XVe législature
Session ordinaire de 2018-2019

Séance du lundi 15 octobre 2018

Cet après-midi, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale. Nous poursuivons celle-ci avec Mme Amélie de Montchalin. Madame la présidente, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, monsieur le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, mes chers collègues, Marcel Proust disait qu’il était souhaitable de substituer « à l’opacité des sons la transparence des idées ». Alors que nous entrons dans des débats budgétaires où les chiffres peuvent vite occulter le sens de l’action, il est plus que jamais nécessaire d’être transparents quant à nos idées.
La clarté du projet et des choix politiques qu’il promeut méritent en effet mieux de la part de nos oppositions que les contre-vérités, les approximations et les chefs-d’œuvre de technique parlementaire mobilisés pour en brouiller, en rallonger et en alourdir l’examen. Qui ne souhaite ici un débat lisible par les Français, où s’opposeraient des projets plutôt que des batailles de chiffres, où chacun aurait enfin le courage de sortir des postures et de jouer cartes sur table ?
Sans dogmatisme, nous avons fait un choix politique : réparer la France par l’emploi et l’investissement pour que le travail paye, pour que la France exporte, innove, reste un pays prospère et finance son modèle social.
Si nos oppositions avaient présenté des projets alternatifs, c’est de leur confrontation avec les résultats tangibles de cette politique que j’aurais parlé – pour n’en citer que quelques-uns : un taux d’emploi record, un investissement des entreprises au plus haut et de petites et moyennes entreprises qui retrouvent massivement des financements de long terme.
Mais, devant l’offensive partiale, partielle et face à la mauvaise foi qui anime souvent cet hémicycle, je me dois de lancer au nom de notre majorité et devant les Français une opération « transparence » absolument nécessaire à la clarté de nos débats.
Lorsque nous entendons que nous présenterions un budget « anti-pouvoir d’achat », nous répondons que ce budget, ce sont 3,5 milliards d’euros de pouvoir d’achat en plus grâce à une baisse d’impôts de 6 milliards. Du jamais vu ; au contraire, on a longtemps financé du pouvoir d’achat artificiel par la dette et les impôts – on reprenait ainsi aux Français d’une main ce qu’on leur avait donné de l’autre.
Ça ne change pas ! Rendez l’argent ! Notre responsabilité, c’est de rappeler que l’emploi, et l’emploi seul, est la véritable source du pouvoir d’achat. Ainsi, quand nous investissons massivement dans ce budget pour la formation professionnelle et les compétences, nous investissons en faveur d’un travail qui paye mieux, nous investissons dans le pouvoir d’achat des Français.
À ce titre, j’aimerais revenir sur deux thématiques chères à nos oppositions : la cigarette et la hausse des prix du carburant.
Tiens, tiens ! Concernant la première, nous assumons totalement une fiscalité comportementale qui a permis de réduire le nombre de fumeurs d’un million déjà, alors que le tabac tue 73 000 personnes par an. Concernant la seconde, nous rejetons avec force tant le populisme que l’inconscience écologique.
Je souhaite tout d’abord rappeler que la hausse du prix du carburant est due pour les deux tiers à celle du prix du baril de pétrole sur les marchés internationaux et pour un tiers, en effet, à la trajectoire carbone, à laquelle ont unanimement appelé les signataires de l’accord de Paris sur le climat pour enclencher une transition énergétique urgente.
Racket ! Non, pas du racket, mais un investissement sur l’avenir.
Nous assumons cette politique et constatons le succès de la prime à la conversion des véhicules votée l’an dernier, qui a déjà permis à 250 000 ménages – dont 70 % de ménages non imposables – d’acheter un véhicule plus propre.
Les travailleurs ne vous remercient pas ! Nous remarquons également que quatre millions de ménages bénéficient du chèque énergie que nous avons créé pour couvrir les dépenses de première nécessité énergétique : c’est une aide directe aux ménages bien plus efficace que les tarifs réglementés qu’elle a remplacés.
Par ailleurs, lorsque nous entendons que, dans ce budget, nous opposerions les Français les uns aux autres, nous répondons avec beaucoup de fermeté que chacun trouve son compte dans un budget dédié au travail comme dans un budget qui finance tous les territoires.
En effet, des entreprises qui créent de l’emploi durable en France sont la meilleure garantie du retour de la croissance et du maintien de notre système de protection sociale. Des emplois au sein de nos entreprises sont la meilleure garantie de pouvoir investir suffisamment dans ce qui profite à tous : 400 millions d’euros dans notre système de santé, 1,7 milliard dans nos armées et 700 millions pour la police et la justice.
C’est aussi la garantie d’un vrai soutien à la ruralité et aux territoires éloignés des grandes métropoles : nous consacrons 1,6 milliard à l’investissement public local et à l’équipement des territoires ; nous finançons l’embauche de 400 médecins salariés pour couvrir les zones médicales désertifiées ; nous finançons la création d’une véritable épargne de précaution pour nos agriculteurs ; nous finançons et, surtout, nous défendons la modernisation des outils de soutien au développement économique des outre-mer. Tout cela, nous ne le finançons pas à partir de la dette, mais grâce au travail et à un soutien fervent à l’activité économique.
Par le déficit, oui ! Je voudrais par ailleurs le réaffirmer avec force : nous ne jouons pas les actifs contre les retraités, et nous ne faisons les poches de personne !
Les retraités ont besoin d’actifs au travail pour payer leurs retraites, sinon, celles-ci ne sont financées que par la dette, et tout le monde y perd : nos enfants, nos petits-enfants, nos arrière-petits-enfants, qui devront trouver des solutions que nous-mêmes avons aujourd’hui du mal à financer.
Dès la campagne présidentielle, nous avons toujours été extrêmement clairs sur l’effort que nous demanderions aux retraités percevant plus de 2 500 euros de revenus mensuels.
900 euros ! C’est un effort de redistribution et de solidarité que nous assumons.
La mauvaise foi de la précédente majorité n’a toutefois pas de limite lorsqu’il s’agit de manipuler nos aînés. Rappelons qu’elle a augmenté les pensions de retraite en début de mandat, de 2,1 % en 2012, puis 1,3 % en 2013… au prix d’une hausse de cinq points de dette. Et après ces débuts en fanfare, 0 % de hausse !
L’inflation n’était pas la même ! Elle était à zéro ! Nous, nous augmentons sensiblement le minimum vieillesse et, plus graduellement et régulièrement, les pensions de retraite depuis 2017, au rythme de la hausse de l’activité, au rythme de ce que notre pays finance pour l’emploi à partir du travail : de 0,8 % en 2017, de 0,3 % en 2019, de 0,3 % en 2020.
J’ajoute que 40 % des retraités ne sont pas concernés par la hausse de la CSG et que plus de la moitié des autres s’y retrouve dès cette année grâce à la baisse de la taxe d’habitation, et s’y retrouvera encore plus en 2019 avec la deuxième tranche de cette baisse.
Pour les retraités, nous faisons le choix politique d’investir dans les vraies questions de qualité de vie qui les concernent, en particulier la santé. Le « reste à charge zéro », notamment, instauré dès 2019, sera total en 2021 pour l’optique, le dentaire et l’audition. Nous investissons 400 millions d’euros pour une prise en charge optimale de leurs soins de santé de proximité et 2 milliards pour que les retraités modestes puissent accéder à des services à la personne à domicile, dispositif auparavant réservé aux seuls ménages les plus aisés puisqu’il reposait sur une réduction d’impôt.
En effet ! Nous investissons également dans la prise en charge de la dépendance de leurs parents en consacrant 125 millions d’euros aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et en ouvrant un grand chantier de prise en charge de la perte d’autonomie.
Enfin, nous ne pouvons laisser dire que nous ne maîtriserions pas la dépense publique. C’est un engagement fort que nous avons souscrit ici, devant les Français et nos partenaires européens, en votant la loi de programmation des finances publiques. Nous ne sommes pas des « coupeurs de coûts » obsédés par la culture du chiffre, et nous l’assumons. Un budget enfin sincère, des politiques publiques plus efficaces : voilà les meilleurs plans d’économies.
Notre cap pour la dépense publique, ce sont nos réformes, et non la politique du coup de rabot ni la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui a appauvri nos services publics sans les rendre plus efficaces. Lorsque nous réformons les hôpitaux pour développer la prévention, lorsque nous réformons la justice pour qu’elle aille plus vite, lorsque nous simplifions le recouvrement de l’impôt, lorsque nous repensons un service public audiovisuel de qualité ou des services de l’État déconcentrés, proches des citoyens, nous réformons la dépense publique !
Notre majorité sera très exigeante vis-à-vis du Gouvernement pour que cette dynamique se poursuive dans la seconde partie du projet de loi de finances. Les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ont consacré toute leur énergie à la renforcer, notamment lors du printemps de l’évaluation.
Notre crédibilité collective n’est pas une question de mots mais, avant tout, de résultats. 2017, 2018, 2019 : ce sont trois années successives où le déficit est inférieur à 3 %, ce qui n’était pas arrivé depuis l’an 2000 ; trois années successives où la dépense publique croît de moins de 1 % par an en volume, ce qui n’était tout simplement jamais arrivé ; trois années successives au-dessus de 1,5 % de croissance, ce qui n’était pas non plus arrivé depuis une décennie.
Pour en revenir à Marcel Proust, il est vrai qu’« il n’y a pas de réussite facile ».
C’est À la recherche du temps perdu , ce n’est pas possible ! Voici le résultat des efforts que nous déployons depuis le début de notre mandat… C’est Le Temps retrouvé ! …et vous pouvez compter sur nos efforts, pendant nos débats, pour continuer sur la même voie : ces débats seront ceux non du temps perdu, mais de la maîtrise retrouvée de notre dépense publique ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) La parole est à Mme Émilie Bonnivard. Monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, chers collègues, une politique budgétaire à la hauteur des enjeux actuels et à venir dans notre pays aurait dû poursuivre avec courage et détermination trois objectifs prioritaires.
Tout d’abord, diminuer l’excès de dépenses et le gaspillage d’argent public pour réduire vraiment notre déficit et notre dette en faisant preuve de responsabilité vis-à-vis de nos concitoyens et des générations à venir.
Ensuite, baisser durablement la fiscalité qui pèse sur les Français afin de leur redonner du pouvoir d’achat au profit d’une croissance solide.
Enfin, améliorer et moderniser nos services publics pour une meilleure équité sociale et territoriale.
J’aurais aimé trouver dans ce deuxième budget du « nouveau monde » au moins quelques prémices de décisions allant dans ce sens, après une première année décevante à bien des égards, notamment en matière de pouvoir d’achat. Malheureusement, il n’y a rien – pas même le début d’une décision courageuse ou d’un choix clair ! Au contraire, ce budget est celui du renoncement à la baisse de la dépense publique, donc celui du transfert massif et injuste de fiscalité d’une catégorie de Français vers une autre et celui de l’illisibilité des choix budgétaires.
Hélas, les chiffres sont têtus, et l’addition salée pour les Français.
En 2019 figure au menu une augmentation de notre déficit qui s’établira à 2,8 % du PIB, ce qui place la France en bonne dernière de la classe au sein de la zone euro. Même si l’on ôte l’effet du double crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE –, la France reste à un niveau bien inférieur à celui de la moyenne de la zone euro. Par ailleurs, nous nous apprêtons malheureusement à trahir notre engagement européen à diminuer notre solde structurel de 0,5 point.
Vous nous proposez également une augmentation à la fois de notre dette – qui avoisinant désormais 100 % de notre richesse nationale – et des intérêts qui y sont liés, à hauteur de 42 milliards d’euros – à la charge des Français, bien sûr.
C’est vraiment salé… On trouve encore au menu une augmentation de la dépense publique en volume, contrairement aux engagements du Premier ministre et alors même que les Français n’ont pas le sentiment que les services publics, notamment dans les territoires ruraux, soient à la hauteur de ce que l’on pourrait attendre de cet effort. Le décalage est tel entre le plaidoyer prononcé cet après-midi par le ministre de l’économie en faveur de la nécessaire réduction de nos dépenses et ce qu’il y a – ou plutôt ce qu’il n’y a pas – dans ce budget que c’en est profondément déroutant. Tout à fait ! Enfin, dans la continuité de 2018, vous nous proposez une augmentation des prélèvements et charges pesant sur plusieurs catégories de nos concitoyens.
Les automobilistes, tout d’abord, avec la poursuite de l’augmentation de la fiscalité sur les carburants sans qu’aujourd’hui de réelles alternatives ne soient possibles et effectivement accessibles à tous. Compte tenu du niveau élevé de l’inflation élevée – 1,7 % –, vous auriez au moins pu interrompre pour 2019 l’augmentation prévue de la fiscalité des carburants, par égard pour les contribuables de nos territoires ruraux.
Vous continuez par ailleurs à affaiblir le pouvoir d’achat des retraités et des familles avec le quasi-gel des pensions et des allocations familiales.
Enfin, vous persistez à ponctionner les collectivités défavorisées ou les perdantes de la réforme de la taxe professionnelle pour financer d’autres territoires en difficulté. La seule malheureuse innovation de ce budget est très injuste, puisqu’elle revient à créer de la péréquation entre les plus fragiles ! Vous aviez pourtant un an pour procéder à de vrais choix en matière de diminution de la dépense publique. Vous ne l’avez pas fait.
Cela vous aurait pourtant permis de financer les avancées positives de votre budget, telle la baisse des charges sur les entreprises et sur les salaires – proposée par le groupe Les Républicains –, autrement qu’en faisant les poches des retraités, des automobilistes et des familles, ou qu’en retardant ou en avançant l’application de mesures fiscales aux entreprises et aux ménages selon qu’elles dégradent ou améliorent la trésorerie de l’État, comme vous l’avez fait avec le prélèvement à la source. Enfin, cela vous aurait permis de financer la diminution de la taxe d’habitation autrement que par du déficit public – un déficit que les Français ne tarderont pas à payer, d’une manière ou d’une autre. Est-ce bien là ce que nous attendons d’un gouvernement moderne et responsable ? Je ne le crois pas !
Pour limiter les dérives budgétaires en l’absence d’économies, et pour que tout cela ne se voie pas trop, vous continuez de recourir au rabot budgétaire, toujours aveugle et souvent injuste. En atteste, dans ce budget, la fin incompréhensible de l’exonération de charges sur les travailleurs saisonniers en agriculture, ou encore la diminution du budget des sports, en contradiction totale avec notre engagement olympique.
Tout à fait ! Je croyais qu’on ne baissait pas les dépenses ! Il faudrait savoir ! La confiance et l’adhésion à des choix politiques viennent de la clarté et de la distinction, comme le dirait Descartes, des idées qu’ils véhiculent. L’idée vraie est claire et distincte. Or le budget pour 2019 est dans l’erreur car il manque son point de départ, qui aurait dû être la baisse des dépenses. Il ne consiste donc plus qu’en une série de choix confus, dont on ignore ce qu’ils nous apporteront, mais dont on pressent bien ce qu’ils nous coûteront. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Très bien ! La parole est à Mme Sarah El Haïry. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, les solidarités, ciment de notre société, sont au centre des préoccupations du groupe du Mouvement démocrate et apparentés. Le présent projet de loi de finances est donc l’occasion pour nous de leur accorder une attention toute particulière.
Je commencerai par un constat. D’après le document « Évaluation des voies et moyens » annexé au projet de loi de finances, la réduction d’ISF – impôt de solidarité sur la fortune – au titre de certains dons a coûté 192 millions d’euros en 2017. Avec la suppression de l’ISF l’an passé et la création de l’impôt sur la fortune immobilière – IFI –, le coût de cette incitation aux dons ne s’élève plus qu’à 65 millions d’euros. Le coût du dispositif équivalent applicable à l’impôt sur le revenu est quant à lui demeuré constant. Cela signifie que les dons aux associations ont diminué d’au moins 150 millions d’euros.
Eh oui ! Nous craignions l’année dernière que cette réforme ne se traduise par une baisse des dons. Au vu des chiffres avancés, je crois bien que nous y sommes. Nous vous l’avions dit ! Vous êtes les fossoyeurs des associations ! Pour y remédier, nous avons déposé plusieurs amendements, à la fois sur la première et sur la seconde partie du projet de loi de finances, pour réenclencher l’incitation aux dons et l’envie de donner dans notre pays. Nous proposerons également plusieurs amendements dont l’objectif est de prendre en considération d’autres formes de solidarités que les dons monétaires, car c’est une vraie culture de la philanthropie que nous voulons développer, une école de la philanthropie à la française.
Dans le même esprit, nous défendrons également un amendement identique à celui que le rapporteur général a proposé en commission des finances la semaine passée, à propos d’une question que j’avais déjà soulevée l’année dernière. Il s’agit d’améliorer le dispositif de réduction d’impôt au titre du mécénat pour les PME.
Cet amendement tient compte du fait que, dans nos territoires, dans nos communes, ce sont essentiellement les PME qui contribuent au mécénat local, parce qu’elles connaissent nos territoires. Nos territoires sont des sources de richesse et d’énergie où nous devons puiser. Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés s’est engagé à renforcer le lien de confiance entre l’État central et les collectivités locales, en laissant bien sûr à ces dernières, là où il est pertinent de le faire, le choix et les moyens d’action : ce n’est rien d’autre que le principe de subsidiarité.
Bravo ! Nous savons que la réforme de la fiscalité sera abordée au semestre prochain à l’occasion d’un projet de loi de finances rectificative, mais notre groupe souhaite d’ores et déjà poser quelques jalons à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de finances. Il est vrai que la réforme des dotations de l’État remettra à plat un système devenu illisible, du fait d’un enchevêtrement de dotations et de compensations de réformes fiscales passées. Mais, dans l’attente de cette réforme, monsieur le secrétaire d’État, nous soutiendrons l’amendement du rapporteur général qui a été adopté en commission et qui prévoit le retrait des communes du champ d’application de la minoration de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle – DCRTP.
Dans ce même cadre, et à l’initiative de notre collègue Richard Ramos, nous défendrons un amendement visant à gommer les effets négatifs des mesures actuelles sur les dotations des communes vertueuses en matière d’ordures ménagères, car la situation présente va à l’encontre de notre volonté de protection de l’environnement.
À l’initiative cette fois de notre collègue Bruno Millienne, et en lien avec notre amendement adopté l’année dernière, qui a introduit la possibilité d’une modulation à la hausse de la taxe sur les surfaces commerciales – TASCOM – en échange d’une baisse de la taxe foncière pour les commerces de centre-ville et de centre-bourg, nous défendrons plusieurs amendements qui permettront d’ouvrir le débat sur la réforme de la fiscalité commerciale. Celle-ci est essentielle eu égard aux recettes de nos collectivités locales, mais aussi et surtout pour la vitalité de nos centres-villes et de nos centres-bourgs, ainsi que pour la lutte contre l’artificialisation des sols.
Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés souhaite que le présent projet de loi de finances poursuive et renforce les mesures adoptées depuis le début de la législature, mais qu’il envoie aussi et surtout un signal fort en faveur de la solidarité et de la cohésion de notre territoire et de notre nation.
(Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Jean-Louis Bricout. Monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, après quelques dizaines d’heures passées en commission, nous voici dans l’hémicycle pour examiner la première partie du projet de loi de finances pour 2019, occasion d’un débat important sur les moyens dévolus à la mise en œuvre de nos politiques publiques.
Un constat s’impose d’emblée : le projet de loi de finances pour 2019 reprend et confirme les marqueurs de la loi de finances pour 2018. L’ISF ne sera pas rétabli et la
flat tax sera maintenue. Messieurs les riches, bonne nouvelle ! Oui, elles seront toujours présentes, ces deux mesures qui nous privent de 5 milliards d’euros de recettes, qui nous obligent à d’énormes économies – baisse des contrats aidés et de l’aide personnalisée au logement, l’APL – et qui nous contraignent à trouver de nouvelles recettes – hausse de la CSG pour les retraités et fiscalité écologique.
Une variante de taille, dans ce projet de loi de finances pour 2019, est la transformation du CICE en réduction de charges pour les entreprises. En 2019, on décaissera ainsi au profit des entreprises un CICE calculé sur la masse salariale de 2018 – une vingtaine de milliards d’euros – et, en outre, 6 % de charges – une autre vingtaine de milliards. Excusez du peu ! Double dépense, et non des moindres !
Au total, ce projet de loi de finances ne fera qu’accentuer les fractures sociales et territoriales créées par le PLF pour 2018. Pourtant, compte tenu de la souffrance des populations fragiles et des territoires affaiblis, compte tenu de l’effondrement de la consommation au premier semestre 2018 et des chiffres de la croissance, nous aurions pu espérer que la politique du ruissellement que vous chérissez tant soit remise en question.
Mon groupe et moi avons la faiblesse de penser que l’économie doit marcher sur ses deux jambes : d’une part, soutenir nos entreprises dans un contexte économique international extrêmement concurrentiel ; d’autre part, soutenir le pouvoir d’achat en vue d’une relance par la consommation. C’est pourquoi nous vous proposerons un autre budget pour les Français : un budget plus équilibré entre les politiques de l’offre et de la demande, un budget digne, prenant réellement en considération les enjeux environnementaux.
S’agissant de la double dépense liée à la transformation du CICE, il nous semblerait beaucoup plus utile de la réorienter. Il serait en effet nécessaire, et même urgent, de constituer un fonds d’investissement afin d’accompagner celles et ceux qui n’acceptent plus la fiscalité écologique tant elle pèse sur leur pouvoir d’achat ou affecte leur métier.
Quant aux quelques mesures en faveur du pouvoir d’achat, elles font l’objet de belles annonces, vendues à coups d’éléments de langage bien appris, répétés et amplifiés par votre majorité parlementaire aux ordres.
Aux ordres ?! Certaines de ces mesures peuvent bénéficier de notre soutien mais, au total, le compte n’y est pas. L’annonce selon laquelle vous allez dégager 6 milliards d’euros de pouvoir d’achat en faveur des ménages est fortement contestée par les économistes. Une étude menée par l’Observatoire français des conjonctures économiques – OFCE – revoit vos annonces à la baisse. Les calculs les plus complets intègrent aussi les mesures relatives aux prestations sociales. Si plusieurs minima sociaux vont effectivement être revalorisés, la fin de l’indexation sur l’inflation des prestations sociales – des pensions, de l’APL, des allocations familiales – va coûter cher aux ménages.
Vos belles annonces sont en réalité un trompe-l’œil. En outre, elles sont mises en œuvre bien différemment selon les territoires. Vous nous dites par exemple que la prime d’activité augmentera de 20 euros. Qu’en est-il réellement ? Par un petit tour de passe-passe, vous modifiez son mode de calcul et, au bout du compte, ces 20 euros en deviennent 8 pour une personne au SMIC. Quant à la taxe d’habitation, parlons-en ! Pour les plus modestes, qui en étaient déjà exonérés, l’impact sur le pouvoir d’achat est nul. Ou plutôt – pardonnez-moi : pour la plupart des retraités, l’impact sur le pouvoir d’achat est absorbé, puisqu’ils ont été ponctionnés par le biais de la CSG. Quant aux autres retraités, à qui vous vendez cette exonération comme une compensation de la hausse de la CSG, vous oubliez de dire que cette compensation sera pécuniairement différente en fonction du lieu de résidence.
Dans le département de l’Aisne, par exemple, la taxe d’habitation est de 412 euros en moyenne, contre 570 euros à l’échelle nationale, soit un différentiel de 160 euros. La démonstration est faite : il existe bien une fracture territoriale. Par ailleurs, lorsqu’un grain de sable s’introduit dans vos belles annonces et vient brouiller votre plan de communication bien rodé, vous avez l’indécence de stigmatiser les maires, qui continuent d’utiliser cet outil fiscal pour mener leurs politiques volontaristes. Vous n’avez que mépris pour la libre administration des communes !
J’évoquerai, pour finir, le chèque énergie. Celui-ci a pour objectif d’améliorer le reste à vivre après les factures d’énergie pour nos concitoyens les plus modestes. Il a remplacé les tarifs sociaux de l’énergie, qui étaient, eux, liés à la consommation. Je regrette que le ministre de l’action et des comptes publics ne soit pas là : il sait bien, lui, qu’il fait un peu plus froid au Nord qu’au Sud. Pourtant, le montant du chèque est le même partout : le fait qu’il n’y ait plus de lien avec la consommation crée, de fait, une inégalité territoriale.
Eh oui ! Au total, ce budget ne s’attache pas à réduire la fracture territoriale entre urbains et ruraux, à laquelle vous ajoutez en outre de nouvelles inégalités géographiques, toujours aux dépens des populations les plus fragiles, pour lesquelles vous n’avez aucune considération. Tout en nuances ! Bref, c’est un budget pour les populations et les territoires qui vont bien. (Applaudissements sur les bancs des groupes Soc et GDR.) La parole est à Mme Emmanuelle Ménard. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, chers collègues, Jean-Paul Sartre disait (« Ah ! sur divers bancs) : « J’admire comme on peut mentir en mettant la raison de son côté. » Loin de moi l’idée de vous accuser de mentir ; peut-être pourrait-on plutôt vous reprocher de « romancer » votre budget pour 2019, ce qui, en matière de finances, relève de l’exploit, vous l’avouerez.
C’est en effet l’impression qui prévaut lorsque l’on examine la présente loi de finances : un budget en trompe-l’œil, flou, presque vaporeux. On a du mal à cerner votre politique et votre dynamique – ou plutôt votre absence de dynamique. Or vous conviendrez que l’absence de lisibilité n’est jamais bon signe quand il s’agit d’encourager le développement économique et les investissements.
Prenons l’exemple de quelques mesures emblématiques. La bascule du CICE en baisse de charges pérenne, tout d’abord, coûtera à l’État, en 2019, 20 milliards d’euros de plus que les années précédentes ! L’État devra en effet payer double, en supportant le remboursement du CICE pour 2018 et la baisse de cotisations pour l’année en cours, soit un total de 40 milliards d’euros.
C’est votre leitmotiv : vous voulez favoriser le travail et l’emploi. Et pourtant… Avec 1 milliard d’aide temporaire à l’embauche en moins pour les PME, la suppression des 850 millions d’euros de contrats aidés et quelques autres robinets fermés, ce sont 2,07 milliards d’euros qui seront détournés du secteur du travail et de l’emploi. Comme si cela ne suffisait pas, les agriculteurs semblent devoir payer une nouvelle fois l’addition, avec la suppression de l’allégement des charges pour les travailleurs saisonniers. Bref, c’est la fameuse politique du « en même temps » : vous prétendez agir pour que les agriculteurs puissent vivre dignement de leur travail et, en même temps, vous les prenez à la gorge par une disposition qui risque, en outre, de favoriser les travailleurs détachés. C’est un comble ! Pourvu que l’amendement déposé par le rapporteur général revienne sur cette mesure !
Et je ne parle pas de la charge colossale imposée aux entreprises, que vous transformez en collecteurs d’impôt par le prélèvement à la source. Pourquoi n’avoir pas tout simplement privilégié la mensualisation obligatoire ?
S’agissant du transfert de pouvoir d’achat des retraités vers les actifs, pas de surprise : c’est la politique qu’avait annoncée Emmanuel Macron durant sa campagne électorale. « Les retraités doivent faire un effort ! », disait-il. Et c’est bien ce qui se passe. Dans une toute récente étude, l’institut des politiques publiques – IPP – explique en effet que les 20 % de ménages les plus modestes seront perdants, tout comme les 20 % les plus aisés, à l’exception du « top 1 % » des ménages les plus riches ; quant aux retraités, pénalisés à la fois par la sous-indexation des pensions et la hausse de la CSG, ils seront « largement perdants ».
Enfin, du côté de l’allégement de la fiscalité du capital, les mesures telles que la suppression de l’ISF et la création de l’IFI ne profitent qu’aux très hauts revenus. Là encore, pas de surprise. La même étude de l’IPP l’assure : la suppression de l’ISF est la disposition dont « les effets sont les plus difficiles à mesurer, c’est là où nous avons le moins de données et de preuves empiriques ». Bref, un beau cadeau aux amis de M. Macron, ceux-là mêmes qui l’ont fait élire – juste retour d’ascenseur, me direz-vous.
Passons aux collectivités. On leur demande de faire toujours plus d’efforts en termes de fonctionnement tout en réalisant beaucoup d’investissements ; or il est rare que ces derniers ne génèrent pas, à leur tour, d’importants frais de fonctionnement importants. Et si le PLF pour 2019 ne comporte pas de bouleversement majeur pour les collectivités territoriales, leur environnement financier leur laisse une marge de manœuvre plus que contrainte, le tout sur fond d’incertitudes liées à la future réforme de la fiscalité locale.
Enfin, votre budget a été bâti sur une hypothèse de croissance de 1,7 % l’an prochain et d’inflation de 1,6 % en 2018 et 1,3 % en 2019, des hypothèses jugées « plausibles » par le Haut Conseil des finances publiques dans l’avis qu’il a rendu sur le projet de loi de finances. Selon vos chiffres, le déficit du budget de l’État devrait atteindre 98,7 milliards d’euros l’an prochain – une hausse plus que sensible par rapport à 2018.
D’après Bercy, cette évolution s’explique notamment par les baisses d’impôts décidées par le Gouvernement. « C’est l’État qui va faire l’essentiel de l’effort », a expliqué M. le ministre de l’action et des comptes publics lors d’une conférence de presse. Je ne le savais pas adepte des leçons d’économie de M. Hollande et de son désormais fameux « C’est pas grave, c’est l’État qui paye... » ! Mais les Français savent bien que c’est eux qui, finalement, seront toujours les dindons de cette farce financière.
Très bien ! La parole est à M. Fabrice Le Vigoureux. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, chers collègues, j’ai participé vendredi soir dans ma circonscription à un formidable rendez-vous citoyen dans un quartier populaire de Caen, le Chemin-Vert. J’ai pu y mesurer une nouvelle fois à quel point les attentes de nos concitoyens sont élevées et combien la décision publique doit leur être sans relâche expliquée, tant elle apparaît lointaine à beaucoup d’entre eux. Nous parlerons souvent cette semaine de millions et de milliards ; je sais toutefois que, sur tous les bancs, nous cherchons à ne jamais oublier la politique à hauteur d’hommes et de femmes.
Le projet de loi de finances pour 2019 s’inscrit dans une trajectoire de redressement des comptes publics, une nécessité de mieux en mieux comprise par les Français. Un rapide calcul nous montre l’urgence de ne pas fléchir dans ce redressement. Ainsi, lorsque l’on additionne toutes les sommes consacrées par l’État à l’écologie, à l’enseignement supérieur, à la vie étudiante, à la culture, à la justice, à l’agriculture et à l’aide publique au développement, on arrive très précisément à 42 milliards d’euros, montant astronomique… qui correspond précisément au montant que l’État versera en 2019 au titre des seuls intérêts de sa dette. Le difficile exercice de rétablissement des comptes publics n’est donc plus une simple exigence : il est l’un des principaux leviers pour développer les services et les politiques publics de demain.
Ce projet de loi de finances s’inscrit aussi dans un contexte politique particulier qu’il faut bien garder à l’esprit. À cet égard, je soulignerai deux préoccupations. La première est le défi européen, qui est immense, car, jour après jour, on voit apparaître des démocraties tamisées, dont l’éclat, dont l’idéal de liberté et d’humanisme laissent peu à peu la place au nationalisme et au repli sur soi. L’envie de renverser la table a pris le pas, dans certains pays, sur celle de construire des ponts et de rapprocher les peuples. Nous, Normands, connaissons tout particulièrement le prix de la liberté en Europe ; nous rendrons d’ailleurs hommage aux héros, civils et militaires, qui, sur les plages, ont contribué à sauver nos peuples il y a bientôt soixante-quinze ans. L’année 2019 sera une année européenne ; puissions-nous ne pas l’oublier dans nos débats budgétaires, notamment par le souci constant de sincériser nos comptes et de mener des politiques favorisant la convergence sociale et fiscale avec nos voisins.
La seconde préoccupation qui ne cesse de nous habiter est le défi climatique. Le rapport du GIEC – Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – ne cherche pas à dissimuler cette vérité qui nous dérange : notre temps est compté pour éviter l’irréversible. S’agissant de ce défi comme de bien d’autres, nous avons besoin d’Europe et d’unité pour que, sur tous les textes, sur tous les thèmes, sur tous les tons, la question du climat et sa traduction énergétique soient centrales, tout simplement parce qu’il n’y a ni session de rattrapage ni deuxième lecture pour notre planète.
On peut toujours maîtriser une dette publique ; on ne peut pas renégocier une dette écologique. C’est ce défi qui nous conduit, par exemple, dans ce projet de budget, à doper et à accompagner les mesures de fiscalité incitative en faveur d’une économie circulaire, à augmenter des prélèvements sur des polluants ou à accompagner les industries les plus volontaristes en matière de transition écologique.
Enfin, ce budget comprend aussi les moyens déployés en faveur des jeunes générations, en particulier en matière d’éducation et de formation. À cet égard, je suis fier d’appartenir à une majorité qui consacre davantage de moyens à l’éducation et aux compétences, de la maternelle jusqu’au premier emploi, sans oublier l’apprentissage. Cette ambition est collective et continue, comme l’illustrent les orientations présentées ce matin même par M. Blanquer, ministre de l’éducation nationale, sur l’avenir de l’école, véritable courroie de transmission de la République.
Ces orientations comprennent un budget pour l’école pour tous dès trois ans, mesure essentielle pour les 25 000 enfants, très souvent d’origine modeste, qui ne la fréquentent pas et qui en tireront un grand bénéfice ; un budget pour défendre l’école de la confiance, qui passe par un dédoublement salutaire de 100 % des classes de CP et CE1 dans les écoles REP – réseau d’éducation prioritaire – et REP + – réseau d’éducation prioritaire renforcé –, mesure qui a des effets directs et durables sur la réussite des enfants ; enfin, un budget pour la mise en œuvre en année pleine de la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, qui a mis fin à l’indécence du tirage au sort et qui accroît considérablement les chances de réussite pour chaque étudiant accédant à l’enseignement supérieur.
Connaissant bien l’université pour y enseigner depuis longtemps, je mesure déjà, chers collègues, que quelque chose est en train de changer dans nos facultés et que la confiance dans cette institution, longtemps érodée, se rétablit. Loin de faire le choix de l’échec, nous avons fait celui de l’orientation dès le lycée, de l’accompagnement à la mobilité géographique et de la personnalisation accrue des cursus. Il s’agit d’un devoir d’investissement dans un monde de moins en moins linéaire et qui nous invite à un rapport renouvelé aux compétences tout au long de nos vies.
Parce qu’il est le socle de notre ambition éducative et qu’il contribue à nous préparer aux grands défis de l’avenir, le projet de loi de finances pour 2019 est un texte qui doit être porté haut et fort.
(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) La parole est à M. Charles de Courson. Allez, camarade ! Le vieux monde est derrière toi ! Les bolcheviks te saluent ! Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État – il nous manque vos deux éminents collègues ministres –, madame la secrétaire de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, qu’est-ce qu’un bon budget ? C’est un budget qui est respectueux de nos engagements européens, économiquement efficace et socialement juste. Nous en sommes loin ! Nous sommes mal partis ! Il y a du boulot ! En l’état, ce budget pour 2019 ne remplit pas pleinement ces trois conditions : nos engagements européens sont à peine à moitié respectés ; la politique fiscale est peu incohérente ; en matière de justice fiscale, enfin, de vraies questions se posent, pour ne pas dire plus. Je ne suis donc pas seul à le penser… C’est en ces termes que nous pourrions résumer ce projet de budget, qui n’est certainement pas, tout à la fois, « responsable », « réaliste », « d’anticipation » ni même « en faveur du pouvoir d’achat », comme vos éléments de langage le qualifient.
Certes, il est globalement plus sincère que ceux des législatures précédentes
(Mme Danielle Brulebois applaudit) et il comporte quelques bonnes mesures : la provision pour épargne destinée aux exploitants agricoles, la réévaluation de l’AHH – allocation adulte handicapé – dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, celle du minimum vieillesse, ou encore la suppression de petites taxes, dont la fameuse taxe farine, etc. « Et caetera » : ce n’est pas rien ! C’est le « en même temps » ! Une bonne politique doit être compréhensible, monsieur le secrétaire d’État : le marketing et la communication n’effaceront jamais l’aspect embrouillé de ce projet de loi de finances. Défaites-vous de cette politique qui consiste à ménager la chèvre et le chou, traduction du « en même temps », qui n’a jamais permis de gagner une seule élection. Vous êtes à une année charnière : vous devez faire des choix forts.
Or le non-respect de nos engagements européens est l’un des problèmes centraux de ce projet de loi de finances comme du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En 2019, le montant des économies reste très insuffisant et la réduction des déficits publics, notamment du déficit structurel, est très faible et en contradiction avec nos engagements européens.
Votre cadrage macro-économique n’est pas déraisonnable à l’heure où nous parlons, comme le confirme, dans son avis, le Haut Conseil des finances publiques : vous avez choisi une hypothèse de croissance de 1,7 %, comme en 2018, et une hypothèse d’inflation de 1,3 % en 2019, contre 1,6 % en 2018. Le problème est que vous laissez peu de marge de manœuvre dans l’hypothèse d’un ralentissement plus important de la croissance, alors que le contexte mondial est de plus en plus incertain. En effet, les nuages s’amoncellent, qu’il s’agisse du prix du baril de pétrole, des taux d’intérêt ou la démultilatéralisation des échanges internationaux.
Le projet de loi de finances estime le prix du baril de pétrole de brent à 73 dollars en 2019, en moyenne annuelle. Or le brent cote actuellement à 80 dollars – il est même monté à 84, voire 85 dollars, et un écart de 10 dollars au moins entraîne une hausse mécanique de l’inflation de 0,25 % l’année suivante et une surestimation de 0,1 point de la croissance du PIB. Dans le contexte géopolitique actuel – sanctions contre l’Iran et plafonnement de la production décidé par les autorités saoudiennes –, le prix du baril de pétrole pourrait très bien franchir le seuil symbolique des 100 dollars, qu’il avait du reste atteint en 2014-2015. L’hypothèse est envisageable et les Français pourraient voir leurs factures de carburant augmenter encore plus fortement, alors que les taux d’intérêt à long terme remonteront courant 2019, du fait de la fin de la politique expansionniste de la Banque centrale européenne et des hausses programmées du taux d’intérêt directeur de la Fed, la Réserve fédérale des États-Unis.
Les taux d’intérêt aux États-Unis se sont d’ailleurs hissés à leur plus haut niveau depuis sept ans et devraient poursuivre leur progression au cours des prochains trimestres, n’en déplaise à M. Trump. Ils devraient donc aussi augmenter en France, comme dans le reste de la zone euro, et peut-être entraîner une crise obligataire, si cette remontée est trop rapide.
Cet environnement dégradé – augmentation du prix du pétrole, hausse des taux d’intérêt et démultilatéralisation des échanges internationaux – risque de perturber l’équilibre de ce projet de budget, monsieur le secrétaire d’État. Je ne saurais donc trop vous exhorter, comme l’année passée, à fournir un plus grand effort sur la dépense publique. À l’heure des tensions commerciales qui pourraient bien faire flancher la croissance, le manque d’effort sur la dépense sera votre faiblesse en cas de fort ralentissement de l’activité économique.
En 2019, le déficit structurel ne baissera pas significativement au regard de nos engagements européens, et le poids de la dette publique augmentera. Voilà le constat brut. Nous sommes, au groupe UDI, Agir et indépendants, des gens raisonnables et pragmatiques : nous savons que la remontée du déficit public en 2019, à 2,8 % du PIB, contre 2,6 % en 2018, est principalement due à la transformation du CICE en exonérations de charges patronales, et nous nous réjouissons que, depuis 2017, le déficit public reste sous la barre des 3 %.
Toutefois, nos partenaires européens attendent encore que nous nous rapprochions de l’équilibre structurel, qui ne dépend pas des effets de la conjoncture économique sur les comptes publics. S’il est une baisse qui se fait désirer, c’est celle du niveau du déficit structurel, qui s’opère à tout petits pas : 0,1 point de PIB en 2018, 0,2 en 2019 – et non 0,3 puisque, comme l’a souligné le Haut Conseil des finances publiques, il faut faire abstraction de la mesure d’accélération de l’augmentation du cinquième acompte, laquelle est conjoncturelle et non structurelle, puisqu’elle est limitée à la seule année 2019.
En effet, au lieu de réduire fortement le déficit structurel, vous préférez une baisse des impôts à une diminution suffisante de la dépense publique. Nous serons donc en contradiction avec la règle européenne qui veut que les États membres réduisent d’au moins 0,5 point leur déficit structurel chaque année, une fois revenus sous la barre des 3 % de déficit. La Commission européenne autorise une déviation de 0,5 point sur deux ans par rapport à la réduction du déficit structurel requise de 0,5 point par an. Or nous avons utilisé toutes les souplesses possibles, si bien, mes chers collègues, que nous avons désormais deux options : soit nous reconstituons les marges de manœuvre budgétaires en faisant des économies de dépenses suffisantes, tant qu’il en est encore temps, afin de pouvoir relâcher l’effort lorsque la prochaine crise arrivera ; soit nous exposons la France, en cas de fort ralentissement de l’économie, au risque d’ouverture d’une procédure pour « déviation significative de son objectif » de retour à l’équilibre structurel – une procédure qui peut, sur le papier, aboutir à des sanctions financières.
Si nous ne faisons rien, selon l’avis du Haut Conseil des finances publiques, le déficit structurel, qui « reste à un niveau élevé », « ne se réduir[a] que lentement et la France n’aur[a] pas encore amorcé, à l’horizon de 2019, la réduction de son ratio de dette publique au PIB, à la différence de la quasi-totalité des pays européens ».
L’effort en matière d’économies est effectivement très insuffisant, monsieur le secrétaire d’État. S’agissant de l’évolution des dépenses, vous révisez à la baisse votre ambition de maîtrise de la dépense publique. Il y a un an, en juillet 2017, au cours du débat d’orientation budgétaire pour 2018, le Gouvernement nous promettait 20 milliards d’euros d’économies : or vous n’en avez réalisé que la moitié en 2018 – 0,4 point de PIB, soit 10 milliards. Je pourrais paraphraser Jacques Brel : « T’as voulu voir 20 milliards et on a vu... 10 milliards ! »
(Sourires sur les bancs du groupe MODEM.)
L’année dernière, déjà, nous vous avions prévenus que vos économies n’atteindraient pas 20 milliards d’euros – ni même 15, montant auquel vous avez ramené l’estimation initiale quelques mois plus tard, lors de l’examen du PLF pour 2018. Hélas, les Cassandre ont souvent raison trop tôt et les Troyens recouvrent la vue toujours trop tard, monsieur le secrétaire d’État.
Quant à 2019, vous n’en êtes, de nouveau, qu’à 0,4 point de PIB d’économies, soit, une fois de plus, à peine 10 milliards d’euros, alors qu’il faudrait, pour être cohérent, doubler les économies ou bien assumer le fait que vous n’avez pas les moyens de baisser les prélèvements obligatoires en conséquence.
La dépense publique continue d’augmenter alors que vous vous étiez fixé, en juillet dernier, un objectif de hausse de 0,4 % en volume et de 1,7 % en valeur pour l’année 2019. En réalité, il est prévu dans le projet de loi de finances une augmentation de cette dépense de 0,6 % en volume hors crédits d’impôt, après 0,7 % en 2018 – et non pas 0 % comme vous l’indiquez dans les documents budgétaires, puisque vous avez retenu l’indice des prix à la consommation et non l’indice des prix à la production. En valeur, le taux de croissance de la dépense publique s’établirait à 1,4 % en 2019, au lieu de 1,8 % en 2018. Entre les prévisions de juillet et celles de septembre, l’écart est de près de 5 milliards d’euros !
Faut-il rappeler que la France est, en 2017 et 2018, le pays qui atteint le plus haut niveau de dépenses publiques au sein de l’Union européenne ? Pour 2017, celles-ci atteignent 56,5 % du PIB contre 45,8 % pour la moyenne des Vingt-Huit. L’écart dépasse 250 milliards d’euros ! Depuis dix ans, le poids de la dépense publique dans le PIB a crû plus vite en France – 3,9 points supplémentaires – que dans l’Union européenne – 1,2 point supplémentaire. Et de nombreux pays de l’Union européenne réduisent le poids des dépenses publiques beaucoup plus rapidement que ne le permettent les timides mesures françaises. Monsieur le secrétaire d’État, vous faites la moitié de l’effort nécessaire !
Dans son dernier rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes indique que malgré le retour, en 2017, du déficit public français à son niveau d’avant la crise, les prélèvements obligatoires se sont aggravés, contrairement à ce qui se passait chez tous nos voisins.
Je le répète, si nous voulions respecter nos engagements européens, il faudrait doubler l’effort sur les dépenses, car vous vous arrêtez à la moitié du chemin : 0,4 point du PIB représentent 10 milliards d’euros alors qu’il faudrait atteindre 20 milliards chaque année.
S’agissant de l’évolution de la dépense, nous devons réellement atteindre le 0 % en volume. Vous nous l’aviez promis en juillet 2017, mais nous en sommes loin. Nous pourrions alors réduire le déficit structurel de manière significative et ne pas dépendre de la conjoncture qui peut, dans le contexte actuel, se retourner à tout moment.
Ainsi, vous baissez très faiblement les effectifs de la fonction publique de l’État – 4 500 ETP en moins en 2019, après une baisse de 1 600 ETP en 2018. Nous sommes bien loin de la promesse de campagne de supprimer 50 000 postes sur le quinquennat. Vous n’en êtes, au bout de deux ans, qu’à 5 700 ETP pour l’État, à peine. Là encore, vous repoussez l’effort à plus tard. Or on n’a jamais vu une majorité accentuer l’effort en fin de mandat ! La coutume serait plutôt de le réduire. Il faudrait donc que vous parveniez à 17 000 suppressions d’emplois. Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, ce ne sont pas moins de 30 000 postes qui avaient été supprimés chaque année ;...
Ce n’était pas si mal ! Mais la dette avait doublé ! ....l’objectif n’est donc pas du tout hors de portée.
Ensuite, ce budget est-il économiquement efficace ?
En ce qui concerne les entreprises, vous faites valoir un énorme effort avec près de 20 milliards d’euros de baisses de charges. Hélas, la transformation du CICE en réductions de cotisations sociales se traduit, en 2019, par un quasi-doublement de son coût budgétaire – une vingtaine de milliards –, du fait de la créance du CICE au titre des années précédentes, d’une part, et de la dépense fiscale due à la réduction de cotisations sociales équivalente pour les salaires de 2019, de l’autre.
Mais les 19 milliards d’euros dus en 2019 au titre du versement des créances passées du CICE n’auront qu’un effet ponctuel, limité à la trésorerie des entreprises, et n’affectera pas leurs résultats comptables, lesquels ont déjà intégré cette mesure.
De surcroît, la bascule du CICE en réductions de cotisations sociales induit une augmentation d’impôt sur les sociétés et d’impôt sur le revenu : 1 euro de réduction de cotisations sociales entraîne 1 euro de bénéfices pour les entreprises réalisant des profits, bénéfices qui sont imposés. Ainsi, le gain pour les entreprises ne repose que sur la mesure de réduction additionnelle de 4 % de cotisations sociales, qui entrera en vigueur au 1er octobre 2019, pour un montant de 2,5 milliards d’euros en année pleine, mais de seulement 600 millions en 2019.
Je vous renvoie à la passionnante étude que l’institut des politiques publiques, l’IPP, a consacrée au sujet.
Par ailleurs, l’article 19 du projet de loi de finances pour 2019, en supprimant le tarif réduit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE – sur le gazole non routier dans un ensemble de secteurs, pénalisera celui du bâtiment et des travaux publics pour financer les mesures fiscales de la loi PACTE. Vous pénalisez la construction alors que vous venez à peine de faire voter une loi ÉLAN supposée la soutenir et faire baisser le coût de l’immobilier ! La moitié de cette mesure, qui représente 1 milliard, pèse sur le bâtiment et les travaux publics. L’évaluation préalable de l’article en minimise la portée en évaluant à 0,8 % seulement la part de la consommation intermédiaire en produits raffinés dans la valeur totale de la production du secteur. Mais, monsieur le secrétaire d’État, le bénéfice de l’ensemble de la branche du bâtiment et des travaux publics s’élève à 900 millions d’euros après impôts. Sur 900 millions d’euros, 500 millions, c’est énorme !
Votre politique n’est pas lisible. Vous baissez le taux de l’impôt sur les sociétés de 33,3 % à 31 % en 2019, soit une réduction de 2,4 milliards – un peu moins pour les PME –, mais, dans le même temps, vous augmentez l’acompte d’impôt sur les sociétés à l’article 15 du projet de loi de finances, pour 1,5 milliard d’euros, et vous baissez la réduction du prix du gazole, pour 1 milliard. Au total, cela représente une augmentation de 100 millions d’euros – dont les effets, qui plus est, varient considérablement d’un secteur à l’autre.
Un mot des collectivités locales. Vous présentez une stabilité globale des dotations, mais celle-ci cache de grandes disparités selon les communes. Si les dotations se maintiennent, n’oublions pas que la fin des contrats aidés a aussi beaucoup pesé sur les budgets des collectivités. Il aura manqué un fonds pour amortir les variations négatives de ces dotations pour près de 60 % des communes et, pour 4 à 5 % d’entre elles, des réductions très fortes.
Les collectivités locales n’ont encore reçu aucune information concernant le remplacement de la taxe d’habitation ; nous ne les aurons que lors du vote d’un projet de loi de finances rectificative, en principe à la fin du premier trimestre. Elles craignent pour leur autonomie fiscale, déjà très altérée.
En outre, les contribuables ne comprennent pas pourquoi vous affirmez que 80 % d’entre eux seront exonérés de la taxe d’habitation en 2020. En effet, 20 % l’étaient déjà et ceux pour qui la taxe était plafonnée à 3,44 % de leur revenu fiscal de référence subissent des phénomènes très variés.
Enfin, votre budget est-il socialement juste ? Vous affirmez que la pression fiscale à laquelle les ménages sont soumis va être allégée de 6 milliards d’euros. Ce n’est pas exact. Selon une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques – OFCE –, ce chiffre de 6 milliards agrège en réalité plusieurs mesures, dont certaines, comme la hausse de la CSG compensée en deux fois par la baisse des cotisations, figuraient déjà parmi les mesures du budget 2018. Vous y intégrez également l’économie réalisée par les 300 000 retraités qui ne seront pas concernés par la hausse de la CSG, sans tenir compte du manque à gagner induit par la revalorisation de 0,3 % des prestations sociales et de retraite quand l’inflation atteindra 1,3 % l’année prochaine, ni de la hausse des cotisations sociales des salariés pour les retraites complémentaires, qui représente 1,8 milliard d’euros.
En intégrant notamment ce dernier montant, les chercheurs de l’OFCE évaluent à 1,7 milliard d’euros le gain de pouvoir d’achat pour les Français, c’est-à-dire presque moitié moins que le chiffre annoncé, soit 0,1 % du revenu des ménages – en fait, près de 0 % si l’on tient compte du fait que l’absence d’indexation sur deux ans du barème de l’impôt sur le revenu.
Le plus grave, monsieur le secrétaire d’État, c’est que, selon l’IPP, les 20 % les plus modestes apparaissent comme les grands perdants de votre politique fiscalo-sociale sur la période 2018-2019. Le Gouvernement a choisi de ne pas revaloriser significativement l’ensemble des prestations sociales et des retraites, à l’exception de l’AAH et le minimum vieillesse ; ce choix s’avère lourd de conséquences.
Veuillez conclure, monsieur le député. Quant aux 1 % les plus riches, leur pouvoir d’achat augmentera de 6 %. Merci, monsieur le député. En conclusion, le projet de loi de finances pour 2019 est-il un bon budget ? (« Oui » sur les bancs du groupe LaREM.) La réponse est clairement négative : le texte ne respecte pas nos engagements européens, il n’est pas économiquement efficace, il n’est pas socialement juste. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Vous allez donc voter contre ? À moins qu’au cours du débat le Gouvernement ne l’améliore fortement, mon groupe… Merci, monsieur de Courson. (Rires et exclamations sur divers bancs.) La parole est à M. François Pupponi. Monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, chers collègues, j’évoquerai deux sujets qui me concernent particulièrement : la politique de la ville et le logement.
S’agissant de la politique de la ville, le paradoxe du projet de loi de finances pour 2019 est que les seules communes auxquelles il fera perdre des recettes sont celles qui relèvent de la politique de la ville. En effet, en 2018, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, la DSU, augmentait de 90 millions d’euros ; cette fois, vous ne la revalorisez que de 60 millions. Quant au fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France, le FSRIF, qui connaissait une hausse de 20 millions en 2018, il n’augmente pas en 2019. Le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, prend fin.
De plus, vous réformez la dotation politique de la ville – DPV –, que nous avions créée pour aider les communes les plus pauvres à faire face à leurs besoins dans le domaine éducatif et social et en matière d’investissements. Vous décidez d’accroître le nombre de communes qui seront éligibles. Celles qui percevaient une dotation en 2018 recevront moins en 2019 : c’est logique. (
« Mais non ! »sur les bancs du groupe LaREM.) S’il faut répartir la même somme de 150 millions d’euros entre plus de communes, celles qui étaient éligibles l’année dernière percevront moins cette année ! Je vous félicite par avance si vous parvenez à me démontrer le contraire. Venant de vous, cela ne m’étonnerait pas.
En revanche, vous continuez de diminuer les variables d’ajustement qui permettaient de corriger les abattements mal compensés par l’État. Ces communes, les plus affectées par ces abattements, percevront moins en 2019 au titre de la compensation qu’en 2018.
C’est très clair ! Certes, la DSU augmente légèrement, mais les autres dotations diminuent : ces communes percevront donc moins de recettes en 2019.
Monsieur le secrétaire d’État, pensez-vous sincèrement que le moment soit venu de réduire les recettes de ces collectivités locales quand la pression sociale s’accentue et que la délinquance s’aggrave dans les quartiers, comme en témoigne hier encore la mort d’un jeune de treize ans ? Je ne le crois pas ! Nous déposerons donc des amendements, comme l’année dernière, pour que les communes concernées reçoivent en 2019 au moins autant qu’en 2018.
Du reste, les recettes de ces communes diminueront aussi pour une raison très simple. Le Gouvernement a décidé de dédoubler les classes de CP et de CE1 en REP et en REP+ : c’est une bonne mesure que nous avons tous saluée. Mais le besoin de construction de locaux neufs pour accueillir ces nouvelles classes est particulièrement criant dans les communes où se concentrent ces réseaux ; c’est donc sur ces territoires qu’il faut investir pour engager des travaux. Or, depuis 2017, nous profitions du FSIL, le fonds de soutien à l’investissement local, pour financer vos mesures, en l’espèce le dédoublement des classes.
Deux villes que je connais bien, Sarcelles et Villiers-le-Bel, ont déposé en 2018 auprès du préfet un dossier pour obtenir des financements du SFIL à cette fin. Le préfet de région et le préfet de département ont refusé de leur accorder quoi que ce soit, car l’argent qui leur était promis pour les aider à financer le dédoublement des classes a servi au dispositif Cœur de ville de la commune voisine !
Voilà comment agit votre Gouvernement : il ne veut même plus financer ses propres décisions, c’est-à-dire aider au développement de mesures éducatives dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. L’année prochaine, nous avons bien peur que la sentence ne soit la même, comme nous l’a annoncé le préfet de région. Le FSIL ne permettra pas de financer la mesure de dédoublement des classes dans les REP et les REP+ que vous avez vous-même décidée.
Nous espérons donc que nos amendements visant à augmenter les recettes de ces communes seront adoptés.
S’agissant du logement, nous avions prévu lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018 que celui-ci mettrait à bas la construction de logements en France au cours de l’année. Notre prédiction se réalise : notre pays compte 20 000 logements sociaux de moins qu’il y a deux ans et les constructions de logements, près de 500 000 en 2017, s’écrouleront en 2018, entraînant dans leur chute les recettes de l’État.
Vous faisiez partie de la précédente majorité, monsieur le secrétaire d’Etat. Vous savez donc bien que le gouvernement de l’époque, que nous soutenions, a commis l’erreur de manquer les deux premières années de la politique du logement. Nous avons eu beau rattraper cette erreur par la suite en relançant la politique du logement, c’était trop tard, et nous avons ainsi perdu deux points de croissance sur l’ensemble du mandat.
Vous commettez la même erreur. En privant les Français des logements auxquels ils ont droit, en réduisant les recettes de l’État et en brisant une dynamique positive, vous cassez une machine qui fonctionne. Vous serez obligé, en 2019 ou en 2020, de la relancer au moyen d’avantages fiscaux, mais il sera trop tard. Il vous manquera à vous aussi, à la fin du mandat, les deux points de croissance essentiels à l’économie française.
(Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.) Exactement ! La parole est à Mme Dominique David. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, pour ma part – je crois ne pas être la seule –, je préfère annoncer de bonnes nouvelles plutôt que des mauvaises. Nous aussi ! Tout va très bien, madame la marquise ! Or ce projet de loi de finances comporte, qu’on le veuille ou non, de très bonnes nouvelles.
Il annonce que les impôts vont baisser pour tous les Français.
C’est faux ! En effet, 6 milliards d’euros seront rendus aux ménages, l’année prochaine, grâce à la suppression de la deuxième tranche de la taxe d’habitation, la réduction des cotisations chômage et maladie,... Eh oui ! ...l’exonération de cotisations sociales pour les heures supplémentaires à compter de septembre 2019 et la mesure de correction touchant la CSG pour 300 000 retraités. Les retraités resteront floués ! Cette baisse de 6 milliards d’euros est la plus marquée depuis 2008.
Le projet de loi de finances annonce ensuite que le travail va être valorisé et l’attractivité de nos entreprises accrue. Ainsi, 2,5 milliards d’euros seront investis dans les compétences pour traiter en profondeur les causes du chômage. La prime d’activité sera augmentée de 20 euros par mois au niveau du SMIC et la hausse atteindra 80 euros à l’horizon 2022. La transformation du CICE en allégements de charges va diminuer le coût du travail, tout comme la poursuite de la baisse de l’IS ou la simplification de la fiscalité par la suppression d’une vingtaine de petites taxes.
Il annonce encore que les Français, en particulier les plus fragiles, vont être mieux protégés, grâce à l’augmentation du minimum vieillesse et de l’AAH, aux mesures annoncées dans le cadre du plan de prévention et de lutte contre la pauvreté, mais aussi à l’important renforcement des moyens alloués aux ministères des armées, de la justice et de l’intérieur.
Il annonce enfin que nous nous donnons les moyens de préparer l’avenir. Je parle ici des efforts budgétaires en faveur de l’éducation, de la recherche et de la transition écologique.
C’est trop ! (Sourires.) Mes chers collègues, ce ne sont pas des opinions, ce sont des faits. J’ai entendu tout à l’heure nos collègues de l’opposition nous expliquer que c’était trop ou pas assez, que nous aurions pu faire différemment. Cela relève du débat démocratique, et je m’en félicite. Mais j’ai aussi entendu chez certains orateurs, parfois avec des trémolos dans la voix, une claire intention de susciter la peur. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe LR.) Est-ce que nous vous faisons peur ? Et vous, ne voulez-vous pas faire peur aux maires ? Mes chers collègues, permettez-moi de vous dire que, quels que soient vos objectifs politiques, ce ne sont pas des positions responsables. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Votre discours est assez totalitaire ! Car la peur a un coût économique. Elle compromet la relance que nous voulons opérer. Ce n’est pas lorsque l’on a peur que l’on achète pour soutenir la consommation, que l’on décide de se former pour trouver un emploi ou en changer, que l’on sort de son quartier pour trouver du travail, que l’on crée son entreprise, que l’on investit dans nos PME. C’est vous qui faites peur aux Français ! Je vous disais tout à l’heure que je préférais annoncer de bonnes nouvelles. De bonnes nouvelles ou de vraies nouvelles ? Une hirondelle ne fait pas le printemps ! Voyez-vous, je ne pense pas me tromper en disant que les Français préfèrent entendre de bonnes nouvelles plutôt que des mauvaises. Nous estimons qu’il est de notre responsabilité collective de replacer notre pays dans une spirale positive. Nous serons tous jugés sur les résultats. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Valérie Lacroute. Cela va être difficile d’intervenir après Mme David ! Allez, faites-nous peur ! Attention aux trémolos ! Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, madame la secrétaire de la commission, mes chers collègues, quelle déception à la lecture du budget pour 2019 présenté par le Gouvernement ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Eh oui ! Quel sentiment de gâchis, auquel s’ajoute la colère légitime des Français et des maires après le lancement du fameux hashtag « Balance ton maire » ! C’est inacceptable ! Oui, ce budget est décevant : on nous avait promis une marche, une dynamique, un élan vers du mieux, mais nous n’y retrouvons que les errements du passé.
Avec une augmentation du déficit public, porté à 2,8 % du PIB contre 2,6 % en 2018, avec une hausse de 25 milliards d’euros des dépenses publiques, M. Macron conduit une politique de finances publiques en marche arrière toute ! Faute de réforme structurelle, on se contente d’ajustements budgétaires cosmétiques. On prend dans la poche de Paul pour contenter Jacques. On vante une augmentation de 6 milliards d’euros du pouvoir d’achat alors que celui-ci a baissé de 4,5 milliards l’année dernière. Nous attendions un souffle réformateur surfant sur la vague de la croissance mondiale, mais le Gouvernement est resté à quai, manquant ainsi l’opportunité d’un cycle économique plus que favorable.
Très bien ! Combien d’années faudra-t-il attendre avant qu’une telle conjoncture ne se représente ?
Oui, les Français sont déçus et en colère – non seulement parce que la République exemplaire tant vantée s’est effritée avec l’affaire Benalla
(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM) ,… La vérité vous fâche ! Et Balkany ? …mais, plus durablement, parce que le gouvernement de M. Macron leur a volé pour un temps la possibilité de renouer avec la prospérité.
En découle un budget brouillon, incohérent, illisible. En effet, où est la cohérence quand, d’un côté, l’État supprime l’ISF afin de favoriser les investissements en capital mais que, de l’autre côté, il accapare à son profit la trésorerie des grandes entreprises en augmentant le cinquième acompte d’IS ?
C’est le « en même temps » cher à la majorité ! La seule logique qui transparaît dans ce budget est celle d’une recherche désespérée d’économies, complètement déconnectée des enjeux vitaux de l’économie française et des problèmes des Français. Très bien ! Les PME et TPE représentent 99,8 % des entreprises et emploient la moitié des salariés en France. Elles font battre le cœur économique, mais aussi humain du pays. Pourtant, on ne compte pas le nombre de hausses de taxes qu’elles vont subir de plein fouet au 1er janvier prochain, au mépris du plus élémentaire respect du principe de sécurité juridique.
Ainsi, alors que les lois de programmation pluriannuelle doivent permettre aux entreprises d’élaborer une stratégie économique à long terme, le Gouvernement vient de décider brutalement du triplement de la TICPE sur le gazole non routier, dans le cadre d’un article que nous avons réussi à supprimer en commission mais qui reviendra probablement en séance publique. Concrètement, comment les entreprises concernées vont-elles résister à ce choc fiscal ? En licenciant ? En augmentant les prix des marchés publics des collectivités ? Quoi qu’elles fassent, ce sera le salarié ou le contribuable local qui paiera.
Et ne venez pas nous parler de fiscalité verte quand, dans le cadre du prélèvement à la source, vous excluez du dispositif d’avance les crédits d’impôt pour l’agriculture biologique alors même que ces agriculteurs sont déjà au bord de la faillite en raison du retard dont souffre le versement des aides promises par l’État.
C’est en train d’être réglé ! Les mots « biologique », « environnemental » et « vert » ne sont que lettre morte dans la bouche des représentants de la majorité. M. Hulot ne s’y est pas trompé et en a tiré les conséquences en quittant le Gouvernement.
Il est aussi totalement hypocrite d’augmenter la taxe sur les carburants quand les particuliers vivant en zone rurale ou périurbaine n’ont pas d’autre moyen de transport que leur véhicule. Vous ne pouvez pas demander aux Français de traverser la route pour trouver un emploi et leur interdire ensuite de prendre la route pour aller travailler !
Ils peuvent y aller en voiture électrique ! Ce sont encore les mêmes qui vont subir le matraquage fiscal de l’État, les mêmes sur le dos desquels l’État va se faire sa trésorerie. La suppression de la taxe d’habitation n’est qu’un leurre que vous agitez pour occulter l’ensemble des mesures qui vont s’abattre sur les Français. En outre, vous accusez les maires d’augmenter les impôts alors qu’ils ne disposent d’aucune visibilité. Qui a augmenté la TVA de 2 points ? Si encore vous en aviez profité pour baisser les dépenses publiques et réduire le déficit… Malheureusement, il n’en est rien !
Voilà, en quelques mots, pourquoi ce budget est si décevant et vous vaudra la colère des Français et des maires, monsieur le secrétaire d’État.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. Bruno Questel. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, l’an dernier, le Gouvernement nous a présenté un budget qui s’inscrivait dans une perspective quinquennale, correspondant à la durée du mandat que les Françaises et les Français ont confié au Président de la République – un mandat qu’ils ont confirmé en nous dotant de la majorité qui nous rassemble aujourd’hui.
Depuis des décennies, le traitement social du chômage, d’une part, et les alternances cotonneuses qui se sont succédé, d’autre part, ont plongé notre pays dans le marasme économique dans lequel nous l’avons trouvé en 2017 et créé la fragilité démocratique due à l’effondrement des partis traditionnels, trop occupés qu’ils étaient à assurer la pérennité d’un mécanisme pendulaire où les uns et les autres trouvaient finalement leur compte.
Aujourd’hui, monsieur le secrétaire d’État, par ce deuxième exercice budgétaire que vous nous proposez, vous entendez affirmer avec raison que le Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, souhaite réhabiliter avec force la valeur travail, mieux soigner nos concitoyens et mieux protéger les Françaises et les Français en augmentant les budgets de la défense, de l’intérieur et de la justice.
Certes, la méthode choisie peut surprendre. Elle déstabilise les partisans de l’ordre établi et les conservateurs de toutes tendances. En effet, le projet de loi de finances dont nous entamons aujourd’hui l’examen s’inscrit lui aussi dans une perspective quinquennale. Il n’a pas d’autre objet que de renouer avec le développement de l’emploi, le développement de nos territoires, le développement de la protection sociale et, finalement, le développement de notre pays dans son ensemble et la réalisation du destin de tout un chacun.
J’ai bien entendu qu’un grand nombre des intervenants précédents – pour ne pas dire la totalité d’entre eux – n’hésitaient pas à imputer la responsabilité de tous les maux de l’économie nationale à la politique menée depuis juin 2017. Mais, ne vous en déplaise, nos concitoyens ne sont pas dupes. Ils savent combien notre pays était encalminé dans des équations insolubles : augmenter les dépenses chez les uns, baisser les impôts chez les autres, réduire drastiquement le nombre de fonctionnaires pour les uns, créer sans discernement nombre d’emplois publics pour les autres – autant de propositions multiples et variées, sans cohérence d’ensemble ni vision à moyen ou long terme.
Pour notre part, nous entendons offrir à nos concitoyens de vraies perspectives.
Tout d’abord, celle de l’emploi, valeur principale de notre politique. Sur ce sujet, je renvoie aux propos tenus par mes collègues du groupe La République en marche.
Ensuite, celle d’une justice rénovée, tournée vers l’avenir et le progrès, avec un budget en augmentation de 6,5 % par rapport à 2018. Je veux notamment souligner la création, cette année, de 3 500 postes de surveillance et de 1 500 postes parmi les personnels de probation, ainsi que la mise en œuvre de mesures concrètes destinées à renforcer l’attractivité des métiers de l’administration pénitentiaire.
Le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, actuellement discuté au Sénat, démontre combien les pouvoirs publics ont souhaité appréhender tous les aspects de la question, refusant ainsi la pratique antérieure consistant à segmenter la réflexion et les décisions qui pouvaient en découler. Tous les champs opérationnels et organisationnels ont été traités dans ce texte et, surtout, budgétés. L’article 1er énonce bien que les moyens de la justice seront portés de 7 à 8,3 milliards d’euros entre 2018 et 2022, que 6 500 postes seront créés et qu’une éventuelle actualisation de la programmation sera opérée, le cas échéant, avant le 31 décembre 2021.
Une autre perspective essentielle fait l’objet de toute l’attention de la majorité, qui soutient toutes les orientations du Gouvernement et entend affirmer que la question des collectivités ne peut pas être appréhendée comme elle l’a malheureusement été entre 2002 et 2012. Monsieur le secrétaire d’État, l’an dernier, pour la première fois, le Gouvernement a maintenu le niveau des dotations aux collectivités. Les dotations de soutien aux investissements sont maintenues à plus de 2 milliards d’euros, dont 1 milliard au titre de la dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR. Pour les départements, la dotation globale d’équipement sera transformée en dotation de soutien à l’investissement local – DSIL –, pour plus de 200 millions d’euros.
Je souhaite terminer mon intervention en abordant la question de la contractualisation. Si 322 collectivités – les régions, les départements, 145 communes et 62 intercommunalités – relèvent de ce champ, il est regrettable que celles qui ont refusé de s’engager dans cette voie vertueuse l’aient fait pour des raisons politiciennes, tenant à l’incapacité de leurs dirigeants à s’inscrire dans la démarche de novation de l’action publique et à sortir de l’inextricable conservatisme qui les caractérise.
Quoi qu’il en soit, ce projet de loi de finances prend en considération la situation de nos territoires. Il est destiné à rassembler les Françaises et les Français, à mieux éduquer nos enfants, à former nos concitoyens, à les protéger et à les soigner.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) La parole est à M. Julien Aubert. Madame le président, monsieur le secrétaire d’État, vous nous présentez votre deuxième budget de la législature. Et ce budget, c’est bel et bien le vôtre ! L’an dernier, en effet, vous aviez largement hérité de la situation économique laissée par vos prédécesseurs, qui s’était d’ailleurs améliorée. Mais, cette année, nous pouvons voir ce que vous êtes capables de faire !
Malheureusement, le gonflement artificiel des recettes du budget pour 2019 traduit une volonté de maquiller les comptes afin de respecter le sacro-saint objectif de déficit.
(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Cette remarque est déplacée ! Il en va de la constitution du budget comme des objectifs de performance de la loi organique relative aux lois de finances – LOLF : qu’importent les moyens, pourvu qu’on atteigne l’objectif – maintenir le déficit en dessous de 3 %. Mais c’est déjà une erreur, un péché contre l’esprit. L’important n’est pas de se situer au-dessus ou au-dessous de 3 %, mais de présenter un budget qui soit enfin en équilibre ; or celui-ci ne l’est pas.
Vous avez donc fait un budget de comptes d’apothicaire, une sorte de kaléidoscope – dispositif qui, comme vous le savez, autorise un nombre indéfini de combinaisons et permet de créer quelque chose de nouveau par le simple réagencement de ce qui existait déjà auparavant.
Il y a par exemple dans votre budget une vraie hausse de l’impôt sur le revenu, qui fait rentrer un peu plus de 3 milliards d’euros dans les caisses de l’État. En effet, en créant le système du prélèvement à la source, qui comporte un décalage, vous allez, en réalité, taxer les gens sur leurs revenus de 2019, et non sur ceux de 2018 – Mme de Montchalin a d’ailleurs reconnu que l’on paierait en 2019 le montant de l’impôt que l’on aurait dû payer en 2020 : il y a donc bien un effet de décalage. Ainsi, quelqu’un qui percevait 1 300 euros par mois en 2018 et à qui on prélevait 10 % d’impôt aurait dû payer 130 euros, mais, s’il a bénéficié d’une promotion de 90 euros et gagne donc 1 390 euros en 2019, on lui prélèvera 139 euros. Il y a donc bien une augmentation, dont le produit entre dans les caisses de l’État et dont vous avez d’ailleurs peu cherché à masquer quelques milliards dans les annexes au PLF en la dénombrant en comptabilité nationale, et non en comptabilité budgétaire – mais cela n’a pas échappé à l’œil de notre ami Charles de Courson, qui l’a fait remarquer en commission.
Il y a aussi quelques oubliés s’agissant du mécanisme de report de crédit d’impôt et de réduction d’impôt. Ainsi, dans le cas du déficit foncier reportable, la mise en œuvre du prélèvement à la source se traduira par des traitements différents pour les propriétaires disposant d’un déficit foncier, reportable sur les années suivantes. Pour ceux dont le déficit foncier est reportable de 2017 à 2018, l’effet de la réduction d’impôt sera tout simplement annulé, car le nouveau système neutralisera l’imposition des revenus fonciers de 2018. On voit bien là une vraie hausse de l’impôt sur le revenu.
Le projet entraîne également une vraie hausse de l’IS, avec la mesure concernant le cinquième acompte : vous rapatriez des revenus qui auraient dû être perçus l’année suivante, ce qui représente plus de 2 milliards d’euros.
S’y ajoute la fausse baisse de la taxe d’habitation, dont on a beaucoup parlé. »
Elle est de 30 % ! Dans cette histoire, le citoyen sera banané : on lui a promis une exonération, mais il ne voit que sa taxe qui taxoie et son revenu qui baissoie – ce qui, monsieur le secrétaire d’État, est quelque peu problématique. Les Français ont compris qu’ils devaient attendre octobre pour bénéficier d’une baisse d’impôts, mais malheureusement, à l’heure dite, la baisse d’impôt n’est pas là car, lorsque l’on engage un bras de fer avec les communes en leur tirant le tapis sous les pieds, elles se vengent ou, du moins, tentent de se protéger en augmentant les taux pour conserver leurs ressources. Sur 36 000 communes, 30 000 ne l’ont pas fait ! Enfin, la vraie hausse de la fiscalité environnementale représente une politique antisociale. Monsieur le secrétaire d’État, je sais que vous venez du parti socialiste et que – sans trémolos dans la voix – cet argument va nous émouvoir. Quand on ponctionne des contribuables qui vivent à la campagne et qui ont des revenus modestes, quand on les punit parce qu’ils roulent au diesel et se chauffent au fioul, et que l’on redistribue cette manne, tirée de la fiscalité climatique, pour l’attribuer à des gens qui réalisent des travaux de rénovation énergétique dans des pavillons, cela revient bien à prélever chez les pauvres pour redistribuer chez les riches. Il s’agit là de plusieurs milliards d’euros : il faudra bien se demander un jour si l’on peut continuer ainsi.
Je conclurai en évoquant la plus grande incohérence de ce budget. Si celui-ci comportait un élément positif – la transformation du CICE –, je suis très inquiet de constater que, dans le PLFSS, vous supprimez le mécanisme des exonérations de charges pour les travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi – TODE –, très important dans l’agriculture. À titre d’illustration, un agriculteur qui embauche des saisonniers devra payer, sur un revenu brut de 1 200 euros, 500 euros de charges, au lieu de 70 : c’est toute sa marge qui disparaîtra. La grande transformation du CICE est donc inutile si, dans le même temps, les agriculteurs – en particulier ceux du Vaucluse, département où je suis élu – subissent une hausse du coût du travail d’environ 12 millions d’euros. Ils ne survivront pas, monsieur le secrétaire d’État.
Ce budget doit être politique et viser la défense des intérêts des Français. Je vous demande donc de reconsidérer la suppression de l’exonération des TODE.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à Mme Bénédicte Peyrol. La réponse arrive, monsieur Aubert ! Madame la présidente, madame la secrétaire de la commission, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans la continuité des décisions prises lors du premier budget du quinquennat, le présent budget traduit bien la volonté commune du Gouvernement et de la majorité d’accélérer notre transition vers une économie plus durable, plus dynamique et plus équitable.
Ce budget contribue au « verdissement » de notre politique fiscale et budgétaire. Il est la traduction des politiques annoncées et des ambitions que nous défendons depuis plus d’un an en matière environnementale : la poursuite de la mise en œuvre du plan climat, la présentation par le Premier ministre de la feuille de route de l’économie circulaire, qui vise à rompre avec le modèle de l’économie linéaire, à transformer notre industrie et à développer des emplois non délocalisables, le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises – PACTE –, qui modifie l’objet social des entreprises pour que celles-ci tiennent compte des enjeux sociaux et environnementaux, enfin l’amplification des investissements privés dans la transition écologique, en favorisant la finance verte, car nous pensons que l’effort doit venir de l’État et du privé œuvrant main dans la main.
En matière d’environnement, on nous reproche, sur les bancs de gauche et de droite, de ne pas faire assez ou d’en faire trop. Or, chers collègues, en matière d’environnement, nous agissons !
(Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Pourquoi, lorsque la France se place en tête des États et se montre ambitieuse, ne la soutenez-vous pas ?
Dans ce budget comme dans celui de l’année dernière, nous mobilisons le levier de la fiscalité environnementale et celui de la dépense publique en faveur de l’environnement. Nous facilitons le passage des collectivités à la tarification incitative, en vue d’atteindre les objectifs fixés dans la loi de transition énergétique et pour la croissance verte : 15 millions de ménages devraient relever de cette tarification en 2020 et 25 millions en 2025, alors qu’elle n’en concerne aujourd’hui que 5 millions.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Nous rendons plus compétitif le recyclage des déchets, avec une augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes – TGAP – relative aux déchets s’agissant de leur incinération et de leur stockage.
Vous rendez surtout plus riches les riches ! En contrepartie de cette augmentation, nous proposons d’appliquer une TVA à 5,5 % aux opérations de prévention, de recyclage et de tri des déchets. Nous proposons aussi un nouveau barème de malus, permettant de dégager des recettes supplémentaires afin d’amplifier le dispositif de prime à la conversion des véhicules, qui a un effet sur la baisse des émissions de CO2 et qui a été un succès en 2018.
Nous augmentons la part de TICPE affectée au compte d’affectation spéciale consacré à la transition énergétique, qui finance les énergies renouvelables.
Pour finir, je reviendrai sur l’objet de l’un de nos débats les plus houleux en commission des finances,…
L’article 19 ! …et dans lequel l’approximation n’est plus de mise : la contribution climat-énergie. Nos oppositions voudraient nous faire croire que la trajectoire que nous avons votée l’an passé est trop ambitieuse et accroît démesurément le prix des carburants pour nos concitoyens. Or la hausse de 7 centimes par litre sur le diesel n’a pesé que pour moins d’un tiers sur l’augmentation générale. Celle-ci – disons-le nettement, pour que cela soit le fondement à nos débats – résulte de la hausse du prix du pétrole depuis un an, laquelle résulte de l’accélération de la demande mondiale, des tensions géopolitiques au Moyen-Orient… Ce n’est pas à cause du cours du baril ! Adaptez-vous ! …et de l’action concertée des principaux pays producteurs.
Remettre en question cette trajectoire n’est rien de moins que remettre en question les défis climatiques que notre humanité doit affronter. Tout se joue aujourd’hui et l’on ne devrait plus pouvoir entendre dire dans cet hémicycle que « demain, c’est loin !».
Remettre en cause cette trajectoire est irresponsable. L’irresponsabilité, c’est laisser augmenter la consommation nationale de carburants, car cela ne signifie rien d’autre que laisser augmenter les émissions de gaz à effet de serre. C’est préférer défendre des gaspillages d’énergies polluantes, plutôt que s’orienter vers une économie utilisant une énergie non polluante. C’est vouloir faire de la politique à la petite semaine, plutôt que s’attaquer au problème de fond : la dépendance aux hydrocarbures de notre économie, de notre société et de notre modèle de croissance.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Très bien ! Nous devrions nous mobiliser pour en sortir : c’est une question de souveraineté et d’indépendance.
Les modèles qu’ont présentés les deux lauréats du prix Nobel d’économie cette année montrent bien qu’il ne faut pas attendre pour infléchir le marché. La responsabilité, c’est intervenir sur l’innovation et les nouvelles ressources, qui sont notre croissance de demain.
Nous n’occultons pas pour autant l’impact de cette fiscalité sur le pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles et les plus exposés. Au contraire, nous l’affrontons, en renforçant les mesures d’accompagnement qui fonctionnent, comme la prime à la conversion, le chèque énergie et le soutien des dispositifs de lutte contre la précarité énergétique.
Je ne peux qu’inviter à renoncer aux postures ceux qui se servent du mot « environnement » pour diviser. Ces questions nous concernent tous et sont trop graves pour ne pas rimer avec « union ».
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et plusieurs bancs du groupe MODEM.) Et l’article 19 ? La parole est à M. Benoit Potterie. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’Etat, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, chers collègues, ce projet de loi de finances, le deuxième du quinquennat, traduit et confirme les choix politiques du Gouvernement et de notre majorité.
C’est avant tout un budget responsable : nous poursuivons notre effort de réduction de la dépense publique, donc du déficit. Ainsi, celui-ci s’établira sous la barre des 3 % de déficit pour la troisième année consécutive, ce qui n’était pas arrivé depuis l’an 2000.
J’appelle cela de la responsabilité, car s’endetter, c’est appauvrir les générations futures. C’est aussi se rendre dépendants de nos créanciers, donc perdre un peu de notre souveraineté. C’est, enfin, alourdir la part des intérêts dans le budget, et donc réduire la marge de manœuvre des pouvoirs publics. Nous ne cédons pas à cette facilité.
Responsable, ce budget n’en est pas moins ambitieux. Nous tenons notre promesse d’alléger la pression fiscale qui pèse sur les contribuables : nous poursuivons la baisse de la taxe d’habitation, cet impôt injuste et incompréhensible pour les ménages ; nous réduisons la CSG pour les retraités modestes ; nous poursuivons la baisse des cotisations salariales ; nous défiscalisons l’intéressement et la participation pour les salariés des PME, encourageant ainsi leur usage pour un meilleur partage de la richesse dans les entreprises ; et, à partir de septembre, nous exonérerons fiscalement les heures supplémentaires.
Ce budget est un outil au service de la reprise économique. Nous voulons que le travail paie mieux, que les entreprises soient incitées à embaucher et que l’ensemble des Français puissent accéder à un emploi. C’est pourquoi nous investissons 1,2 milliard d’euros supplémentaires dans l’éducation, l’enseignement supérieur et la recherche, et 2,5 milliards d’euros supplémentaires dans la formation des chômeurs et des jeunes.
Ces investissements sont le volet financier des mesures que nous avons prises par ailleurs pour relancer la croissance et créer de l’emploi – je pense notamment aux ordonnances sur le travail, à la loi sur la formation professionnelle et à la loi PACTE.
Ce texte est aussi un texte de renforcement de nos institutions : il met l’accent sur les budgets régaliens – défense, police et justice. Nous démontrons ainsi l’importance que nous accordons à la sécurité de nos concitoyens.
Un mot enfin de la transition écologique : l’actualité tragique est un signe supplémentaire, s’il en fallait un, qu’il est urgent d’agir. C’est la raison pour laquelle nous augmentons les crédits alloués au ministère et assumons l’instauration d’une fiscalité offensive pour accélérer la transition énergétique et changer de modèle environnemental.
Ce texte encourage les pratiques vertueuses et pénalise les produits polluants. Sur certains bancs, des députés déplorent un prétendu manque d’ambition en matière écologique. Ce sont aussi les premiers à se plaindre de toute mesure qui va dans le sens de la vertu écologique. Nous, au moins, nous sommes cohérents et nous agissons.
(« Ah ! » et sourires sur les bancs du groupe GDR.)
Enfin, ce budget relève d’une logique de simplification. Nous voulons rendre l’impôt plus simple et plus lisible. Ainsi, nous mettons en œuvre le prélèvement à la source, nous amorçons la réforme du recouvrement de l’impôt et nous supprimons progressivement les taxes à faible rendement – en l’état, le PLF prévoit la suppression de dix-neuf d’entre elles pour l’année prochaine. C’est une mesure salutaire. En supprimant ces taxes, en effet, nous simplifions le droit fiscal, nous réduisons la pression fiscale qui pèse sur les entreprises et les particuliers, nous allégeons les formalités déclaratives des entreprises et nous réduisons les coûts de recouvrement pour l’État. En effet, ces taxes ont un faible rendement, mais sont complexes et leur perception est coûteuse. Sans doute pouvons-nous pousser cet effort encore plus loin, notamment par une réflexion approfondie sur la pertinence de certaines taxes affectées.
En somme, nous commençons aujourd’hui l’examen d’un texte qui est la concrétisation d’une philosophie claire. Notre objectif commun, notre cap, c’est l’émancipation des individus.
Houlà ! C’est du lourd ! À cette fin, nous défendons un texte qui vise à mieux rémunérer le travail, à renforcer l’accompagnement des personnes qui cherchent un travail, à améliorer le partage de la valeur créée et à protéger les plus fragiles. Ce texte doit être étudié en relation avec le PLFSS, lequel apporte des remèdes aux souffrances des Français, que ce soit en matière de prestations sociales ou d’accès aux soins.
Libérer et protéger
(Exclamations sur les bancs du groupe GDR) : nous avions promis de maintenir cet équilibre. On a déjà entendu ça tout à l’heure ! Je suis heureux de défendre un projet cohérent avec cette promesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Libérez-nous… mais protégez-nous de cette liberté ! La parole est à M. Laurent Saint-Martin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, le PLF pour 2019 peut tout d’abord être qualifié de budget de confirmation. Voilà pourquoi certaines mesures font écho à ce que vous avez pu entendre lors de l’examen du budget pour 2018 : c’est normal, voulu et assumé. Mais il s’agit surtout d’un budget de confirmation des engagements pris par le Gouvernement et par la majorité – et cette majorité n’est pas aux ordres, monsieur Bricout : elle est convaincue par ce qu’elle vote. C’est encore pire ! Ce budget, le ministre Darmanin l’a rappelé tout à l’heure, est aussi une confirmation de notre effort de sincérité. Cet aspect est essentiel. Il y a un peu plus d’un an, nous votions un projet de loi de programmation pour les finances publiques intégrant une projection de croissance à 1,7 % ; nous atteindrons ce chiffre à la fin de cette année. C’est important : si la croissance est bien telle que nous l’avions prévue, cela nous permet de voter un budget crédible pour l’année suivante, d’expliquer à nos concitoyens comment sont utilisés les deniers publics grâce à l’impôt que nous levons. La sincérité permet donc de ne pas avoir à voter de décrets d’avance, seulement un projet de loi de finances rectificative réduit à la portion congrue, c’est-à-dire technique, qui servira à ajuster les crédits de l’année en cours, guère plus.
C’est un budget cohérent, qui permet à la fois de redresser les comptes publics et d’assumer les réformes profondes engagées l’an dernier, selon le fameux triptyque « libérer, protéger, investir », que nous continuons d’assumer sans réserve. C’est un budget qui se distingue par un effort considérable d’allégement de la pression fiscale. Pour les contribuables, d’abord : nous avons entendu l’expression du ras-le-bol fiscal de nos concitoyens. D’où les 6 milliards d’euros de baisse d’impôts et de taxes à leur profit.
(Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Que vous reprenez de l’autre main ! C’est factuel : les chiffres sont têtus, mes chers collègues ! En témoigne le projet de loi de finances initiale.
Naturellement, le travail étant notre priorité, nous voulons axer cette baisse d’abord sur ceux qui travaillent, grâce à la hausse de la prime d’activité, la baisse des cotisations chômage et maladie, la suppression des cotisations sur les heures supplémentaires. Tout cela a été dit maintes fois, mais il est nécessaire d’y insister. Par ailleurs, nous continuons à revaloriser les minima sociaux, ce que nous avions commencé à faire l’an dernier, en particulier le minimum vieillesse et l’AAH.
(Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
La baisse de la pression fiscale pour les entreprises, ensuite, permettra à celles-ci de regagner les points de compétitivité dont elles ont besoin, en lien direct avec tout ce que nous avons fait l’an dernier, mais aussi avec la loi PACTE, que nous avons votée en première lecture il y a quelques jours.
Relance de l’investissement, donc de l’emploi par la baisse du coût du travail : tel est l’objet de la suppression du CICE et de son remplacement par une baisse de charges directe et pérenne. D’aucuns se plaindront de cet effet bonus de 20 milliards en 2019 ; pour notre part, nous l’assumons, car il permettra justement aux entreprises de retrouver des marges, d’investir et d’embaucher. En outre, la démarche est parfaitement complémentaire de la poursuite de la baisse de l’IS.
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, de m’attarder brièvement sur la suppression des taxes à faible rendement, qui, vous le savez, m’est chère.
Combien ça coûte ? D’abord, il s’agit d’un engagement du Gouvernement dont je veux saluer le respect. Il poursuit un triple objectif : la baisse de la pression fiscale, la simplification et la lisibilité, la réalisation d’économies. Il s’agit de réduire les dépenses publiques dans les administrations qui procèdent aujourd’hui à la collecte et au recouvrement, à commencer par la DGFIP – direction générale des finances publiques – et la DGDDI – direction générale des douanes et droits indirects.
La mesure a un coût : les dix-sept petites taxes proposées en loi de finances initiale représentent 137 millions d’euros. Je sais que vous avez l’intention, monsieur le secrétaire d’État, d’aller plus loin l’an prochain, pour atteindre un total de 400 millions.
C’est un pognon de dingue, ça ! Nous présenterons plusieurs amendements que le rapporteur général a déjà détaillés et, personnellement, j’en défendrai trois nouveaux. Plusieurs secteurs d’activité seront concernés : l’agriculture, les transports, les jeux, le tourisme, l’artisanat – bref, tous ceux qui ont besoin d’une fiscalité en baisse, mais aussi plus lisible. Aujourd’hui, certaines entreprises payent des taxes dont elles ne savent même pas à quoi elles servent. À nous de rendre ces dispositions plus lisibles. Monsieur le secrétaire d’État, vous pouvez compter sur moi – et sur nous – dès cette année pour effectuer ce travail, que nous continuerons puisqu’il relève d’une dynamique pluriannuelle. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Fiona Lazaar. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il y a un an, nous étions réunis ici même pour examiner le premier budget du quinquennat. Il y a un an, nous marquions une profonde rupture avec les exercices précédents en votant un budget qui concrétisait les engagements que nous avions pris devant les Français tout en s’appuyant sur des hypothèses budgétaires et économiques crédibles et sincères.
Cette double ambition, les Français en constatent aujourd’hui les résultats : la machine de l’emploi redémarre et l’investissement dans notre économie est au plus haut. Ils les constatent aussi en recevant leur taxe d’habitation, qui baisse de 30 % dès cette année pour 18 millions d’entre eux. À Argenteuil, dans ma circonscription où cette taxe injuste est la plus élevée de France, l’économie est en moyenne de 236 euros par foyer. Ils les constatent sur leur fiche de paie, grâce à la suppression des cotisations salariales qui représente, pour un salarié au SMIC, 250 euros par an. Ils les constatent quand ils bénéficient du minimum vieillesse, qui a augmenté de 30 euros cette année, ou de l’AAH, qui progressera de 50 euros à partir du 1er novembre. Ils les constatent enfin, depuis ce mois d’octobre, avec la hausse de 20 euros par mois de la prime d’activité, destinée à soutenir la reprise d’activité.
L’opinion publique a l’air conquise ! Le projet de budget 2019 relève de cette même ambition : pas de bricolage, pas d’ajustements paramétriques, pas de petits calculs. C’est une étape de plus pour tenir les engagements pris devant les Français.
Ce budget est en premier lieu sincère et crédible.
C’est un budget pour les classes moyennes
(Protestations sur les bancs du groupe LR) ,... C’est cela, oui ! ...qui croit au travail et donne vraiment la priorité à l’activité.
C’est enfin un budget qui protège davantage les Français, qui nous permettra, pour la troisième fois consécutive, de tenir nos engagements budgétaires européens – une première en vingt ans ! – et de contenir la hausse de la dépense publique sous les 1 %, sans mener la politique du coup de rabot.
Ce budget, je le répète, est celui des classes moyennes, celui du travail. Il permettra de poursuivre la baisse des impôts dus par les Français en rendant à ces derniers 6 milliards d’euros. Cela passera notamment par une nouvelle baisse de 35 % de la taxe d’habitation pour 80 % des Français, avant sa suppression définitive en 2020. Cette baisse d’impôts s’accompagne d’une conviction forte : le travail doit mieux payer. C’est pourquoi nous augmenterons de nouveau la prime d’activité de 20 euros l’année prochaine et supprimerons les cotisations salariales sur les heures supplémentaires. Cette mesure permettra à un salarié au SMIC de toucher en moyenne 200 euros de plus par an.
Enfin, ce budget prépare l’avenir en nous permettant d’investir 1 milliard d’euros supplémentaire dans la transition écologique et les mobilités, mais aussi de faire passer à la vitesse supérieure notre mobilisation pour les quartiers ; comme élue d’une circonscription populaire, j’en sais l’urgence. Nous poursuivrons ainsi nos efforts en matière d’éducation, premier levier pour enrayer les inégalités de destin. Après le dédoublement des classes de CP et de CE1, qui a concerné 200 000 élèves cette année, nous investirons de nouveaux moyens pour rendre le métier d’enseignant plus attractif dans ces territoires, avec 1 000 euros supplémentaires par an pour les 60 000 enseignants de REP+.
Vous supprimez des classes ! Après avoir doublé les crédits de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, pour les porter à 10 milliards d’euros, nous augmenterons cette année de 20 % les crédits de la politique de la ville pour financer le développement des stages de troisième, la création de 1 000 postes d’adultes-relais ou encore le doublement du nombre de coordonnateurs associatifs.
Bien sûr, ce budget consolide également les moyens que nous allouons à la sécurité de tous les Français, avec des crédits en hausse pour la justice, les forces armées ou encore par la création de près de 2 500 postes supplémentaires de gendarmes et policiers. Protéger les Français, c’est aussi soutenir les plus modestes d’entre nous, par une nouvelle revalorisation des minima sociaux : 35 euros de plus par mois pour le minimum vieillesse, 40 euros de plus pour l’AAH. Nous tenons donc le cap et traduisons dans ce budget les premières mesures du plan pauvreté, qui mobilisera plus de 8 milliards d’euros sur le quinquennat. Dès cette année, les Français les plus modestes bénéficieront ainsi d’un meilleur accès à la complémentaire santé, d’une revalorisation du chèque énergie ou encore des premiers effets du « reste à charge zéro » sur les prothèses auditives et dentaires et sur les lunettes.
Ces mesures forment un tout cohérent. Elles ne sont pas commandées par des impératifs comptables mais, au contraire, par une vision claire et ambitieuse de l’avenir, fidèle aux engagements pris devant les Français et lucide quant aux défis que doit affronter notre pays. Il nous revient maintenant, après un premier examen en commission, de poursuivre le travail, avec l’intérêt des Français pour seule boussole.
(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Jean-René Cazeneuve. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il y a tout juste un an, le Gouvernement et sa majorité ont instauré une nouvelle approche dans les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, fondée sur la contractualisation et sur la confiance et en rupture avec la baisse historique des dotations. Cette approche a porté ses fruits dès cette année : les dépenses de fonctionnement des collectivités ont augmenté de 0,9 %, leur capacité d’autofinancement de 6 % et leur investissement de 7 %.
2018 est l’année du retour à meilleure fortune des collectivités territoriales. Nous le devons au budget 2018, mais aussi aux élus, dont je voudrais ici saluer l’engagement et le travail.
« Balance ton maire » ! Je veux en profiter pour condamner fermement, monsieur Pupponi, la récente campagne « Balance ton maire »,... C’est vous qui l’avez écrit ! ...lancée par des internautes irresponsables : je le dis devant tout le monde ! (Exclamationssur les bancs des groupes SOC et LR. – Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
De telles campagnes visant des élus qu’elles livrent à la vindicte populaire, lancées par certains qui se rêvent en Saint-Just mais sont juste des matamores, n’alimentent que les populismes et affaiblissent notre démocratie.
C’est vous qui avez lancé cette campagne ! (Protestations sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.) C’est faux ! Et personne ici ne l’a fait !
Ce triptyque vertueux – maîtrise des dépenses, autofinancement, investissement –, nous voulons le perpétuer dans notre projet de budget 2019. Oui, ce budget est une bonne nouvelle pour la France des territoires ! Il confirme la promesse du Président de la République : les dotations aux collectivités territoriales ne baissent pas pour la seconde année consécutive ; elles seront même en légère hausse. Combinées à des ressources propres dynamiques, les recettes des collectivités territoriales augmenteront en 2019. La DGF est stabilisée ; la majorité des communes verront leur DGF progresser en 2019 et je défendrai des amendements visant à en encadrer les variations d’une année sur l’autre.
Bravo ! Les communes les plus fragiles, monsieur Pupponi, bénéficieront d’une solidarité nationale accrue, la DSU et la DSR – dotation de solidarité rurale – augmentant chacune de 90 millions d’euros. L’année dernière, c’était 110 millions ! Vous le savez, la péréquation verticale communale représentera en 2019 un tiers de leur DGF.
Quant aux régions, leurs ressources, qui ont crû de 96 millions d’euros cette année, devraient à nouveau augmenter de 166 millions l’année prochaine.
La reprise de l’investissement local sera également confortée par le maintien à un niveau record de l’ensemble des dotations de l’État à l’investissement : la DETR – dotation d’équipement des territoires ruraux –, à hauteur de plus d’1 milliard d’euros, la DSIL – 570 millions –, la DPV – 150 millions, monsieur Pupponi ! La dotation globale d’équipement des départements sera quant à elle transformée en une dotation de soutien à l’investissement des départements, pour soutenir des projets structurants selon une logique de cohésion des territoires.
Toujours dans un souci de modernisation des concours financiers, la dotation d’intercommunalité, dont l’évolution est devenue illisible, sera réformée pour introduire davantage de prévisibilité dans son calcul et renforcer son rôle de péréquation. Je serai vigilant quant aux critères retenus, afin de la rendre la plus juste possible pour toutes les catégories d’intercommunalité.
Par ailleurs, la lutte contre le changement climatique est l’affaire de tous : de l’État, des entreprises, des citoyens, mais aussi des collectivités territoriales. La fiscalité est l’un des leviers sur lesquels nous devons nous appuyer pour modifier les comportements. L’augmentation de la part déchets de la TGAP sera en partie compensée pour les collectivités par la réduction du taux de TVA sur certaines prestations de gestion de déchet, ainsi que par la baisse des frais de gestion de l’État sur la part incitative de la TEOM – taxe d’enlèvement sur les ordures ménagères.
(Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Nous donnons du temps aux collectivités territoriales pour s’adapter et les plus vertueuses seront gagnantes.
Enfin, ce budget prévoit qu’en 2019, comme en 2018 – et Dieu sait que vous nous l’avez reproché, mais vous l’avez évidemment oublié –, l’augmentation des dépenses de l’État sera inférieure à celle des collectivités : c’est un juste retour des choses.
Les oiseaux de mauvais augure avaient prédit l’année dernière que la contractualisation ne serait pas jugée constitutionnelle, que l’objectif de 1,2 % était inatteignable, que les collectivités territoriales ne signeraient pas, qu’elles seraient asphyxiées. Ils se sont trompés sur toute la ligne. Cette année, nous allons entendre la même petite musique – nous avons déjà commencé à l’entendre. Ne tombons pas dans ce piège. Notre majorité peut être fière de ce projet de loi de finances, qui témoigne de sa confiance résolue envers les territoires. Nous savons que c’est avec les collectivités et en leur donnant les moyens nécessaires que nous construirons la France des territoires.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Jean-Claude Leclabart. Madame la présidente, monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le projet de loi de finances que nous commençons à examiner est la traduction budgétaire de nos ambitions pour la France. Ce budget est bien plus qu’une suite de chiffres ; c’est une feuille de route qui nous engage et nous invite à penser à moyen et long termes. Notre défi est à la fois de répondre aux questions d’aujourd’hui et de savoir quelle France nous voulons léguer à nos enfants et aux enfants de nos enfants. Nous voulons une France juste, où chacun soit en capacité d’évoluer et de trouver sa place.
Agriculteur, élu d’un territoire rural et agricole, permettez-moi de vous dire que « l’agriculture est la base et la force de la prospérité du pays ». Parler d’agriculture, c’est à la fois parler du monde rural et de l’avenir de la planète. Nous devons nous employer à retrouver la compétitivité de notre agriculture tout en participant à la transition énergétique du pays.
Le projet de budget pour 2019 du ministère de l’agriculture et de l’alimentation acte l’accompagnement dans la transformation des secteurs de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture, de l’agroalimentaire, de la forêt et du bois, confrontés aux défis économiques, sociaux, environnementaux et sanitaires. C’est un budget de construction et d’ambition qui permet d’encourager la volonté d’entreprendre et de réussir de nos exploitations et de nos entreprises. C’est un budget qui protège les consommateurs contre tout ce qui peut altérer la qualité de notre alimentation. C’est un budget qui protège également nos producteurs contre les aléas économiques, climatiques et sanitaires, avec la mise en place d’un dispositif unique de déduction reposant sur la constitution d’une épargne de précaution.
Il pourra se traduire par des allégements conséquents de charges fiscales et sociales. L’objectif est de faire évoluer la fiscalité agricole afin qu’elle soit mieux adaptée à la vie économique des exploitations en leur permettant d’améliorer leur résilience, leur viabilité et leur compétitivité. Cette réflexion s’inscrit plus largement dans le cadre de la gestion des risques et a vocation à préparer la future réforme de la politique agricole commune – la PAC.
C’est enfin un budget qui vise à rassembler les producteurs, les transformateurs et les distributeurs dans la poursuite d’objectifs stratégiques de souveraineté alimentaire, de qualité de l’alimentation et de la compétitivité de nos filières économiques.
À périmètre comparable, les autorisations de dépense sont stabilisées en 2018 et 2019. Le PLF permet donc la poursuite du financement des trois grandes priorités du ministère, dont les crédits sont préservés : le soutien aux agriculteurs et aux filières, à travers notamment les cofinancements de la PAC et la mise en œuvre du grand plan d’investissement ; la sécurité sanitaire de la chaîne alimentaire, en maintenant un niveau élevé de surveillance et de prévention ; la préparation de l’avenir,
via la formation des jeunes et l’innovation.
L’année 2019 accompagnera la poursuite des actions structurantes de la feuille de route issue des états généraux de l’alimentation. Elle sera notamment marquée par l’entrée en vigueur de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
L’application de la loi, la conduite des actions structurantes issues des EGA, le grand plan d’investissement qui accompagnera la transformation des filières, ainsi que la réforme de la fiscalité agricole renforceront la compétitivité des entreprises, des filières agricoles et agroalimentaires, et impacteront positivement, je l’espère, le revenu des agriculteurs. Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation participe à l’effort budgétaire collectif voulu par le président de la République pour respecter l’objectif d’un déficit inférieur à 3 % du PIB et d’une baisse progressive de la dépense publique. Nous voulons apporter, par nos choix politiques et budgétaires, la preuve que les Françaises et les Français sont attachés à leur agriculture et à leurs agriculteurs.
Mes chers collègues, au terme de nos débats, nous serons amenés à voter solennellement le deuxième budget de la législature. Les Français nous ont donné pour mission de mener à bien un projet de transformation en profondeur du pays. Voilà notre ambition !
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
La parole est à M. Alexandre Holroyd. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la secrétaire de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, « Choose France , choisissez la France » : c’est le message limpide que l’élection du Président de la République et de cette majorité a envoyé aux investisseurs du monde entier, en juin 2017. C’est aussi un cap très clair : c’est une injonction à la transformation de nos politiques publiques, pour que notre pays retrouve l’attractivité qu’il mérite. Cette transformation a été engagée dès l’été 2017 avec le premier volet de la réforme du dialogue social. Ce deuxième budget, dont nous entamons l’examen aujourd’hui, s’inscrit pleinement dans la continuité.
C’est un budget qui fait le pari de la cohérence et le choix de la sincérité. Derrière ces principes, mes chers collègues, se cache une réalité bien tangible pour ceux qui souhaitent investir : la promesse de politiques prévisibles, crédibles, lisibles. Pas d’inepties révolutionnaires déclamées aujourd’hui pour mieux être oubliées demain ; pas de responsables politiques qui chantent leur amour des équilibres budgétaires au moment du fromage, mais proposent avec désinvolture au dessert plus de 6 milliards d’euros de pertes de recettes pour l’État ; pas de zigzag, de sinuosité, de circonvolution, de virage, de flexuosité. Réduire conjointement la part de la dette publique, de la dépense publique, du déficit public et des prélèvements obligatoires dans le PIB : nous l’avons voté l’année dernière, nous l’entérinons à nouveau aujourd’hui.
Comme son prédécesseur, ce paquet budgétaire PLF-PLFSS fait le choix de soutenir nos entreprises et d’encourager les entrepreneurs de demain. Il continue à faire converger l’impôt sur les sociétés vers la moyenne européenne. Il engage la baisse des charges sociales, en supprimant les cotisations patronales au niveau du SMIC, parce que cette majorité assume que c’est en soutenant ceux qui créent de l’emploi que l’on s’attaque véritablement au chômage.
Ce budget s’attaque à l’illisibilité de notre fiscalité, devenue un véritable épouvantail au cours des dernières décennies, un labyrinthe dans lequel on trouve tantôt des aides parfaitement inefficaces, tantôt des mécanismes de soutien en contradiction totale avec notre volonté farouche de réussir la transition écologique.
Ce budget, c’est aussi la partition de certains éléments du projet de loi PACTE – plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises –, dont le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a été le compositeur. Demain et grâce à ce budget, nos PME familiales se transmettront plus facilement. Ces PME transmises de génération en génération au fil des décennies et des siècles, qui préservent et enrichissent des savoir-faire uniques au monde et qui font la fierté de tous les Français, sont les bijoux de notre économie ; nous nous devons de les protéger et de les faire grandir. Demain, grâce à ce budget, les salariés des TPE, PME et ETI seront d’autant plus partie prenante à la vie de leur entreprise qu’ils seront associés à son succès, grâce à la suppression du forfait social sur l’intéressement.
Mes chers collègues, cette transformation engagée depuis plus d’un an, qui offre à nos entreprises tous les ingrédients pour réussir dans le monde dans lequel nous vivons et dans lequel elles évoluent, ne passe pas inaperçue. Ernst & Young, l’un des plus grands cabinets de conseil au monde, le note avec une grande clarté : « Le redressement de l’attractivité de la France est spectaculaire. La France s’inscrit à nouveau dans le peloton de tête européen, dont elle avait décroché depuis une dizaine d’années ». Le
Financial Times , référence ultime des investisseurs étrangers, était encore plus clair récemment en remarquant : « Il n’y a jamais eu de meilleur moment pour investir en France. » (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Monsieur le ministre, soyons francs : un projet de loi de finances, c’est toujours quelque peu aride. Certains initiés peuvent admirer la beauté unique d’un tuyautage fiscal particulièrement élégant – n’est-ce pas monsieur le rapporteur général ? –…
Oh oui ! …mais je doute que tous partagent ce sens de l’esthétique. Alors, taux, augmentation, baisse, péréquation, conjecture et structure mis à part, ce budget, de qui porte-t-il le nom ?
Ce budget, c’est celui de Philippe, ouvrier, qui va retrouver un emploi comme agent de production à Valenciennes, dans l’usine d’un grand constructeur automobile japonais qui a fait le choix de poursuivre ses investissements en France à la suite de la baisse du coût du travail qui découle directement de l’allégement des cotisations patronales.
Ce budget, il porte le nom de Myriam, qui va trouver un emploi à Fos-sur-Mer, dans une usine de silice à haute dispersion utilisée pour la fabrication de pneus verts, usine dont le propriétaire a été, convaincu, entre autres, par la détermination de cette majorité d’acter la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi en allégement de charges pérennes.
Ce budget, c’est aussi celui de Jeanne, embauchée dans une start-up biotech dont le développement se fera à Montpellier plutôt qu’à Berlin, grâce à l’engagement pris par l’État de soutenir activement notre recherche.
Mes chers collègues, ce budget porte le nom de toutes les Françaises et tous les Français qui cherchent de l’emploi et de tous ceux qui sont en mesure d’en créer, de tous ceux qui comptent investir en France et veulent venir y créer une entreprise. C’est une deuxième étape de la renaissance de l’attractivité de notre pays. À ce titre, je vous enjoins de lui apporter votre plein soutien.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) La discussion générale est close. Le ministre ne répond pas aux orateurs ? Il n’y a rien à dire !
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article liminaire.
La parole est à M. Daniel Labaronne.
L’article liminaire porte sur les prévisions de solde structurel et de solde effectif des administrations publiques. Je souhaite ici souligner à la fois la cohérence et la sincérité de ces prévisions.
La cohérence d’abord. Le déficit, en 2019, se réduirait, avec une amélioration de 0,3 point du solde effectif et de 0,3 point du solde structurel. Ces résultats interviennent après la sortie de la France de la procédure européenne pour déficit excessif. Surtout, ils sont cohérents avec les orientations fixées par le Parlement dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
Ces prévisions sont aussi sincères. Il faut reconnaître au Gouvernement une constance dans sa volonté de rendre ses prévisions sincères – elles sont d’ailleurs en ligne avec celles des principaux instituts économiques.
Je rappelle la difficulté du calcul de la croissance potentielle, de l’écart de production et du solde structurel. Par exemple, surestimer l’écart de production négatif permettrait de surestimer la composante conjoncturelle et de sous-estimer la composante structurelle. Une surestimation de la croissance potentielle aboutirait à creuser l’écart de production et à minimiser le déficit structurel. Nous avons connu cela dans le passé. Or, soulignons-le, les hypothèses de calcul du déficit structurel ont été jugées réalistes par le Haut Conseil des finances publiques, dans son avis sur la loi de programmation des finances publiques. Cet ajustement structurel, je le rappelle aussi, est porté par un effort sur la dépense, conformément aux objectifs du Gouvernement de contenir celle-ci afin de réduire à la fois les prélèvements obligatoires et le déficit. Je ne doute pas que ces efforts seront appréciés à leur juste valeur par la Commission européenne quand elle sera amenée à examiner notre déficit structurel.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Michel Castellani. Les projets de loi de finances sont, on le sait, au cœur de toutes les problématiques, de toutes les difficultés.
L’ajustement structurel a connu, lors du dernier exercice, une amélioration de 0,1 point de PIB. Pour modeste qu’il soit, ce résultat marque une inversion de tendance. L’ajustement structurel prévu dans le présent PLF s’élève à 0,2 point, hors mesure relative au cinquième acompte d’IS – impôt sur les sociétés. On est bien obligé de constater que cet objectif n’est pas conforme à ce que prévoit le règlement européen et surtout qu’il éloigne la perspective d’atteindre l’objectif de moyen terme du solde structurel et qu’il allonge la trajectoire de redressement des finances publiques. Il est toujours très difficile de toucher à la dépense publique. Les besoins de toutes natures sont immenses. Pourtant, la réduction du déficit et de la dette est un objectif indispensable à atteindre. Le message keynésien, de nature éminemment sociale, a été détourné de ses objectifs. Il est particulièrement malsain de voir la dette publique se transformer en objet privilégié d’investissement spéculatif. Il est inquiétant de constater l’énorme montant des émissions quotidiennes de France trésor, tout comme il est inquiétant de savoir que les taux d’intérêt vont inéluctablement grimper, tout comme il est inquiétant d’appréhender le rôle négatif qu’aura le coût futur de l’énergie sur les revenus et la croissance.
Quoique conscients de la complexité des choses, nous appelons au maintien de l’effort d’ajustement structurel et, corollaire indispensable, à un partage juste du fardeau fiscal : juste entre capital et travail ; juste entre entreprises, secteur public et ménages. Nous soutiendrons, sur cet article comme sur l’ensemble du texte, les amendements qui iront dans ce sens.
La parole est à M. Xavier Paluszkiewicz. « Toutes choses sont dites déjà ; mais comme personne n’écoute, il faut toujours recommencer », disait André Gide. (Exclamations sur les bancs des groupes LR, SOC et GDR.) Parlez pour vous ! Raisonnement débile ! Avons-nous tous écouté les arguments et commentaires, ô combien justifiés et pertinents, des différents intervenants, notamment ceux formulés et développés cet après-midi par M. Le Maire et M. Darmanin, respectivement ministre de l’économie et des finances, et ministre de l’action et des comptes publics ? Il n’est pas certain cependant qu’ici ou là, d’aucuns ne veuillent entendre. Entendre que la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, adoptée l’année dernière, traduit nos ambitions en matière de redressement de nos finances publiques. Entendre que l’ensemble des politiques publiques et des réformes annoncées sont pour la première fois sincèrement et rigoureusement présentées dans une trajectoire ambitieuse. Entendre que la « sincérisation » des documents budgétaires n’est contestée par personne. Entendre que – chose rare – il ne sera présenté aucun décret d’avance. Entendre que la France est sortie en 2018 de la procédure pour déficit excessif ouverte en 2009. Entendre que le déficit pour 2017 a été revu à 2,7 % du PIB. Entendre enfin que l’hypothèse de croissance de 1,7 % pour 2018 et 2019 reste à un niveau élevé, qu’elle est solide. Dès lors, mes chers collègues de l’opposition, peut-être pourriez-vous entendre que tout ne va pas si mal et garder un brin d’objectivité pour qui sait prendre ses responsabilités.
Dire, comme tout à l’heure, que tous les signaux économiques sont au rouge traduit une volonté manifeste de nuire
(Exclamations sur les bancs du groupe LR) :… Oh ! Les méchants ! (Sourires.) …nuire à notre économie, à notre projet ; nuire aux Français, tant cette déclaration est mensongère et trompe nos concitoyens. Les Français sont impatients ; nous le sommes tout autant. Il nous faut toutefois les avertir : la transformation du pays ne se fera pas en une année – personne ici ne prétend être magicien. Qu’ils sachent néanmoins que nous allons réussir, tant notre volonté et notre optimisme sont grands. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Gilles Lurton. Avec l’article liminaire, nous disposons, conformément à l’article 7 de la loi organique du 17 décembre 2012, des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour 2019. Cet article nous permet aussi de revenir sur les propos du rapporteur général, qui indique en introduction de son rapport : « Il y a un an, beaucoup doutaient encore de la volonté et de la capacité de la nouvelle majorité à mettre en œuvre un ambitieux programme de transformation de l’action publique et de baisse des impôts tout en ramenant le déficit public sous la barre des 3 % du produit intérieur brut ». Pourtant, monsieur le ministre, il y a un an, nous avons eu bien raison de douter, car aujourd’hui, contrairement à ce qui est écrit dans l’introduction de M. le rapporteur général, les faits sont là, et ils incitent bien moins à l’optimisme que vous ne le dites : des dépenses publiques qui augmenteront de 25 milliards d’euros en 2019 ; un déficit public qui repart à la hausse et va s’aggraver de 13 milliards d’euros l’année prochaine, atteignant les 98,7 milliards d’euros ; une dette publique qui ne diminue pas et reste insoutenable, atteignant 98,5 % du PIB fin 2017, ce qui la rapproche du seuil fatidique des 100 % – nous dépenserons 40 milliards d’euros en 2019 rien que pour payer les intérêts de la dette.
Vous affirmez qu’en diminuant les prélèvements obligatoires de 6 milliards d’euros, vous allez augmenter d’autant le pouvoir d’achat des Françaises et des Français. Nous, nous leur disons que c’est une tromperie. Les débats de ce week-end sur la taxe d’habitation, les débats incessants depuis un an sur la contribution sociale généralisée – la CSG – et son augmentation pour les retraités, les débats sur l’augmentation considérable du prix du gazole, qui pénalise la ruralité, les débats que nous aurons la semaine prochaine à propos de la diminution du pouvoir d’achat des familles engagée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale : tous ces débats nous montrent à quel point les Françaises et les Français ne sont pas dupes.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.) La parole est à M. Marc Le Fur. Ce qui intéresse les Français, c’est leur pouvoir d’achat. Justement ! Or que vont-ils constater dès cette année ? Qu’il baisse. Ce fut le cas naguère à cause de la CSG. C’est encore le cas maintenant : du fait de l’augmentation conjointe du prix du pétrole et de la TICPE – la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques –, le gazole, chez nous, a passé la barre d’1,50 euro au litre – les conversations de nos compatriotes, du moins dans le monde rural, se résument au prix du gazole, qui les impacte directement. La taxe d’habitation, cela ne les impacte pas ? L’augmentation des cotisations à l’AGIRC et à l’ARRCO – l’Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres et l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés – est un autre facteur qui réduit le pouvoir d’achat de nos compatriotes.
Et il va aussi y avoir les conséquences du prélèvement à la source.
Qui seront bénéfiques pour tout le monde ! En effet, celui-ci ne s’appliquera plus, comme l’impôt naguère, aux revenus de l’année n-1, mais à ceux de l’année n. En conséquence, les effets de l’inflation annuelle ou de la petite promotion obtenue se traduiront immédiatement par une augmentation de l’impôt. L’inverse sera vrai aussi ! Il pourra y avoir rattrapage ! La preuve, monsieur le ministre, c’est que le produit de l’impôt sur le revenu pour l’année qui vient sera très bon ! D’ailleurs, cette recette, vous en dissimulez – je vous renvoie à la page 21 de l’évaluation des voies et moyens –… Ce n’est pas très bien dissimulé ! (Sourires.) …5,8 milliards d’euros, en faisant en sorte qu’elle soit inscrite sur janvier 2020 plutôt que sur décembre 2019.
Et vous dissimulez une autre recette, monsieur le ministre, puisqu’en 2019, il y aura deux impôts sur le revenu, et non pas un seul. En effet, si en 2019 l’on paiera l’impôt sur les revenus de 2019, un certain nombre de nos compatriotes devront aussi payer des impôts sur l’année 2018 au titre des revenus exceptionnels ou surérogatoires.
C’est normal ! Ce ne sera donc pas une année blanche pour tout le monde. Peut-être est-ce légitime, mais il y a là une recette bien réelle que vous vous gardez bien d’évaluer. Hélas ! En effet, je n’ai pas trouvé, dans les documents qui nous ont été communiqués, la moindre information la concernant. Les recettes fiscales de deux années civiles en une seule année budgétaire : voilà qui est inquiétant. Je vous invite, monsieur le ministre, à nous répondre sur ce sujet, afin de lever toute ambiguïté. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.) La parole est à M. Jean Lassalle. Je reprendrai à mon compte tous les arguments que vient de présenter Michel Castellani – je ne sais pas si vous l’avez écouté, mais moi, oui –, ce qui m’évitera de les répéter.
Je ne comprends pas comment M. le Président de la République peut laisser ainsi passer son crédit politique – un crédit exceptionnel, qu’au cours de ma longue vie d’élu, je n’avais encore jamais vu –, sans prendre d’initiative majeure.
Si : il a pris l’initiative de lâcher des ours ! (Sourires.) Comment se fait-il qu’un homme aussi brillant et intelligent, que des millions ont été à suivre et sur le nom duquel vous avez été des centaines à vous faire élire, ne bouge pas pour redonner à la France un espace politique et financier digne de ce nom ? Pourquoi ne pas avoir immédiatement engagé un grand projet en matière d’énergie solaire ? Dans ce domaine comme en matière d’énergie marémotrice, on est bien plus avancé qu’on veut bien le dire. Pourtant, on continue à faire du surplace avec des projets datant des années soixante, qu’on ne pourrait plus lancer aujourd’hui – car ne nous racontons pas d’histoire, on ne pourrait plus lancer Airbus aujourd’hui ! Quel rapport avec l’article liminaire ?