XVe législature
Session ordinaire de 2018-2019

Séance du mardi 02 octobre 2018

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (nos 1088, 1237).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de six heures trente-quatre minutes pour le groupe La République en marche, dont 257 amendements sont en discussion ; quatre heures vingt et une minutes pour le groupe Les Républicains, dont 339 amendements sont en discussion ; une heure cinquante-quatre minutes pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, dont 63 amendements sont en discussion ; deux heures trente-huit minutes pour le groupe UDI, Agir et indépendants, dont 88 amendements sont en discussion ; deux heures cinquante-deux minutes pour le groupe Socialistes et apparentés, dont 84 amendements sont en discussion ; une heure cinquante-six minutes pour le groupe La France insoumise, dont 52 amendements sont en discussion ; une heure cinquante-trois minutes pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, dont 66 amendements sont en discussion ; dix minutes pour les députés non inscrits, dont 77 amendements sont en discussion.
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles du projet de loi, s’arrêtant, dans la discussion des amendements portant article additionnel après l’article 29 bis , à l’amendement no 1790 rectifié.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1790 rectifié et 2434.
La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour soutenir l’amendement no 1790 rectifié.
Il est défendu. La parole est à M. Régis Juanico, pour soutenir l’amendement no 2434. Cet amendement vise à renforcer le volet associatif du projet de loi PACTE. Comme vous le savez, 180 000 associations emploient environ 2 millions de salariés dans notre pays. Il s’agit d’un secteur économique extrêmement dynamique, même si nous avons été alertés ces derniers jours par le rapport annuel de Recherches et solidarités, qui, sur la base de chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques – INSEE –, nous indique que 25 000 associations, dans les secteurs de la culture, de la santé et du sport, ont disparu en 2017 – c’est une première depuis de très longues années –, et que l’emploi associatif a également tendance à se tasser.
Bien que rien ne les empêche juridiquement de réaliser des bénéfices, les associations disposent en général de peu de fonds propres, ce qui peut constituer un obstacle à leur développement. Cette situation est liée à la nature de leur activité, essentiellement à but non lucratif. Le principe de l’excédent raisonnable, inscrit dans notre droit, consiste à conserver une partie des fonds octroyés dans le cadre d’un financement public.
Notre amendement intègre la possibilité de conserver un éventuel excédent trop versé, au-delà d’un bénéfice raisonnable dans la définition de la subvention. Il reprend en cela une possibilité ouverte par la circulaire du Premier ministre Manuel Valls, du 29 septembre 2015 relative aux nouvelles relations entre les pouvoirs publics et les associations.
La parole est à M. Jean-Noël Barrot, rapporteur thématique de la commission spéciale, pour donner l’avis de la commission. Ces amendements visent à faciliter le financement des associations, sujet proche de la proposition avancée tout à l’heure sur les prêts au sein des fédérations d’associations. Comme pour celle-ci, je suggère de reporter l’examen de ces amendements à la seconde lecture, voire à un texte plus large sur les associations. J’émets donc un avis défavorable à leur adoption. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, pour donner l’avis du Gouvernement. Même avis. La parole est à M. Fabien Di Filippo. Je ne suis pas d’accord avec le rapporteur sur ce sujet, car je partage le constat de mes collègues du MODEM et du groupe socialiste sur l’urgence de la cause associative. Il y a toujours plus de normes et de contraintes pour nos associations, qu’elles viennent des fédérations ou de l’État. Les dirigeants doivent assumer une responsabilité de plus en plus écrasante, et on demande aux associations d’adopter un fonctionnement sans cesse plus professionnel.
Que leur a-t-on imposé depuis le début de ce quinquennat ? La suppression des contrats aidés sans baisse de charges en contrepartie, ce qui est le point le plus douloureux.
Il a raison ! Le budget du Centre national pour le développement du sport, le CNDS, a été divisé par deux, ce qui devait être indolore mais a fait énormément de mal aux associations sportives. D’autres décisions ont également eu un impact négatif, comme la suppression de la réserve parlementaire.
Il est donc urgent de faire un geste pour nos associations, qui sont le premier indicateur de la vitalité de nos territoires. Leur dynamisme influe sur l’emploi et sur le lien social, deux éléments très importants aujourd’hui.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Il a raison !
(Les amendements identiques nos 1790 rectifié et 2434 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2682 rectifié. La commande publique est un levier d’entraînement puissant pour l’économie de nos territoires et de notre pays. Si nous voulons une société et une économie vertueuses, les pouvoirs publics doivent donner l’exemple. Ainsi, la commande publique doit être en adéquation avec les impératifs de notre temps.
Par cet amendement, nous proposons de faire de la commande publique un levier pour accélérer la transition écologique, développer l’activité économique locale et promouvoir les entreprises de l’économie sociale et solidaire. À titre d’exemple, il devrait être non seulement possible, mais obligatoire, de privilégier les paysans bios locaux pour approvisionner les cantines scolaires.
Cet amendement propose donc que les marchés publics favorisent les entreprises de l’économie sociale et solidaire, les produits et services écologiques, ainsi que l’activité locale.
Quel est l’avis de la commission ? Cher collègue, nous partageons évidemment votre objectif. D’ailleurs, le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous prévoit que les cantines soient servies en produits bios et locaux.
Votre amendement touche au cadre plus large des marchés publics et à la représentation dans ceux-ci des entreprises issues de l’économie sociale et solidaire.
Le droit existant satisfait votre demande, puisque les articles 30, 37 et 38 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics mentionnent explicitement l’économie sociale et solidaire. L’article 30 se lit ainsi : « La nature et l’étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale. » ; l’article 37 dispose que « Des marchés publics peuvent être réservés par un pouvoir adjudicateur […] aux entreprises de l’économie sociale et solidaire […] » ; enfin, l’article 38 prévoit que « Les conditions d’exécution d’un marché public peuvent prendre en compte des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, à l’environnement, au domaine social ou à l’emploi, à condition qu’elles soient liées à l’objet du marché public. »
Même si cela n’est pas satisfaisant et qu’il faille aller plus loin, 10 % des marchés publics passés par l’État et 20 % de ceux passés par les collectivités territoriales incluent désormais des clauses sociales et environnementales, selon l’Observatoire économique de la commande publique. L’évolution du code de la commande publique, annoncée par Mme la secrétaire d’État, que je salue, permettra peut-être de faire de nouveaux progrès, même si le droit actuel n’oublie pas l’économie sociale et solidaire. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Je comprends bien l’objectif de l’amendement, mais cette matière est délicate puisque nous nous situons dans le cadre du droit communautaire et que nous ne pouvons pas discriminer directement un certain type d’entreprises, notamment à raison de leur localisation.
Il est possible, comme l’a rappelé le rapporteur, de prévoir des clauses sociales et environnementales, pour autant qu’elles soient bien liées à l’objet du marché. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 2682 rectifié n’est pas adopté.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 1462, 1464, 2427 et 1467, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean Terlier, pour soutenir l’amendement no 1462.
Je défendrai en même temps les amendements nos 1462, 1464 et 1467. Nous vous en remercions, monsieur Terlier. Je vous avoue avoir été assez sensible au discours de la présidente de la commission spéciale sur le fait que ce texte permettait de favoriser le rebond de nos entreprises en difficulté. J’ai défendu un amendement à peu près similaire à l’article 15. Ma proposition vise à sensibiliser le Gouvernement à une situation qui me semble assez problématique pour ces sociétés en difficulté, en raison de l’ordonnance de 2015, en particulier de ses articles 45 et 51. Ceux-ci ne permettent pas que ces entreprises, en procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, puissent soumissionner à des marchés publics. Ces dispositions de l’ordonnance imposent des conditions de garantie financière tellement drastiques que ces entreprises n’ont ni la possibilité de soumissionner, ni même celle d’être retenues par des collectivités locales qui le souhaiteraient.
L’amendement no 1462 vise à supprimer ces dispositions pour permettre à nos entreprises en difficulté de pouvoir soumissionner à un certain nombre de marchés publics – je reprends l’exemple, que j’avais utilisé à l’article 15, de la petite boulangerie qui veut soumissionner à un marché public de cantine scolaire – et pour autoriser les collectivités territoriales à accepter ces entreprises comme partenaires.
L’amendement no 1464 vient d’être défendu.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 2427.
Cet amendement, proposé par notre collègue Boris Vallaud, traduit notre interrogation sur les PME qui traversent une période de mutation les rendant fragiles et qui, pour certaines d’entre elles, dépendent essentiellement des marchés publics – dans les secteurs des services et du bâtiment et des travaux publics, BTP, le chiffre d’affaires d’un grand nombre d’entreprises dépend pour moitié, voire pour les deux tiers, des marchés publics. Or les procédures de redressement judiciaire les en excluent.
Dans l’esprit de la loi, qui ouvre des libertés, des facultés et des souplesses, nous faisons une proposition très constructive, qui vise à permettre aux entreprises, sous l’examen du juge, de continuer à soumissionner aux marchés publics, afin d’assurer leur pérennité.
Sans cette capacité de soumissionner aux marchés publics, beaucoup d’entreprises seront condamnées à mort. Bien sûr, il faut faire preuve de discernement, car il ne s’agit en aucun cas d’exposer la collectivité ou la puissance publique passant le marché. Dans certains cas, la fragilité de l’entreprise est temporaire et son redressement passe par l’accès aux marchés publics. Voilà le sens de notre démarche.
L’amendement no 1467 a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Notre objectif prioritaire doit être de faciliter l’accès des entreprises, notamment des PME, à la commande publique, et, de ce point de vue, il faut saluer les annonces faites hier par Mme la secrétaire d’État. Depuis hier, 1er octobre, en effet, les marchés de plus de 25 000 euros sont dématérialisés et, très bientôt, ceux de moins de 100 000 euros adressés aux PME innovantes se passeront de mise en concurrence, ce qui facilitera l’accès de ces entreprises aux marchés publics.
Le deuxième objectif est de faire en sorte que jamais l’État, les collectivités locales ou le monde hospitalier ne mettent en difficulté nos PME. Il faut, là aussi, saluer les annonces qui ont été faites : à partir du mois de décembre, 20 % d’acompte seront réglés par les acheteurs publics et la retenue de garantie diminuera de 5 à 3 %.
À cela s’ajoute un amendement de Jean-Paul Mattei, voté en commission spéciale, qui met fin aux ordres de service à zéro euro, pratique condamnable des acheteurs publics qui consistait à ajouter des prestations dans ces marchés publics sans avoir à les payer.
S’ajoutent encore les dispositions dont nous avons discuté tout à l’heure, en particulier l’affacturage inversé public, pour faire en sorte que les entreprises, notamment les PME, soient réglées dans les temps lorsqu’elles ont affaire à des acheteurs publics.
Je comprends l’objectif de ces amendements – soutenir par la commande publique les entreprises en difficulté –, mais ils risquent de compromettre la continuité du service public. Je vous demande donc de les retirer.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Je suis tout à fait d’accord avec le rapporteur.
Je rappelle, par ailleurs, que si la durée du marché public est inférieure à la durée de la période d’observation, rien n’empêche une entreprise de soumissionner. L’impossibilité prévue par l’ordonnance du 23 juillet 2015 ne s’applique donc que dans les cas où la durée du marché excède cette période d’observation.
L’amendement no 2427 propose de s’en remettre au juge, mais il nous semble illusoire de penser qu’un tribunal pourrait, en avance, s’engager sur l’issue de la période d’observation du redressement judiciaire.
Outre ces raisons, il existe un risque de rupture de la continuité du service public – vous en avez débattu il y a quelques jours, et il me semble que M. le ministre Bruno Le Maire avait pris l’exemple des fournisseurs de cantines scolaires. Le code des marchés publics ne peut faire courir ce risque. Avis défavorable.
Retirez-vous vos amendements, monsieur Terlier ? En tout cas, nous ne retirons pas le nôtre ! Je l’ai bien noté, monsieur Potier, mais je voulais d’abord interroger M. Terlier. Sa réponse sera peut-être différente de la vôtre. La majorité retire ses amendements, l’opposition maintient les siens : c’est dans l’ordre des choses ! J’ai entendu les arguments de M. le rapporteur et Mme la secrétaire d’État. Bien que mes amendements soient des amendements d’appel, nous devons veiller à ce que le système n’instaure pas une double peine. Lorsque des entreprises connaissent des difficultés, on cherche à les soutenir mais, en même temps, on les empêche d’accéder à un certain nombre de marchés publics ! Il faut trouver un dispositif plus fin, qui laisserait à ces entreprises la possibilité de soumissionner aux marchés publics tout en donnant aux collectivités territoriales les informations qui leur permettront de décider, en toute connaissance de cause, si elles choisissent de contractualiser avec ces entreprises.
Je retire mes amendements, en espérant que les indications de Mme la secrétaire d’État seront suivies d’effet.
L’espoir fait vivre ! En marche arrière !
(Les amendements nos 1462, 1464 et 1467 sont retirés.)
(L’amendement no 2427 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1574 et 1759.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 1574.
Il est défendu. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 1759. Défendu également. Quel est l’avis de la commission ? Ces amendements nous paraissent satisfaits, dans la mesure où l’article 112-2 du code monétaire et financier doit s’appliquer aux marchés publics. Si tel n’était pas le cas, il faudrait chercher pourquoi. En principe, je le répète, ces amendements sont totalement satisfaits par le droit existant.
(Les amendements identiques nos 1574 et 1759, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 1137. Vous allez introduire la notion de responsabilité sociale et environnementale – RSE – dans le code civil. Mon amendement permettrait d’optimiser cette introduction, avec des effets bénéfiques pour les entreprises : la prise en compte de critères sociaux et environnementaux permettrait d’attribuer une partie des marchés publics aux entreprises de chez nous. Quel est l’avis de la commission ? Même avis que précédemment. Le droit existant fait sa place à l’économie sociale et solidaire, et donc, par extension, à la RSE. On observe bel et bien une augmentation du nombre de clauses sociales et environnementales, même si elle est lente. Par ailleurs, s’il fallait un jour faire évoluer la législation en la matière, ce serait peut-être dans le cadre d’une discussion sur le droit de la commande publique – par exemple, lorsque nous discuterons du code de la commande publique comme annoncé par le Gouvernement. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, je lui donnerai un avis défavorable.
(L’amendement no 1137, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Nous en venons aux amendements portant article additionnel avant l’article 30.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1514 et 2083.
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 1514.
Cet amendement vise à inscrire dans la loi les missions d’accompagnement aux transitions énergétique et numérique des territoires par la Caisse des dépôts et consignations – CDC. Nous savons que cette dernière poursuit déjà de tels objectifs, mais les inscrire dans la loi permettrait de renforcer leur visibilité et de souligner la nécessité de faire de ces missions l’un des axes majeurs de l’activité de la Caisse. Très bien ! La parole est à M. Anthony Cellier, pour soutenir l’amendement no 2083. Il semblerait que nos idées convergent, puisque mon amendement est identique à celui que vient de présenter M. Pauget. La Caisse des dépôts et consignations contribue au développement économique, au niveau local comme national, dans de nombreux domaines tels que l’emploi, la politique de la ville ou encore le développement durable. Il s’agit ici d’inscrire dans la loi la contribution de la Caisse des dépôts et consignations en matière de transition énergétique et de transition numérique, deux domaines d’avenir qui sont sources de développement. Quel est l’avis de la commission ? Ces missions sont d’ores et déjà remplies par la Caisse des dépôts. J’ai tendance à considérer que ces amendements visent à apporter une précision rédactionnelle et qu’ils n’ajoutent pas un bloc supplémentaire aux missions assumées par la Caisse. Je m’en remets donc à la sagacité de notre assemblée. Sagesse. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Ces missions pourraient être mieux reconnues, mais elles sont déjà assumées de façon massive par la Caisse des dépôts et consignations. En matière de transition énergétique, par exemple, la Caisse gère des fonds d’épargne dédiés à la rénovation thermique des bâtiments publics et des logements sociaux. En matière de transition numérique, elle intervient en appui des investissements des collectivités locales pour assurer la couverture du territoire en très haut débit. Dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir, les PIA ! Nous ne parlons pas de la même chose, madame la secrétaire d’État ! Le Gouvernement apporte bien évidemment un grand soutien à ces missions.
Les amendements identiques nos 1514 et 2083 n’ont pas de portée normative : le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de l’Assemblée nationale.
Très bien ! Ne démissionnez pas, madame la secrétaire d’État ! (Sourires.)
(Les amendements identiques nos 1514 et 2083 sont adoptés.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et LR. – M. M’jid El Guerrab applaudit également.)
La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1157. Cet amendement vise à améliorer et à diversifier les financements des petites et moyennes entreprises françaises implantées à l’étranger.
Alors qu’on estime entre 2 et 2,5 millions le nombre de Français résidant à l’étranger, près de deux Français installés à l’étranger sur dix étaient des créateurs d’entreprises en 2013, contre seulement un sur dix en 2003, selon une étude détaillée réalisée par la chambre de commerce et d’industrie de Paris. Les Français, en particulier les entrepreneurs, réussissent de plus en plus à l’étranger. Malgré ce succès croissant, ils ont, eux aussi, besoin d’être soutenus et accompagnés, notamment financièrement. De nombreux entrepreneurs français soulignent les difficultés qu’ils rencontrent pour obtenir des financements en raison de dispositifs existants trop complexes, trop lointains, avec une somme de garanties exigées telle qu’il est quasiment impossible d’obtenir une aide.
Alors que la Caisse des dépôts participe au financement de l’investissement des entreprises locales et nationales, il paraîtrait judicieux qu’elle accompagne, à travers l’octroi de prêts, les TPE, PME, start-up et ETI créées par les entrepreneurs français installés à l’étranger. Mon amendement vise à mettre en place une expérimentation, qui nous permettrait de mesurer le potentiel d’une telle mesure en termes de création et de portage de projets par nos concitoyens établis à l’étranger.
Quel est l’avis de la commission ? La mission de la Caisse des dépôts et consignations n’est pas d’accorder des prêts aux particuliers, comme la lecture de votre amendement pourrait le laisser penser. Vous avez précisé que ces prêts pourraient être destinés aux PME et aux TPE, mais cela rentre sans doute dans le périmètre des actions déjà réalisées par la Caisse. Votre amendement étant satisfait, je vous propose de le retirer. Quel est l’avis du Gouvernement ? La Caisse des dépôts intervient essentiellement en fonds propres ; elle n’a pas de compétence en matière de prêts aux particuliers ou aux entreprises, a fortiori localisées à l’étranger. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, je lui donnerai un avis défavorable. La parole est à M. M’jid El Guerrab. Cet amendement me tient à cœur, mais je sais que les députés non inscrits n’ont plus beaucoup de temps de parole : j’essaierai donc d’être très bref, même s’il s’agit d’un sujet très important.
Aujourd’hui, le Président de la République a rassemblé l’ensemble des entreprises du monde – en tout cas, celles qui comptent. Il leur a demandé : «
Invest in France ». Pour ma part, je propose de demander à nos jeunes de « conquer the world »,…
In French, please !
I don’t speak English ! …c’est-à-dire de partir à l’étranger, aidés par la France, et de porter des projets afin de faire rayonner notre pays.
Je sors d’une réunion au Quai d’Orsay sur le rayonnement de la France dans le monde. Aujourd’hui, à l’étranger, nos entrepreneurs ne sont pas véritablement aidés. Les structures existantes, comme Business France, ne permettent pas à nos entrepreneurs de prendre des petits tickets, de créer leur entreprise et de faire rayonner notre pays dans le monde. Je maintiens donc mon amendement.
(L’amendement no 1157 n’est pas adopté.) La parole est à M. Régis Juanico, pour soutenir l’amendement no 1637. Cet amendement s’inscrit en cohérence avec la création de la Banque des territoires, dont le but est notamment d’accompagner les collectivités territoriales dans leur investissement. Il s’agit de préciser que la Caisse des dépôts a un bien un rôle central à jouer dans le financement de tels projets en facilitant l’accès à l’emprunt des collectivités, d’autant que celles qui connaissent le plus de difficultés mais font face à de grands programmes d’investissements – la construction de crèches ou d’écoles, la rénovation urbaine – peinent parfois à trouver des prêteurs malgré un marché particulièrement favorable.
J’espère que cet amendement recueillera également un avis de sagesse de la part de la commission et du Gouvernement.
Quel est l’avis de la commission ? L’article L. 518-2 du code monétaire et financier, qui précise les missions de la Caisse des dépôts et consignations, dispose qu’elle « remplit des missions d’intérêt général en appui des politiques publiques conduites par l’État et les collectivités territoriales ».
Nous pouvions vraiment dire que les amendements identiques nos 1514 et 2083, que nous avons examinés il y a quelques instants, visaient à préciser les notions de développement durable et de transitions énergétique et numérique. Ce n’est pas le cas de l’amendement no 1637, qui comporte plus d’imprécisions, et ce pour deux raisons.
D’une part, cet amendement vise spécifiquement les investissements alors que l’article L. 518-2 du code monétaire et financier, qui vise les politiques publiques, me paraît un peu plus large et donc un peu moins contraignant pour l’activité de la Caisse des dépôts et consignations.
D’autre part, en précisant que la Caisse doit faciliter l’accès à l’emprunt et l’endettement des collectivités territoriales, nous ferions peser une autre contrainte sur la manière dont elle peut accompagner ces collectivités dans leurs politiques publiques.
Pour ces deux raisons, il me semble qu’il ne serait pas judicieux d’ajouter cette précision sur les missions de la Caisse.
(L’amendement no 1637, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) La commission spéciale m’a fait savoir qu’elle souhaitait une suspension de séance. De combien de temps, monsieur le rapporteur général ? Dix minutes suffiront, monsieur le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures, est reprise à vingt-deux heures dix.) La séance est reprise.
La parole est à M. Jacques Savatier, premier orateur inscrit sur l’article 30. Depuis le 28 avril 1816, sans interruption, et selon l’expression utilisée dès cette époque, la Caisse des dépôts et consignations est placée « de la manière la plus spéciale sous la surveillance et la garantie de l’autorité législative ». C’est très important ! Très important, en effet, et c’est pourquoi je cite cette phrase avec quelque solennité. Depuis plus de deux cents ans, la Caisse des dépôts a servi l’intérêt général, participé à la protection de l’épargne des ménages et a su résister dans les crises qu’a connues notre pays.
Au cours des quinze derniers mois – je fais un bond dans l’Histoire jusqu’à cette période plus récente –, sous la présidence de Gilles Le Gendre, d’abord, puis de Sophie Errante, et avec Gilles Carrez, nous avons représenté l’Assemblée nationale au sein de la commission de surveillance, avec nos collègues du Sénat. La surveillance du Parlement est donc bien effective.
Nous mesurons les responsabilités qui nous ont été confiées, tant les missions de la Caisse des dépôts ont été élargies au cours des siècles, et singulièrement au cours des deux dernières décennies.
Permettez-moi de rappeler certaines de ces missions. Ce sont d’abord les dépôts des notaires et l’épargne réglementée des Français : 265 milliards d’euros placés par 50 millions de Français qui font confiance au Livret A, lequel sert à financer le logement social. C’est aussi, avec la Caisse nationale de prévoyance – CNP –, l’un des leaders européens de l’assurance-vie. C’est encore la gestion des retraites d’un Français sur cinq et, bientôt, des moyens de la formation professionnelle. Ce sont un parc immobilier de 500 000 logements, des prêts au secteur public, des participations dans l’économie mixte, le contrôle de sociétés d’ingénierie au service des entreprises et des territoires et la présence aux côtés de l’État dans la Banque postale d’investissement et dans le groupe La Poste, première entreprise française par le nombre de ses salariés. C’est la gestion de délégations de services publics dans les stations de montagne et les parcs d’attractions – vous me pardonnerez de citer le Futuroscope. La Caisse des dépôts et consignations, c’est tout cela, mais c’est bien plus encore.
Au sein de la commission de surveillance, nous veillons à ce que la gestion soit performante, prudente et prenne en compte l’intérêt général. Attachés à la préservation de la spécificité de l’institution, nous sommes également conscients de la nécessité d’en adapter la gouvernance à l’évolution du contexte économique et social, ainsi qu’aux politiques publiques qu’elle soutient.
À cet effet, depuis le début de l’année, nous avons engagé une réflexion avec les représentants de l’État. Je tiens, monsieur le ministre de l’économie et des finances, à remercier vos services et votre cabinet pour leur disponibilité et leur écoute. Ce travail a permis de converger vers des mesures dont la plupart sont reprises dans votre projet de loi.
La commission de surveillance a toutefois fait connaître une appréciation divergente sur l’évolution de sa composition. Nous partageons, bien évidemment, la volonté de maintenir la Caisse des dépôts et consignations sous la surveillance du Parlement, mais également celle d’y associer les représentants du personnel, de viser la parité, de tenir compte de nouvelles modalités de contrôle du modèle prudentiel et de la nécessaire clarification des responsabilités.
Lors de la commission spéciale, j’ai soutenu l’amendement présenté par Gilles Carrez, qui proposait une adaptation du texte pour le mettre en conformité avec les conclusions des travaux de la commission.
(« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) Nous n’avons pas été suivis mais nous avons été entendus (« Oh ! » sur les mêmes bancs) : l’initiative que vous avez prise, monsieur le ministre, nous a permis de rapprocher les points de vue, tout en respectant les préoccupations de chacun. Je remercie également la présidente de la commission, le rapporteur général et Jean-Noël Barrot, qui ont également œuvré pour trouver cet accord.
Un amendement, cosigné avec Sophie Errante, qui le présentera tout à l’heure, et Gilles Carrez – il n’est pas présent mais m’a demandé de préciser qu’il avait œuvré dans cette direction –, traduit cette évolution que nous appelions de nos vœux. Je souhaite qu’à l’issue de nos débats, cette proposition soit acceptée pour que nous disposions d’une institution au service des politiques publiques, dont la gouvernance aura été adaptée aux nouvelles missions qui lui seront confiées, tout en demeurant fidèle aux principes qui ont présidé à sa création, le 28 avril 1816.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.) La parole est à Mme Valérie Rabault. Je souhaite rebondir sur les propos qui viennent d’être tenus, car ils me paraissent extrêmement importants. La Caisse des dépôts et consignations est le seul organe placé sous le contrôle du Parlement et ce, depuis 1816, ainsi que notre collègue l’a rappelé. Ce n’est donc pas une création récente : cela répond à la volonté, depuis bien longtemps, du législateur de garder sous son contrôle la surveillance de l’épargne des Français. Dans votre projet de loi, vous nous proposez une vision un peu différente puisque vous souhaitez que Bercy reprenne la main et nomme les personnalités qualifiées. Cela serait nouveau et trahirait l’histoire, depuis plus de deux cents ans, de la Caisse des dépôts et consignations.
C’est pour cette raison que le groupe Socialistes et apparentés a déposé un amendement qui viendra prochainement en discussion. Une fois n’est pas coutume, il s’agit d’un copier-coller – et nous l’avons bien signalé – de l’amendement initialement déposé par Gilles Carrez, qui vise à affirmer un certain nombre de principes : la Caisse des dépôts qui reste placée sous le contrôle du Parlement ; la parité dans la commission de surveillance ; la sortie de la Banque de France qui, exerçant un rôle de contrôle via l’ACPR – Autorité de contrôle prudentiel et de résolution –, est un peu juge et partie, ce qui est compliqué ; que les personnalités qualifiées soient désignées par l’Assemblée nationale et le Sénat. Je crois savoir, pour en avoir discuté avec M. Savatier, que vous avez trouvé une solution permettant d’atteindre ces objectifs, évitant ainsi de trahir l’histoire bicentenaire de la Caisse des dépôts et consignations. Vous avez, en effet, eu la tentation de reprendre le pouvoir sur la Caisse des dépôts et consignations – peut-être pas vous, monsieur le ministre, mais vos services ou, du moins, quelqu’un à Bercy.
La Caisse des dépôts et consignations fait aussi l’objet de plusieurs évolutions : elle entre dans un schéma nouveau, avec la Banque postale, sur la transformation capitalistique de la CNP. Deux points retiennent notre attention sur ce sujet, le premier portant sur l’offre capitalistique déposée. Là aussi, monsieur le ministre, nous souhaitons vous entendre de manière très précise : considérez-vous que le dépôt d’une offre de rachat est obligatoire ? Les critères nous placent dans une zone grise ; certains pourraient considérer que ce dépôt d’offre de rachat est obligatoire.
Deuxième point qui nous paraît extrêmement important, nous ne voulons pas que la restructuration capitalistique enclenchée avec la CNP, entre la Caisse des dépôts et consignations, d’un côté, et La Banque Postale, de l’autre, donne lieu dans un an ou deux – on sait comment cela se passe – à une cession de Banque Postale Asset Management. La Banque Postale récupérant une activité d’assurance via la CNP, certains pourraient être tentés d’acheter Banque Postale Asset Management. Nous souhaitons donc que le capital de celle-ci reste détenu par La Banque Postale à une large majorité – aujourd’hui, La Banque postale en est actionnaire à 70 %.
J’entends bien que ces mouvements capitalistiques répondent à des objectifs précis pour maintenir un réseau – sur ce point, nous vous soutiendrons. En revanche, nous savons très bien que d’autres activités, telles que l’
asset management , par exemple, pourraient intéresser un certain nombre de concurrents. Nous souhaitons donc que soit affirmé ici, à l’Assemblée nationale, que ces activités ne sauraient être cédées. La parole est à M. Michel Castellani. Je prends la parole non pas pour défendre l’intérêt de la Caisse des dépôts et consignations – cela a été fait – mais pour évoquer, à mon tour, la composition de la commission de surveillance. Tout d’abord, la nomination de deux représentants du personnel nous agrée, car elle va dans le bon sens, ne serait-ce que parce qu’elle contribue à moderniser le dialogue social dans l’institution.
Moins heureux est l’article que vous nous proposez, qui prévoit la réforme de la commission de surveillance en modifiant le poids relatif des parlementaires dans la représentation. De plus, il accentue encore plus la tutelle gouvernementale à travers la nomination de quatre personnalités. Nous ne pouvons que regretter la direction prise, qui réduit de fait l’indépendance de l’institution.
La parole est à M. Stéphane Peu. Le projet de loi PACTE entend profondément modifier les attributions de la Caisse des dépôts et consignations, véritable poumon de la vie économique de notre pays. Aussi, vous comprendrez aisément que ce texte suscite nos plus vives inquiétudes. Jacques Savatier l’a souligné, la Caisse des dépôts est une vieille dame : elle a plus de deux cents ans. Il s’agit d’un établissement public spécial, placé depuis l’origine sous la protection et l’autorité du législateur pour garantir les différentes formes d’épargne populaire que la Caisse des dépôts centralise, afin de les préserver à la fois de tout risque de détournement spéculatif par les marchés financiers et de toute tentation prédatrice du Gouvernement. Nous parlons ici d’une institution particulièrement connue et appréciée des Français ; elle est un relais présent sur tout le territoire à travers ses directions régionales et compte aujourd’hui des milliers de salariés.
Elle constitue également une spécificité française, enviée dans le reste du monde. La Caisse des dépôts est un service public à part entière, aux antipodes d’un quelconque fonds d’investissement. À de multiples reprises, elle a démontré son efficacité, œuvrant au service de l’intérêt général et du développement économique du pays. Nous considérons que c’est un modèle, qui doit être chéri et développé.
Or, de notre point de vue, le projet de loi ne va pas dans ce sens. D’abord, nous constatons que la nouvelle composition de la commission de surveillance prévue dans le texte, si celui-ci reste en l’état, affaiblira le contrôle du Parlement en augmentant le nombre de représentants de l’exécutif, nommés à la discrétion du ministre en charge de l’économie.
Pas faux ! En parallèle, sous couvert de dispositions de toilettage et de clarification relatives à la gouvernance de La Poste, votre gouvernement a pour objectif de permettre à la Caisse des dépôts de prendre le contrôle de La Poste tout en se rapprochant de l’opérateur CNP Assurances. C’est une façon habile pour l’État de se détourner de l’actionnariat majoritaire de La Poste et ainsi, nous le craignons, de préparer sa privatisation. Qui plus est, ce rapprochement n’est pas sans porter à conséquence sur la nature des fonctions de la Caisse des dépôts, qui se trouvera désormais à la tête d’un conglomérat aux activités multiples et diverses.
Ces bouleversements ne s’opèrent pas sans raison. Avec l’assujettissement de la Caisse des dépôts à la surveillance de l’Autorité du contrôle prudentiel et de résolution prévu par le projet de loi, il faut s’attendre à voir ce futur puissant groupe, constitué de la Caisse des dépôts et consignations, de La Banque Postale, de la CNP, de la Banque publique d’investissement, dont les amendements de la loi PACTE modifient également la structure, passer, avec son bilan de 1 000 milliards d’euros, sous le contrôle direct de la Banque centrale européenne, comme tous les autres groupes bancaires européens dits systémiques. Dès lors, comment ne pas considérer cette restructuration des institutions financières publiques de notre pays comme une étape importante dans la soumission de la société française aux marchés financiers et à la Banque centrale européenne, consacrant ainsi une perte de souveraineté de notre pays sur le plan financier ?
De longue date, les députés communistes proposent de constituer un pôle financier public digne de ce nom autour d’une mission commune : un service public du crédit pour financer les investissements d’intérêt général dans notre pays. Ce projet de loi ne va pas dans ce sens, bien au contraire : c’est la source de nos inquiétudes et ce sera l’origine de nos amendements, nombreux, sur ces différents articles.
La parole est à M. Julien Aubert. La Caisse des dépôts et consignations est le bras armé de l’État. L’un des aspects du sujet est son lien sui generis avec le Parlement. Certains amendements corrigeront cela ; ils vont dans le bon sens.
Par contre, la disparition du contrôle de la Cour des comptes signifie bel et bien que la Caisse des dépôts ne gérera plus d’argent public, car qui dit argent public dit contrôle de la Cour des comptes. Nous basculons, en réalité, dans un autre système : le système bancaire, beaucoup plus proche d’un établissement bancaire normal. Pour ma part, je considère que la Caisse des dépôts doit conserver sa spécificité. Elle est le bras armé de l’État, elle est là pour penser le long terme. Nous savons aussi les travers que peuvent avoir certains établissements bancaires dans la manière de concevoir l’économie.
Ce choix n’est donc pas anodin. Il ne s’agit pas seulement d’une mesure technique consistant à modifier quelque peu la composition d’un comité de surveillance ; c’est bel et bien le basculement d’un monde où la Caisse des dépôts est au service de l’État à un univers où la Caisse des dépôts sera un établissement financier comme les autres. Je crains que demain, faute de bras armé, l’État dans l’économie ne devienne manchot.
Bravo ! La parole est à M. Charles de Courson. La Caisse des dépôts, dans sa commission de surveillance, doit être réformée. Merci ! Nul ne peut le contester, tout simplement parce que la présence du gouverneur de la Banque de France n’est plus compatible avec le contrôle, lui-même étant responsable du contrôle. On ne peut pas être juge et partie ; il faut donc le sortir et faire entrer des représentants du personnel au sein de la commission de surveillance.
Ce qui ne va pas, dans la composition de la commission de surveillance proposée dans l’article 30, c’est que l’on voit bien le grand rêve de la direction du Trésor, qui n’a jamais digéré la loi de 1816 !
(Sourires.)
D’où vient la loi de 1816 ? Il faut le dire et le répéter : Napoléon a pillé les caisses publiques pour financer ses aventures guerrières, qui ont fini par une catastrophe historique. C’est pour cela qu’en 1816, il a été décidé que le Parlement ferait écran et protégerait l’épargne des Français. Cela est toujours vrai, mes chers collègues, car tout gouvernement est tenté, un jour ou l’autre, étant toujours en difficulté, de piller l’épargne des Français pour combler les trous de ses budgets ! Il n’y a rien là de nouveau sous le soleil !
La grande erreur du Gouvernement – je crois qu’il l’a reconnu, d’après les discussions que nous avons eues avec M. le ministre –, c’est d’avoir cédé à la direction du Trésor en faisant passer le nombre de ses représentants de un à cinq. Outre le directeur du Trésor, qui sera toujours là, le texte gouvernemental prévoit quatre experts nommés par le ministre de l’économie.
Qui va vendre au ministre d’excellents candidats ? La direction du Trésor, bien sûr ! Il y aura donc cinq représentants de la direction du Trésor sur quinze membres de la commission.
Si, qui de surcroît, deux des trois représentants de l’Assemblée nationale et un des deux du Sénat appartiennent à la majorité – en général, on se partage cela d’une façon équitable –, avec les membres nommés par le Président de l’Assemblée et celui du Sénat, il y a un vrai risque que l’exécutif domine totalement la commission, pour peu les parlementaires de la majorité ne lui résistent pas. On voit bien que la composition qu’on nous propose est totalement inadaptée. Notre groupe a donc déposé un amendement, et il y a aussi l’amendement du « trio », soit nos trois représentants à la commission de surveillance, qui revient sur ce sujet et auquel je me rallierai avec plaisir.
Il y a un deuxième débat : celui des compétences. Au fond, à part sa mission de surveillance, la commission a très peu de compétences. C’est donc à raison que le texte gouvernemental renforce ces compétences, mais je suis de ceux qui pensent que cette commission de surveillance devrait se transformer en un vrai conseil d’administration, doté des pouvoirs d’un conseil d’administration.
Reste la nomination du directeur général, poste actuellement à la discrétion du Gouvernement. On ne touche pas à ce statut, tout le monde rêvant d’être directeur général de la Caisse des dépôts ! Sur ce point, vous êtes un peu conservateur, monsieur le ministre, si vous avez progressé sur les deux autres. Il serait logique que la commission de surveillance devenue un vrai conseil d’administration puisse proposer et choisir un candidat. Ce serait la solution la plus logique pour protéger l’épargne des Français. Nous vous proposerons donc un certain nombre d’amendements visant à renforcer les pouvoirs du conseil de surveillance.
Un dernier point me paraît d’une importance considérable : le rapprochement entre la Caisse des dépôts et le groupe La Poste. Cela fait des années que les présidents successifs du groupe La Poste rêvent d’intégrer la CNP dans leur groupe. Ce n’est pas une si mauvaise idée : tous les groupes bancaires se sont diversifiés dans la bancassurance et les groupes d’assurance dans l’assurance bancaire. Cela serait conforme à une certaine logique commerciale du point de vue de la distribution des produits de la CNP – notre collègue Savatier et nos autres représentants à la commission de surveillance reviendront sur ce point.
Le problème, c’est que l’État n’a pas le sou. La logique eût été qu’il dote le groupe La Poste de quelques milliards pour lui permettre de racheter sa part de la Caisse des dépôts. Or, ce qui est proposé, c’est de passer par des échanges de titres pour que l’État n’ait rien à sortir de sa poche. Mais, de ce fait, le groupe La Poste va devenir la filiale de la Caisse des dépôts. Je trouve que l’on n’a pas assez réfléchi, en adoptant en commission l’amendement gouvernemental qui a introduit cette modification : n’est-on pas en train de changer la nature de la Caisse des dépôts, de la transformer en une holding d’État à la tête d’un conglomérat ? Il faudrait avoir une vraie réflexion sur les conséquences à long terme de cette affaire. Mais j’anticipe sur les articles suivants.
S’agissant de l’article 30, nous nous rallierons à la position des trois sages que nous avons désignés pour nous représenter à la commission de surveillance.
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 766, 1769, 1846 et 2002, tendant à supprimer l’article.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 766.
Monsieur le ministre, votre proposition originelle d’article 30 risquait de poser de sérieuses difficultés à la Caisse des dépôts et consignations, à deux titres. D’abord, elle remettait radicalement en cause l’indépendance de la CDC. Et puis, il y a un deuxième élément qui ne me semble pas avoir été beaucoup évoqué : la CDC est opérateur d’origine sur les plans d’investissements d’avenir, PIA. Comment peut-on être opérateur avec des fonds de l’État sur des missions telles que vous les avez définies dans le cadre des PIA, avec une commission de surveillance composée quasi majoritairement d’experts désignés par l’État ? Il y avait là un vrai problème juridique qui affaiblissait votre texte.
C’est pourquoi le groupe des Républicains se rallie à l’amendement de Sophie Errante, Jacques Savatier et Gilles Carrez, qui a beaucoup travaillé sur le sujet et qui connaît bien le fonctionnement de cette maison après des années d’expertise au sein de la CDC, et je retire purement et simplement l’amendement no 766 au nom du groupe.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
(L’amendement no 766 est retiré.) La parole est à M. Ludovic Pajot, pour soutenir l’amendement no 1769. Défendu ! La parole est à M. Jean-Louis Masson, pour soutenir l’amendement no 1846. Il est un peu compliqué de comprendre l’utilité de cette réforme, si ce n’est qu’on y constate la volonté de l’exécutif d’étendre toujours sa prééminence. Voilà pourquoi nous proposons la suppression de cet article. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 2002. Vous souhaitez modifier la composition de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations en accroissant encore le nombre des représentants de l’État directement nommés par Bercy, cela sous prétexte de moderniser la composition de la commission. On essaie de nous rassurer en nous disant que cette recomposition respectera son identité, notamment le rôle spécifique confié par la loi au Parlement.
Je vous avoue que je vois assez mal en quoi modifier ainsi la composition de la commission de surveillance contribuerait à sa modernisation. L’exposé des motifs ne me convainc pas, ne faisant que masquer la volonté de Bercy de mettre la main sur cette institution historiquement placée sous le contrôle du Parlement. Je me permets de le rappeler, la CDC est au service de l’intérêt général et du développement économique du pays et si elle doit, bien sûr, veiller à s’adapter à l’évolution du contexte économique et social, c’est uniquement dans la poursuite de cet objectif de service.
Son adaptation à de meilleurs standards en matière de gouvernance d’entreprise, défendue par votre gouvernement, me semble parfois un peu hypocrite. Je ne crois pas qu’on dirige une institution publique de la même manière qu’une grande entreprise.
L’introduction d’une parité forcée des membres de cette commission est la cerise sur le gâteau. Je dois avouer que je suis assez sceptique : la discrimination positive n’a jamais été un succès. Le recrutement doit se faire avant tout sur les compétences. Que l’on se rassure, les femmes compétentes ne manquent pas !
Voilà pourquoi je propose la suppression de cet article.
Quel est l’avis de la commission ? Je voudrais, à mon tour, saluer le travail des commissaires surveillants Sophie Errante, Gilles Carrez et Jacques Savatier, qui, non seulement consacrent une partie importante de leur temps à représenter cette assemblée à la commission de surveillance, mais en plus ont travaillé en lien avec le Gouvernement sur la réforme de la Caisse. Ils ont aussi, dans le cadre des discussions de la commission spéciale, largement travaillé à trouver une solution d’équilibre.
Je voudrais saluer aussi l’ambition de M. le ministre et de Mme la secrétaire d’État de créer, avec la CDC, un nouveau pôle financier public qui puisse servir d’appui à toutes les politiques publiques dont il aura la responsabilité.
Je voudrais ensuite indiquer que le texte du Gouvernement ne semble pas tant prévoir un transfert de souveraineté de la commission de surveillance vers l’État, que du directeur général de la Caisse vers la commission de surveillance. La commission de surveillance, qui disposait essentiellement d’un pouvoir consultatif, aura désormais un pouvoir délibératif : elle pourra rejeter le budget, rejeter le programme d’investissements ; elle fixera l’appétence au risque, les besoins en fonds propres de l’institution. Ses pouvoirs sont donc renforcés et, grâce à l’adoption d’un amendement du rapporteur général, elle disposera également des moyens de mener à bien ses missions.
En ce qui concerne la composition de la commission de surveillance, un certain nombre de ses membres vont en sortir et des personnalités qualifiées y entrer – en tout cas dans le texte du Gouvernement – ainsi que des représentants des salariés.
J’invite donc les auteurs de ces amendements de suppression à les retirer pour que nous puissions poursuivre la discussion sur la composition de la commission de surveillance et enrichir le texte des apports qui seront proposés.
La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances, pour donner l’avis du Gouvernement. Avis défavorable.
Monsieur de Courson, vous nous dites que le Gouvernement n’a jamais digéré les décisions de 1816. C’est vrai qu’il y a des choses datant de cette année que je n’ai jamais digérées
(Rires) : l’avis de Wellington demandant à Louis XVI de revoir le budget de la France parce qu’il n’était pas conforme aux attentes des autres pays européens ; la dissolution de l’école Polytechnique pour faits d’insubordination ; la suppression du droit au divorce, qui n’a été rétabli que quelques décennies plus tard. Tout cela, je ne le digère pas.
Mais la création de la Caisse des dépôts et consignations, je l’accueille avec un immense enthousiasme. C’est une des belles et grandes réalisations de l’année 1816. Et vous pourrez être tous fiers, ici, d’avoir, deux siècles plus tard, renforcé la Caisse des dépôts et consignations.
Ce que nous vous proposons aujourd’hui, sans pouvoir être soupçonnés de mauvaise foi – ce que je ne peux pas imaginer sur ces bancs –, c’est un clair et franc renforcement, non pas de la direction du Trésor, non pas de Bercy, objet de tous les fantasmes et de toutes les fantasmagories sur ces bancs, mais un clair, véritable et franc renforcement de la Caisse des dépôts et consignations, qui va devenir l’un des premiers pôles financiers publics au monde. Ça n’est pas rien ! Mille milliards d’euros de bilan consolidé ; un rapprochement avec La Poste, qui était demandé depuis très longtemps par tous les dirigeants mais aussi tous les salariés de La Poste, qui avaient parfaitement compris qu’il fallait développer ses activités ailleurs, notamment vers la bancassurance via un rapprochement avec la CNP. Nous offrons un avenir à La Poste, nous lui offrons plus de rentabilité ainsi qu’à ses milliers de salariés, et nous offrons aux Français un des premiers pôles financiers publics mondiaux.
Je veux rassurer tout de suite la présidente Valérie Rabault : l’opération avec la CNP se fera sous le contrôle de l’Autorité des marchés financiers, l’AMF. C’est l’AMF qui nous dira s’il faut une offre publique d’achat – OPA – ou non. C’est la règle et nous respectons, bien entendu, les règles. Quant à se séparer de La poste Asset Management, cela ne fait pas partie des projets du Gouvernement, je tiens à vous rassurer sur ce point.
Je voudrais rassurer également tous ceux qui, comme M. Peu, craignent que nos décisions ne dissimulent une privatisation rampante de la France. Avec nous, vous pouvez être tranquille, monsieur Peu : quand nous cédons des actifs de l’État, nous le disons et nous le revendiquons, et de même quand nous faisons une autre opération. Inutile donc d’imaginer des privatisations rampantes derrière nos décisions. Quand nous prenons la décision de céder le contrôle de l’État dans une entreprise, nous avons le courage de l’assumer, nous avons le courage de le dire devant les Français et de leur expliquer que c’est une stratégie économique délibérée qui vise à investir pour l’innovation, la recherche et l’avenir de nos enfants.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Quand nous défendons un service public, comme c’est le cas pour La Poste, nous vous donnons l’engagement que celle-ci restera un grand service public. Quand nous réalisons les opérations nécessaires pour permettre à la SNCF de résister à la concurrence, nous vous disons aussi qu’il n’est pas question de revenir sur ce grand service public.
Vous avez affaire à un gouvernement avec lequel vous pourrez être en désaccord, à un ministre de l’économie et des finances avec lequel vous pourrez être en désaccord – et vous le serez sur un certain nombre de sujets. Une fois encore, c’est le mérite de notre démocratie. Mais reconnaissez-nous une qualité : nous avançons à visage découvert.
C’est clair ! Surtout pour ceux qui démissionnent ! Telle a toujours été ma conception de la politique.
M. Aubert, quant à lui, craignait de voir disparaître le contrôle de la Cour des comptes… mais c’est lui qui a disparu.
(Sourires.) Je tiens à le rassurer et je n’aurai pas la malice de rappeler qu’il est lui-même issu de ce corps prestigieux : la Cour des comptes gardera, bien entendu, un contrôle sur la Caisse des dépôts et consignations.
Oui, il y a un renforcement. Grâce au travail remarquable accompli par Jacques Savatier, que je remercie de son engagement et de sa persévérance, grâce à la présidente Sophie Errante, grâce à Gilles Carrez, dont nous connaissons la ténacité, la force des convictions, surtout lorsqu’il s’agit du contrôle de la Caisse des dépôts et consignations – il n’est pas là et ne rougira donc pas, mais je tiens à rendre hommage à sa ténacité en la matière –,…
À sa clairvoyance ! …la commission de surveillance constitue désormais un véritable conseil d’administration, disposant de toutes les prérogatives et de toutes les qualités afférentes, qui pourra contrôler l’ensemble des activités de la Caisse : l’approbation des comptes, la stratégie, les programmes d’émissions, tout ce qui fait la vie de la Caisse des dépôts et consignations sera désormais sous son contrôle.
Non seulement cette commission de surveillance reste sous le contrôle du Parlement, à moins de ne pas savoir compter 1 plus 1 font 2 et 2 plus 2 font 4, on voit que ce dernier y est largement majoritaire. Sur seize personnalités qui la composent, dix seront issues de vos bancs ou nommées par l’Assemblée nationale ou le Sénat. Dix sur seize, avec voix prépondérante à la présidente du conseil de surveillance, vous avouerez que cela ne fait que renforcer le pouvoir du Parlement sur la Caisse des dépôts et consignations !
Je vais vous dire mon sentiment. Nous avons discuté, négocié pendant des semaines et des mois pour parvenir à ce bon résultat. Il est bien, juste et utile pour le pays que la Caisse des dépôts et consignations reste sous le contrôle plein et entier des parlementaires.
Très bien ! S’agissant de Bercy, trois personnalités seront proposées par le ministre de l’économie et des finances sous le contrôle d’une commission de surveillance, puis nommées par le Premier ministre. Vous disposez là de toutes les garanties pour qu’il n’y ait pas d’abus en la matière. C’est sûr. Je répète très clairement à ceux qui, ici ou là, émettent encore des critiques ou qui doutent : je ne cède à aucune direction de mon administration, je ne cède à aucun lobby et je ne cède à aucun fonctionnaire. Je suis le chef de mon administration et j’en assume toutes les responsabilités. Je pense que l’amendement qui vous sera proposé ce soir le prouve. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) La parole est à M. Jean-Louis Masson. Compte tenu des arguments développés par le rapporteur, je retire mon amendement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
(L’amendement no 1846 est retiré.)
(Les amendements identiques nos 1769 et 2002 ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de trois amendements, nos 1764, 1785 et 2404, pouvant être soumis à une discussion commune.
Sur l’amendement no 1785, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 1764.
Notre groupe a déposé un amendement pour que la commission de surveillance reste composée de treize membres et que la nature de sa composition demeure, si ce n’est que les représentants de la Cour des comptes passent de deux à un et que le Gouverneur de la Banque de France en sort pour ouvrir deux postes pour le personnel : moins deux, plus deux, l’équilibre est maintenu.
Compte tenu de l’amendement Errante, Carrez, Savatier, je retire le nôtre pour nous y rallier.
(L’amendement no 1764 est retiré.) La parole est à Mme Sophie Errante, pour soutenir l’amendement no 1785. Je remercie tout d’abord grandement nos rapporteurs général et thématique, M. Lescure et M. Barrot, Mme la présidente de la commission spéciale, M. le ministre Le Maire, son cabinet, et tous ceux qui ont bien voulu nous aider à trouver ce compromis.
Petite excuse, cet amendement n’était pas mûr lors de nos discussions en commission spéciale, ce qui explique que j’ai le plaisir de le présenter ce soir avec Jacques Savatier, tout en regrettant l’absence de Gilles Carrez.
Il nous regarde ! Gilles, je présente donc notre amendement commun en ton nom aussi ! (Sourires.)
Ce projet de réforme de la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations – dont nous sommes tous d’accord pour dire qu’elle est placée sous le contrôle particulier du Parlement – a été présenté le 7 mars dernier à la commission de surveillance. Fidèles à leur mission de protection des intérêts de la CDC, les membres de cette dernière ont débattu. Deux avis, rendus le 15 mars et le 11 avril, ont permis de faire évoluer le texte avant que le Gouvernement ne le dépose.
S’agissant de la composition de la commission de surveillance, le débat n’était pas achevé avant ce soir. Je me félicite donc du dépôt de cet amendement commun : nous avons pu trouver un compromis avec le Gouvernement et MM. les rapporteurs, qui permettra de travailler efficacement sur les importants projets et sujets qui continueront à nous occuper pendant les mois prochains.
Comme M. le ministre l’a répété, sur seize membres que compte la commission de surveillance, dix seront issus du Parlement : cinq parlementaires – trois députés et deux sénateurs – et cinq personnalités qualifiées, dont trois nommées par le président de l’Assemblée nationale et deux par le président du Sénat. S’y ajouteront deux salariés, trois personnalités qualifiées d’État et la direction du Trésor.
Par cet amendement, nous vous proposons les modifications suivantes : le nombre de personnalités qualifiées désignées par le Parlement passe de trois à cinq membres ; en contrepartie, ces nominations font l’objet d’un avis public de la commission des finances de l’assemblée concernée. Le nombre de personnalités qualifiées désignées par le Premier ministre, sur rapport du ministre de l’économie, passe de quatre à trois, et fait l’objet d’un processus de sélection présentant des garanties d’indépendance suffisantes : il s’agit d’un comité de nomination, dont la composition est fixée par décret en Conseil d’État, sur le modèle de ce qui est pratiqué pour la nomination des directeurs d’administration centrale notamment. Enfin, l’obligation de parité des commissaires surveillants élus par les salariés est précisée de façon plus explicite.
Je remercie tous les collègues qui ont bien voulu retirer leurs amendements pour se rallier à celui-ci, que je vous invite à adopter. Je vous remercie pour la solution qui a été trouvée.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l’amendement no 2404. Cet amendement a été déposé avant que nous ayons eu connaissance de l’amendement no 1785 de Mme Errante.
Je souhaite revenir sur quelques points qui rejoignent l’esprit de ce dernier.
Il importe, en effet, d’ouvrir la commission de surveillance à la représentation du personnel. Cette proposition avait été formulée par Henri Emmanuelli qui, sous la précédente législature, présidait la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. Des négociations avaient eu lieu avec les représentants du personnel pendant un certain temps. Je suis ravie que cette proposition initiée et soutenue par Henri Emmanuelli se concrétise.
Je me propose de retirer cet amendement no 2404 au profit de l’amendement no 1785, négocié à la fois avec le Parlement, la commission de surveillance et le Gouvernement, et qui permet d’atteindre les objectifs que notre amendement défendait : l’entrée des représentants du personnel au sein de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, la parité, le fait que le Parlement reste majoritaire, ce qui n’était pas le cas dans le texte initial du Gouvernement.
Très bien ! La parole est à M. Roland Lescure, rapporteur général de la commission spéciale, pour donner l’avis de la commission. Je remercie tous les parlementaires, notamment nos trois éminents représentants à la commission de surveillance, madame Errante, ici présente, monsieur Savatier et M. Carrez, hélas absent, pour le travail qui a été accompli.
(L’amendement no 2404 est retiré.) Nous l’avons dit, si tous les articles de ce projet de loi PACTE concernant cette vénérable institution sont votés, la Caisse des dépôts et consignations changera de dimension. Il était donc indispensable que sa commission de surveillance, qui n’avait jusqu’à présent qu’un rôle consultatif devienne un vrai conseil de surveillance, avec une gouvernance moderne, ce qui suppose la parité, madame Ménard. Vous dites que les quotas ne servent à rien, mais la France est en avance sur le monde entier parce qu’elle a voté une loi courageuse obligeant les conseils d’administration des entreprises à compter au moins 40 % de femmes en leur sein. La Caisse des dépôts et consignations s’aligne sur ces bonnes pratiques, et c’est tant mieux ! Il en est de même s’agissant de la présence des représentants des salariés et des personnalités qualifiées qui, grâce au processus de nomination, le seront vraiment : pas de fait du prince, ni du côté du ministère ni du côté du Parlement, mais des processus de nomination transparents, publics, nous assurant que ce conseil de surveillance compte les bonnes personnes, à la bonne place.
Évidemment, avis très favorable.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que le rapporteur. Bravo ! C’est une règle de trois ! La parole est à M. Charles de Courson. La proportion de représentants du Parlement ou désignés par les présidents de l’Assemblée et du Sénat est stable : de huit treizièmes, on passe à dix seizièmes. On monte un peu ! Soyons rigoureux ! On se situe à peu près à 60 %.
De 1 % ou 2 %. Disons que cela reste dans la même proportion.
Les postes des représentants du Conseil d’État et de la Cour des comptes sont supprimés et trois personnes sont nommées par le ministre des finances.
Le baroud d’honneur de la Cour des comptes ! J’appelle votre attention à ce propos, monsieur le ministre, puisque c’est vous qui déciderez. Nombre de nos collègues qui ont été membres de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts estiment fort utile la présence d’un représentant du Conseil d’État et de la Cour des comptes. Contrairement à ce que croient bien des collègues – qu’ils étaient désignés par le vice-président du Conseil d’État et le Premier président de la Cour des comptes –, ils étaient élus par l’assemblée générale du Conseil d’État et par l’institution équivalente de la Cour des comptes afin d’assurer leur indépendance. Certains ont dit qu’ils n’étaient pas indépendants car juges et parties, etc. C’est tout à fait inexact.
Rien ne vous empêche, monsieur le ministre, ni non plus les présidents de l’Assemblée et du Sénat, dans les nominations que chacun fera, de glisser délicatement un membre du Conseil d’État et de la Cour des comptes. Simplement, ils ne seront pas élus par leurs pairs.
La parole est à M. Stéphane Peu. Nous notons l’avancée que représente cet amendement, notamment – c’était important pour nous et pour d’autres – la représentation des salariés au sein de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts. C’est là un vrai progrès.
En revanche, nous aurions souhaité que la part du Parlement, incarnée par des parlementaires et pas seulement par des personnes qualifiées désignées par l’Assemblée nationale ou le Sénat, soit supérieure, de même que la représentation de l’opposition.
Les garanties du contrôle parlementaire, par les parlementaires, ne nous semblent pas tout à fait satisfaisantes. Nous notons l’avancée, mais elle est encore bien loin de ce que nous aurions souhaité pour un contrôle effectif, pérenne et sécurisé du Parlement sur la Caisse des dépôts et consignations. Nous nous abstiendrons donc.
Je mets aux voix l’amendement no 1785.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 117
Majorité absolue 59
Pour l’adoption 117
Contre 0
(L’amendement no 1785 est adopté et l’article 30 est ainsi rédigé ; en conséquence, les amendements nos 2057, 522, 523, 578, 2209, 526, 596, 527, 767, 1966, 528, 529, 525, 1370, 1369, 530, 531 et 1874 n’ont plus d’objet.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
La parole est à Mme Sophie Errante. S’agissant de l’article précédent, je voulais rappeler que, chaque année, le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations est auditionné par la commission des finances, ce qui nous permet d’avoir un échange sur ses engagements et sa feuille de route.
J’en viens à l’article 31. Avec la réforme de la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations proposée dans ce texte, la commission de surveillance passera du rôle de superviseur, désormais dédié à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ACPR –, au rôle de challenger, de compétiteur. Cela va pleinement dans le sens d’une clarification des rôles, la commission de surveillance assurant la plénitude de ses fonctions de contrôle, de délimitation de l’appétence aux risques et d’évaluation des actions du directeur général, tandis que l’ACPR pourra assurer son rôle de superviseur financier.
Désormais, la commission de surveillance ne donnera plus un simple avis mais délibérera avec effet contraignant pour le directeur général sur les orientations du groupe CDC et approuvera le budget présenté par celui-ci. Elle sera donc plus que jamais en situation d’inciter le groupe CDC à remplir la totalité de ses actions d’intérêt général et au profit de tous les territoires de métropole et d’outre-mer.
Tout n’étant pas du ressort de la loi, j’ai proposé aux commissaires surveillants de travailler au sein de séminaires pour co-élaborer une nouvelle organisation de nos travaux et accompagner cette réforme.
Je voudrais, pour finir, évoquer un exemple concret. Vous avez peut-être entendu l’annonce, ce matin, de le cession des parts de Veolia dans la société Transdev au groupe allemand Rethmann. C’est une très belle histoire qui s’écrit aujourd’hui, et qui prendra réellement effet au mois de janvier. La commission de surveillance n’avait pas à donner son avis
stricto sensu . Pourtant, nous avons participé au dialogue et nous avons pu poser à la direction générale les questions qui nous paraissaient importantes.
Une nouvelle manière de travailler avec la Caisse des dépôts et consignations est en train de se dessiner, qui va dans le sens de la réforme introduite par cet article. Je vous invite donc à le voter, mes chers collègues.
Très bien ! Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 532 et 2058.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 532.
Il est défendu. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2058. Défendu !
(Les amendements identiques nos 532 et 2058, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Jean-Noël Barrot, pour soutenir l’amendement no 1394. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
(L’amendement no 1394, accepté par le Gouvernement, est adopté.) La parole est à M. Jean-Noël Barrot, pour soutenir l’amendement no 1367. Il s’agit également d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
(L’amendement no 1367, accepté par le Gouvernement, est adopté.) La parole est à M. Philippe Bolo, pour soutenir l’amendement no 2210. Cet amendement tend à instaurer un avis consultatif de l’ACPR lors de la détermination du modèle prudentiel, afin d’éviter que la Caisse des dépôts et consignations ne s’expose à un risque d’illiquidité ou d’insuffisance de ses fonds propres. Cet avis reste consultatif et ne s’impose pas à la commission de surveillance. Quel est l’avis de la commission ? Comme la présidente de la commission de surveillance l’a expliqué, dans la nouvelle architecture proposée par ce texte, l’ACPR exercera son rôle de supervision : en ce sens, votre amendement est satisfait. Dans les discussions qui ont précédé la rédaction de ce projet de loi, les commissaires surveillants ont souhaité conserver la maîtrise d’un modèle prudentiel interne à la Caisse des dépôts. C’est la raison pour laquelle il apparaît dans cet article.
Je ne doute pas que dans l’élaboration et dans la maintenance de ce modèle prudentiel, la commission de surveillance aura un dialogue avec l’ACPR, qui est désormais son nouveau superviseur. Votre amendement me paraissant satisfait, je vous invite à le retirer.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Pour que chacun comprenne bien le nouveau schéma, la commission de surveillance devient le véritable conseil d’administration de la Caisse des dépôts et consignations ; son pouvoir est donc considérablement renforcé. L’ACPR, quant à elle, devient l’organe de supervision de la caisse. En tant que tel, elle ne peut pas donner un avis, car elle serait à la fois juge et partie. Je vous invite donc, moi aussi, à retirer votre amendement. Monsieur Bolo, votre amendement est-il maintenu ? Je le retire.
(L’amendement no 2210 est retiré.) La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 533. Il est défendu.
(L’amendement no 533, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 31, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 534 et 535, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour les soutenir.
L’article 32 contredit les termes du code monétaire et financier, qui dispose que « la Caisse des dépôts et consignations est dirigée et administrée par un directeur général ». En effet, l’alinéa 2 tend à prévoir que le directeur général dirige, mais n’administre plus la Caisse des dépôts et consignations. Or il importe, selon nous, que la Caisse des dépôts, qui est une administration centrale du point de vue du cadre d’emploi des fonctionnaires qui lui sont affectés, continue d’être administrée. Il n’est pas envisageable qu’une telle suppression banalise sa gestion et remette en cause le statut des fonctionnaires et des agents de la Caisse des dépôts et consignations – on voit bien que le changement n’est pas seulement sémantique. Tel est l’objet de mon amendement no 534.
L’amendement no 535, quant à lui, concerne les règles d’organisation de la Caisse des dépôts et consignations. L’alinéa 4 du présent article prévoit que le directeur général peut désigner un ou plusieurs directeurs délégués pour être assisté et leur confier une partie de ses pouvoirs.
Or le cadre réglementaire actuel d’organisation de la Caisse des dépôts et consignations prévoit que le directeur général est assisté de sept directeurs, nommés par décret dans les mêmes conditions que les directeurs d’administration centrale de l’État, et qu’ils doivent prêter serment devant la commission de surveillance. Le cadre actuel permet les délégations de signature mais pas les délégations de pouvoir, ce qui nous semble fondamentalement différent et plus respectueux de ce qu’est, selon nous, la Caisse des dépôts et consignations.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ? S’agissant du premier amendement, peut-être le glissement sémantique s’explique-t-il tout simplement par le transfert du pouvoir de décision du directeur général vers la commission de surveillance. Désormais, la commission de surveillance aura un pouvoir de délibération et prendra donc toute sa part dans l’administration de la Caisse. C’est ce que M. le ministre vient de rappeler, en indiquant que la commission de surveillance prenait les attributions d’un véritable conseil d’administration. Il revient donc au directeur général de diriger, et au conseil d’administration, d’administrer. Avis défavorable sur ce premier amendement.
Votre deuxième amendement tend à supprimer la capacité, désormais reconnue au directeur général, de désigner des directeurs généraux délégués. Il nous semble que cette disposition va dans le sens d’une plus grande souplesse et d’une adaptation aux missions de la Caisse des dépôts. Avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Charles de Courson. Il me semble, mes chers collègues, que cet amendement est tombé. Il n’est pas cohérent avec ce que nous venons de voter.
(Les amendements nos 534 et 535, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L’article 32 est adopté.)
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2653, tendant à la suppression de l’article. Par cet amendement, nous proposons de supprimer cet article, qui rend applicable à la Caisse des dépôts et consignations les règles de la comptabilité commerciale. Le Gouvernement explique qu’il suit les recommandations de la Cour des comptes et que cette disposition vise à conférer plus de souplesse à la gestion de la Caisse des dépôts et consignations. Nous craignons, au contraire, que cela ne conduise la Caisse des dépôts et consignations à s’éloigner de ses missions d’intérêt général. Quel est l’avis de la commission ? Sur ce sujet, je crois qu’il faut suivre la recommandation de la Cour des comptes et celle de la commission de surveillance elle-même. Je vous invite donc à retirer cet amendement, au profit de la rédaction actuelle de l’article 33. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Charles de Courson. Cher collègue, les trésoriers, qui sont des comptables publics, sont jugés par la Cour des comptes, ce qui est une immense plaisanterie. Pourquoi ? Parce que, vu la nature de la Caisse des dépôts, cela n’a plus de sens. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est la Cour des comptes elle-même ! Elle demande en effet la suppression de la compétence juridictionnelle qu’elle exerce sur la Caisse des dépôts. La Cour conserve néanmoins un rôle de contrôle administratif sur la bonne gestion de la Caisse des dépôts. Il est donc tout à fait inutile de maintenir un comptable public à la Caisse des dépôts et consignations.
(L’amendement no 2653 n’est pas adopté.) La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 536. Il est défendu.
(L’amendement no 536, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 33 est adopté.)
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 768, 1770, 2005 et 2059, tendant à la suppression de l’article.
La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 768.
Il est défendu. La parole est à M. Ludovic Pajot, pour soutenir l’amendement no 1770. Il est défendu. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 2005. Il est défendu, monsieur le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2059. Défendu !
(Les amendements identiques nos 768, 1770, 2005 et 2059, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 537. Il est défendu.
(L’amendement no 537, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 35 est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 538 et 2060, tendant à supprimer l’article.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 538.
L’article 36 prévoit que le versement de la Caisse des dépôts et consignations au budget de l’État soit désormais fixé par décret, ce qui signifie que cette décision sera laissée à l’arbitraire de l’exécutif. La commission de surveillance ne pourra rendre qu’un avis consultatif. Ainsi, pour la première fois depuis la création de la Caisse des dépôts et consignations, le pouvoir réglementaire s’arrogerait le droit de déterminer ce montant, au mépris du statut d’autonomie de la Caisse des dépôts et consignations et de sa garantie par le législateur.
Il n’est pas souhaitable que l’exécutif décide seul du montant de ce versement. Cette décision met à mal le rôle du Parlement, qui ne pourrait pas garantir l’autonomie de la Caisse des dépôts et consignations, dès l’instant que la ponction annuelle sur son résultat sera entièrement dépendante du pouvoir réglementaire.
Au-delà, cet article contribue à dénaturer encore un peu plus la Caisse des dépôts et consignations, cette institution qui, comme nous l’avons rappelé à de nombreuses reprises, est intimement liée au Parlement.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2060. Il est défendu. Quel est l’avis de la commission ? La Caisse des dépôts et consignations contribue au budget de l’État de trois manières : d’abord, avec l’équivalent d’un impôt sur les sociétés, la contribution représentative de l’impôt sur le revenu; ensuite, avec un prélèvement sur les fonds d’épargne ; enfin, avec un versement qui résulte de l’activité de la section générale, qui regroupe les autres activités de la Caisse.
Selon le projet de loi, chaque modification des règles de versement sera suivie de la saisine pour avis de la commission de surveillance, ce qui va dans le bon sens car, jusqu’à présent, elle n’était saisie que si le directeur général le jugeait souhaitable. Désormais, elle le sera automatiquement, ce qui renforce ses prérogatives. Ce faisant, le régime du versement est aligné sur celui du prélèvement, qui fait déjà l’objet d’un décret sur avis de la commission de surveillance. D’une certaine façon, nous harmonisons ainsi les deux procédures.
Le nouveau schéma a été jugé équilibré par les trois commissaires surveillants qui siègent au sein de cette assemblée, d’autant qu’il a été sécurisé par l’adoption d’un amendement de vos rapporteurs destiné à garantir que le versement ne nuise pas à la solvabilité de la Caisse.
Pour toutes ces raisons, je vous invite à retirer ces amendements.
Quel est l’avis du Gouvernement ? J’invite également M. Peu à retirer son amendement car le nouveau dispositif serait bien plus protecteur des intérêts du Parlement que le fonctionnement actuel, dont je peux témoigner de par mon expérience. Aujourd’hui, nous échangeons avec le directeur de la Caisse des dépôts et consignations à propos du montant et des modalités du versement. Ce n’est qu’une fois l’accord trouvé – je parle sous le contrôle de sa présidente, Sophie Errante – que la commission de surveillance est saisie pour avis sur les règles fixées entre le directeur de la Caisse – nommé par l’État, je le rappelle – et le ministre des finances. Bref, la commission de surveillance regarde passer les balles.
Nous vous proposons que la commission de surveillance donne un avis sur le montant et pas simplement sur les règles, ce qui obligera, bien évidemment, le Gouvernement. Si la commission de surveillance juge que le montant réclamé n’est pas acceptable, il sera, sur un plan politique, très difficile de contrer son avis.
Le rapporteur l’a rappelé, nous avons de surcroît accepté des amendements qui visent à garantir que ce montant obéit aux règles prudentielles de la CDC et n’en remet pas en cause la solvabilité.
(Les amendements identiques nos 538 et 2060 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 1651. Je souhaiterais, mes chers collègues, que nous allions au bout de la réforme, c’est-à-dire que la commission de surveillance fixe elle-même le montant du versement dont nous parlons – et qui est l’équivalent d’un dividende versé à l’État. C’est elle, en effet, qui doit protéger la solvabilité de la Caisse des dépôts, et non le Gouvernement. Une telle disposition n’empêcherait pas le dialogue avec ce dernier, mais il appartient à la commission de surveillance de veiller à l’application du dernier alinéa de l’article, issu de l’amendement que vous avez accepté, et qui dispose que le versement ne saurait mettre en cause la solvabilité de la Caisse.
C’est bien la commission de surveillance – laquelle, du reste, n’en est plus une ; nous aurions dû la renommer « conseil d’administration » – qui garantit le respect de ce principe. Dès lors, il serait logique qu’elle fixe elle-même le montant du prélèvement.
Quel est l’avis de la commission ? Même avis que précédemment. Le nouveau mode de fonctionnement du versement est aligné sur celui du prélèvement sur les fonds d’épargne. Rien n’est vraiment nouveau, mais il s’agit de sécuriser la supervision de la commission de surveillance sur ce versement. La parole est à M. le ministre. Même avis. La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur, qui définit le modèle prudentiel ? La commission de surveillance. C’est à elle de le faire respecter et de refuser un prélèvement susceptible de mettre en cause la solvabilité de la Caisse des dépôts. C’est logique. Maintenir le pouvoir du ministre n’est pas cohérent avec la réforme dans son ensemble.
(L’amendement no 1651 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 539 et 2467 rectifié.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 539.
Afin de renforcer les pouvoirs de la commission de surveillance et, indirectement, ceux du Parlement, cet amendement de repli tend à soumettre le versement annuel à son avis conforme. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 2467 rectifié. C’est un amendement de repli ! La commission de surveillance doit pouvoir refuser de verser à l’État des sommes qu’elle juge excessives. Elle doit pouvoir lui dire qu’il n’aura pas les 2 milliards réclamés, que le prélèvement ne pourra dépasser 1,5 milliard, par exemple. Or seul un avis conforme est de nature à lui conférer une telle autorité.
Vous prétendez qu’un ministre n’osera pas passer outre l’avis de la commission de surveillance, mais qui en aura connaissance ? Sera-t-il publié ? L’épargne sera mieux protégée s’il faut un avis conforme.
(Les amendements identiques nos 539 et 2467 rectifié ne sont pas adoptés.)
(L’article 36 est adopté.)
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 540. Il est défendu.
(L’amendement no 540, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 37 est adopté.)
La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 367. Au moment où vous appelez à renforcer la transparence, monsieur le ministre, il ne nous paraît pas opportun de supprimer le contrôle juridictionnel de la Cour des comptes sur la Caisse des dépôts. Quel est l’avis de la commission ? La Cour des comptes a elle-même affirmé qu’elle n’était pas en mesure d’assurer le contrôle juridictionnel. Je vous invite à retirer votre amendement, sinon j’y serai défavorable.