suscité, en commission, d’assez longs débats, pour les motifs que vous venez de rappeler, cher collègue Dharréville : disons-le clairement, le nombre de pourvois qui aboutissent est plus élevé si le justiciable s’est fait assister par un avocat. Rien de plus normal : cela tient à l’organisation même de notre justice.
D’un autre côté, la présence d’un avocat n’est pas obligatoire devant la Cour de cassation, qui, étant au sommet de notre ordre judiciaire, doit être accessible à tout justiciable. À titre strictement personnel, je me range volontiers à cet argument, et suivrai donc la direction proposée par l’amendement. Merci. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l’avis du Gouvernement. Comme vient de le suggérer M. le rapporteur, le sujet est assez délicat. Dans les prochains jours, j’installerai un groupe de travail sur la question du filtrage au niveau de la Cour de cassation, faisant suite en cela aux travaux engagés par le président Louvel. Pour ces raisons, j’émets un avis de sagesse sur l’amendement.
Si nous approuvons l’idée que chaque justiciable puisse être assisté par un avocat, l’article risque de créer une entrave dans l’accès au juge pour des personnes qui, ne bénéficiant pas de l’aide juridictionnelle, devraient payer elles-mêmes, en plus de l’avocat qui les a assistées devant les juridictions du fond, un avocat pour former un pourvoi devant le Conseil d’État et la Cour de cassation.
Pour mener à bien l’idée d’une représentation obligatoire, il faut revoir le barème actuel de l’aide juridictionnelle. À titre d’exemple, en dessous de 1 000 euros par mois, les frais de justice sont intégralement pris en charge par l’État pour un individu sans personne à charge ; les autres, qui touchent parfois juste un peu plus de 1 000 euros, n’ont pas droit à la prise en charge à 100 % par l’aide juridictionnelle.
Nous savons que le Gouvernement travaille sur ce sujet : dont acte mais, en attendant, et à défaut de modification du barème, les dispositions de l’article apparaissent dissuasives, et elles priveraient certaines personnes de l’accès au juge. La parole est à M. Didier Paris, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission. Je dois à la vérité de reconnaître que cet amendement a suscité, en commission, d’assez longs débats, pour les motifs que vous venez de rappeler, cher collègue Dharréville : disons-le clairement, le nombre de pourvois qui aboutissent est plus élevé si le justiciable s’est fait assister par un avocat. Rien de plus normal : cela tient à l’organisation même de notre justice.
D’un autre côté, la présence d’un avocat n’est pas obligatoire devant la Cour de cassation, qui, étant au sommet de notre ordre judiciaire, doit être accessible à tout justiciable. À titre strictement personnel, je me range volontiers à cet argument, et suivrai donc la direction proposée par l’amendement. Merci. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l’avis du Gouvernement. Comme vient de le suggérer M. le rapporteur, le sujet est assez délicat. Dans les prochains jours, j’installerai un groupe de travail sur la question du filtrage au niveau de la Cour de cassation, faisant suite en cela aux travaux engagés par le président Louvel. Pour ces raisons, j’émets un avis de sagesse sur l’amendement.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour un rappel au règlement.
Je n’ai pas l’intention de polluer davantage les débats et ne vous demanderai pas de suspension de séance, monsieur le président. J’observe simplement que nos prédictions se réalisent : tout à l’heure, nous avons quitté l’hémicycle pour arriver à l’heure à l’audition organisée en commission des lois, laquelle, faut-il le rappeler, est saisie au fond sur le présent texte. La séance publique a donc repris sans même que nous ayons la possibilité d’y participer dès l’ouverture : la preuve en est que la présidente de la commission des lois elle-même, à cette heure, est encore retenue par l’audition.
Je tenais à souligner clairement ce point, car ce ne sont pas là de bonnes conditions de travail. Nous, législateur, avons ici à nous pencher sur un domaine très particulier, le droit pénal et la procédure pénale, lesquels touchent aux libertés individuelles et aux libertés publiques. Je voulais donc prendre notre assemblée à témoin de ce fait, et, à travers elle, le pays tout entier. Alors que celui-ci flambe de partout, nous pourrions espérer d’autres conditions, non pour les parlementaires eux-mêmes – nul ne pleurera sur notre sort, et d’ailleurs je ne le demande pas –, mais pour l’élaboration de la loi, qui n’est tout de même pas la moindre des normes.
Je tenais à souligner clairement ce point, car ce ne sont pas là de bonnes conditions de travail. Nous, législateur, avons ici à nous pencher sur un domaine très particulier, le droit pénal et la procédure pénale, lesquels touchent aux libertés individuelles et aux libertés publiques. Je voulais donc prendre notre assemblée à témoin de ce fait, et, à travers elle, le pays tout entier. Alors que celui-ci flambe de partout, nous pourrions espérer d’autres conditions, non pour les parlementaires eux-mêmes – nul ne pleurera sur notre sort, et d’ailleurs je ne le demande pas –, mais pour l’élaboration de la loi, qui n’est tout de même pas la moindre des normes.
La parole est à M. Ugo Bernalicis.
Je profite de l’amendement en discussion pour rouvrir un instant le débat sur l’aide juridictionnelle, sujet en lien direct avec la représentation obligatoire.
J’ai fini par comprendre pourquoi l’argument d’une prise en charge intégrale des frais de justice par l’aide juridictionnelle pour les salariés payés au SMIC ne vous atteignait pas, chers collègues de la majorité lorsque j’ai vu certains d’entre vous, invités sur des plateaux télé, ayant quelque peine à donner le montant du SMIC. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) C’est facile ! Eh oui ! Si l’on n’a pas conscience des réalités, on se dit que ces gens-là sont en mesure de payer un reste à charge qui peut se monter à 45 % ! Pas de difficulté !
Mais des difficultés, bien sûr qu’il y en a ! Quelqu’un payé au SMIC n’est pas éligible à une prise en charge à 100 % par l’aide juridictionnelle ! Il n’y a pas besoin de réfléchir pendant des jours, des semaines ou des mois, ni de créer je ne sais quelle mission ou commission pour revaloriser le montant des plafonds de ressources ! On sait le faire, non ? Au-dessus de 1 200 euros, la prise en charge est encore plus faible, et les seuils sont au nombre de trois. Décalons tout d’un niveau ! Décidons qu’un salarié payé 1 200 euros par mois bénéficie d’une prise en charge à 100 % ! Pouvez-vous l’entendre ? (Mme Mathilde Panot applaudit.) La parole est à M. Stéphane Mazars. Nous sommes en mesure de travailler en toute sérénité, monsieur Gosselin. C’est ainsi que le groupe La République en marche votera l’amendement du groupe communiste défendu par M. Dharréville, car il nous semble opportun.
M. le rapporteur l’a rappelé, un pourvoi en cassation formé par un justiciable en détention a parfois peu de chances de prospérer ; mais cette procédure est celle de la liberté : nous devons donc permettre à tout un chacun de l’engager en se faisant assister par un avocat, quand bien même il n’en aurait pas les moyens s’il ne peut prétendre au bénéfice de l’aide juridictionnelle. Nous nous retrouvons donc sans difficulté sur ce point.
Nous prenons également acte des travaux annoncés par Mme la garde des sceaux sur l’amélioration de l’accès des justiciables, quels qu’ils soient, au pourvoi en cassation. Il paraît bienvenu, en tout état de cause, d’en rester à la situation actuelle dans l’attente de ces travaux. Aussi le groupe La République en marche votera-t-il l’amendement présenté par notre collègue communiste. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Très bien ! La parole est à M. Xavier Breton. Cet amendement est certainement bienvenu, et nous pouvons regretter qu’il n’ait pas été adopté dès l’examen en commission. Nous nous félicitons aussi de l’avis favorable du rapporteur et de l’avis de sagesse émis par Mme la garde des sceaux.
Le mieux est en effet l’ennemi du bien. Nous sommes tous convaincus de l’utilité d’un avocat dans une procédure ; mais l’obligation de représentation devant le Conseil d’État et la chambre criminelle de la Cour de cassation est une mesure technocratique qui paraît inopportune. Je voterai donc l’amendement. (L’amendement no 1377 est adopté. En conséquence, l’article 42 bis est supprimé et l’amendement no 1158 n’a plus d’objet.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LaREM.)
J’ai fini par comprendre pourquoi l’argument d’une prise en charge intégrale des frais de justice par l’aide juridictionnelle pour les salariés payés au SMIC ne vous atteignait pas, chers collègues de la majorité lorsque j’ai vu certains d’entre vous, invités sur des plateaux télé, ayant quelque peine à donner le montant du SMIC. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) C’est facile ! Eh oui ! Si l’on n’a pas conscience des réalités, on se dit que ces gens-là sont en mesure de payer un reste à charge qui peut se monter à 45 % ! Pas de difficulté !
Mais des difficultés, bien sûr qu’il y en a ! Quelqu’un payé au SMIC n’est pas éligible à une prise en charge à 100 % par l’aide juridictionnelle ! Il n’y a pas besoin de réfléchir pendant des jours, des semaines ou des mois, ni de créer je ne sais quelle mission ou commission pour revaloriser le montant des plafonds de ressources ! On sait le faire, non ? Au-dessus de 1 200 euros, la prise en charge est encore plus faible, et les seuils sont au nombre de trois. Décalons tout d’un niveau ! Décidons qu’un salarié payé 1 200 euros par mois bénéficie d’une prise en charge à 100 % ! Pouvez-vous l’entendre ? (Mme Mathilde Panot applaudit.) La parole est à M. Stéphane Mazars. Nous sommes en mesure de travailler en toute sérénité, monsieur Gosselin. C’est ainsi que le groupe La République en marche votera l’amendement du groupe communiste défendu par M. Dharréville, car il nous semble opportun.
M. le rapporteur l’a rappelé, un pourvoi en cassation formé par un justiciable en détention a parfois peu de chances de prospérer ; mais cette procédure est celle de la liberté : nous devons donc permettre à tout un chacun de l’engager en se faisant assister par un avocat, quand bien même il n’en aurait pas les moyens s’il ne peut prétendre au bénéfice de l’aide juridictionnelle. Nous nous retrouvons donc sans difficulté sur ce point.
Nous prenons également acte des travaux annoncés par Mme la garde des sceaux sur l’amélioration de l’accès des justiciables, quels qu’ils soient, au pourvoi en cassation. Il paraît bienvenu, en tout état de cause, d’en rester à la situation actuelle dans l’attente de ces travaux. Aussi le groupe La République en marche votera-t-il l’amendement présenté par notre collègue communiste. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Très bien ! La parole est à M. Xavier Breton. Cet amendement est certainement bienvenu, et nous pouvons regretter qu’il n’ait pas été adopté dès l’examen en commission. Nous nous félicitons aussi de l’avis favorable du rapporteur et de l’avis de sagesse émis par Mme la garde des sceaux.
Le mieux est en effet l’ennemi du bien. Nous sommes tous convaincus de l’utilité d’un avocat dans une procédure ; mais l’obligation de représentation devant le Conseil d’État et la chambre criminelle de la Cour de cassation est une mesure technocratique qui paraît inopportune. Je voterai donc l’amendement. (L’amendement no 1377 est adopté. En conséquence, l’article 42 bis est supprimé et l’amendement no 1158 n’a plus d’objet.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LaREM.)
(L’article 42 ter est adopté.)
Je suis saisi de trois amendements, nos 641, 576 et 1242, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 641. Malgré la faim qui me tenaille (Sourires) , je prendrai le temps de défendre cet amendement, qui vise à modifier l’échelle des peines correctionnelles. Certains ont plus de réserves que vous, mon cher collègue… (Sourires.) J’en avais davantage lorsque j’étais garde mobile, mais le ministre de l’intérieur était alors Charles Pasqua. (Sourires.) M. le président vise quelqu’un en particulier ! C’est un fait personnel ! (Sourires.) Le présent amendement, disais-je, vise d’abord à supprimer la disposition qui tend à faire de la détention à domicile sous surveillance électronique une peine autonome.
Il supprime également la peine de sanction-réparation de l’échelle des peines correctionnelles définie à l’article 131-3 du code pénal.
À l’inverse, nous proposons d’inscrire, à des fins de clarification de la nomenclature, la peine de suivi socio-judiciaire au rang des peines principales.
Cet amendement prévoit par ailleurs le cumul des peines d’emprisonnement, alternatives à l’emprisonnement – travail d’intérêt général ou stage – ou restrictives de liberté, afin de redonner au tribunal correctionnel toute sa liberté de choix.
Il simplifie également le régime unique des stages, dont les modalités et le contenu seraient déterminés par les juridictions au regard des besoins locaux, et non par le législateur.
Serait également supprimée la possibilité de prononcer un travail d’intérêt général sans accord préalable du condamné : l’absence de consentement de sa part augurerait mal, en effet, de l’exécution d’une telle peine.
Enfin, par coordination avec les articles 46 et 47, nous proposons d’introduire la peine autonome de probation dans l’échelle des peines : en remplacement du sursis probatoire envisagé dans le projet de loi, cette peine résulterait de la fusion de la contrainte pénale et du sursis avec mise à l’épreuve. Elle pourrait se cumuler avec une peine d’emprisonnement, contrairement à la contrainte pénale. Nous en venons à l’amendement no 576.
Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour défendre l’amendement. Par cet amendement nous proposons de revoir l’échelle des peines, pour lui substituer le triptyque : amende, peine de probation et emprisonnement. Cette disposition, de nature à clarifier le code pénal, instaurerait une peine de probation autonome.
Ce que nous vous proposons donc, en réalité, c’est que le juge puisse apprécier, pour chaque délit, laquelle de ces trois peines est la plus adaptée, étant entendu que certains délits, à nos yeux, n’appellent qu’une peine de probation.
Qu’est-ce qu’une peine de probation, en effet ? Il peut s’agir d’un travail d’intérêt général, d’une forme de placement à l’extérieur ou d’injonctions diverses et variées – soins, stages obligatoires, bref, toute la panoplie disponible en la matière.
Nous entendons, disais-je, créer une peine de probation autonome, sans rapport avec la peine d’emprisonnement. De fait, nous ne pourrons atteindre les objectifs de désinflation carcérale sans ce nouveau triptyque et sans un réexamen approfondi de notre code pénal. Oui, l’inflation pénale, les peines de plus en plus lourdes prononcées contre un certain nombre de délits, ont conduit à envoyer en prison, à niveau de délinquance constant, un plus grand nombre de gens, et pour des durées plus longues. Voilà comment l’on en vient au constat de la surpopulation carcérale, et à la conclusion qu’il faut construire 7 000 ou 15 000 places de prison, voire 20 000 selon certains.
De surcroît, tout cela ne fonctionne pas, les récidivistes étant fort nombreux en prison. Or, on le sait, les peines de probation en milieu ouvert sont plus efficaces pour prévenir la récidive. Efficaces, elles ne le sont certes pas à 100 %, si bien que, en cas d’échec, elles peuvent choquer : tel condamné, est-on alors porté à dire, n’aurait peut-être pas récidivé s’il avait été envoyé en prison. Reste que, statistiquement, la peine de probation est bien plus efficace pour prévenir la récidive. Elle est donc de nature à faire baisser la délinquance. Merci, monsieur Bernalicis. Faire baisser la délinquance, n’est-ce pas là le véritable objectif ? N’est-il pas préférable d’envoyer moins de gens dans nos prisons tout en rendant la société plus paisible et plus tranquille ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à M. Yannick Kerlogot, pour soutenir l’amendement no 1242. Défendu. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ? Nous abordons ici l’un des points centraux de la présente réforme. Il s’agit en effet de définir une échelle des peines mieux adaptée aux circonstances de la délinquance, composée de peines disponibles de façon égale pour les magistrats et adaptée à la personnalité de l’auteur des faits ainsi qu’à son passé pénal, tout en satisfaisant aux besoins de répression et de protection de la société.
Je répondrai en quelques mots aux arguments précédemment développés. La constitution en peine autonome de la détention à domicile sous surveillance électronique nous paraît clairement répondre à l’objectif de diminution du nombre d’incarcérations, inutiles pour certains d’entre elles. Cette peine doit donc être conservée à ce niveau, c’est-à-dire mentionnée comme deuxième peine dans notre code pénal.
Contrairement à ce que j’ai entendu dire, la sanction-réparation est, dans de nombreux cas, une réponse parfaitement adaptée aux circonstances de fait.
Nous préférons le sursis probatoire à la peine autonome – car, il faut le reconnaître, on a pu se demander si une peine autonome de probation n’aurait pas été souhaitable ; je me suis moi-même posé la question. Mais il nous paraît finalement que le sursis probatoire, restant lié aux conséquences qui doivent être tirées du non-respect de la probation, permet d’éviter les inconvénients de la contrainte pénale et d’apporter une réponse parfaitement adaptée.
Quant au suivi socio-judiciaire, il constitue une disposition particulièrement lourde de notre code pénal, dont la mise en œuvre peut durer de très longues années et à propos de laquelle on peut craindre une aggravation très sensible de la répression. Cette disposition existe ; elle est parfaitement adaptée aux circonstances : selon la commission des lois, il n’est pas nécessaire de l’étendre davantage.
De même, nous estimons que la liste des peines de stage est parfaitement conforme au principe de légalité des peines ; elle est réduite et précise : une infraction, un stage.
Enfin, il me semble que le fait de cumuler une peine d’amende avec une peine privative ou restrictive de droits ainsi qu’avec un travail d’intérêt général – TIG – constituerait une répression excessive.
Précisons d’ailleurs, pour répondre à l’une des observations qui nous ont été faites, qu’en aucune façon il n’est question que l’accord de la personne condamnée à l’exécution du TIG ne soit pas recueilli ; simplement – nous le verrons à propos d’un autre amendement –, il pourra être recueilli de manière différée, devant le juge d’application des peines, au lieu de l’être nécessairement au moment du prononcé, lorsque celui-ci a lieu en son absence.
L’avis de la commission est donc globalement défavorable – je réponds également par là aux autres remarques qui ont été formulées à propos de l’article 43. Quel est l’avis du Gouvernement ? Quelques mots pour présenter l’échelle des peines qui figure à l’article 43. Le système actuel est selon nous peu lisible – on ne sait plus très bien qui y fait quoi, entre un tribunal qui prononce une sanction qui ne sera pas exécutée telle qu’il l’a prononcée, l’intervention du juge d’application des peines, etc. –, déresponsabilisant pour les tribunaux – lesquels prononcent des peines qui ne seront pas exécutées telles qu’elles ont été prononcées –, et peu crédible pour nos concitoyens qui voient qu’alors qu’une peine d’emprisonnement a été prononcée, l’intéressé n’ira jamais en détention – je pourrais citer d’autres constats de cette nature.
Nous avons donc fait un choix clair, fondé sur ces deux principes : toute infraction mérite sanction – c’est à nos yeux capital ; mais il faut des sanctions adaptées à la personnalité du condamné, à ses antécédents, à l’infraction commise, à sa dangerosité, etc. Tels sont les principes qui nous guident pour parvenir à des peines vraiment effectives.
Sur ces fondements, nous avons décidé, d’une part, de créer différentes peines autonomes, c’est-à-dire déréférencées – si je puis utiliser ce terme – de la notion d’emprisonnement. Parmi elles, la détention à domicile sous surveillance électronique. Pourquoi en avons-nous fait une peine autonome ? Pour que le juge puisse la prononcer plus aisément, car nous savons que, dans certains cas, elle correspondra véritablement à la personnalité des condamnés. S’y ajoutent le TIG, bien sûr, dont les conditions de prononcé sont considérablement améliorées – nous aurons l’occasion d’y revenir –, ainsi que le stage, qui devient un stage unique subdivisé en plusieurs catégories.
Par ailleurs, nous modifions la compréhension de la détention en considérant qu’une peine de détention d’un mois n’a aucun sens, parce qu’elle est exclusivement désocialisante et ne permet pas d’éviter la récidive ni d’assurer la réinsertion sociale, ce qui fait pourtant partie des objectifs de la peine. Nous avons donc décidé qu’en dessous d’un mois il n’y aurait pas d’emprisonnement. Entre un et six mois, par principe, la peine doit s’effectuer en dehors de l’établissement pénitentiaire ; bien sûr, il peut y avoir des cas dans lesquels l’emprisonnement restera possible. Entre six mois et un an, nous permettons au tribunal de prononcer des peines réellement exécutées. C’est seulement au-delà d’un an que la peine d’emprisonnement pourra être aménagée le cas échéant.
Voilà une gradation claire, responsabilisante pour les tribunaux, réellement adaptée à la situation des condamnés. C’est grâce à cet ensemble de politiques pénales, joint au programme immobilier pénitentiaire dont nous avons eu l’occasion de parler et qui sera, lui aussi, différencié et adapté, que nous espérons pouvoir disposer de sanctions répondant efficacement aux infractions commises, mais également réduire la surpopulation carcérale.
Voilà pourquoi le Gouvernement tient évidemment à l’échelle des peines telle qu’il l’a reconstruite et émet un avis défavorable aux amendements en discussion. La parole est à M. Ugo Bernalicis. « Peu lisible », « déresponsabilisant », « peu crédible » : autant de reproches que l’on pourra aussi faire à l’échelle des peines que vous proposez, madame la ministre. Pourquoi vous dis-je cela ? Parce que vous vous êtes bel et bien arrêtée au milieu du gué. Vous commencez par déclarer qu’il faut en finir avec les alternatives à l’incarcération, qu’il faut pouvoir prononcer des peines autonomes, vous instaurez la détention à domicile sous surveillance électronique – qui implique d’autres problèmes ; mais pourquoi pas ? Simplement, en réalité, la peine de prison reste la monnaie virtuelle utilisée au tribunal : « au lieu de vous mettre six mois, je vais prononcer une peine de milieu ouvert » ; « au lieu d’un an », ou « parce qu’il vous reste six mois à un an », « je vous condamne à telle sanction, et au-delà, vous devrez vraiment faire de la prison ». C’est cela qui n’est pas lisible : que l’étalon interne à la justice reste la peine de prison. Vous n’avez pas écouté la première partie de mon intervention, monsieur le député ! Le problème est que vous ne créiez pas une peine de probation autonome – je ne parle pas d’un ab initio approximatif ou d’une alternative prononcée dès le jugement, ce qui est autre chose, que notre droit permet déjà, mais qui n’est pas utilisée. Dans votre système, on peut craindre des effets de seuil : un magistrat qui voudra emprisonner quelqu’un, qui l’aurait auparavant fait pour trois ou quatre mois, étant désormais, pour cette durée, réduit à prononcer une peine de milieu ouvert, va le condamner à six mois et un jour de prison ! Voilà ce qu’implique réellement ce système ; vous le savez, d’ailleurs, et craignez les effets de seuil, comme nous tous.
Dès lors, on peut soit lancer les paris – mais je ne suis pas là pour ça –, soit établir une échelle des peines telle que, pour un délit donné, il ne soit pas possible de prononcer une peine de prison. Vous dites que la détention à domicile sous surveillance électronique est entièrement déconnectée de la prison : ah bon ? Et dans votre esprit, quand on sera en infraction par rapport à cette peine, il se passera quoi ? On ira où ? (Mme Mathilde Panot applaudit.) La parole est à M. Jean-Louis Masson. Pour ma part, madame la ministre, je crois à l’exemplarité de la peine de prison. Monsieur le rapporteur, la réponse pénale ne saurait être adaptée au nombre de places de prison : je ne souscris pas à ce raisonnement. Je n’ai pas dit ça ! Moi non plus ! Si, mon cher collègue Paris, je vous ai bien écouté : vous vous êtes appuyé sur l’argument selon lequel il n’y a pas assez de places en prison ; vous lirez le compte rendu pour le vérifier ! C’est le raisonnement inverse qu’il faut appliquer : le nombre de places de prison doit correspondre à l’état de la délinquance et de la criminalité. (L’amendement no 641 n’est pas adopté.) Je mets aux voix l’amendement no 576. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 43
Nombre de suffrages exprimés 41
Majorité absolue 21
Pour l’adoption 6
Contre 35 (L’amendement no 576 n’est pas adopté.) (L’amendement no 1242 n’est pas adopté.) La parole est à M. Philippe Michel-Kleisbauer, pour soutenir l’amendement no 1268. Mon modeste plaidoyer vaudra également pour les amendements nos 1269 à 1272, qui portent sur le même sujet.
Le groupe MODEM souhaite revoir le vocabulaire ici employé – puisque, quant au fond, nous sommes d’accord avec la création de la peine de détention à domicile, qui enrichit l’arsenal dont disposent les juges pour lutter contre la délinquance. René Frégni, auteur provençal que notre ministre de l’intérieur connaît bien puisqu’il vient de Manosque, disait : « Écrivez le mot gare et montez dans un train qui n’existe pas. » La richesse de notre vocabulaire permet en effet de s’approprier les choses, de les fixer, et sa nuance autorise la précision.
Aussi souhaiterions-nous remplacer la notion de détention à domicile par celle d’assignation pénale à domicile, afin de réserver le mot de détention aux seules incarcérations dans les établissements pénitentiaires. Quel est l’avis de la commission ? Je comprends parfaitement cette interrogation purement sémantique – nous nous situons très au-delà de la sémantique dans les débats qui nous occupent. Nous craignons simplement une confusion, dont le risque est réel, avec les assignations administratives à résidence ou avec les assignations à résidence sous surveillance électronique prononcées à titre d’alternatives à la détention, notamment par le juge d’instruction.
Avis défavorable, donc, pour permettre une meilleure compréhension du texte et assurer à celui-ci la lisibilité voulue. Quel est l’avis du Gouvernement ? Demande de retrait, sinon avis défavorable. L’amendement est-il maintenu ? Oui. Très bien ! La parole est à M. Ugo Bernalicis. Cet amendement est vraiment très intéressant, car il touche à un questionnement profond concernant le bracelet électronique. Sous bien des aspects, il s’agit en effet d’une forme de détention, mais dans laquelle il n’existe pas de surveillant pénitentiaire : ceux qui jouent ce rôle, ce sont les familles, les proches, ceux qui hébergent les intéressés sur place. Ce sont eux qui reçoivent les coups de téléphone quand la personne n’est pas à l’heure. Cela exerce une pression sur l’environnement familial dans son ensemble.
Je comprends que vous vouliez parler d’assignation pénale, mon cher collègue : c’est logique, puisque l’on se situe ici dans le champ des peines et qu’il ne s’agit plus d’une assignation à résidence sous surveillance électronique – ARSE –, en tout cas en phase pré-sentencielle. J’ai donc envie d’être d’accord avec vous. En même temps, la formulation contenue dans le texte est peut-être la moins hypocrite : c’est bien d’une forme de détention qu’il s’agit. Beaucoup de gens ne la supportent d’ailleurs pas au-delà de six mois – raison pour laquelle il serait problématique d’étendre le dispositif jusqu’à deux ans –, car elle crée un état d’anxiété qui complique la vie à domicile, non seulement pour l’individu – passe encore : il a débloqué, il purge sa peine –, mais aussi pour son environnement. Voilà pourquoi certains détenus refusent le bracelet électronique et lui préfèrent une peine de prison, souvent un peu plus courte que la durée pendant laquelle ils doivent porter le bracelet.
Dès lors, si nous nous dotons ici d’un outil supplémentaire, dont la dénomination est en outre la moins hypocrite de celles qui ont pu être proposées, il ne faudrait pas croire pour autant qu’il est la panacée et que l’on va pouvoir mettre des bracelets à tout le monde sous prétexte que la technologie le permet. Il existe déjà l’assignation à résidence classique, sans bracelet ; la contrainte pénale classique ; la libération conditionnelle, sans bracelet, qui fonctionne, qui produit des résultats. N’allons donc pas penser que nous avons trouvé la peine autonome par excellence, celle qui va permettre de désemplir les prisons : en réalité, elle emporte bien d’autres problèmes. (Mme Mathilde Panot applaudit.) (L’amendement no 1268 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 508 et 852.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 508. Vous créez, madame la ministre, cette nouvelle pseudo peine, si je puis dire, de détention à domicile sous surveillance électronique. J’admets qu’il y a un progrès par rapport à l’hypocrisie que représentait le placement sous surveillance électronique – PSE – qui consistait à déconstruire la décision souveraine que le juge avait prononcée au nom du peuple français. Ici, la décision appartiendra bien au tribunal et, j’y insiste, j’admets qu’il s’agit d’un progrès en matière de lisibilité.
Quelle effectivité, toutefois, aura cette peine ? Je conteste d’ailleurs l’emploi du mot « détention ». Le PSE à domicile n’est pas une détention. Et ces alinéas participent de la même logique que celle suivie par vos prédécesseurs, celle, hypocrite, consistant à pallier le déficit de places de prison. Or le pays manque cruellement de places de prison. Aussi la sanction pénale ne peut-elle être prononcée comme il serait nécessaire par rapport à la gravité des faits commis.
Vous êtes donc contraints de créer des processus que vous parez de vertus supposées pour lutter contre la récidive. Je le répète : il s’agit d’une vaste hypocrisie. Vous cherchez des substituts au déficit de places de prison, voilà la réalité. La détention à domicile comme le placement sous surveillance électronique ne se substitueront pas aux places de prison qu’il faut créer pour que la loi pénale s’applique.
Il ne s’agit donc ici, encore une fois, qu’un subterfuge, un palliatif, si bien que, in fine , la peine n’a plus de sens. Elle n’est plus dissuasive et, parce qu’elle ne fait plus peur, elle est un encouragement à la récidive. C’est la réalité que subissent au quotidien les policiers et les gendarmes qui nous interpellent, qui se désolent qu’il n’y ait pas de sanctions adaptées à la gravité des faits qu’ils ont la lourde responsabilité, la difficulté et le courage de combattre au quotidien. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 852. Le réquisitoire dressé par notre collègue Ciotti est complet. Il y a une vraie difficulté et une part d’hypocrisie aujourd’hui et nous souhaitons supprimer cette peine de détention à domicile sous surveillance électronique. Déjà existent – et je serais un peu moins sévère que M. Ciotti sur ce point – des placements sous surveillance électronique. Ces derniers mériteraient certes un dispositif d’évaluation plus complet que celui qui existe aujourd’hui, afin que nous nous assurions que la prévention de la récidive est réellement assurée, ce qui, honnêtement, me semble loin d’être le cas. Or comme nous n’avons pas tiré toutes les conséquences possibles de ce dispositif, nous ne souhaitons pas pour l’heure aller plus loin en la matière, d’où le présent amendement de suppression des alinéas 14 à 19. Quel est l’avis de la commission ? La commission estime, tout au contraire, que la détention à domicile est une véritable sanction. Elle est d’ailleurs très durement ressentie par les condamnés, tout au moins quand elle dure au moins plusieurs mois. Elle présente en outre l’avantage de favoriser la réinsertion et nous ne sommes absolument pas persuadés, pour notre part, que des peines de très courte durée évitent la récidive, bien au contraire. La commission a donc décidé, de façon nette, de conserver la peine de détention à domicile sous surveillance électronique, selon nous très efficace. Quel est l’avis du Gouvernement ? La peine de détention à domicile sous surveillance électronique, monsieur Ciotti, n’est pas un subterfuge mais au contraire la prise en considération de la réalité ; elle n’est pas une hypocrisie mais un choix ; elle n’est pas une contrainte mais l’adaptation d’une peine à une situation donnée ; elle n’est pas un substitut mais une prise en compte assumée. Je suis certaine, et je m’adresse également à vous, monsieur Gosselin, que certains détenus dont l’infraction exige une sanction – car toute infraction mérite sanction, cela nous l’avons dit – n’ont pas pour autant à être nécessairement condamnés à l’enfermement. Quand ces personnes travaillent, sont socialement insérées, faut-il rompre cette socialisation pour les entraîner dans une situation dont on sait qu’elle sera un facteur de récidive ?
Il n’y a là, bien sûr, rien d’automatique et il faut mettre en relation la situation de la personne condamnée et l’infraction. Il y a dans la détention à domicile sous surveillance électronique la possibilité d’éviter un risque de désocialisation. C’est en outre un dispositif qui nous permettra d’encore mieux individualiser la peine et nous savons que c’est important. Vous savez comme moi, monsieur Ciotti, que, pour les peines d’emprisonnement de moins de cinq ans, le taux de récidive est de près de 60 %, ce qui montre bien que si l’emprisonnement est une réponse, il faut qu’elle soit adaptée – or elle ne l’est pas pour tout le monde, et cela vous le savez aussi. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Nous voyons bien que l’accompagnement prévu pour ceux qui seront placés en détention à domicile sous surveillance électronique est assez faible. Il y a en effet assez peu de conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation et il y en aura de toute façon toujours trop peu pour suivre ceux qui portent un bracelet électronique. On se dit : « Celui-là, on va lui mettre un bracelet, comme ça on sera tranquilles : il est dehors, il est surveillé, circulez, il n’y a rien à voir. » C’est peut-être aussi le fond du problème : si l’on ne se contentait pas du bracelet électronique mais qu’on travaillait en plus sur la problématique délictuelle de la personne concernée, le dispositif serait intéressant en ce qu’il permettrait un suivi.
Seulement, aujourd’hui, des magistrats, pour éviter l’incarcération – puisque les prisons sont surpeuplées –, décident de placer des personnes qu’ils condamnent pour trafic de stupéfiants à un placement sous surveillance électronique – or la pose d’un bracelet électronique n’empêche pas la poursuite du trafic de stupéfiants. C’est non seulement évident mais c’est la réalité et, cela, quand bien même ceux qui continuent leur trafic respectent les horaires qui leur sont imposés. Il faut donc donner au magistrat la possibilité d’individualiser la peine plutôt que de ne lui laisser que la possibilité de se dire qu’il y a la peine de probation autonome avec la détention à domicile sous surveillance électronique. Ce n’est pas vrai, il s’agit d’un outil parmi d’autres et peut-être pas le meilleur, par ailleurs. La parole est à M. Éric Ciotti. J’entends vos arguments, madame la ministre, et j’ai bien souligné que le fait que ce soit le tribunal qui prononce cette peine de détention à domicile était un progrès par rapport à l’aménagement de peine tel que prévu par les textes en vigueur. C’est incontestable.
Toutefois, vos arguments sont en porte-à-faux avec vos déclarations et avec l’étude d’impact. Le présent texte a pour objectif de réduire de 8 000 personnes la population carcérale… Non. …, quels que soient les faits commis, alors que 71 000 détenus – presque un record – sont écroués dans des prisons qui au total ne comptent que 60 000 places, soit un taux d’occupation de 117 %. Vous vous dévoilez et vos intentions sont donc désormais claires. Or, quels que soient vos arguments, malgré l’habillage par des vertus supposées de tel ou tel dispositif, il n’y a qu’une réalité, qui n’est pas la seule vôtre, j’en conviens, mais également celle de vos prédécesseurs. Et j’ai combattu cette logique consistant à diminuer par tous les moyens la population carcérale, y compris lorsque nous étions majoritaires – ainsi ai-je voté contre la loi pénitentiaire de 2009.
L’objectif ne doit pas être de faire diminuer la population carcérale en soi mais de faire en sorte que les peines soient appliquées : si des délits et des crimes ont été commis et nécessitent une sanction pénale, cette dernière doit être prononcée et exécutée. Et, pour cela, il faut des places de prison et non pas suivre la logique inverse, celle que vous nous proposez, qui, je le répète, vise à diminuer le nombre de détenus de 8 000, ce qui ne peut que nuire à la sécurité publique alors que la violence augmente. Ce n’est pas en diminuant la gravité des peines encourues qu’on la fera reculer ! Bien sûr ! La parole est à Mme la garde des sceaux. Je ne souhaite pas prolonger les débats mais M. Ciotti sait très bien que je ne peux pas le laisser prétendre cela. Vous savez, monsieur le député, parce que je vous l’ai déjà dit en commission, que je n’ai pas pour objectif de diminuer de 8 000 le nombre de détenus. Ce n’est pas mon objectif, c’est la résultante que nous supposons… Cela ne revient-il pas au même ? Non, ce n’est pas la même chose, ne faites pas l’innocent : vous qui êtes un fin lettré, vous ne pouvez tout de même pas confondre la cause et la conséquence. Notre objectif est d’obtenir que les peines soient vraiment adaptées à la nature des infractions et aux personnes qui les commettent. Il en résulte une diversification des peines avec des peines autonomes, monsieur Bernalicis, parce que les tribunaux pourront les prononcer directement. C’est déjà le cas, ils peuvent les prononcer ab initio ! Et outre les peines autonomes, restent les peines d’emprisonnement et l’ensemble, la résultante, sera en effet la régression de la surpopulation carcérale – la résultante, pas l’objectif. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) (Les amendements identiques nos 508 et 852 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Erwan Balanant, pour soutenir l’amendement no 1265. Le présent amendement vise à permettre à la juridiction et au juge d’application des peines de disposer d’une marge d’appréciation plus importante lorsqu’ils fixent les modalités d’une détention à domicile sous surveillance électronique. En effet, ces détentions se révèlent parfois anxiogènes pour les condamnés, dans la mesure où un imprévu, comme un aléa de transport, peut être susceptible de les empêcher de respecter un horaire fixé strictement. Or le texte ne permet pas à la juridiction ou au juge d’application des peines de tenir compte de ce type d’événement lorsqu’il détermine les horaires de la détention à domicile.
Il ne permet pas non plus d’autoriser, à titre exceptionnel, le condamné à bénéficier d’un horaire un peu plus souple (Mme Marine Le Pen s’exclame) pour pouvoir participer, par exemple, à un pot de départ. Un pot de départ ? Oui, un pot de départ, car quand vous êtes en réinsertion, cela vous permet, madame Le Pen, de ne pas vous couper de la société. Non mais on rêve ! Pourquoi ne pas l’autoriser à se rendre à un petit cocktail, par exemple ? Non, pas à un cocktail mais à un pot de départ car oui, madame Le Pen, la convivialité fait partie de la vie des entreprises et c’est en y participant que parfois on ne se désocialise pas.
Le présent amendement, sans infléchir – pour rassurer Mme Le Pen – la force des obligations incombant aux condamnés au titre de la détention à domicile, vise à permettre aux magistrats de déterminer la teneur de ces obligations de manière plus libre et humaine, en s’attachant davantage aux particularités de chaque situation. Voilà un amendement complètement lunaire ! Quel est l’avis de la commission ? Avis favorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis : les adverbes ne sont pas toujours nécessaires. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Je suis moi aussi favorable à cet amendement. Quand vous rencontrez les services pénitentiaires d’insertion et de probation, vous vous rendez compte que des broutilles polluent l’activité de magistrats qui sont obligés de se prononcer toutes les cinq minutes pour cinq minutes en l’occurrence. Un peu de discernement, un peu de souplesse ne ferait de mal à personne.
Je reviens à la surveillance électronique à domicile pour vous alerter sur un point : ce dispositif comporte un biais social très fort. Par exemple, il n’est pas applicable aux SDF non plus qu’à tous ceux qui n’ont pas de logement. Lorsque les personnes sont hébergées chez quelqu’un d’autre, le bracelet s’invite chez un tiers qui dispose alors d’un moyen de pression et de coercition sur celui qu’il héberge. Cela rend la situation pour le moins étrange si ce n’est un peu glauque. Ne faisons pas de la détention à domicile sous surveillance électronique un axe majeur de développement des peines en milieu ouvert : il existe de nombreuses alternatives en la matière qui fonctionnent aussi correctement.
Oui, madame la ministre, on peut d’ores et déjà prononcer ab initio un placement sous surveillance électronique, ou, dans le cadre d’une mesure pré-sentencielle, décider d’une ARSE – assignation à résidence sous surveillance électronique. Il est vrai, en revanche, que les magistrats ne prononcent pas ces mesures aujourd’hui – les arguments de M. Ciotti et de M. Gosselin étaient justes sur ce point –, parce que les enquêtes personnalisées ne sont pas assez efficaces. Les ESR – enquêtes sociales rapides – ne sont précisément pas assez rapides pour que les magistrats puissent aller dans ce sens. Ils sont aussi malheureusement trop frileux pour le faire. Voilà la réalité dans ce pays ! La parole est à Mme Marine Le Pen. Madame la ministre, avant que nous n’interrompions l’examen du texte, le 23 novembre dernier, je vous avais dit que vous étiez pire que Mme Taubira. La référence à Mme Taubira n’est pas une insulte ! Vous venez de le démontrer une fois de plus, et, en matière de laxisme, ce n’est pas une petite référence ! On vous propose un amendement qui constitue le summum du laxisme… Mais non ! Évidemment, vous y êtes favorable. Nous n’en sommes pas très étonnés.
Il faut tout de même se souvenir que la peine dont vous parlez est une peine substitutive à l’emprisonnement. Savez-vous ce qu’il faut avoir fait pour prendre de la prison ferme ? Savez-vous la gravité des faits qu’il faut avoir commis dans notre pays, compte tenu de l’effondrement de l’échelle des peines, pour être condamné à de la prison ferme ? Savez-vous combien de fois il faut avoir récidivé pour se voir condamné à une peine de prison ferme ?
Bien qu’il s’agisse déjà d’une peine aménagée, d’un cadeau, en quelque sorte, fait à celui qui devrait aller en prison, vous nous expliquez qu’il faut que nous restions souples au cas où le type concerné rentre un peu en retard s’il a été invité à un pot de départ. Vous rendez-vous compte de ce que les Français ressentent lorsqu’ils vous entendent ? Eux, ils sont confrontés tous les jours à la délinquance, tous les jours, ils croisent en bas de chez eux, sur leur trottoir, des gens qui devraient être en prison.
Ils considèrent déjà que depuis des années les gouvernements n’ont pas mené la politique pénale qui aurait dû être menée, qu’ils n’ont pas fait preuve de la fermeté dont ils auraient dû faire preuve, et vous en rajoutez une louche de manière complètement déconnectée avec la réalité de ce que vivent les victimes ! Pardon de dire des gros mots et de parler des victimes. Je sais que, dans cette assemblée, on les évacue systématiquement d’un revers de main, mais, enfin, tout de même ! Point trop n’en faut ! Un peu de décence à leur égard ! Je crois qu’il faut raison garder dans vos propositions et dans vos arguments ! (MM. Louis Aliot et Ludovic Pajot applaudissent.) La parole est à M. Erwan Balanant. Madame Le Pen, c’est l’un des grands malheurs de notre société : parfois, on ne punit pas assez vite ni assez bien, je suis entièrement d’accord avec vous. Parfois aussi, il faut avoir un petit peu de bon sens, si je peux me permettre de rétorquer cela. Lorsqu’une peine se passe mal et que quelqu’un dérive puis récidive, pour la société, c’est la double peine.
Nous avons discuté avec un certain nombre de juges de l’application des peines qui nous disent que la petite amélioration proposée permettrait de donner un peu de souplesse et d’éviter que quelqu’un ne se désocialise. Vous devez comprendre cela, vous qui dites tant aimer les Français, car, je vous le rappelle, celui qui est condamné à de la prison ferme n’en est pas moins Français. Il a payé, il paie, mais est-ce une raison pour le mettre au ban de la société durant toute sa vie ? Non ! Pourtant, c’est aujourd’hui trop souvent ce qu’il se passe avec la prison et avec un certain nombre de peines. Supprimons les peines ! Non, il ne s’agit pas de les supprimer, madame Le Pen, mais de les aménager pour que tout le monde y gagne : la victime, la société et la personne qui a été condamnée, laquelle doit pouvoir se reconstruire. La parole est à Mme la garde des sceaux. Madame Le Pen, un vol de scooter avec bris de neiman est puni de cinq ans d’emprisonnement. Arrêtez ! Vous savez très bien que ce n’est pas vrai ! C’est l’échelle des peines ! Voilà d’ailleurs pourquoi il faut la revoir ! C’est peut-être l’échelle des peines, mais ce n’est pas appliqué ! Je voulais également vous dire, madame la députée, parce que peut-être n’avez-vous pas pu assister au début de notre débat, que la détention à domicile sous surveillance électronique n’est plus seulement, dans les dispositifs que je propose, un aménagement de la peine de prison. C’est devenu une peine autonome. C’est pareil ! Pas tout à fait ! Cela signifie que cette peine n’est pas prononcée par rapport à l’emprisonnement.
Pour conclure, madame la députée, lorsque vous aimez à me comparer à Mme Taubira, sachez que ce n’est pas, à mes yeux, une insulte si je mesure la lutte contre les discriminations que cette dernière a su conduire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Mme Cécile Untermaier et M. Jean-Paul Lecoq applaudissent également.) Bravo ! La parole est à M. Stéphane Mazars. Tout d’abord, le placement sous surveillance électronique n’est pas une sous-peine. Il peut être vécu très difficilement – nous le savons aujourd’hui, car nous disposons de suffisamment de recul. On estime qu’au-delà de six mois, ce type de mesure a plus d’impact sur la personne concernée qu’une véritable détention. Ce point est acquis dans le débat, mais je crains qu’il ne vous ait échappé, madame Le Pen, puisque vous avez certainement quitté les prétoires et la pratique qui a pu être la vôtre, depuis de nombreuses années.
Ensuite, je pense que notre collègue, Erwan Balanant, en parlant d’un « pot de départ », a choisi un exemple malheureux. En revanche, lisez l’exposé sommaire de l’amendement, vous verrez qu’il s’agit uniquement de ne pas avoir une approche absolument stricte du respect des horaires de détention à domicile, dans la mesure où des événements extérieurs peuvent retarder un retour à la maison – l’exemple du retard de transport est cité. C’est cela que l’amendement vise. Le « pot de départ » était un exemple malheureux… Je ne suis pas d’accord ! Ce n’est pas ce qui est visé par l’amendement. La parole est à Mme Cécile Untermaier. De façon exceptionnelle, nous voterons l’amendement de M. Balanant ! (Sourires.) Ce n’est pas la première fois ! C’est vrai, monsieur Balanant ! En tout cas, je trouve qu’on en fait beaucoup pour un amendement de bon sens. Le juge serait vraiment en difficulté s’il devait déterminer ce qui est strict et ce qui ne l’est pas. Si vous lisez l’amendement et son exposé sommaire, vous comprenez bien qu’il peut à tout moment rectifier un comportement qui n’est pas celui attendu de la personne à l’encontre de laquelle cette mesure a été prise. (L’amendement no 1265 est adopté.) Nous en venons à l’amendement no 577 rectifié.
Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danièle Obono pour soutenir l’amendement. Il vise à supprimer les alinéas 20 à 31 de l’article 43 qui opère un changement profond et problématique de la peine de stage.
Il est tout d’abord prévu que la peine de stage n’est plus une alternative à l’incarcération, car elle pourrait être prononcée « en même temps que l’emprisonnement ». De notre point de vue, cela confirme le tropisme carcéral qui tend à détricoter les peines alternatives à l’incarcération. La peine de stage est désormais une peine cumulable à l’enfermement.
Ensuite la peine de stage est effectuée « aux frais des condamnés ». Méconnaissant très certainement la situation des personnes visées par ce dispositif, le Gouvernement systématise le paiement du coût des stages par les personnes condamnées. Actuellement, ce paiement est à l’appréciation du magistrat qui individualise la peine en fonction de la situation de la personne. Cette évolution va à l’encontre des déclarations de la ministre qui a insisté sur la nécessaire individualisation des peines. Le groupe La France insoumise estime essentiel que la juridiction puisse conserver la possibilité de moduler le coût afin d’assurer une personnalisation de la peine. Nous craignons un effet de seuil avec un recours à des peines courtes d’emprisonnement pour ceux ou celles qui n’ont pas la capacité de paiement nécessaire. Quel est l’avis de la commission ? Madame Obono, je ne comprends pas pour quelles raisons une personne détenue ne pourrait pas être sensibilisée à certains sujets dans le cadre de stages. Contrairement à vous, nous pensons que les détenus doivent pouvoir bénéficier d’une sensibilisation, y compris dans le cadre de la préparation à la sortie de détention. Il en va tout autrement s’agissant des autres peines, car cela constituerait une très forte accentuation de la répression.
Le stage « est effectué aux frais du condamné », sauf si le juge en décide autrement compte tenu de la situation financière et matérielle du condamné. Je suis défavorable à l’amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Monsieur le rapporteur, je ne comprends pas que vous ne compreniez pas ! Qu’est-on censé faire en détention ? Attendre derrière les barreaux que les jours passent ? Malheureusement, c’est ce que font aujourd’hui beaucoup trop de détenus. Les activités proposées, les stages ou la formation professionnelle sont totalement en deçà de ce qui pourrait faire de l’emprisonnement un temps utile. C’est vous, madame la ministre, qui parlez de rendre la prison utile, mais vous voulez rendre les stages payants.
La logique précédente est inversée. Le stage est payant, sauf si le juge en décide autrement au vu de la situation. Jusqu’à présent il s’agissait d’un moyen d’individualisation de la peine. On voit bien que vous ne voulez pas améliorer la prise en charge des détenus en prison pour travailler sur la problématique délictuelle – vous pensez qu’il faut obligatoirement passer par une peine de stage cumulable avec la peine d’emprisonnement. Vous refusez l’individualisation, et on en vient à se demander à quoi servent les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation, et à quoi sert tout le travail effectué aujourd’hui en détention.
Laissez donc les magistrats faire leur travail ! Laissez les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation et les établissements pénitentiaires faire leur part du travail dans le cadre de l’individualisation de la peine ! Je mets aux voix l’amendement no 577 rectifié. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 6
Contre 57 (L’amendement no 577 rectifié n’est pas adopté.) La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 583. Il est défendu. (L’amendement no 583, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à Mme Corinne Vignon, soutenir l’amendement no 832. Je présenterai conjointement les amendements nos 832 et 1195, qui ont le même objet. Ils visent à intégrer, au sein du stage de citoyenneté, un volet de sensibilisation au respect de l’animal, lorsqu’une personne est condamnée pour violence ou maltraitance contre des animaux.
De nombreux faits de maltraitance sur des animaux sont signalés chaque année en France. En 2017, le parquet a été saisi de 8 447 affaires de ce type, contre 7 766 en 2012, parmi lesquelles 5 539 pour des faits d’actes de cruauté envers les animaux ou de mauvais traitement infligé à un animal.
Le code pénal sanctionne, par une contravention, les atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l’intégrité d’un animal domestique ou assimilé, ainsi que les mauvais traitements infligés sans nécessité. À ce jour, toutefois, aucune peine éducative n’existe pour lutter contre la maltraitance animale.
Plusieurs études ont démontré qu’un lien existe entre la maltraitance sur les animaux et la violence, notamment domestique, envers les êtres humains. En adaptant la réponse pénale afin de diminuer la maltraitance, nous visons un objectif plus global : lutter contre toute forme de violence.
Il existe de plus en plus de peines dites éducatives – c’est le cas des stages spécifiques de sensibilisation à la sécurité routière ou aux dangers de l’usage des produits stupéfiants –, mais il n’existe pas de peines de ce type concernant la maltraitance des animaux. L’intérêt de ces stages est de limiter de manière significative les risques de réitération des infractions concernées en apportant, par une peine adaptée, une réponse pédagogique à leur auteur.
Compte tenu des indications qui ont été données en commission, je propose deux rédactions différentes visant à intégrer au sein du stage de citoyenneté un volet consacré à la sensibilisation au respect de l’animal pour les personnes condamnées pour violences contre des animaux. Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà largement abordé ce débat la semaine dernière, dans d’autres hypothèses, y compris le vote d’une contravention. La commission a longuement discuté de l’opportunité d’intégrer la question de la maltraitance des animaux dans les stages de citoyenneté : elle a conclu par la négative.
Il existe déjà sept stages de ce type, et selon qu’on serait sensible à tel sujet plutôt qu’à tel autre, toute infraction pourrait donner lieu à la création d’un nouveau stage : cela serait sans fin ! Il existe déjà de nombreuses modalités de répression de la maltraitance des animaux. Il nous semble, de surcroît, que l’amendement no 832 n’atteindrait pas le but que vous souhaitez. La commission y est donc défavorable.
Votre deuxième amendement, no 1195, peut sembler plus acceptable. Il vise à préciser que le stage de citoyenneté « peut comprendre une sensibilisation au respect de l’animal ». Cette précision est-elle bien nécessaire ? Je pense, pour ma part, qu’elle est inutile, car la citoyenneté comprend de multiples autres dimensions. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je vous engage donc à retirer ces amendements, même si je doute que vous accédiez à cette demande ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Je partage, sur le fond, vos préoccupations, mais trois éléments me conduisent à donner un avis défavorable à ces amendements.
Premièrement, on ne peut pas instituer un stage adapté pour chaque infraction. On ne peut pas suivre le principe « une infraction, un stage » : ce serait beaucoup trop compliqué à organiser.
Deuxièmement, s’il s’agit d’un acte de cruauté, alors il s’agit d’un délit, et dans ce cas, c’est une sanction plus sévère qu’un stage qui s’impose. Cette sanction peut aller jusqu’à une peine d’emprisonnement.
En revanche, troisième argument, s’il s’agit d’un acte d’une gravité moindre, alors il est possible d’y répondre soit par une composition pénale, soit par une alternative aux poursuites. Ces procédures permettent, précisément, de proposer à l’auteur des faits un stage dans des organismes sociaux, éventuellement des associations de protection des animaux.
Pour ces raisons, je vous engage à retirer ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable. La parole est à M. Éric Diard. Je trouve que ces deux amendements vont dans le bon sens.
La loi a évolué, et les animaux ne sont plus définis sur le plan juridique comme des biens meubles mais comme des « êtres vivants doués de sensibilité ». Et pourtant, les actes de cruauté envers les animaux ont augmenté de manière exponentielle en 2017. Or une étude canadienne a montré que la maltraitance envers les animaux n’est pas sans lien avec la maltraitance envers les personnes. Ceux qui maltraitent les animaux maltraitent souvent aussi leurs femmes, leurs enfants : c’est très grave.
Le stage de citoyenneté vise à rappeler aux personnes condamnées les valeurs républicaines. Il a une fonction éducative. Il faut lutter contre la récidive des personnes condamnées pour violences envers les animaux, qui est élevée. Ces deux amendements me paraissent opportuns à ce titre : aussi les soutiendrai-je. La parole est à M. Loïc Dombreval. Pour appuyer les propos tenus par ma collègue Corinne Vignon, je tiens à souligner combien l’expérience des TIG mettant en contact des condamnés et des animaux est positive. Ainsi, dans le Val-d’Oise, une ferme accueille depuis quelques années des personnes condamnées à des TIG, où celles-ci ont l’occasion d’élever des animaux. Leur taux de non-réitération est spectaculaire. Le contact avec les animaux représente donc bien plus qu’une alternative à la prison : il permet de réveiller les consciences. C’est une école du respect du vivant, un retour à la dignité.
Dans le même ordre d’idée, des associations pratiquent la médiation animale en milieu carcéral : il s’agit de relier les détenus au vivant afin de les aider à réorienter leur vie. C’est une démarche surprenante, c’est vrai, mais elle fait ses preuves : ses résultats sont mêmes inespérés. Un ouvrage a été publié à ce sujet en décembre 2014, intitulé Des animaux pour rester des hommes : il témoigne des résultats de la médiation animale dans la maison d’arrêt de Strasbourg.
Tout cela montre que la sensibilisation au respect de l’animal est à la fois une méthode de réinsertion, une garantie de résultats en matière de prévention de la récidive, un chemin vers le respect d’autrui et le retour à l’estime de soi. Il nous appartient donc, chers collègues, de consacrer un nouvel outil à cette approche fructueuse : le stage de sensibilisation au respect de l’animal que propose Mme Vignon au moyen de ces amendements que je vous invite à voter. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Je soutiens moi aussi ces amendements. La souffrance animale doit être prise en compte – plus exactement : elle doit être combattue – dans notre société. Il s’agit d’un fait de société important : comme l’a rappelé tout à l’heure Éric Diard, il y a un lien entre la souffrance que l’on inflige aux animaux et celle que l’on inflige aux êtres humains. Il ne s’agit pas uniquement de la souffrance globale que la société inflige, mais aussi de celle qui est le fait d’une personne donnée.
Vous avez dit, madame la ministre, que nous ne pouvons pas suivre le principe « une infraction, un stage ». Mais je pense qu’il s’agit, dans l’absolu, d’une bonne idée : il s’agit d’apporter une réponse personnalisée, adaptée au délit en question. Cela permettrait peut-être d’assurer une justice plus aboutie, une justice meilleure.
Vous avez dit par ailleurs que certains de ces délits sont déjà punis par de lourdes peines, raison pour laquelle, selon vous, un stage de sensibilisation au bien-être animal serait inadapté. C’est bien le signe, comme je le disais tout à l’heure, qu’il y a un problème d’échelle des peines pour les délits – y compris s’agissant du vol de scooter, que vous avez évoqué tout à l’heure. Si une peine de cinq ans de prison est trop sévère pour un vol de scooter, alors il faut prévoir une durée inférieure pour cette infraction ; de même, si la peine encourue en matière de maltraitance des animaux est trop élevée, il faut prévoir une peine moins longue et l’assortir d’un stage de sensibilisation. Il faut donner une autre idée de la justice, mais ce n’est pas ce que vous faites par ce texte.
Par ailleurs, il est vrai que l’animalothérapie est très utilisée dans les prisons, pour une bonne raison : parce que ça marche ! Si ce n’était pas le cas, elle ne serait pas employée. Les responsables du centre pénitentiaire pour femmes de Rennes souhaitaient disposer de chiens en permanence, mais c’était trop compliqué : il leur faut donc passer par une association, ce qui n’a rien d’évident.
J’espère du fond du cœur que Mme Le Pen apportera son soutien à ces amendements, elle qui voulait mettre des chats partout. Je la sais proche des animaux ; je l’espère proche de ces amendements ! La parole est à Mme Corinne Vignon. Je retire l’amendement no 832 mais je maintiens l’amendement no 1195, qui est quasiment identique. (L’amendement no 832 est retiré.) (L’amendement no 1195 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 507 et 850.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 507. Il est défendu. La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 850. Il est défendu. (Les amendements identiques nos 507 et 850, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) Nous en venons à l’amendement no 578.
Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour défendre l’amendement. Par cet amendement de suppression qui cible certains alinéas de l’article, nous entendons conserver l’identité du travail d’intérêt général. Pour cela, il ne faut pas qu’il puisse être effectué auprès de personnes morales de droit privé. Nous considérons en effet qu’en élargissant les travaux d’intérêt général aux entreprises privées, le Gouvernement procède de fait à une privatisation du service public de la justice au détriment de l’intérêt général.
Le Gouvernement souhaite que cette peine puisse être accomplie au sein des entreprises, personnes morales de droit privé relevant de l’économie sociale et solidaire et poursuivant un but d’utilité sociale. La commission a élargi cette possibilité aux sociétés à mission au sens de l’article L. 210-10 du code de commerce.
Traditionnellement, les sociétés de droit privé sont exclues du champ des organisations pouvant accueillir des travaux d’intérêt général. En revenant sur cette exclusion, vous creusez une brèche. La peine de TIG est une sanction-réparation au profit de la société ; par cette réhabilitation, une personne ayant causé un dommage à la société peut réparer sa faute par un travail non rémunéré au profit de la société.
Par ailleurs, le Gouvernement a choisi d’augmenter le nombre maximal possible d’heures de TIG, lequel passera de 280 à 400. Nous refusons cette augmentation, qui conduirait à la constitution d’une main-d’œuvre précarisée sous main de justice. À ce niveau, le but des TIG n’est plus la réinsertion !
Enfin, le Gouvernement a souhaité que les mineurs puissent être condamnés à une telle peine qui devient l’alpha et l’oméga des mesures de justice. Ce faisant, il s’assied sur le principe de l’individualisation des peines, et surtout de la primauté de l’éducatif sur le répressif. Nous nous y opposons : nous préférerions que le Gouvernement se concentre sur le développement des postes de TIG dans les administrations, les collectivités territoriales et les entreprises publiques. Nous partageons en effet le constat qu’il est nécessaire de faire des efforts pour développer cette mesure bien identifiée par nos concitoyens et concitoyennes ainsi que par les magistrats et magistrates. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) Quel est l’avis de la commission ? Détaillant l’échelle des peines, nous avons déjà évoqué tout à l’heure le travail d’intérêt général. Ce projet de loi, tel qu’il a été modifié par la commission, vise à lui donner toute sa place. Nous pensons que l’incarcération est nécessaire, mais que d’autres dispositifs permettent d’assurer la protection de la société, par une sanction réelle, tout en œuvrant à la réinsertion de la personne condamnée. Le travail d’intérêt général prend d’ailleurs une place importante dans la nouvelle échelle des peines, où il figure en troisième position.
Madame Obono, vous avez évoqué plusieurs questions de nature différente. Il est exact que la durée maximale d’un TIG est actuellement de 280 heures ; nous proposons de la porter à 400 heures. Il ne s’agit bien sûr pas que toutes les peines de TIG soient de 400 heures, mais de donner un outil plus efficace aux magistrats. En effet, la crédibilité du travail d’intérêt général repose en partie sur sa durée.
Ensuite, s’agissant des mineurs, je rappelle qu’ils peuvent déjà être condamnés à un travail d’intérêt général. L’amendement adopté en commission permet simplement qu’un mineur puisse être condamné à un TIG dès lors qu’il est âgé d’au moins seize ans quand il comparaît devant la juridiction, y compris s’il était plus jeune au moment de la commission de l’infraction. Cela permettra d’appliquer la mesure à des mineurs en âge de comprendre, tout en les intégrant dans un dispositif qui constitue une véritable réponse à un acte commis à un plus jeune âge. Cette disposition est absolument nécessaire pour que la réponse soit plus adaptée à leur personnalité.
Enfin, l’extension des structures autorisées à proposer des TIG est un vrai sujet de débat. Celui-ci a eu lieu largement au sein de la commission et a aussi fait l’objet d’un rapport remis au Premier ministre. L’une des voies par lesquelles le travail d’intérêt général peut trouver son plein développement est aussi d’élargir le nombre de structures susceptibles d’accueillir des personnes condamnées à une peine de TIG. Et il nous a semblé que le secteur de l’économie sociale et solidaire, secteur parfaitement protégé et correspondant tout à fait à la logique sociale du travail d’intérêt général, devait pouvoir lui aussi en accueillir. Ce secteur est extrêmement réactif, y compris en zone rurale. Nous y avons ajouté les « entreprises à mission » telles que définies dans le projet de loi PACTE en cours d’examen : il sera possible à ces dernières d’accueillir des personnes condamnées à une peine de TIG, si la mission sociale qu’elles auront elles-mêmes définie dans leurs statuts les en rend susceptibles.
Ces éléments d’évolution profonde du travail d’intérêt général nous paraissent parfaitement correspondre au rôle que nous entendons dorénavant lui voir jouer. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je ne saurais mieux argumenter que M. le rapporteur. Même avis. La parole est à M. Ugo Bernalicis. On part du constat que la peine de travail d’intérêt général est trop peu prononcée aujourd’hui : c’est vrai. Et on pense qu’il faut qu’elle le soit davantage : c’est vrai, raison pour laquelle j’étais pour une peine de probation autonome lors de la discussion de notre amendement qui proposait une autre échelle des peines, où le travail d’intérêt général aurait pu être un élément important. Néanmoins, on finit par céder sur des choses qui me semblent essentielles : un travail d’intérêt général, ce n’est pas une « peine de travail », une condamnation à n’importe quel travail. Il comporte une dimension d’intérêt général, ce qui suppose qu’on fasse appel à des structures, publiques ou privées, mais nécessairement à but non lucratif. Or en ouvrant le dispositif à l’économie sociale et solidaire, aussi sympa soit la dénomination de ce secteur, on l’ouvre tout de même au secteur privé marchand, à but lucratif. Voilà la réalité. Et avec le relèvement du plafond à 400 heures, je fais confiance à de grandes entreprises ayant déjà une filiale œuvrant dans le segment de l’économie sociale et solidaire pour proposer des postes de travail d’intérêt général au-delà des 280 heures du plafond actuel, parce que cela s’insérera bien dans leur plan de charge et que, dans le même temps, joignant ainsi l’utile à l’agréable, elles pourront se donner une bonne image. Pourquoi ne se diraient-elles pas : « Tope là ! » ?
En réalité, c’est parce qu’on a démissionné, en renonçant à proposer des postes de travail d’intérêt général là où on pourrait le faire mais où on ne le fait pas, car le principal problème, ce sont les encadrants, tout le monde le sait. Et que propose-t-on pour qu’il y en ait davantage et qu’ils soient mieux formés ? Est-ce la future agence nationale du travail d’intérêt général qui s’en chargera demain ? Non, absolument pas. C’est le cœur du problème. Quand je suis allé voir, dans ma circonscription, à Lille, le directeur du CROUS et celui du SPIP – service pénitentiaire d’insertion et de probation –, le premier m’a dit que le CROUS ne prenait pas de personnes en TIG ; or, finalement, le CROUS de Lille va proposer pour la première fois des postes de TIG, et ce uniquement parce que j’ai mis les deux services en relation ! Merci, monsieur Bernalicis ! Et ce sont des initiatives comme celle-ci qui, à côté de circulaires interministérielles et d’objectifs fixés aux administrations concernées, devraient permettre de développer le TIG, pas le secteur marchand. Je mets aux voix l’amendement no 578. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 7
Contre 55 (L’amendement no 578 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 1001, 851 et 703, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 1001. Madame la ministre, je suis favorable aux peines de travaux d’intérêt général et je pense qu’on doit les accompagner et les développer. C’est pourquoi mon amendement propose de supprimer l’obligation de consentement du prévenu, de manière à laisser au juge la faculté de décider s’il est pertinent ou non, au regard de la situation de ce dernier, de prononcer cette peine. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 851. Notre rapporteur a fait un très bon travail sur les travaux d’intérêt général, et je pense qu’on doit aller évidemment dans la direction qu’il suggère. Mais si le consentement est systématiquement demandé, je crains que la mesure, qui a pourtant vraiment tout son intérêt, tombe à plat. D’où cet amendement. La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l’amendement no 703. Le travail d’intérêt général est déjà un cadeau puisqu’il se substitue à une peine de prison. Il est donc raisonnable d’acter le principe que tout refus de la peine de travail d’intérêt général proposée à la place de l’emprisonnement entraîne l’exécution immédiate de ladite peine de prison, laquelle ne peut alors plus faire l’objet d’aménagement, parce que l’échelle des peines, ce n’est pas le resto : chacun ne choisit pas à la carte ce qui lui plaît. À partir du moment où la personne refuse le cadeau qui lui est déjà fait en lui proposant une peine alternative à la prison, non seulement elle doit immédiatement purger sa peine de prison mais, de surcroît, tout ou partie de cette peine ne doit pouvoir faire l’objet d’aucun aménagement, prenant encore je ne sais quelle forme – tant vous faites preuve d’imagination dans cette assemblée. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ? Là où Mme Le Pen voit des cadeaux, je vois des réponses pénales effectives et adaptées à la situation de chaque délinquant.
Quant à la proposition de pouvoir condamner à un travail d’intérêt général sans le consentement de la personne, pourquoi pas ? Si ce n’est que cela se heurterait à un principe de droit international, notamment à la convention de l’Organisation internationale du travail de 1932 qui proscrit tout ce qui pourrait ressembler à du travail forcé ! Je signale aux auteurs de ces amendements que nous avons prévu que le consentement puisse être différé. Il ne sera donc plus impératif que le prévenu soit présent à l’audience pour être condamné à un TIG : il suffira que son consentement soit recueilli ultérieurement devant le juge d’application des peines. L’avis est défavorable pour ces motifs. (Les amendements nos 1001, 851 et 703, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Les deux amendements, nos 1104 et 1102, sont rédactionnels. Tout à fait, monsieur le président. Le premier est de précision, le second de coordination. (Les amendements nos 1104 et 1102, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.) La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 849. Il s’agit de pouvoir prononcer des peines de travail d’intérêt général pour les mineurs âgés de treize à seize ans, avec bien sûr l’autorisation de leurs parents. (L’amendement no 849, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) Les amendements nos 1105, 1103, 1106, 1107 et 1108, sont de coordination. En effet, monsieur le président. (Les amendements nos 1105, 1103, 1106, 1107 et 1108, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.) La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 1002. Cet amendement s’inscrit lui aussi dans la logique de favoriser, d’accompagner et de développer les travaux d’intérêt général. J’ai longtemps été maire adjoint, chargée notamment de la prévention de la délinquance, d’une commune qui accueillait dans ses services des personnes condamnées à un TIG : à ce titre, je puis témoigner que cet accueil représente pour la collectivité une charge administrative et un coût financier. Ces deux éléments constituent d’ailleurs souvent un frein ; certaines communes qui seraient prêtes à en accueillir y renoncent pour ces raisons. Je propose donc que la dotation globale de fonctionnement prenne en compte les charges liées à l’accueil des TIG. Je n’ai pas voulu spécifier de montant, simplement proposer déjà l’idée. Quel est l’avis de la commission ? Il y a sans aucun doute un problème de financement, pas seulement d’ailleurs pour les collectivités territoriales mais aussi pour les associations et de nombreuses autres structures qui pourraient en accueillir. Mais il ressort des auditions que nous avons menées que beaucoup d’entre elles n’en font pas un préalable. Une des voies à suivre ne serait pas forcément celle que vous proposez, cher collègue, mais plutôt une augmentation du FIPD, le fonds interministériel de prévention de la délinquance, car celui-ci vise précisément ce but. Et surtout, je ne pense pas que le présent texte soit le lieu d’un débat sur ces aspects financiers. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. J’ai parfaitement conscience de l’apport que les tuteurs doivent évidemment impulser dans le dispositif. Il faut savoir que l’agence nationale pour le travail d’intérêt général, qui sera créée le 10 décembre prochain, développera une plateforme numérique à même d’apporter un appui aux tuteurs en leur fournissant des modules de formation et que, par ailleurs, je suis en discussion sur l’ensemble de la question avec ma collègue ministre de la cohésion de territoires, Jacqueline Gourault. Mais il me semble difficile de faire de la dotation que vous proposez un préalable. Je comprends la problématique, j’ai beaucoup discuté avec des maires qui ont soulevé devant moi la question, mais je pense qu’il y a d’autres moyens de parvenir à favoriser l’accueil de TIG par les collectivités, en tout cas à ce stade. La parole est à Mme Cécile Untermaier. Cet amendement est intéressant parce qu’il soulève la problématique de l’isolement dans lequel se trouvent les collectivités locales qui souhaitent s’engager dans le dispositif des TIG. Sinon une réponse financière, il faut au moins leur apporter une réponse en termes d’accompagnement à proposer aux élus, notamment dans les intercommunalités, où l’offre se développe. Un accompagnement sérieux devrait être proposé aux maires et présidents d’intercommunalité qui s’engagent dans cette voie. La parole est à M. Philippe Gosselin. Notre collègue Pauget a vraiment raison de soulever cette question. La réponse n’est peut-être pas seulement financière, c’est bien possible, mais il fallait appeler l’attention de l’Assemblée – car la garde des sceaux le sait déjà – sur la difficulté pour les collectivités à répondre favorablement à des demandes de TIG : il faut de préférence évidemment un élu référent, mais aussi des personnels à même de s’engager dans la démarche, le problème n’étant pas qu’ils manquent des compétences requises – encore qu’il puisse se poser dans certaines petites collectivités –, mais plutôt qu’ils soient accompagnés, aidés dans la démarche, bref que, se sentant sécurisés, épaulés, ils en aient l’envie. Si on veut vraiment que les travaux d’intérêt général se développent dans les collectivités territoriales, il faudra non seulement faire œuvre de pédagogie, car il n’est pas toujours simple de faire avec le regard que portent nos concitoyens sur les personnes effectuant un TIG, mais également œuvre utile en accompagnant ces collectivités, autrement sans doute que sur le plan financier mais je crois que nous sommes au moins d’accord là-dessus. Peut-être pourriez-vous, madame la garde des sceaux, nous donner quelques éléments supplémentaires, quelques perspectives à ce stade ? Quel est l’avis du Gouvernement ? Comme je vous le disais, monsieur le député, nous allons créer cette agence du TIG. Un réseau de délégués territoriaux, qui seront précisément là pour apporter leur appui, en termes d’encadrement et de conception, aux collectivités qui voudraient, avec nous, s’engager dans ce dispositif, en fera partie.
Ce réseau de délégués territoriaux jouera, je le crois, un rôle important. Cela n’exclut cependant pas d’autres réflexions comme celle que M. le rapporteur a évoquée ou celle que j’ai évoquée auprès de M. le député. La parole est à M. Rémy Rebeyrotte. Je rejoins la préoccupation exprimée par notre collègue : si les collectivités ne disposent pas de personnes un minimum formées pour bien accompagner la personne accomplissant en leur sein une peine d’intérêt général, cela soulève des difficultés. Si la dimension financière existe, existe également celle relative à l’accueil, à la formation et à l’encadrement. L’encadrement est en effet essentiel. Il faut également être capable de se rendre utile par rapport à l’évolution que peut connaître la personne accomplissant une telle peine.
Par conséquent, les délégués territoriaux, ainsi que la formation qu’ils pourront apporter, peuvent constituer une véritable réponse visant à encourager les collectivités à entrer dans le dispositif. (L’amendement no 1002 n’est pas adopté.) (L’article 43, amendé, est adopté.)
La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 641. Malgré la faim qui me tenaille (Sourires) , je prendrai le temps de défendre cet amendement, qui vise à modifier l’échelle des peines correctionnelles. Certains ont plus de réserves que vous, mon cher collègue… (Sourires.) J’en avais davantage lorsque j’étais garde mobile, mais le ministre de l’intérieur était alors Charles Pasqua. (Sourires.) M. le président vise quelqu’un en particulier ! C’est un fait personnel ! (Sourires.) Le présent amendement, disais-je, vise d’abord à supprimer la disposition qui tend à faire de la détention à domicile sous surveillance électronique une peine autonome.
Il supprime également la peine de sanction-réparation de l’échelle des peines correctionnelles définie à l’article 131-3 du code pénal.
À l’inverse, nous proposons d’inscrire, à des fins de clarification de la nomenclature, la peine de suivi socio-judiciaire au rang des peines principales.
Cet amendement prévoit par ailleurs le cumul des peines d’emprisonnement, alternatives à l’emprisonnement – travail d’intérêt général ou stage – ou restrictives de liberté, afin de redonner au tribunal correctionnel toute sa liberté de choix.
Il simplifie également le régime unique des stages, dont les modalités et le contenu seraient déterminés par les juridictions au regard des besoins locaux, et non par le législateur.
Serait également supprimée la possibilité de prononcer un travail d’intérêt général sans accord préalable du condamné : l’absence de consentement de sa part augurerait mal, en effet, de l’exécution d’une telle peine.
Enfin, par coordination avec les articles 46 et 47, nous proposons d’introduire la peine autonome de probation dans l’échelle des peines : en remplacement du sursis probatoire envisagé dans le projet de loi, cette peine résulterait de la fusion de la contrainte pénale et du sursis avec mise à l’épreuve. Elle pourrait se cumuler avec une peine d’emprisonnement, contrairement à la contrainte pénale. Nous en venons à l’amendement no 576.
Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour défendre l’amendement. Par cet amendement nous proposons de revoir l’échelle des peines, pour lui substituer le triptyque : amende, peine de probation et emprisonnement. Cette disposition, de nature à clarifier le code pénal, instaurerait une peine de probation autonome.
Ce que nous vous proposons donc, en réalité, c’est que le juge puisse apprécier, pour chaque délit, laquelle de ces trois peines est la plus adaptée, étant entendu que certains délits, à nos yeux, n’appellent qu’une peine de probation.
Qu’est-ce qu’une peine de probation, en effet ? Il peut s’agir d’un travail d’intérêt général, d’une forme de placement à l’extérieur ou d’injonctions diverses et variées – soins, stages obligatoires, bref, toute la panoplie disponible en la matière.
Nous entendons, disais-je, créer une peine de probation autonome, sans rapport avec la peine d’emprisonnement. De fait, nous ne pourrons atteindre les objectifs de désinflation carcérale sans ce nouveau triptyque et sans un réexamen approfondi de notre code pénal. Oui, l’inflation pénale, les peines de plus en plus lourdes prononcées contre un certain nombre de délits, ont conduit à envoyer en prison, à niveau de délinquance constant, un plus grand nombre de gens, et pour des durées plus longues. Voilà comment l’on en vient au constat de la surpopulation carcérale, et à la conclusion qu’il faut construire 7 000 ou 15 000 places de prison, voire 20 000 selon certains.
De surcroît, tout cela ne fonctionne pas, les récidivistes étant fort nombreux en prison. Or, on le sait, les peines de probation en milieu ouvert sont plus efficaces pour prévenir la récidive. Efficaces, elles ne le sont certes pas à 100 %, si bien que, en cas d’échec, elles peuvent choquer : tel condamné, est-on alors porté à dire, n’aurait peut-être pas récidivé s’il avait été envoyé en prison. Reste que, statistiquement, la peine de probation est bien plus efficace pour prévenir la récidive. Elle est donc de nature à faire baisser la délinquance. Merci, monsieur Bernalicis. Faire baisser la délinquance, n’est-ce pas là le véritable objectif ? N’est-il pas préférable d’envoyer moins de gens dans nos prisons tout en rendant la société plus paisible et plus tranquille ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à M. Yannick Kerlogot, pour soutenir l’amendement no 1242. Défendu. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ? Nous abordons ici l’un des points centraux de la présente réforme. Il s’agit en effet de définir une échelle des peines mieux adaptée aux circonstances de la délinquance, composée de peines disponibles de façon égale pour les magistrats et adaptée à la personnalité de l’auteur des faits ainsi qu’à son passé pénal, tout en satisfaisant aux besoins de répression et de protection de la société.
Je répondrai en quelques mots aux arguments précédemment développés. La constitution en peine autonome de la détention à domicile sous surveillance électronique nous paraît clairement répondre à l’objectif de diminution du nombre d’incarcérations, inutiles pour certains d’entre elles. Cette peine doit donc être conservée à ce niveau, c’est-à-dire mentionnée comme deuxième peine dans notre code pénal.
Contrairement à ce que j’ai entendu dire, la sanction-réparation est, dans de nombreux cas, une réponse parfaitement adaptée aux circonstances de fait.
Nous préférons le sursis probatoire à la peine autonome – car, il faut le reconnaître, on a pu se demander si une peine autonome de probation n’aurait pas été souhaitable ; je me suis moi-même posé la question. Mais il nous paraît finalement que le sursis probatoire, restant lié aux conséquences qui doivent être tirées du non-respect de la probation, permet d’éviter les inconvénients de la contrainte pénale et d’apporter une réponse parfaitement adaptée.
Quant au suivi socio-judiciaire, il constitue une disposition particulièrement lourde de notre code pénal, dont la mise en œuvre peut durer de très longues années et à propos de laquelle on peut craindre une aggravation très sensible de la répression. Cette disposition existe ; elle est parfaitement adaptée aux circonstances : selon la commission des lois, il n’est pas nécessaire de l’étendre davantage.
De même, nous estimons que la liste des peines de stage est parfaitement conforme au principe de légalité des peines ; elle est réduite et précise : une infraction, un stage.
Enfin, il me semble que le fait de cumuler une peine d’amende avec une peine privative ou restrictive de droits ainsi qu’avec un travail d’intérêt général – TIG – constituerait une répression excessive.
Précisons d’ailleurs, pour répondre à l’une des observations qui nous ont été faites, qu’en aucune façon il n’est question que l’accord de la personne condamnée à l’exécution du TIG ne soit pas recueilli ; simplement – nous le verrons à propos d’un autre amendement –, il pourra être recueilli de manière différée, devant le juge d’application des peines, au lieu de l’être nécessairement au moment du prononcé, lorsque celui-ci a lieu en son absence.
L’avis de la commission est donc globalement défavorable – je réponds également par là aux autres remarques qui ont été formulées à propos de l’article 43. Quel est l’avis du Gouvernement ? Quelques mots pour présenter l’échelle des peines qui figure à l’article 43. Le système actuel est selon nous peu lisible – on ne sait plus très bien qui y fait quoi, entre un tribunal qui prononce une sanction qui ne sera pas exécutée telle qu’il l’a prononcée, l’intervention du juge d’application des peines, etc. –, déresponsabilisant pour les tribunaux – lesquels prononcent des peines qui ne seront pas exécutées telles qu’elles ont été prononcées –, et peu crédible pour nos concitoyens qui voient qu’alors qu’une peine d’emprisonnement a été prononcée, l’intéressé n’ira jamais en détention – je pourrais citer d’autres constats de cette nature.
Nous avons donc fait un choix clair, fondé sur ces deux principes : toute infraction mérite sanction – c’est à nos yeux capital ; mais il faut des sanctions adaptées à la personnalité du condamné, à ses antécédents, à l’infraction commise, à sa dangerosité, etc. Tels sont les principes qui nous guident pour parvenir à des peines vraiment effectives.
Sur ces fondements, nous avons décidé, d’une part, de créer différentes peines autonomes, c’est-à-dire déréférencées – si je puis utiliser ce terme – de la notion d’emprisonnement. Parmi elles, la détention à domicile sous surveillance électronique. Pourquoi en avons-nous fait une peine autonome ? Pour que le juge puisse la prononcer plus aisément, car nous savons que, dans certains cas, elle correspondra véritablement à la personnalité des condamnés. S’y ajoutent le TIG, bien sûr, dont les conditions de prononcé sont considérablement améliorées – nous aurons l’occasion d’y revenir –, ainsi que le stage, qui devient un stage unique subdivisé en plusieurs catégories.
Par ailleurs, nous modifions la compréhension de la détention en considérant qu’une peine de détention d’un mois n’a aucun sens, parce qu’elle est exclusivement désocialisante et ne permet pas d’éviter la récidive ni d’assurer la réinsertion sociale, ce qui fait pourtant partie des objectifs de la peine. Nous avons donc décidé qu’en dessous d’un mois il n’y aurait pas d’emprisonnement. Entre un et six mois, par principe, la peine doit s’effectuer en dehors de l’établissement pénitentiaire ; bien sûr, il peut y avoir des cas dans lesquels l’emprisonnement restera possible. Entre six mois et un an, nous permettons au tribunal de prononcer des peines réellement exécutées. C’est seulement au-delà d’un an que la peine d’emprisonnement pourra être aménagée le cas échéant.
Voilà une gradation claire, responsabilisante pour les tribunaux, réellement adaptée à la situation des condamnés. C’est grâce à cet ensemble de politiques pénales, joint au programme immobilier pénitentiaire dont nous avons eu l’occasion de parler et qui sera, lui aussi, différencié et adapté, que nous espérons pouvoir disposer de sanctions répondant efficacement aux infractions commises, mais également réduire la surpopulation carcérale.
Voilà pourquoi le Gouvernement tient évidemment à l’échelle des peines telle qu’il l’a reconstruite et émet un avis défavorable aux amendements en discussion. La parole est à M. Ugo Bernalicis. « Peu lisible », « déresponsabilisant », « peu crédible » : autant de reproches que l’on pourra aussi faire à l’échelle des peines que vous proposez, madame la ministre. Pourquoi vous dis-je cela ? Parce que vous vous êtes bel et bien arrêtée au milieu du gué. Vous commencez par déclarer qu’il faut en finir avec les alternatives à l’incarcération, qu’il faut pouvoir prononcer des peines autonomes, vous instaurez la détention à domicile sous surveillance électronique – qui implique d’autres problèmes ; mais pourquoi pas ? Simplement, en réalité, la peine de prison reste la monnaie virtuelle utilisée au tribunal : « au lieu de vous mettre six mois, je vais prononcer une peine de milieu ouvert » ; « au lieu d’un an », ou « parce qu’il vous reste six mois à un an », « je vous condamne à telle sanction, et au-delà, vous devrez vraiment faire de la prison ». C’est cela qui n’est pas lisible : que l’étalon interne à la justice reste la peine de prison. Vous n’avez pas écouté la première partie de mon intervention, monsieur le député ! Le problème est que vous ne créiez pas une peine de probation autonome – je ne parle pas d’un ab initio approximatif ou d’une alternative prononcée dès le jugement, ce qui est autre chose, que notre droit permet déjà, mais qui n’est pas utilisée. Dans votre système, on peut craindre des effets de seuil : un magistrat qui voudra emprisonner quelqu’un, qui l’aurait auparavant fait pour trois ou quatre mois, étant désormais, pour cette durée, réduit à prononcer une peine de milieu ouvert, va le condamner à six mois et un jour de prison ! Voilà ce qu’implique réellement ce système ; vous le savez, d’ailleurs, et craignez les effets de seuil, comme nous tous.
Dès lors, on peut soit lancer les paris – mais je ne suis pas là pour ça –, soit établir une échelle des peines telle que, pour un délit donné, il ne soit pas possible de prononcer une peine de prison. Vous dites que la détention à domicile sous surveillance électronique est entièrement déconnectée de la prison : ah bon ? Et dans votre esprit, quand on sera en infraction par rapport à cette peine, il se passera quoi ? On ira où ? (Mme Mathilde Panot applaudit.) La parole est à M. Jean-Louis Masson. Pour ma part, madame la ministre, je crois à l’exemplarité de la peine de prison. Monsieur le rapporteur, la réponse pénale ne saurait être adaptée au nombre de places de prison : je ne souscris pas à ce raisonnement. Je n’ai pas dit ça ! Moi non plus ! Si, mon cher collègue Paris, je vous ai bien écouté : vous vous êtes appuyé sur l’argument selon lequel il n’y a pas assez de places en prison ; vous lirez le compte rendu pour le vérifier ! C’est le raisonnement inverse qu’il faut appliquer : le nombre de places de prison doit correspondre à l’état de la délinquance et de la criminalité. (L’amendement no 641 n’est pas adopté.) Je mets aux voix l’amendement no 576. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 43
Nombre de suffrages exprimés 41
Majorité absolue 21
Pour l’adoption 6
Contre 35 (L’amendement no 576 n’est pas adopté.) (L’amendement no 1242 n’est pas adopté.) La parole est à M. Philippe Michel-Kleisbauer, pour soutenir l’amendement no 1268. Mon modeste plaidoyer vaudra également pour les amendements nos 1269 à 1272, qui portent sur le même sujet.
Le groupe MODEM souhaite revoir le vocabulaire ici employé – puisque, quant au fond, nous sommes d’accord avec la création de la peine de détention à domicile, qui enrichit l’arsenal dont disposent les juges pour lutter contre la délinquance. René Frégni, auteur provençal que notre ministre de l’intérieur connaît bien puisqu’il vient de Manosque, disait : « Écrivez le mot gare et montez dans un train qui n’existe pas. » La richesse de notre vocabulaire permet en effet de s’approprier les choses, de les fixer, et sa nuance autorise la précision.
Aussi souhaiterions-nous remplacer la notion de détention à domicile par celle d’assignation pénale à domicile, afin de réserver le mot de détention aux seules incarcérations dans les établissements pénitentiaires. Quel est l’avis de la commission ? Je comprends parfaitement cette interrogation purement sémantique – nous nous situons très au-delà de la sémantique dans les débats qui nous occupent. Nous craignons simplement une confusion, dont le risque est réel, avec les assignations administratives à résidence ou avec les assignations à résidence sous surveillance électronique prononcées à titre d’alternatives à la détention, notamment par le juge d’instruction.
Avis défavorable, donc, pour permettre une meilleure compréhension du texte et assurer à celui-ci la lisibilité voulue. Quel est l’avis du Gouvernement ? Demande de retrait, sinon avis défavorable. L’amendement est-il maintenu ? Oui. Très bien ! La parole est à M. Ugo Bernalicis. Cet amendement est vraiment très intéressant, car il touche à un questionnement profond concernant le bracelet électronique. Sous bien des aspects, il s’agit en effet d’une forme de détention, mais dans laquelle il n’existe pas de surveillant pénitentiaire : ceux qui jouent ce rôle, ce sont les familles, les proches, ceux qui hébergent les intéressés sur place. Ce sont eux qui reçoivent les coups de téléphone quand la personne n’est pas à l’heure. Cela exerce une pression sur l’environnement familial dans son ensemble.
Je comprends que vous vouliez parler d’assignation pénale, mon cher collègue : c’est logique, puisque l’on se situe ici dans le champ des peines et qu’il ne s’agit plus d’une assignation à résidence sous surveillance électronique – ARSE –, en tout cas en phase pré-sentencielle. J’ai donc envie d’être d’accord avec vous. En même temps, la formulation contenue dans le texte est peut-être la moins hypocrite : c’est bien d’une forme de détention qu’il s’agit. Beaucoup de gens ne la supportent d’ailleurs pas au-delà de six mois – raison pour laquelle il serait problématique d’étendre le dispositif jusqu’à deux ans –, car elle crée un état d’anxiété qui complique la vie à domicile, non seulement pour l’individu – passe encore : il a débloqué, il purge sa peine –, mais aussi pour son environnement. Voilà pourquoi certains détenus refusent le bracelet électronique et lui préfèrent une peine de prison, souvent un peu plus courte que la durée pendant laquelle ils doivent porter le bracelet.
Dès lors, si nous nous dotons ici d’un outil supplémentaire, dont la dénomination est en outre la moins hypocrite de celles qui ont pu être proposées, il ne faudrait pas croire pour autant qu’il est la panacée et que l’on va pouvoir mettre des bracelets à tout le monde sous prétexte que la technologie le permet. Il existe déjà l’assignation à résidence classique, sans bracelet ; la contrainte pénale classique ; la libération conditionnelle, sans bracelet, qui fonctionne, qui produit des résultats. N’allons donc pas penser que nous avons trouvé la peine autonome par excellence, celle qui va permettre de désemplir les prisons : en réalité, elle emporte bien d’autres problèmes. (Mme Mathilde Panot applaudit.) (L’amendement no 1268 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 508 et 852.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 508. Vous créez, madame la ministre, cette nouvelle pseudo peine, si je puis dire, de détention à domicile sous surveillance électronique. J’admets qu’il y a un progrès par rapport à l’hypocrisie que représentait le placement sous surveillance électronique – PSE – qui consistait à déconstruire la décision souveraine que le juge avait prononcée au nom du peuple français. Ici, la décision appartiendra bien au tribunal et, j’y insiste, j’admets qu’il s’agit d’un progrès en matière de lisibilité.
Quelle effectivité, toutefois, aura cette peine ? Je conteste d’ailleurs l’emploi du mot « détention ». Le PSE à domicile n’est pas une détention. Et ces alinéas participent de la même logique que celle suivie par vos prédécesseurs, celle, hypocrite, consistant à pallier le déficit de places de prison. Or le pays manque cruellement de places de prison. Aussi la sanction pénale ne peut-elle être prononcée comme il serait nécessaire par rapport à la gravité des faits commis.
Vous êtes donc contraints de créer des processus que vous parez de vertus supposées pour lutter contre la récidive. Je le répète : il s’agit d’une vaste hypocrisie. Vous cherchez des substituts au déficit de places de prison, voilà la réalité. La détention à domicile comme le placement sous surveillance électronique ne se substitueront pas aux places de prison qu’il faut créer pour que la loi pénale s’applique.
Il ne s’agit donc ici, encore une fois, qu’un subterfuge, un palliatif, si bien que, in fine , la peine n’a plus de sens. Elle n’est plus dissuasive et, parce qu’elle ne fait plus peur, elle est un encouragement à la récidive. C’est la réalité que subissent au quotidien les policiers et les gendarmes qui nous interpellent, qui se désolent qu’il n’y ait pas de sanctions adaptées à la gravité des faits qu’ils ont la lourde responsabilité, la difficulté et le courage de combattre au quotidien. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 852. Le réquisitoire dressé par notre collègue Ciotti est complet. Il y a une vraie difficulté et une part d’hypocrisie aujourd’hui et nous souhaitons supprimer cette peine de détention à domicile sous surveillance électronique. Déjà existent – et je serais un peu moins sévère que M. Ciotti sur ce point – des placements sous surveillance électronique. Ces derniers mériteraient certes un dispositif d’évaluation plus complet que celui qui existe aujourd’hui, afin que nous nous assurions que la prévention de la récidive est réellement assurée, ce qui, honnêtement, me semble loin d’être le cas. Or comme nous n’avons pas tiré toutes les conséquences possibles de ce dispositif, nous ne souhaitons pas pour l’heure aller plus loin en la matière, d’où le présent amendement de suppression des alinéas 14 à 19. Quel est l’avis de la commission ? La commission estime, tout au contraire, que la détention à domicile est une véritable sanction. Elle est d’ailleurs très durement ressentie par les condamnés, tout au moins quand elle dure au moins plusieurs mois. Elle présente en outre l’avantage de favoriser la réinsertion et nous ne sommes absolument pas persuadés, pour notre part, que des peines de très courte durée évitent la récidive, bien au contraire. La commission a donc décidé, de façon nette, de conserver la peine de détention à domicile sous surveillance électronique, selon nous très efficace. Quel est l’avis du Gouvernement ? La peine de détention à domicile sous surveillance électronique, monsieur Ciotti, n’est pas un subterfuge mais au contraire la prise en considération de la réalité ; elle n’est pas une hypocrisie mais un choix ; elle n’est pas une contrainte mais l’adaptation d’une peine à une situation donnée ; elle n’est pas un substitut mais une prise en compte assumée. Je suis certaine, et je m’adresse également à vous, monsieur Gosselin, que certains détenus dont l’infraction exige une sanction – car toute infraction mérite sanction, cela nous l’avons dit – n’ont pas pour autant à être nécessairement condamnés à l’enfermement. Quand ces personnes travaillent, sont socialement insérées, faut-il rompre cette socialisation pour les entraîner dans une situation dont on sait qu’elle sera un facteur de récidive ?
Il n’y a là, bien sûr, rien d’automatique et il faut mettre en relation la situation de la personne condamnée et l’infraction. Il y a dans la détention à domicile sous surveillance électronique la possibilité d’éviter un risque de désocialisation. C’est en outre un dispositif qui nous permettra d’encore mieux individualiser la peine et nous savons que c’est important. Vous savez comme moi, monsieur Ciotti, que, pour les peines d’emprisonnement de moins de cinq ans, le taux de récidive est de près de 60 %, ce qui montre bien que si l’emprisonnement est une réponse, il faut qu’elle soit adaptée – or elle ne l’est pas pour tout le monde, et cela vous le savez aussi. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Nous voyons bien que l’accompagnement prévu pour ceux qui seront placés en détention à domicile sous surveillance électronique est assez faible. Il y a en effet assez peu de conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation et il y en aura de toute façon toujours trop peu pour suivre ceux qui portent un bracelet électronique. On se dit : « Celui-là, on va lui mettre un bracelet, comme ça on sera tranquilles : il est dehors, il est surveillé, circulez, il n’y a rien à voir. » C’est peut-être aussi le fond du problème : si l’on ne se contentait pas du bracelet électronique mais qu’on travaillait en plus sur la problématique délictuelle de la personne concernée, le dispositif serait intéressant en ce qu’il permettrait un suivi.
Seulement, aujourd’hui, des magistrats, pour éviter l’incarcération – puisque les prisons sont surpeuplées –, décident de placer des personnes qu’ils condamnent pour trafic de stupéfiants à un placement sous surveillance électronique – or la pose d’un bracelet électronique n’empêche pas la poursuite du trafic de stupéfiants. C’est non seulement évident mais c’est la réalité et, cela, quand bien même ceux qui continuent leur trafic respectent les horaires qui leur sont imposés. Il faut donc donner au magistrat la possibilité d’individualiser la peine plutôt que de ne lui laisser que la possibilité de se dire qu’il y a la peine de probation autonome avec la détention à domicile sous surveillance électronique. Ce n’est pas vrai, il s’agit d’un outil parmi d’autres et peut-être pas le meilleur, par ailleurs. La parole est à M. Éric Ciotti. J’entends vos arguments, madame la ministre, et j’ai bien souligné que le fait que ce soit le tribunal qui prononce cette peine de détention à domicile était un progrès par rapport à l’aménagement de peine tel que prévu par les textes en vigueur. C’est incontestable.
Toutefois, vos arguments sont en porte-à-faux avec vos déclarations et avec l’étude d’impact. Le présent texte a pour objectif de réduire de 8 000 personnes la population carcérale… Non. …, quels que soient les faits commis, alors que 71 000 détenus – presque un record – sont écroués dans des prisons qui au total ne comptent que 60 000 places, soit un taux d’occupation de 117 %. Vous vous dévoilez et vos intentions sont donc désormais claires. Or, quels que soient vos arguments, malgré l’habillage par des vertus supposées de tel ou tel dispositif, il n’y a qu’une réalité, qui n’est pas la seule vôtre, j’en conviens, mais également celle de vos prédécesseurs. Et j’ai combattu cette logique consistant à diminuer par tous les moyens la population carcérale, y compris lorsque nous étions majoritaires – ainsi ai-je voté contre la loi pénitentiaire de 2009.
L’objectif ne doit pas être de faire diminuer la population carcérale en soi mais de faire en sorte que les peines soient appliquées : si des délits et des crimes ont été commis et nécessitent une sanction pénale, cette dernière doit être prononcée et exécutée. Et, pour cela, il faut des places de prison et non pas suivre la logique inverse, celle que vous nous proposez, qui, je le répète, vise à diminuer le nombre de détenus de 8 000, ce qui ne peut que nuire à la sécurité publique alors que la violence augmente. Ce n’est pas en diminuant la gravité des peines encourues qu’on la fera reculer ! Bien sûr ! La parole est à Mme la garde des sceaux. Je ne souhaite pas prolonger les débats mais M. Ciotti sait très bien que je ne peux pas le laisser prétendre cela. Vous savez, monsieur le député, parce que je vous l’ai déjà dit en commission, que je n’ai pas pour objectif de diminuer de 8 000 le nombre de détenus. Ce n’est pas mon objectif, c’est la résultante que nous supposons… Cela ne revient-il pas au même ? Non, ce n’est pas la même chose, ne faites pas l’innocent : vous qui êtes un fin lettré, vous ne pouvez tout de même pas confondre la cause et la conséquence. Notre objectif est d’obtenir que les peines soient vraiment adaptées à la nature des infractions et aux personnes qui les commettent. Il en résulte une diversification des peines avec des peines autonomes, monsieur Bernalicis, parce que les tribunaux pourront les prononcer directement. C’est déjà le cas, ils peuvent les prononcer ab initio ! Et outre les peines autonomes, restent les peines d’emprisonnement et l’ensemble, la résultante, sera en effet la régression de la surpopulation carcérale – la résultante, pas l’objectif. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) (Les amendements identiques nos 508 et 852 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Erwan Balanant, pour soutenir l’amendement no 1265. Le présent amendement vise à permettre à la juridiction et au juge d’application des peines de disposer d’une marge d’appréciation plus importante lorsqu’ils fixent les modalités d’une détention à domicile sous surveillance électronique. En effet, ces détentions se révèlent parfois anxiogènes pour les condamnés, dans la mesure où un imprévu, comme un aléa de transport, peut être susceptible de les empêcher de respecter un horaire fixé strictement. Or le texte ne permet pas à la juridiction ou au juge d’application des peines de tenir compte de ce type d’événement lorsqu’il détermine les horaires de la détention à domicile.
Il ne permet pas non plus d’autoriser, à titre exceptionnel, le condamné à bénéficier d’un horaire un peu plus souple (Mme Marine Le Pen s’exclame) pour pouvoir participer, par exemple, à un pot de départ. Un pot de départ ? Oui, un pot de départ, car quand vous êtes en réinsertion, cela vous permet, madame Le Pen, de ne pas vous couper de la société. Non mais on rêve ! Pourquoi ne pas l’autoriser à se rendre à un petit cocktail, par exemple ? Non, pas à un cocktail mais à un pot de départ car oui, madame Le Pen, la convivialité fait partie de la vie des entreprises et c’est en y participant que parfois on ne se désocialise pas.
Le présent amendement, sans infléchir – pour rassurer Mme Le Pen – la force des obligations incombant aux condamnés au titre de la détention à domicile, vise à permettre aux magistrats de déterminer la teneur de ces obligations de manière plus libre et humaine, en s’attachant davantage aux particularités de chaque situation. Voilà un amendement complètement lunaire ! Quel est l’avis de la commission ? Avis favorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis : les adverbes ne sont pas toujours nécessaires. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Je suis moi aussi favorable à cet amendement. Quand vous rencontrez les services pénitentiaires d’insertion et de probation, vous vous rendez compte que des broutilles polluent l’activité de magistrats qui sont obligés de se prononcer toutes les cinq minutes pour cinq minutes en l’occurrence. Un peu de discernement, un peu de souplesse ne ferait de mal à personne.
Je reviens à la surveillance électronique à domicile pour vous alerter sur un point : ce dispositif comporte un biais social très fort. Par exemple, il n’est pas applicable aux SDF non plus qu’à tous ceux qui n’ont pas de logement. Lorsque les personnes sont hébergées chez quelqu’un d’autre, le bracelet s’invite chez un tiers qui dispose alors d’un moyen de pression et de coercition sur celui qu’il héberge. Cela rend la situation pour le moins étrange si ce n’est un peu glauque. Ne faisons pas de la détention à domicile sous surveillance électronique un axe majeur de développement des peines en milieu ouvert : il existe de nombreuses alternatives en la matière qui fonctionnent aussi correctement.
Oui, madame la ministre, on peut d’ores et déjà prononcer ab initio un placement sous surveillance électronique, ou, dans le cadre d’une mesure pré-sentencielle, décider d’une ARSE – assignation à résidence sous surveillance électronique. Il est vrai, en revanche, que les magistrats ne prononcent pas ces mesures aujourd’hui – les arguments de M. Ciotti et de M. Gosselin étaient justes sur ce point –, parce que les enquêtes personnalisées ne sont pas assez efficaces. Les ESR – enquêtes sociales rapides – ne sont précisément pas assez rapides pour que les magistrats puissent aller dans ce sens. Ils sont aussi malheureusement trop frileux pour le faire. Voilà la réalité dans ce pays ! La parole est à Mme Marine Le Pen. Madame la ministre, avant que nous n’interrompions l’examen du texte, le 23 novembre dernier, je vous avais dit que vous étiez pire que Mme Taubira. La référence à Mme Taubira n’est pas une insulte ! Vous venez de le démontrer une fois de plus, et, en matière de laxisme, ce n’est pas une petite référence ! On vous propose un amendement qui constitue le summum du laxisme… Mais non ! Évidemment, vous y êtes favorable. Nous n’en sommes pas très étonnés.
Il faut tout de même se souvenir que la peine dont vous parlez est une peine substitutive à l’emprisonnement. Savez-vous ce qu’il faut avoir fait pour prendre de la prison ferme ? Savez-vous la gravité des faits qu’il faut avoir commis dans notre pays, compte tenu de l’effondrement de l’échelle des peines, pour être condamné à de la prison ferme ? Savez-vous combien de fois il faut avoir récidivé pour se voir condamné à une peine de prison ferme ?
Bien qu’il s’agisse déjà d’une peine aménagée, d’un cadeau, en quelque sorte, fait à celui qui devrait aller en prison, vous nous expliquez qu’il faut que nous restions souples au cas où le type concerné rentre un peu en retard s’il a été invité à un pot de départ. Vous rendez-vous compte de ce que les Français ressentent lorsqu’ils vous entendent ? Eux, ils sont confrontés tous les jours à la délinquance, tous les jours, ils croisent en bas de chez eux, sur leur trottoir, des gens qui devraient être en prison.
Ils considèrent déjà que depuis des années les gouvernements n’ont pas mené la politique pénale qui aurait dû être menée, qu’ils n’ont pas fait preuve de la fermeté dont ils auraient dû faire preuve, et vous en rajoutez une louche de manière complètement déconnectée avec la réalité de ce que vivent les victimes ! Pardon de dire des gros mots et de parler des victimes. Je sais que, dans cette assemblée, on les évacue systématiquement d’un revers de main, mais, enfin, tout de même ! Point trop n’en faut ! Un peu de décence à leur égard ! Je crois qu’il faut raison garder dans vos propositions et dans vos arguments ! (MM. Louis Aliot et Ludovic Pajot applaudissent.) La parole est à M. Erwan Balanant. Madame Le Pen, c’est l’un des grands malheurs de notre société : parfois, on ne punit pas assez vite ni assez bien, je suis entièrement d’accord avec vous. Parfois aussi, il faut avoir un petit peu de bon sens, si je peux me permettre de rétorquer cela. Lorsqu’une peine se passe mal et que quelqu’un dérive puis récidive, pour la société, c’est la double peine.
Nous avons discuté avec un certain nombre de juges de l’application des peines qui nous disent que la petite amélioration proposée permettrait de donner un peu de souplesse et d’éviter que quelqu’un ne se désocialise. Vous devez comprendre cela, vous qui dites tant aimer les Français, car, je vous le rappelle, celui qui est condamné à de la prison ferme n’en est pas moins Français. Il a payé, il paie, mais est-ce une raison pour le mettre au ban de la société durant toute sa vie ? Non ! Pourtant, c’est aujourd’hui trop souvent ce qu’il se passe avec la prison et avec un certain nombre de peines. Supprimons les peines ! Non, il ne s’agit pas de les supprimer, madame Le Pen, mais de les aménager pour que tout le monde y gagne : la victime, la société et la personne qui a été condamnée, laquelle doit pouvoir se reconstruire. La parole est à Mme la garde des sceaux. Madame Le Pen, un vol de scooter avec bris de neiman est puni de cinq ans d’emprisonnement. Arrêtez ! Vous savez très bien que ce n’est pas vrai ! C’est l’échelle des peines ! Voilà d’ailleurs pourquoi il faut la revoir ! C’est peut-être l’échelle des peines, mais ce n’est pas appliqué ! Je voulais également vous dire, madame la députée, parce que peut-être n’avez-vous pas pu assister au début de notre débat, que la détention à domicile sous surveillance électronique n’est plus seulement, dans les dispositifs que je propose, un aménagement de la peine de prison. C’est devenu une peine autonome. C’est pareil ! Pas tout à fait ! Cela signifie que cette peine n’est pas prononcée par rapport à l’emprisonnement.
Pour conclure, madame la députée, lorsque vous aimez à me comparer à Mme Taubira, sachez que ce n’est pas, à mes yeux, une insulte si je mesure la lutte contre les discriminations que cette dernière a su conduire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Mme Cécile Untermaier et M. Jean-Paul Lecoq applaudissent également.) Bravo ! La parole est à M. Stéphane Mazars. Tout d’abord, le placement sous surveillance électronique n’est pas une sous-peine. Il peut être vécu très difficilement – nous le savons aujourd’hui, car nous disposons de suffisamment de recul. On estime qu’au-delà de six mois, ce type de mesure a plus d’impact sur la personne concernée qu’une véritable détention. Ce point est acquis dans le débat, mais je crains qu’il ne vous ait échappé, madame Le Pen, puisque vous avez certainement quitté les prétoires et la pratique qui a pu être la vôtre, depuis de nombreuses années.
Ensuite, je pense que notre collègue, Erwan Balanant, en parlant d’un « pot de départ », a choisi un exemple malheureux. En revanche, lisez l’exposé sommaire de l’amendement, vous verrez qu’il s’agit uniquement de ne pas avoir une approche absolument stricte du respect des horaires de détention à domicile, dans la mesure où des événements extérieurs peuvent retarder un retour à la maison – l’exemple du retard de transport est cité. C’est cela que l’amendement vise. Le « pot de départ » était un exemple malheureux… Je ne suis pas d’accord ! Ce n’est pas ce qui est visé par l’amendement. La parole est à Mme Cécile Untermaier. De façon exceptionnelle, nous voterons l’amendement de M. Balanant ! (Sourires.) Ce n’est pas la première fois ! C’est vrai, monsieur Balanant ! En tout cas, je trouve qu’on en fait beaucoup pour un amendement de bon sens. Le juge serait vraiment en difficulté s’il devait déterminer ce qui est strict et ce qui ne l’est pas. Si vous lisez l’amendement et son exposé sommaire, vous comprenez bien qu’il peut à tout moment rectifier un comportement qui n’est pas celui attendu de la personne à l’encontre de laquelle cette mesure a été prise. (L’amendement no 1265 est adopté.) Nous en venons à l’amendement no 577 rectifié.
Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danièle Obono pour soutenir l’amendement. Il vise à supprimer les alinéas 20 à 31 de l’article 43 qui opère un changement profond et problématique de la peine de stage.
Il est tout d’abord prévu que la peine de stage n’est plus une alternative à l’incarcération, car elle pourrait être prononcée « en même temps que l’emprisonnement ». De notre point de vue, cela confirme le tropisme carcéral qui tend à détricoter les peines alternatives à l’incarcération. La peine de stage est désormais une peine cumulable à l’enfermement.
Ensuite la peine de stage est effectuée « aux frais des condamnés ». Méconnaissant très certainement la situation des personnes visées par ce dispositif, le Gouvernement systématise le paiement du coût des stages par les personnes condamnées. Actuellement, ce paiement est à l’appréciation du magistrat qui individualise la peine en fonction de la situation de la personne. Cette évolution va à l’encontre des déclarations de la ministre qui a insisté sur la nécessaire individualisation des peines. Le groupe La France insoumise estime essentiel que la juridiction puisse conserver la possibilité de moduler le coût afin d’assurer une personnalisation de la peine. Nous craignons un effet de seuil avec un recours à des peines courtes d’emprisonnement pour ceux ou celles qui n’ont pas la capacité de paiement nécessaire. Quel est l’avis de la commission ? Madame Obono, je ne comprends pas pour quelles raisons une personne détenue ne pourrait pas être sensibilisée à certains sujets dans le cadre de stages. Contrairement à vous, nous pensons que les détenus doivent pouvoir bénéficier d’une sensibilisation, y compris dans le cadre de la préparation à la sortie de détention. Il en va tout autrement s’agissant des autres peines, car cela constituerait une très forte accentuation de la répression.
Le stage « est effectué aux frais du condamné », sauf si le juge en décide autrement compte tenu de la situation financière et matérielle du condamné. Je suis défavorable à l’amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Monsieur le rapporteur, je ne comprends pas que vous ne compreniez pas ! Qu’est-on censé faire en détention ? Attendre derrière les barreaux que les jours passent ? Malheureusement, c’est ce que font aujourd’hui beaucoup trop de détenus. Les activités proposées, les stages ou la formation professionnelle sont totalement en deçà de ce qui pourrait faire de l’emprisonnement un temps utile. C’est vous, madame la ministre, qui parlez de rendre la prison utile, mais vous voulez rendre les stages payants.
La logique précédente est inversée. Le stage est payant, sauf si le juge en décide autrement au vu de la situation. Jusqu’à présent il s’agissait d’un moyen d’individualisation de la peine. On voit bien que vous ne voulez pas améliorer la prise en charge des détenus en prison pour travailler sur la problématique délictuelle – vous pensez qu’il faut obligatoirement passer par une peine de stage cumulable avec la peine d’emprisonnement. Vous refusez l’individualisation, et on en vient à se demander à quoi servent les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation, et à quoi sert tout le travail effectué aujourd’hui en détention.
Laissez donc les magistrats faire leur travail ! Laissez les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation et les établissements pénitentiaires faire leur part du travail dans le cadre de l’individualisation de la peine ! Je mets aux voix l’amendement no 577 rectifié. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 6
Contre 57 (L’amendement no 577 rectifié n’est pas adopté.) La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 583. Il est défendu. (L’amendement no 583, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à Mme Corinne Vignon, soutenir l’amendement no 832. Je présenterai conjointement les amendements nos 832 et 1195, qui ont le même objet. Ils visent à intégrer, au sein du stage de citoyenneté, un volet de sensibilisation au respect de l’animal, lorsqu’une personne est condamnée pour violence ou maltraitance contre des animaux.
De nombreux faits de maltraitance sur des animaux sont signalés chaque année en France. En 2017, le parquet a été saisi de 8 447 affaires de ce type, contre 7 766 en 2012, parmi lesquelles 5 539 pour des faits d’actes de cruauté envers les animaux ou de mauvais traitement infligé à un animal.
Le code pénal sanctionne, par une contravention, les atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l’intégrité d’un animal domestique ou assimilé, ainsi que les mauvais traitements infligés sans nécessité. À ce jour, toutefois, aucune peine éducative n’existe pour lutter contre la maltraitance animale.
Plusieurs études ont démontré qu’un lien existe entre la maltraitance sur les animaux et la violence, notamment domestique, envers les êtres humains. En adaptant la réponse pénale afin de diminuer la maltraitance, nous visons un objectif plus global : lutter contre toute forme de violence.
Il existe de plus en plus de peines dites éducatives – c’est le cas des stages spécifiques de sensibilisation à la sécurité routière ou aux dangers de l’usage des produits stupéfiants –, mais il n’existe pas de peines de ce type concernant la maltraitance des animaux. L’intérêt de ces stages est de limiter de manière significative les risques de réitération des infractions concernées en apportant, par une peine adaptée, une réponse pédagogique à leur auteur.
Compte tenu des indications qui ont été données en commission, je propose deux rédactions différentes visant à intégrer au sein du stage de citoyenneté un volet consacré à la sensibilisation au respect de l’animal pour les personnes condamnées pour violences contre des animaux. Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà largement abordé ce débat la semaine dernière, dans d’autres hypothèses, y compris le vote d’une contravention. La commission a longuement discuté de l’opportunité d’intégrer la question de la maltraitance des animaux dans les stages de citoyenneté : elle a conclu par la négative.
Il existe déjà sept stages de ce type, et selon qu’on serait sensible à tel sujet plutôt qu’à tel autre, toute infraction pourrait donner lieu à la création d’un nouveau stage : cela serait sans fin ! Il existe déjà de nombreuses modalités de répression de la maltraitance des animaux. Il nous semble, de surcroît, que l’amendement no 832 n’atteindrait pas le but que vous souhaitez. La commission y est donc défavorable.
Votre deuxième amendement, no 1195, peut sembler plus acceptable. Il vise à préciser que le stage de citoyenneté « peut comprendre une sensibilisation au respect de l’animal ». Cette précision est-elle bien nécessaire ? Je pense, pour ma part, qu’elle est inutile, car la citoyenneté comprend de multiples autres dimensions. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je vous engage donc à retirer ces amendements, même si je doute que vous accédiez à cette demande ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Je partage, sur le fond, vos préoccupations, mais trois éléments me conduisent à donner un avis défavorable à ces amendements.
Premièrement, on ne peut pas instituer un stage adapté pour chaque infraction. On ne peut pas suivre le principe « une infraction, un stage » : ce serait beaucoup trop compliqué à organiser.
Deuxièmement, s’il s’agit d’un acte de cruauté, alors il s’agit d’un délit, et dans ce cas, c’est une sanction plus sévère qu’un stage qui s’impose. Cette sanction peut aller jusqu’à une peine d’emprisonnement.
En revanche, troisième argument, s’il s’agit d’un acte d’une gravité moindre, alors il est possible d’y répondre soit par une composition pénale, soit par une alternative aux poursuites. Ces procédures permettent, précisément, de proposer à l’auteur des faits un stage dans des organismes sociaux, éventuellement des associations de protection des animaux.
Pour ces raisons, je vous engage à retirer ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable. La parole est à M. Éric Diard. Je trouve que ces deux amendements vont dans le bon sens.
La loi a évolué, et les animaux ne sont plus définis sur le plan juridique comme des biens meubles mais comme des « êtres vivants doués de sensibilité ». Et pourtant, les actes de cruauté envers les animaux ont augmenté de manière exponentielle en 2017. Or une étude canadienne a montré que la maltraitance envers les animaux n’est pas sans lien avec la maltraitance envers les personnes. Ceux qui maltraitent les animaux maltraitent souvent aussi leurs femmes, leurs enfants : c’est très grave.
Le stage de citoyenneté vise à rappeler aux personnes condamnées les valeurs républicaines. Il a une fonction éducative. Il faut lutter contre la récidive des personnes condamnées pour violences envers les animaux, qui est élevée. Ces deux amendements me paraissent opportuns à ce titre : aussi les soutiendrai-je. La parole est à M. Loïc Dombreval. Pour appuyer les propos tenus par ma collègue Corinne Vignon, je tiens à souligner combien l’expérience des TIG mettant en contact des condamnés et des animaux est positive. Ainsi, dans le Val-d’Oise, une ferme accueille depuis quelques années des personnes condamnées à des TIG, où celles-ci ont l’occasion d’élever des animaux. Leur taux de non-réitération est spectaculaire. Le contact avec les animaux représente donc bien plus qu’une alternative à la prison : il permet de réveiller les consciences. C’est une école du respect du vivant, un retour à la dignité.
Dans le même ordre d’idée, des associations pratiquent la médiation animale en milieu carcéral : il s’agit de relier les détenus au vivant afin de les aider à réorienter leur vie. C’est une démarche surprenante, c’est vrai, mais elle fait ses preuves : ses résultats sont mêmes inespérés. Un ouvrage a été publié à ce sujet en décembre 2014, intitulé Des animaux pour rester des hommes : il témoigne des résultats de la médiation animale dans la maison d’arrêt de Strasbourg.
Tout cela montre que la sensibilisation au respect de l’animal est à la fois une méthode de réinsertion, une garantie de résultats en matière de prévention de la récidive, un chemin vers le respect d’autrui et le retour à l’estime de soi. Il nous appartient donc, chers collègues, de consacrer un nouvel outil à cette approche fructueuse : le stage de sensibilisation au respect de l’animal que propose Mme Vignon au moyen de ces amendements que je vous invite à voter. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Je soutiens moi aussi ces amendements. La souffrance animale doit être prise en compte – plus exactement : elle doit être combattue – dans notre société. Il s’agit d’un fait de société important : comme l’a rappelé tout à l’heure Éric Diard, il y a un lien entre la souffrance que l’on inflige aux animaux et celle que l’on inflige aux êtres humains. Il ne s’agit pas uniquement de la souffrance globale que la société inflige, mais aussi de celle qui est le fait d’une personne donnée.
Vous avez dit, madame la ministre, que nous ne pouvons pas suivre le principe « une infraction, un stage ». Mais je pense qu’il s’agit, dans l’absolu, d’une bonne idée : il s’agit d’apporter une réponse personnalisée, adaptée au délit en question. Cela permettrait peut-être d’assurer une justice plus aboutie, une justice meilleure.
Vous avez dit par ailleurs que certains de ces délits sont déjà punis par de lourdes peines, raison pour laquelle, selon vous, un stage de sensibilisation au bien-être animal serait inadapté. C’est bien le signe, comme je le disais tout à l’heure, qu’il y a un problème d’échelle des peines pour les délits – y compris s’agissant du vol de scooter, que vous avez évoqué tout à l’heure. Si une peine de cinq ans de prison est trop sévère pour un vol de scooter, alors il faut prévoir une durée inférieure pour cette infraction ; de même, si la peine encourue en matière de maltraitance des animaux est trop élevée, il faut prévoir une peine moins longue et l’assortir d’un stage de sensibilisation. Il faut donner une autre idée de la justice, mais ce n’est pas ce que vous faites par ce texte.
Par ailleurs, il est vrai que l’animalothérapie est très utilisée dans les prisons, pour une bonne raison : parce que ça marche ! Si ce n’était pas le cas, elle ne serait pas employée. Les responsables du centre pénitentiaire pour femmes de Rennes souhaitaient disposer de chiens en permanence, mais c’était trop compliqué : il leur faut donc passer par une association, ce qui n’a rien d’évident.
J’espère du fond du cœur que Mme Le Pen apportera son soutien à ces amendements, elle qui voulait mettre des chats partout. Je la sais proche des animaux ; je l’espère proche de ces amendements ! La parole est à Mme Corinne Vignon. Je retire l’amendement no 832 mais je maintiens l’amendement no 1195, qui est quasiment identique. (L’amendement no 832 est retiré.) (L’amendement no 1195 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 507 et 850.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 507. Il est défendu. La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 850. Il est défendu. (Les amendements identiques nos 507 et 850, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) Nous en venons à l’amendement no 578.
Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour défendre l’amendement. Par cet amendement de suppression qui cible certains alinéas de l’article, nous entendons conserver l’identité du travail d’intérêt général. Pour cela, il ne faut pas qu’il puisse être effectué auprès de personnes morales de droit privé. Nous considérons en effet qu’en élargissant les travaux d’intérêt général aux entreprises privées, le Gouvernement procède de fait à une privatisation du service public de la justice au détriment de l’intérêt général.
Le Gouvernement souhaite que cette peine puisse être accomplie au sein des entreprises, personnes morales de droit privé relevant de l’économie sociale et solidaire et poursuivant un but d’utilité sociale. La commission a élargi cette possibilité aux sociétés à mission au sens de l’article L. 210-10 du code de commerce.
Traditionnellement, les sociétés de droit privé sont exclues du champ des organisations pouvant accueillir des travaux d’intérêt général. En revenant sur cette exclusion, vous creusez une brèche. La peine de TIG est une sanction-réparation au profit de la société ; par cette réhabilitation, une personne ayant causé un dommage à la société peut réparer sa faute par un travail non rémunéré au profit de la société.
Par ailleurs, le Gouvernement a choisi d’augmenter le nombre maximal possible d’heures de TIG, lequel passera de 280 à 400. Nous refusons cette augmentation, qui conduirait à la constitution d’une main-d’œuvre précarisée sous main de justice. À ce niveau, le but des TIG n’est plus la réinsertion !
Enfin, le Gouvernement a souhaité que les mineurs puissent être condamnés à une telle peine qui devient l’alpha et l’oméga des mesures de justice. Ce faisant, il s’assied sur le principe de l’individualisation des peines, et surtout de la primauté de l’éducatif sur le répressif. Nous nous y opposons : nous préférerions que le Gouvernement se concentre sur le développement des postes de TIG dans les administrations, les collectivités territoriales et les entreprises publiques. Nous partageons en effet le constat qu’il est nécessaire de faire des efforts pour développer cette mesure bien identifiée par nos concitoyens et concitoyennes ainsi que par les magistrats et magistrates. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) Quel est l’avis de la commission ? Détaillant l’échelle des peines, nous avons déjà évoqué tout à l’heure le travail d’intérêt général. Ce projet de loi, tel qu’il a été modifié par la commission, vise à lui donner toute sa place. Nous pensons que l’incarcération est nécessaire, mais que d’autres dispositifs permettent d’assurer la protection de la société, par une sanction réelle, tout en œuvrant à la réinsertion de la personne condamnée. Le travail d’intérêt général prend d’ailleurs une place importante dans la nouvelle échelle des peines, où il figure en troisième position.
Madame Obono, vous avez évoqué plusieurs questions de nature différente. Il est exact que la durée maximale d’un TIG est actuellement de 280 heures ; nous proposons de la porter à 400 heures. Il ne s’agit bien sûr pas que toutes les peines de TIG soient de 400 heures, mais de donner un outil plus efficace aux magistrats. En effet, la crédibilité du travail d’intérêt général repose en partie sur sa durée.
Ensuite, s’agissant des mineurs, je rappelle qu’ils peuvent déjà être condamnés à un travail d’intérêt général. L’amendement adopté en commission permet simplement qu’un mineur puisse être condamné à un TIG dès lors qu’il est âgé d’au moins seize ans quand il comparaît devant la juridiction, y compris s’il était plus jeune au moment de la commission de l’infraction. Cela permettra d’appliquer la mesure à des mineurs en âge de comprendre, tout en les intégrant dans un dispositif qui constitue une véritable réponse à un acte commis à un plus jeune âge. Cette disposition est absolument nécessaire pour que la réponse soit plus adaptée à leur personnalité.
Enfin, l’extension des structures autorisées à proposer des TIG est un vrai sujet de débat. Celui-ci a eu lieu largement au sein de la commission et a aussi fait l’objet d’un rapport remis au Premier ministre. L’une des voies par lesquelles le travail d’intérêt général peut trouver son plein développement est aussi d’élargir le nombre de structures susceptibles d’accueillir des personnes condamnées à une peine de TIG. Et il nous a semblé que le secteur de l’économie sociale et solidaire, secteur parfaitement protégé et correspondant tout à fait à la logique sociale du travail d’intérêt général, devait pouvoir lui aussi en accueillir. Ce secteur est extrêmement réactif, y compris en zone rurale. Nous y avons ajouté les « entreprises à mission » telles que définies dans le projet de loi PACTE en cours d’examen : il sera possible à ces dernières d’accueillir des personnes condamnées à une peine de TIG, si la mission sociale qu’elles auront elles-mêmes définie dans leurs statuts les en rend susceptibles.
Ces éléments d’évolution profonde du travail d’intérêt général nous paraissent parfaitement correspondre au rôle que nous entendons dorénavant lui voir jouer. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je ne saurais mieux argumenter que M. le rapporteur. Même avis. La parole est à M. Ugo Bernalicis. On part du constat que la peine de travail d’intérêt général est trop peu prononcée aujourd’hui : c’est vrai. Et on pense qu’il faut qu’elle le soit davantage : c’est vrai, raison pour laquelle j’étais pour une peine de probation autonome lors de la discussion de notre amendement qui proposait une autre échelle des peines, où le travail d’intérêt général aurait pu être un élément important. Néanmoins, on finit par céder sur des choses qui me semblent essentielles : un travail d’intérêt général, ce n’est pas une « peine de travail », une condamnation à n’importe quel travail. Il comporte une dimension d’intérêt général, ce qui suppose qu’on fasse appel à des structures, publiques ou privées, mais nécessairement à but non lucratif. Or en ouvrant le dispositif à l’économie sociale et solidaire, aussi sympa soit la dénomination de ce secteur, on l’ouvre tout de même au secteur privé marchand, à but lucratif. Voilà la réalité. Et avec le relèvement du plafond à 400 heures, je fais confiance à de grandes entreprises ayant déjà une filiale œuvrant dans le segment de l’économie sociale et solidaire pour proposer des postes de travail d’intérêt général au-delà des 280 heures du plafond actuel, parce que cela s’insérera bien dans leur plan de charge et que, dans le même temps, joignant ainsi l’utile à l’agréable, elles pourront se donner une bonne image. Pourquoi ne se diraient-elles pas : « Tope là ! » ?
En réalité, c’est parce qu’on a démissionné, en renonçant à proposer des postes de travail d’intérêt général là où on pourrait le faire mais où on ne le fait pas, car le principal problème, ce sont les encadrants, tout le monde le sait. Et que propose-t-on pour qu’il y en ait davantage et qu’ils soient mieux formés ? Est-ce la future agence nationale du travail d’intérêt général qui s’en chargera demain ? Non, absolument pas. C’est le cœur du problème. Quand je suis allé voir, dans ma circonscription, à Lille, le directeur du CROUS et celui du SPIP – service pénitentiaire d’insertion et de probation –, le premier m’a dit que le CROUS ne prenait pas de personnes en TIG ; or, finalement, le CROUS de Lille va proposer pour la première fois des postes de TIG, et ce uniquement parce que j’ai mis les deux services en relation ! Merci, monsieur Bernalicis ! Et ce sont des initiatives comme celle-ci qui, à côté de circulaires interministérielles et d’objectifs fixés aux administrations concernées, devraient permettre de développer le TIG, pas le secteur marchand. Je mets aux voix l’amendement no 578. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 7
Contre 55 (L’amendement no 578 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 1001, 851 et 703, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 1001. Madame la ministre, je suis favorable aux peines de travaux d’intérêt général et je pense qu’on doit les accompagner et les développer. C’est pourquoi mon amendement propose de supprimer l’obligation de consentement du prévenu, de manière à laisser au juge la faculté de décider s’il est pertinent ou non, au regard de la situation de ce dernier, de prononcer cette peine. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 851. Notre rapporteur a fait un très bon travail sur les travaux d’intérêt général, et je pense qu’on doit aller évidemment dans la direction qu’il suggère. Mais si le consentement est systématiquement demandé, je crains que la mesure, qui a pourtant vraiment tout son intérêt, tombe à plat. D’où cet amendement. La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l’amendement no 703. Le travail d’intérêt général est déjà un cadeau puisqu’il se substitue à une peine de prison. Il est donc raisonnable d’acter le principe que tout refus de la peine de travail d’intérêt général proposée à la place de l’emprisonnement entraîne l’exécution immédiate de ladite peine de prison, laquelle ne peut alors plus faire l’objet d’aménagement, parce que l’échelle des peines, ce n’est pas le resto : chacun ne choisit pas à la carte ce qui lui plaît. À partir du moment où la personne refuse le cadeau qui lui est déjà fait en lui proposant une peine alternative à la prison, non seulement elle doit immédiatement purger sa peine de prison mais, de surcroît, tout ou partie de cette peine ne doit pouvoir faire l’objet d’aucun aménagement, prenant encore je ne sais quelle forme – tant vous faites preuve d’imagination dans cette assemblée. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ? Là où Mme Le Pen voit des cadeaux, je vois des réponses pénales effectives et adaptées à la situation de chaque délinquant.
Quant à la proposition de pouvoir condamner à un travail d’intérêt général sans le consentement de la personne, pourquoi pas ? Si ce n’est que cela se heurterait à un principe de droit international, notamment à la convention de l’Organisation internationale du travail de 1932 qui proscrit tout ce qui pourrait ressembler à du travail forcé ! Je signale aux auteurs de ces amendements que nous avons prévu que le consentement puisse être différé. Il ne sera donc plus impératif que le prévenu soit présent à l’audience pour être condamné à un TIG : il suffira que son consentement soit recueilli ultérieurement devant le juge d’application des peines. L’avis est défavorable pour ces motifs. (Les amendements nos 1001, 851 et 703, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Les deux amendements, nos 1104 et 1102, sont rédactionnels. Tout à fait, monsieur le président. Le premier est de précision, le second de coordination. (Les amendements nos 1104 et 1102, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.) La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 849. Il s’agit de pouvoir prononcer des peines de travail d’intérêt général pour les mineurs âgés de treize à seize ans, avec bien sûr l’autorisation de leurs parents. (L’amendement no 849, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) Les amendements nos 1105, 1103, 1106, 1107 et 1108, sont de coordination. En effet, monsieur le président. (Les amendements nos 1105, 1103, 1106, 1107 et 1108, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.) La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 1002. Cet amendement s’inscrit lui aussi dans la logique de favoriser, d’accompagner et de développer les travaux d’intérêt général. J’ai longtemps été maire adjoint, chargée notamment de la prévention de la délinquance, d’une commune qui accueillait dans ses services des personnes condamnées à un TIG : à ce titre, je puis témoigner que cet accueil représente pour la collectivité une charge administrative et un coût financier. Ces deux éléments constituent d’ailleurs souvent un frein ; certaines communes qui seraient prêtes à en accueillir y renoncent pour ces raisons. Je propose donc que la dotation globale de fonctionnement prenne en compte les charges liées à l’accueil des TIG. Je n’ai pas voulu spécifier de montant, simplement proposer déjà l’idée. Quel est l’avis de la commission ? Il y a sans aucun doute un problème de financement, pas seulement d’ailleurs pour les collectivités territoriales mais aussi pour les associations et de nombreuses autres structures qui pourraient en accueillir. Mais il ressort des auditions que nous avons menées que beaucoup d’entre elles n’en font pas un préalable. Une des voies à suivre ne serait pas forcément celle que vous proposez, cher collègue, mais plutôt une augmentation du FIPD, le fonds interministériel de prévention de la délinquance, car celui-ci vise précisément ce but. Et surtout, je ne pense pas que le présent texte soit le lieu d’un débat sur ces aspects financiers. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. J’ai parfaitement conscience de l’apport que les tuteurs doivent évidemment impulser dans le dispositif. Il faut savoir que l’agence nationale pour le travail d’intérêt général, qui sera créée le 10 décembre prochain, développera une plateforme numérique à même d’apporter un appui aux tuteurs en leur fournissant des modules de formation et que, par ailleurs, je suis en discussion sur l’ensemble de la question avec ma collègue ministre de la cohésion de territoires, Jacqueline Gourault. Mais il me semble difficile de faire de la dotation que vous proposez un préalable. Je comprends la problématique, j’ai beaucoup discuté avec des maires qui ont soulevé devant moi la question, mais je pense qu’il y a d’autres moyens de parvenir à favoriser l’accueil de TIG par les collectivités, en tout cas à ce stade. La parole est à Mme Cécile Untermaier. Cet amendement est intéressant parce qu’il soulève la problématique de l’isolement dans lequel se trouvent les collectivités locales qui souhaitent s’engager dans le dispositif des TIG. Sinon une réponse financière, il faut au moins leur apporter une réponse en termes d’accompagnement à proposer aux élus, notamment dans les intercommunalités, où l’offre se développe. Un accompagnement sérieux devrait être proposé aux maires et présidents d’intercommunalité qui s’engagent dans cette voie. La parole est à M. Philippe Gosselin. Notre collègue Pauget a vraiment raison de soulever cette question. La réponse n’est peut-être pas seulement financière, c’est bien possible, mais il fallait appeler l’attention de l’Assemblée – car la garde des sceaux le sait déjà – sur la difficulté pour les collectivités à répondre favorablement à des demandes de TIG : il faut de préférence évidemment un élu référent, mais aussi des personnels à même de s’engager dans la démarche, le problème n’étant pas qu’ils manquent des compétences requises – encore qu’il puisse se poser dans certaines petites collectivités –, mais plutôt qu’ils soient accompagnés, aidés dans la démarche, bref que, se sentant sécurisés, épaulés, ils en aient l’envie. Si on veut vraiment que les travaux d’intérêt général se développent dans les collectivités territoriales, il faudra non seulement faire œuvre de pédagogie, car il n’est pas toujours simple de faire avec le regard que portent nos concitoyens sur les personnes effectuant un TIG, mais également œuvre utile en accompagnant ces collectivités, autrement sans doute que sur le plan financier mais je crois que nous sommes au moins d’accord là-dessus. Peut-être pourriez-vous, madame la garde des sceaux, nous donner quelques éléments supplémentaires, quelques perspectives à ce stade ? Quel est l’avis du Gouvernement ? Comme je vous le disais, monsieur le député, nous allons créer cette agence du TIG. Un réseau de délégués territoriaux, qui seront précisément là pour apporter leur appui, en termes d’encadrement et de conception, aux collectivités qui voudraient, avec nous, s’engager dans ce dispositif, en fera partie.
Ce réseau de délégués territoriaux jouera, je le crois, un rôle important. Cela n’exclut cependant pas d’autres réflexions comme celle que M. le rapporteur a évoquée ou celle que j’ai évoquée auprès de M. le député. La parole est à M. Rémy Rebeyrotte. Je rejoins la préoccupation exprimée par notre collègue : si les collectivités ne disposent pas de personnes un minimum formées pour bien accompagner la personne accomplissant en leur sein une peine d’intérêt général, cela soulève des difficultés. Si la dimension financière existe, existe également celle relative à l’accueil, à la formation et à l’encadrement. L’encadrement est en effet essentiel. Il faut également être capable de se rendre utile par rapport à l’évolution que peut connaître la personne accomplissant une telle peine.
Par conséquent, les délégués territoriaux, ainsi que la formation qu’ils pourront apporter, peuvent constituer une véritable réponse visant à encourager les collectivités à entrer dans le dispositif. (L’amendement no 1002 n’est pas adopté.) (L’article 43, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 43.
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour soutenir l’amendement no 378. Cet amendement aborde le débat relatif au traitement pénal des individus présentant des troubles psychiatriques. Il vise à modifier la rédaction de l’article 122-1 du code pénal sur la responsabilité psychiatrique afin d’y faire figurer le fait que l’altération du discernement doit constituer une cause légale d’atténuation de responsabilité.
Aujourd’hui, en effet, elle provoque plutôt un alourdissement de la peine qu’un allégement. Or il est nécessaire que les personnes présentant des troubles psychiatriques soient soignées, car elles peuvent présenter un danger, pour elles-mêmes ainsi que pour les autres. Pour elles, la peine de prison n’a en outre pas toujours de sens. Quel est l’avis de la commission ? Il est défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il me semble, madame la députée, que l’objectif de votre amendement est déjà satisfait par l’article 122-1 du code pénal dans sa rédaction actuelle – je ne le citerai pas. Il ne fait en effet aucun doute que l’altération du discernement est une cause non pas d’irresponsabilité pénale, mais d’atténuation de celle-ci et donc d’allégement de la peine.
Cela résulte de l’intitulé même du chapitre II : « Des causes d’irresponsabilité ou d’atténuation de la responsabilité ». Cela résulte aussi de l’alinéa 2 de ce même article qui, depuis la loi du 15 août 2014, prévoit expressément, en cas d’altération du discernement, une diminution du tiers du maximum de la peine privative de liberté encourue.
Il me semble donc que votre amendement ne modifie en rien le fond du droit existant mais qu’en revanche il présente l’inconvénient de supprimer la précision selon laquelle la personne dont le discernement est altéré demeure cependant punissable. Il me semble également que sa rédaction est imparfaite. Aussi je vous demande de le retirer. À défaut, j’émettrais un avis défavorable. Madame Levy, retirez-vous cet amendement ? Oui. (L’amendement no 378 est retiré.) Vous gardez la parole, madame Levy, pour soutenir l’amendement no 379. Il s’agit toujours du traitement pénal des individus présentant des troubles psychiatriques. L’amendement vise à modifier la rédaction de l’article 122-1 qui vient d’être évoqué afin que les personnes présentant des troubles psychiatriques condamnées soient soignées dans des structures adaptées telles que les services médico-psychologiques régionaux – SMPR –, dans lesquelles elles ne représentent des dangers ni pour elles-mêmes ni pour les autres. Ces unités de soins assurent en effet la prévention, le diagnostic et les soins des troubles psychiatriques en détention. Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement prend toute sa valeur au regard du groupe de travail sur les conditions psychiatriques en détention qui était présidé par notre excellent collègue Stéphane Mazars.
En réalité, il est déjà parfaitement satisfait au plan de la loi, même si une certaine nuance peut parfois exister entre la loi et son effectivité : existent en effet déjà pour les soins ambulatoires les SMPR, ou des unités sanitaires particulières comme les unités hospitalières spécialement aménagées – UHSA – ou, pour les hôpitaux psychiatriques de secteur, les unités pour malades difficiles – UMD.
Nous disposons donc d’ores et déjà d’une palette d’actions tout à fait cohérente pour répondre à cette problématique. Je vous demande donc, si vous en êtes d’accord, de retirer votre amendement, puisque la prise en charge de ces personnes est déjà assurée, en précisant également que les possibilités de suspension de leur peine ont été récemment assouplies par la loi de 2014. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. (L’amendement no 379 est retiré.) Je suis saisi de deux amendements, nos 382 et 996, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour soutenir l’amendement no 382. Il faut savoir que les habitants des zones prioritaires comme les anciennes ZUS – zones urbaines sensibles – sont plus souvent témoins de trafics que ceux des autres quartiers. En particulier, un quart d’entre eux déclarent avoir souvent observé, au cours des douze derniers mois, des phénomènes de consommation ou de trafic de drogue dans leur quartier.
Cet amendement ne vise pas à instaurer une loi pénale différente selon les territoires mais à rétablir l’égalité républicaine entre tous les citoyens, quel que soit leur lieu de vie. Il veut lutter contre la prolifération des zones de non-droit en durcissant les sanctions à l’encontre des caïds et en rétablissant l’effet dissuasif de la sanction pour ceux qui estiment pouvoir s’adonner à toutes sortes de trafics dans une relative impunité. La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 996. Il s’agit, madame la ministre, d’un amendement d’appel. L’idée est de créer une circonstance aggravante nouvelle, comme vient de le proposer ma collègue : le fait que les infractions soient commises dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
Nous avons conscience qu’en l’état, cet amendement peut poser problème, mais le Danemark est en train de mettre en place une telle mesure, sur le même type de dispositif.
L’idée sous-jacente est de retrouver une équité territoriale en fonction des juridictions et des retours de peine que l’on observe en différents points du territoire.
Il s’agit, je le répète, d’un amendement d’appel visant à lancer le débat. Si nous avons bien conscience qu’en l’état il peut poser problème, cette notion de circonstance aggravante dans les quartiers en difficulté mérite la réflexion. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ? Vous avez raison, cher collègue, cela peut poser et cela pose problème. En effet, ces amendements se heurtent à deux principes un peu fondamentaux : le premier est celui de l’égalité de chaque citoyen devant la loi pénale, et le second est celui selon lequel il serait particulièrement malvenu de stigmatiser telle ou telle zone, tel ou tel quartier, ou telle ou telle condition de réalisation d’infractions.
La commission a donc émis un avis très clairement défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est vraiment défavorable, parce qu’en la matière on heurte des principes constitutionnels qui sont indépassables. M. le rapporteur vient de les rappeler, et parmi eux, le principe d’égalité, surtout en droit pénal, est vraiment indépassable.
En revanche, il est un point sur lequel j’insiste en tant que garde des sceaux : il peut m’arriver de donner, sur des zones que je peux délimiter sur le territoire, des instructions de politique pénale générale visant à la prise en charge d’un certain nombre d’infractions. C’est cependant très différent : je peux en effet avoir une politique pénale différenciée selon les territoires, mais pas s’agissant des infractions mais du travail conduit avec les autres institutions, notamment les préfectures.
Je distingue par conséquent les instructions de politique pénale générale de la question du principe d’égalité qui, en l’espèce, serait enfreint. (Les amendements nos 382 et 996, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Geneviève Levy, pour soutenir l’amendement no 377. Il est défendu. (L’amendement no 377, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 513. Il est défendu. (L’amendement no 513, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour soutenir l’amendement no 378. Cet amendement aborde le débat relatif au traitement pénal des individus présentant des troubles psychiatriques. Il vise à modifier la rédaction de l’article 122-1 du code pénal sur la responsabilité psychiatrique afin d’y faire figurer le fait que l’altération du discernement doit constituer une cause légale d’atténuation de responsabilité.
Aujourd’hui, en effet, elle provoque plutôt un alourdissement de la peine qu’un allégement. Or il est nécessaire que les personnes présentant des troubles psychiatriques soient soignées, car elles peuvent présenter un danger, pour elles-mêmes ainsi que pour les autres. Pour elles, la peine de prison n’a en outre pas toujours de sens. Quel est l’avis de la commission ? Il est défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il me semble, madame la députée, que l’objectif de votre amendement est déjà satisfait par l’article 122-1 du code pénal dans sa rédaction actuelle – je ne le citerai pas. Il ne fait en effet aucun doute que l’altération du discernement est une cause non pas d’irresponsabilité pénale, mais d’atténuation de celle-ci et donc d’allégement de la peine.
Cela résulte de l’intitulé même du chapitre II : « Des causes d’irresponsabilité ou d’atténuation de la responsabilité ». Cela résulte aussi de l’alinéa 2 de ce même article qui, depuis la loi du 15 août 2014, prévoit expressément, en cas d’altération du discernement, une diminution du tiers du maximum de la peine privative de liberté encourue.
Il me semble donc que votre amendement ne modifie en rien le fond du droit existant mais qu’en revanche il présente l’inconvénient de supprimer la précision selon laquelle la personne dont le discernement est altéré demeure cependant punissable. Il me semble également que sa rédaction est imparfaite. Aussi je vous demande de le retirer. À défaut, j’émettrais un avis défavorable. Madame Levy, retirez-vous cet amendement ? Oui. (L’amendement no 378 est retiré.) Vous gardez la parole, madame Levy, pour soutenir l’amendement no 379. Il s’agit toujours du traitement pénal des individus présentant des troubles psychiatriques. L’amendement vise à modifier la rédaction de l’article 122-1 qui vient d’être évoqué afin que les personnes présentant des troubles psychiatriques condamnées soient soignées dans des structures adaptées telles que les services médico-psychologiques régionaux – SMPR –, dans lesquelles elles ne représentent des dangers ni pour elles-mêmes ni pour les autres. Ces unités de soins assurent en effet la prévention, le diagnostic et les soins des troubles psychiatriques en détention. Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement prend toute sa valeur au regard du groupe de travail sur les conditions psychiatriques en détention qui était présidé par notre excellent collègue Stéphane Mazars.
En réalité, il est déjà parfaitement satisfait au plan de la loi, même si une certaine nuance peut parfois exister entre la loi et son effectivité : existent en effet déjà pour les soins ambulatoires les SMPR, ou des unités sanitaires particulières comme les unités hospitalières spécialement aménagées – UHSA – ou, pour les hôpitaux psychiatriques de secteur, les unités pour malades difficiles – UMD.
Nous disposons donc d’ores et déjà d’une palette d’actions tout à fait cohérente pour répondre à cette problématique. Je vous demande donc, si vous en êtes d’accord, de retirer votre amendement, puisque la prise en charge de ces personnes est déjà assurée, en précisant également que les possibilités de suspension de leur peine ont été récemment assouplies par la loi de 2014. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. (L’amendement no 379 est retiré.) Je suis saisi de deux amendements, nos 382 et 996, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour soutenir l’amendement no 382. Il faut savoir que les habitants des zones prioritaires comme les anciennes ZUS – zones urbaines sensibles – sont plus souvent témoins de trafics que ceux des autres quartiers. En particulier, un quart d’entre eux déclarent avoir souvent observé, au cours des douze derniers mois, des phénomènes de consommation ou de trafic de drogue dans leur quartier.
Cet amendement ne vise pas à instaurer une loi pénale différente selon les territoires mais à rétablir l’égalité républicaine entre tous les citoyens, quel que soit leur lieu de vie. Il veut lutter contre la prolifération des zones de non-droit en durcissant les sanctions à l’encontre des caïds et en rétablissant l’effet dissuasif de la sanction pour ceux qui estiment pouvoir s’adonner à toutes sortes de trafics dans une relative impunité. La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 996. Il s’agit, madame la ministre, d’un amendement d’appel. L’idée est de créer une circonstance aggravante nouvelle, comme vient de le proposer ma collègue : le fait que les infractions soient commises dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
Nous avons conscience qu’en l’état, cet amendement peut poser problème, mais le Danemark est en train de mettre en place une telle mesure, sur le même type de dispositif.
L’idée sous-jacente est de retrouver une équité territoriale en fonction des juridictions et des retours de peine que l’on observe en différents points du territoire.
Il s’agit, je le répète, d’un amendement d’appel visant à lancer le débat. Si nous avons bien conscience qu’en l’état il peut poser problème, cette notion de circonstance aggravante dans les quartiers en difficulté mérite la réflexion. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ? Vous avez raison, cher collègue, cela peut poser et cela pose problème. En effet, ces amendements se heurtent à deux principes un peu fondamentaux : le premier est celui de l’égalité de chaque citoyen devant la loi pénale, et le second est celui selon lequel il serait particulièrement malvenu de stigmatiser telle ou telle zone, tel ou tel quartier, ou telle ou telle condition de réalisation d’infractions.
La commission a donc émis un avis très clairement défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est vraiment défavorable, parce qu’en la matière on heurte des principes constitutionnels qui sont indépassables. M. le rapporteur vient de les rappeler, et parmi eux, le principe d’égalité, surtout en droit pénal, est vraiment indépassable.
En revanche, il est un point sur lequel j’insiste en tant que garde des sceaux : il peut m’arriver de donner, sur des zones que je peux délimiter sur le territoire, des instructions de politique pénale générale visant à la prise en charge d’un certain nombre d’infractions. C’est cependant très différent : je peux en effet avoir une politique pénale différenciée selon les territoires, mais pas s’agissant des infractions mais du travail conduit avec les autres institutions, notamment les préfectures.
Je distingue par conséquent les instructions de politique pénale générale de la question du principe d’égalité qui, en l’espèce, serait enfreint. (Les amendements nos 382 et 996, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Geneviève Levy, pour soutenir l’amendement no 377. Il est défendu. (L’amendement no 377, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 513. Il est défendu. (L’amendement no 513, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)