XVe législature
Session ordinaire de 2018-2019
Séance du jeudi 15 novembre 2018
- Présidence de Mme Annie Genevard
- 1. Projet de loi de finances pour 2019
- Seconde partie (suite)
- Articles non rattachés
- Article 48
- Après l’article 48
- Article 49
- Article 50
- Article 51
- Rappel au règlement
- Article 51 (suite)
- Rappel au règlement
- Article 51 (suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Amendements nos 2498 et 1585, 1586 rectifié, 1587
- Après l’article 51
- Rappel au règlement
- Après l’article 51 (suite)
- Seconde partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
1e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2019 (nos 1255, 1302).
Nous en venons à l’examen des articles non rattachés à des missions.
Comme de coutume, les articles de récapitulation 39 à 47 seront examinés à la fin de la première délibération.
Comme de coutume, les articles de récapitulation 39 à 47 seront examinés à la fin de la première délibération.
Je suis saisie d’un amendement no 1947, qui fait l’objet d’un sous-amendement no 2540.
La parole est à Mme Bénédicte Peyrol, pour soutenir l’amendement. Cet amendement vise à renforcer les garanties offertes aux contribuables. Dans le cadre de la transposition de la directive de lutte contre l’évasion fiscale – ATAD –, je souhaite créer un nouveau rescrit permettant au contribuable d’avoir une position ferme de la part de l’administration. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir le sous-amendement no 2540. C’est un sous-amendement de précision à l’amendement no 1947, lequel a été adopté par la commission des finances. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances, pour donner l’avis du Gouvernement. Avis favorable. Comme l’a souligné Bénédicte Peyrol, son amendement permet de sécuriser les entreprises dans le cadre de l’application de cette nouvelle directive, grâce au rescrit. Quant au sous-amendement, il précise utilement que c’est l’administration fiscale qui sera chargée de l’instruction des demandes. (Le sous-amendement no 2540 est adopté.) (L’amendement no 1947, sous-amendé, est adopté.) La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1948. C’est un amendement de précision. (L’amendement no 1948, accepté par le Gouvernement, est adopté.) (L’article 48, amendé, est adopté.)
La parole est à Mme Bénédicte Peyrol, pour soutenir l’amendement. Cet amendement vise à renforcer les garanties offertes aux contribuables. Dans le cadre de la transposition de la directive de lutte contre l’évasion fiscale – ATAD –, je souhaite créer un nouveau rescrit permettant au contribuable d’avoir une position ferme de la part de l’administration. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir le sous-amendement no 2540. C’est un sous-amendement de précision à l’amendement no 1947, lequel a été adopté par la commission des finances. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances, pour donner l’avis du Gouvernement. Avis favorable. Comme l’a souligné Bénédicte Peyrol, son amendement permet de sécuriser les entreprises dans le cadre de l’application de cette nouvelle directive, grâce au rescrit. Quant au sous-amendement, il précise utilement que c’est l’administration fiscale qui sera chargée de l’instruction des demandes. (Le sous-amendement no 2540 est adopté.) (L’amendement no 1947, sous-amendé, est adopté.) La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1948. C’est un amendement de précision. (L’amendement no 1948, accepté par le Gouvernement, est adopté.) (L’article 48, amendé, est adopté.)
Je suis saisie d’un amendement no 1949 portant article additionnel après l’article 48. Il fait l’objet d’un sous-amendement no 2542.
La parole est à Mme Bénédicte Peyrol, pour soutenir l’amendement. À la suite des travaux que j’ai menés dans le cadre de la mission d’information sur la lutte contre l’évasion fiscale internationale, je propose de renforcer le dispositif d’abus de droit en créant un système à deux étages. Aujourd’hui, l’abus de droit s’applique aux opérations à but exclusivement fiscal, avec des pénalités très importantes ; je propose de créer un autre étage, qui viserait des opérations à motivation principalement fiscale. Plutôt que des pénalités, ce deuxième étage prévoit des règles d’assiette qui conduiraient à une requalification du schéma. Il s’agit d’un nouvel outil anti-abus pour l’administration fiscale. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 2542. Ce sous-amendement décale d’une année l’application de cette disposition, de façon à laisser aux contribuables le temps d’intégrer la nouvelle donne afin d’agir en pleine connaissance de cause. Quel est l’avis du Gouvernement ? Favorable à l’amendement modifié par la précision du rapporteur général, qui diffère l’application de la mesure d’un an. La parole est à M. Charles de Courson. Mes chers collègues, cet amendement est intéressant. On s’est heurté pendant des années à une conception de l’abus de droit très rigide, nécessitant de prouver le motif exclusivement fiscal des montages. Je crains néanmoins que le passage à un motif « principalement » fiscal n’introduise d’énormes problèmes d’interprétation. Certes, il existe un texte communautaire à ce sujet, mais comment les tribunaux comprendront-ils cette notion ? Il faudrait, monsieur le ministre, que vous nous précisiez ce que recouvre ce terme. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Je partage l’interrogation de Charles de Courson. Je veux bien qu’on précise les définitions pour mieux caractériser l’abus de droit, mais le diable se loge toujours dans les détails. Le décalage d’un an me paraît le bienvenu afin de bien poser les choses. L’amendement va plus loin que ce que propose le Gouvernement, et probablement même la directive ATAD. Les mots ont un sens, et un terme trop général peut induire une interprétation très négative. Les entreprises doivent être claires dans leurs démarches, mais attention à ne pas créer une incertitude qui les handicaperait lourdement. La parole est à M. Gilles Carrez. Pour compléter les interventions de M. de Courson et du président de la commission des finances, dont je partage les interrogations, je me souviens qu’au début de la précédente législature, une décision du Conseil constitutionnel a rejeté la notion de « principalement » au profit d’une définition exclusive. Il me semble aussi qu’il existe une jurisprudence assez restrictive du Conseil d’État sur ce point. La parole est à Mme Bénédicte Peyrol. Il est vrai que ce débat ne date pas d’aujourd’hui. La disposition législative qui a subi la censure du Conseil constitutionnel faisait suite à la mission qui avait été présidée par l’actuel président de la commission des finances. Dans ma proposition, je tire les conséquences de cette décision jurisprudentielle. En effet, la disposition censurée par le Conseil constitutionnel conservait l’article L. 64 du livre des procédures fiscales tel qu’il existe d’aujourd’hui, et remplaçait « exclusivement » par « principalement ». Elle induisait donc une requalification et une pénalité de 80 %. Je propose pour ma part de garder le dispositif existant, mais de créer un nouvel étage qui introduirait une règle d’assiette. L’administration pourrait alors utiliser le dispositif d’abus de droit pour viser également des opérations à but principalement fiscal.
Pour préciser la portée de ce terme, nous disposons d’une jurisprudence européenne conséquente, qui a été utilisée en France de manière assez précise – je pense notamment à l’arrêt Cadbury Schweppes de la Cour de justice de l’Union européenne. Certes, la doctrine n’est pas encore totalement stabilisée, mais c’est aussi le rôle du législateur que d’avancer. Juridiquement, ma proposition tient la route car elle tire les conséquences de la jurisprudence du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel. Je ne propose pas de remplacer, par facilité, la motivation « exclusivement » fiscale par « principalement » fiscale, je crée un abus de droit à deux étages. L’affaire est grave et M. le ministre devrait s’exprimer ! La parole est à M. le ministre. Le sujet est sensible. Une entreprise peut prendre des dispositions fiscales tout en les motivant par un intérêt économique : dès lors, on ne peut pas prouver qu’il s’agit d’un montage à vocation exclusivement fiscale, et c’est dans cet interstice que peut se loger une évasion fiscale qui échappera aux sanctions.
L’objectif de l’amendement présenté par Bénédicte Peyrol est d’éviter cette possibilité de contournement, où une entreprise prétend avoir pris une disposition pour des motifs économiques alors que celle-ci lui donne un avantage principalement – même si ce n’est pas exclusivement – fiscal. Cette proposition permet d’améliorer la précision du contrôle du risque d’évasion fiscale, ce qui correspond bien à l’objectif de la transposition de la directive ATAD. Je rejoins les propos du président de la commission des finances Éric Woerth, qui recommande la prudence : c’est pourquoi nous nous donnons une année supplémentaire pour bien préciser le dispositif avant de l’appliquer. (Le sous-amendement no 2542 est adopté.) (L’amendement no 1949, sous-amendé, est adopté.)
La parole est à Mme Bénédicte Peyrol, pour soutenir l’amendement. À la suite des travaux que j’ai menés dans le cadre de la mission d’information sur la lutte contre l’évasion fiscale internationale, je propose de renforcer le dispositif d’abus de droit en créant un système à deux étages. Aujourd’hui, l’abus de droit s’applique aux opérations à but exclusivement fiscal, avec des pénalités très importantes ; je propose de créer un autre étage, qui viserait des opérations à motivation principalement fiscale. Plutôt que des pénalités, ce deuxième étage prévoit des règles d’assiette qui conduiraient à une requalification du schéma. Il s’agit d’un nouvel outil anti-abus pour l’administration fiscale. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 2542. Ce sous-amendement décale d’une année l’application de cette disposition, de façon à laisser aux contribuables le temps d’intégrer la nouvelle donne afin d’agir en pleine connaissance de cause. Quel est l’avis du Gouvernement ? Favorable à l’amendement modifié par la précision du rapporteur général, qui diffère l’application de la mesure d’un an. La parole est à M. Charles de Courson. Mes chers collègues, cet amendement est intéressant. On s’est heurté pendant des années à une conception de l’abus de droit très rigide, nécessitant de prouver le motif exclusivement fiscal des montages. Je crains néanmoins que le passage à un motif « principalement » fiscal n’introduise d’énormes problèmes d’interprétation. Certes, il existe un texte communautaire à ce sujet, mais comment les tribunaux comprendront-ils cette notion ? Il faudrait, monsieur le ministre, que vous nous précisiez ce que recouvre ce terme. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Je partage l’interrogation de Charles de Courson. Je veux bien qu’on précise les définitions pour mieux caractériser l’abus de droit, mais le diable se loge toujours dans les détails. Le décalage d’un an me paraît le bienvenu afin de bien poser les choses. L’amendement va plus loin que ce que propose le Gouvernement, et probablement même la directive ATAD. Les mots ont un sens, et un terme trop général peut induire une interprétation très négative. Les entreprises doivent être claires dans leurs démarches, mais attention à ne pas créer une incertitude qui les handicaperait lourdement. La parole est à M. Gilles Carrez. Pour compléter les interventions de M. de Courson et du président de la commission des finances, dont je partage les interrogations, je me souviens qu’au début de la précédente législature, une décision du Conseil constitutionnel a rejeté la notion de « principalement » au profit d’une définition exclusive. Il me semble aussi qu’il existe une jurisprudence assez restrictive du Conseil d’État sur ce point. La parole est à Mme Bénédicte Peyrol. Il est vrai que ce débat ne date pas d’aujourd’hui. La disposition législative qui a subi la censure du Conseil constitutionnel faisait suite à la mission qui avait été présidée par l’actuel président de la commission des finances. Dans ma proposition, je tire les conséquences de cette décision jurisprudentielle. En effet, la disposition censurée par le Conseil constitutionnel conservait l’article L. 64 du livre des procédures fiscales tel qu’il existe d’aujourd’hui, et remplaçait « exclusivement » par « principalement ». Elle induisait donc une requalification et une pénalité de 80 %. Je propose pour ma part de garder le dispositif existant, mais de créer un nouvel étage qui introduirait une règle d’assiette. L’administration pourrait alors utiliser le dispositif d’abus de droit pour viser également des opérations à but principalement fiscal.
Pour préciser la portée de ce terme, nous disposons d’une jurisprudence européenne conséquente, qui a été utilisée en France de manière assez précise – je pense notamment à l’arrêt Cadbury Schweppes de la Cour de justice de l’Union européenne. Certes, la doctrine n’est pas encore totalement stabilisée, mais c’est aussi le rôle du législateur que d’avancer. Juridiquement, ma proposition tient la route car elle tire les conséquences de la jurisprudence du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel. Je ne propose pas de remplacer, par facilité, la motivation « exclusivement » fiscale par « principalement » fiscale, je crée un abus de droit à deux étages. L’affaire est grave et M. le ministre devrait s’exprimer ! La parole est à M. le ministre. Le sujet est sensible. Une entreprise peut prendre des dispositions fiscales tout en les motivant par un intérêt économique : dès lors, on ne peut pas prouver qu’il s’agit d’un montage à vocation exclusivement fiscale, et c’est dans cet interstice que peut se loger une évasion fiscale qui échappera aux sanctions.
L’objectif de l’amendement présenté par Bénédicte Peyrol est d’éviter cette possibilité de contournement, où une entreprise prétend avoir pris une disposition pour des motifs économiques alors que celle-ci lui donne un avantage principalement – même si ce n’est pas exclusivement – fiscal. Cette proposition permet d’améliorer la précision du contrôle du risque d’évasion fiscale, ce qui correspond bien à l’objectif de la transposition de la directive ATAD. Je rejoins les propos du président de la commission des finances Éric Woerth, qui recommande la prudence : c’est pourquoi nous nous donnons une année supplémentaire pour bien préciser le dispositif avant de l’appliquer. (Le sous-amendement no 2542 est adopté.) (L’amendement no 1949, sous-amendé, est adopté.)
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 2251.
Cet amendement propose de remplacer le crédit d’impôt pour rachat d’une entreprise par des salariés tel qu’il est défini par l’article 49 par une réduction d’impôt. En effet, la réduction d’impôt est incitatrice et permet de ne pas grever nos finances publiques aussi lourdement que le crédit d’impôt, dans le contexte de tension actuel. Cet amendement vise donc à réaliser des économies. Il prévoit également qu’il sera possible d’intégrer l’amortissement sur les titres sociaux ou les valeurs incorporelles tels les fonds de commerce, ce qui constitue une novation par rapport à la législation actuelle. Il tend enfin à étendre ces dispositions aux entreprises individuelles, qu’il ne me semble pas justifié d’en exclure.
J’insiste sur le fait que l’amortissement sur les titres sociaux ou les valeurs incorporelles permettrait, en cas de cession ou de revente, de calculer une plus-value par rapport à la valeur comptable nette et non forcément la valeur historique. Cet amendement de bon sens ouvre une porte à cette solution dans certains cas. Quel est l’avis de la commission ? Monsieur le député, votre amendement a été rejeté par la commission réunie en application de l’article 86. Le dispositif que vous proposez pour le rachat d’une entreprise par ses salariés est certes plus vertueux, puisqu’une réduction d’impôt l’est toujours plus qu’un crédit d’impôt – ce n’est pas moi qui vous dirai le contraire – mais il est moins favorable. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? J’ai le même avis que le rapporteur général. Monsieur Mattei, je vous recommande de retirer votre amendement. Le dispositif de reprise d’une entreprise par ses salariés est très favorable, mais il n’a été utilisé, à ma connaissance, que par soixante-trois entreprises l’année dernière. Il n’est pas employé parce qu’il n’est pas connu et que les règles sont trop complexes.
La loi PACTE les a simplifiées, même si nous avons prévu une clause anti abus exigeant que le salarié travaille dans l’entreprise depuis au moins deux ans, afin de ne pas ouvrir le mécanisme à un salarié de complaisance. Une durée de deux ans de présence me paraît légitime et raisonnable.
Le crédit d’impôt proposé aujourd’hui est plus favorable que la réduction d’impôt, et nous avons intérêt à le conserver. La parole est à Mme Véronique Louwagie. L’amendement de Jean-Paul Mattei peut être intéressant, mais il me paraît difficile d’impulser cette évolution par un simple amendement. Autoriser l’amortissement des valeurs incorporelles, comme les fonds de commerce, l’amortissement fiscal des titres sociaux, aurait des conséquences qu’il faut mesurer. En effet, si nous admettions l’amortissement fiscal pour ce dispositif, nous l’admettrions pour le calcul des revenus, dans le cadre des bénéfices industriels et commerciaux, agricoles ou non-commerciaux, ce qui aurait de nombreux impacts, complexes à gérer. L’amortissement comptable existe, mais il me paraît difficile de créer un amortissement fiscal. Bref, ce sujet mérite une réflexion. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Monsieur le ministre, vous soulignez que ce dispositif ne marche pas bien. Je veux bien retirer l’amendement, mais il faut réfléchir à ce problème de l’amortissement des titres de société des valeurs incorporelles. Je suis d’accord avec vous, madame Louwagie, mais cette question se pose réellement dans le cadre de rachats. L’État pourrait retrouver des recettes fiscales dans le cadre de futures plus-values.
Je retire mon amendement. Merci, monsieur Mattei. (L’amendement no 2251 est retiré.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1950 et 2321.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1950. Le dispositif de l’article 49 est plébiscité par l’ensemble des personnes interrogées. Il s’agit, en effet, d’un très bon dispositif et je propose de le proroger d’un an, afin, entre autres, de le cadrer sur la loi de programmation des finances publiques, ce qui me semble vertueux. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2321. Cet amendement est identique à celui de la commission des finances. Comme l’a très bien dit le rapporteur général, proroger d’un an, jusqu’au 31 décembre 2022, l’assouplissement des conditions d’éligibilité à ce crédit d’impôt est une bonne idée, l’année 2022 marquant la fin de l’actuelle loi de programmation des finances publiques.
Nous aurons l’occasion de nous interroger plus tard sur le devenir de ce dispositif après 2022, mais c’est un bon dispositif, et l’élargir est bienvenu. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis favorable. La parole est à M. Charles de Courson. Je suis tout à fait favorable à cet amendement, mais pourquoi ne rend-on pas le système permanent ? Parce que je me méfie des concessions perpétuelles ! (Sourires.) Ce n’est pas une réponse, monsieur le rapporteur général, les concessions perpétuelles n’existant plus depuis longtemps, comme vous le savez : elles sont plafonnées à cinquante ans ! (Les amendements identiques nos 1950 et 2321 sont adoptés.) La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 1545. Le paysage économique est caractérisé par la prédominance des petites et très petites entreprises. Le problème de la transmission de l’entreprise se pose toujours, en l’absence d’un successeur familial. Même si 30 % des dirigeants de PME sont prêts à céder leur entreprise à leurs salariés, cette opération reste très rare, et il faut l’encourager.
Cet amendement a pour objet de ramener de 15 à 5 le nombre minimum de salariés repreneurs requis pour octroyer un crédit d’impôt aux sociétés reprises en interne. Le seuil actuel peut en effet décourager des groupes de salariés potentiellement intéressés par une reprise, ou faire craindre des risques sur la confidentialité à des dirigeants souhaitant constituer en amont un noyau de salariés repreneurs. Quel est l’avis de la commission ? L’article 49 supprime toute condition de nombre de salariés requis pour reprendre une entreprise et bénéficier du crédit d’impôt. Vous proposez de recréer un seuil, fixé à 5 salariés. Votre amendement étant moins favorable que l’article 49, vous devriez le retirer. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à Mme Danielle Brulebois. L’amendement étant satisfait, je le retire. (L’amendement no 1545 est retiré.) Je suis saisie de trois amendements, nos 1552, 1951 et 2295, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1951 et 2295 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 1552. Je m’associe à tous les propos ayant porté sur l’article 49, qui assouplit les conditions d’éligibilité au crédit d’impôt pour le rachat d’une entreprise par ses salariés, en supprimant le seuil minimal de salariés participant au rachat. C’est une bonne mesure, évoquée lors de l’examen du projet de loi PACTE.
Maintenant, il importe d’encadrer le dispositif. Ainsi, les droits de vote attachés aux parts ou actions de la société nouvelle doivent être détenus par au moins 15 salariés de la société rachetée ou, si les effectifs n’excèdent pas cinquante personnes, par au moins 30 % d’entre eux. Ensuite, il existe une condition d’ancienneté minimale, fixée à vingt-quatre mois, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre.
Pour avoir vécu ces périodes de tuilage entre le chef d’entreprise sur le départ et le ou les repreneurs, il me semble que le délai de vingt-quatre mois est excessif, et je vous propose de le ramener à douze. Un délai d’une année est suffisant pour connaître l’entreprise, son savoir-faire, être présenté aux clients et aux fournisseurs. Un délai trop long, en revanche, nourrit les tensions. On sait bien que la situation est difficile pour le chef d’entreprise cédant son poste, qui reste dans la société alors que d’autres personnes ont pris les manettes. J’ai vécu, comme beaucoup, ces tensions nées d’une cohabitation trop longue.
Il me semble que le délai de douze mois est le bon, car il permet le tuilage tout en évitant les tensions. Je sais que certains amendements proposeront dix-huit mois, mais pour avoir vécu cette situation, douze mois me paraissent préférables. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1951. Dans un souci de compromis entre le délai de vingt-quatre mois fixé par le texte et celui de douze mois, je propose, en bon radical et bon centriste, de le porter à dix-huit mois pour rassembler tout le monde.
Ce qui compte le plus, c’est le délai notifié à la Commission européenne, et j’attends les informations de M. le ministre sur ce point. J’ai déjà tenu ce discours à ceux qui voulaient modifier l’IR-PME : il n’est pas opportun de changer des éléments notifiés à la Commission, car cela peut porter préjudice à la stabilité juridique du texte. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2295. Je ne suis pas radicale, pas encore (Sourires) , mais j’ai déposé, au nom de mon groupe, un amendement fixant le délai à dix-huit mois. Il me semble qu’il s’agit d’un bon compromis entre les vingt-quatre mois du texte et les douze de Mme Louwagie.
Nous avons intérêt à favoriser le rachat d’entreprises par les salariés, sachant que le crédit d’impôt est aujourd’hui très peu utilisé. Tout ce qui facilitera ces opérations de rachat ira dans le bon sens. Quel est l’avis de la commission ? Je demande à Mme Louwagie de retirer son amendement et je donne, bien entendu, un avis favorable à l’amendement de Mme Pires Beaune, identique à celui de la commission. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je pense que la mesure prévue par l’article 49 est très importante, et sera très efficace pour la reprise d’une entreprise en difficulté. Avant la modification issue de la loi PACTE, un salarié voulant reprendre une entreprise et bénéficier du crédit d’impôt devait être accompagné de quatorze autres. Cette condition réservait le dispositif à un nombre limité d’entreprises.
Nous avons supprimé ce seuil, ce qui est un assouplissement considérable. Un seul salarié suffira désormais pour reprendre l’entreprise, et il bénéficiera du crédit d’impôt. Je suis convaincu que cela facilitera la reprise de nombreuses entreprises en difficulté par les salariés et que le nombre ridicule d’entreprises actuellement concernées – soixante-trois – augmentera fortement.
Mais il faut éviter les abus, car le crédit d’impôt est très puissant. Nous avons donc retenu une condition minimale d’ancienneté dans l’entreprise de deux ans pour le salarié voulant la reprendre. Ce seuil offre une garantie de connaissance de l’entreprise, de maîtrise de ses arcanes, de son plan de financement et de son carnet de commandes – en un mot de compétence.
Monsieur le rapporteur général, nous avons notifié cette condition de deux ans d’ancienneté à la Commission européenne. Car, si l’on ne veut pas qu’elle retoque ce crédit d’impôt, il faut présenter une clause solide contre les abus. Deux ans nous paraissent constituer un socle solide, et il serait compliqué de revenir vers la Commission européenne pour lui soumettre une clause considérablement assouplie.
Madame Louwagie, je comprends vos motivations, mais le délai d’une année me semble insuffisant, si bien que j’émets un avis défavorable à l’adoption de votre amendement. Vous voulez encore simplifier les choses, mais cela me paraît aller trop loin. Et, m’étant engagé sur deux ans auprès de la Commission européenne, je donne un avis de sagesse sur les amendements portant le délai à dix-huit mois. Madame Louwagie, maintenez-vous votre amendement ? Oui. (L’amendement no 1552 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 1951 et 2295, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.) La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1952. Il s’agit d’un amendement de précision. (L’amendement no 1952, accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, les amendements nos 2252 et 2037 tombent.) (L’article 49, amendé, est adopté.)
J’insiste sur le fait que l’amortissement sur les titres sociaux ou les valeurs incorporelles permettrait, en cas de cession ou de revente, de calculer une plus-value par rapport à la valeur comptable nette et non forcément la valeur historique. Cet amendement de bon sens ouvre une porte à cette solution dans certains cas. Quel est l’avis de la commission ? Monsieur le député, votre amendement a été rejeté par la commission réunie en application de l’article 86. Le dispositif que vous proposez pour le rachat d’une entreprise par ses salariés est certes plus vertueux, puisqu’une réduction d’impôt l’est toujours plus qu’un crédit d’impôt – ce n’est pas moi qui vous dirai le contraire – mais il est moins favorable. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? J’ai le même avis que le rapporteur général. Monsieur Mattei, je vous recommande de retirer votre amendement. Le dispositif de reprise d’une entreprise par ses salariés est très favorable, mais il n’a été utilisé, à ma connaissance, que par soixante-trois entreprises l’année dernière. Il n’est pas employé parce qu’il n’est pas connu et que les règles sont trop complexes.
La loi PACTE les a simplifiées, même si nous avons prévu une clause anti abus exigeant que le salarié travaille dans l’entreprise depuis au moins deux ans, afin de ne pas ouvrir le mécanisme à un salarié de complaisance. Une durée de deux ans de présence me paraît légitime et raisonnable.
Le crédit d’impôt proposé aujourd’hui est plus favorable que la réduction d’impôt, et nous avons intérêt à le conserver. La parole est à Mme Véronique Louwagie. L’amendement de Jean-Paul Mattei peut être intéressant, mais il me paraît difficile d’impulser cette évolution par un simple amendement. Autoriser l’amortissement des valeurs incorporelles, comme les fonds de commerce, l’amortissement fiscal des titres sociaux, aurait des conséquences qu’il faut mesurer. En effet, si nous admettions l’amortissement fiscal pour ce dispositif, nous l’admettrions pour le calcul des revenus, dans le cadre des bénéfices industriels et commerciaux, agricoles ou non-commerciaux, ce qui aurait de nombreux impacts, complexes à gérer. L’amortissement comptable existe, mais il me paraît difficile de créer un amortissement fiscal. Bref, ce sujet mérite une réflexion. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Monsieur le ministre, vous soulignez que ce dispositif ne marche pas bien. Je veux bien retirer l’amendement, mais il faut réfléchir à ce problème de l’amortissement des titres de société des valeurs incorporelles. Je suis d’accord avec vous, madame Louwagie, mais cette question se pose réellement dans le cadre de rachats. L’État pourrait retrouver des recettes fiscales dans le cadre de futures plus-values.
Je retire mon amendement. Merci, monsieur Mattei. (L’amendement no 2251 est retiré.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1950 et 2321.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1950. Le dispositif de l’article 49 est plébiscité par l’ensemble des personnes interrogées. Il s’agit, en effet, d’un très bon dispositif et je propose de le proroger d’un an, afin, entre autres, de le cadrer sur la loi de programmation des finances publiques, ce qui me semble vertueux. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2321. Cet amendement est identique à celui de la commission des finances. Comme l’a très bien dit le rapporteur général, proroger d’un an, jusqu’au 31 décembre 2022, l’assouplissement des conditions d’éligibilité à ce crédit d’impôt est une bonne idée, l’année 2022 marquant la fin de l’actuelle loi de programmation des finances publiques.
Nous aurons l’occasion de nous interroger plus tard sur le devenir de ce dispositif après 2022, mais c’est un bon dispositif, et l’élargir est bienvenu. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis favorable. La parole est à M. Charles de Courson. Je suis tout à fait favorable à cet amendement, mais pourquoi ne rend-on pas le système permanent ? Parce que je me méfie des concessions perpétuelles ! (Sourires.) Ce n’est pas une réponse, monsieur le rapporteur général, les concessions perpétuelles n’existant plus depuis longtemps, comme vous le savez : elles sont plafonnées à cinquante ans ! (Les amendements identiques nos 1950 et 2321 sont adoptés.) La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 1545. Le paysage économique est caractérisé par la prédominance des petites et très petites entreprises. Le problème de la transmission de l’entreprise se pose toujours, en l’absence d’un successeur familial. Même si 30 % des dirigeants de PME sont prêts à céder leur entreprise à leurs salariés, cette opération reste très rare, et il faut l’encourager.
Cet amendement a pour objet de ramener de 15 à 5 le nombre minimum de salariés repreneurs requis pour octroyer un crédit d’impôt aux sociétés reprises en interne. Le seuil actuel peut en effet décourager des groupes de salariés potentiellement intéressés par une reprise, ou faire craindre des risques sur la confidentialité à des dirigeants souhaitant constituer en amont un noyau de salariés repreneurs. Quel est l’avis de la commission ? L’article 49 supprime toute condition de nombre de salariés requis pour reprendre une entreprise et bénéficier du crédit d’impôt. Vous proposez de recréer un seuil, fixé à 5 salariés. Votre amendement étant moins favorable que l’article 49, vous devriez le retirer. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à Mme Danielle Brulebois. L’amendement étant satisfait, je le retire. (L’amendement no 1545 est retiré.) Je suis saisie de trois amendements, nos 1552, 1951 et 2295, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1951 et 2295 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 1552. Je m’associe à tous les propos ayant porté sur l’article 49, qui assouplit les conditions d’éligibilité au crédit d’impôt pour le rachat d’une entreprise par ses salariés, en supprimant le seuil minimal de salariés participant au rachat. C’est une bonne mesure, évoquée lors de l’examen du projet de loi PACTE.
Maintenant, il importe d’encadrer le dispositif. Ainsi, les droits de vote attachés aux parts ou actions de la société nouvelle doivent être détenus par au moins 15 salariés de la société rachetée ou, si les effectifs n’excèdent pas cinquante personnes, par au moins 30 % d’entre eux. Ensuite, il existe une condition d’ancienneté minimale, fixée à vingt-quatre mois, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre.
Pour avoir vécu ces périodes de tuilage entre le chef d’entreprise sur le départ et le ou les repreneurs, il me semble que le délai de vingt-quatre mois est excessif, et je vous propose de le ramener à douze. Un délai d’une année est suffisant pour connaître l’entreprise, son savoir-faire, être présenté aux clients et aux fournisseurs. Un délai trop long, en revanche, nourrit les tensions. On sait bien que la situation est difficile pour le chef d’entreprise cédant son poste, qui reste dans la société alors que d’autres personnes ont pris les manettes. J’ai vécu, comme beaucoup, ces tensions nées d’une cohabitation trop longue.
Il me semble que le délai de douze mois est le bon, car il permet le tuilage tout en évitant les tensions. Je sais que certains amendements proposeront dix-huit mois, mais pour avoir vécu cette situation, douze mois me paraissent préférables. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1951. Dans un souci de compromis entre le délai de vingt-quatre mois fixé par le texte et celui de douze mois, je propose, en bon radical et bon centriste, de le porter à dix-huit mois pour rassembler tout le monde.
Ce qui compte le plus, c’est le délai notifié à la Commission européenne, et j’attends les informations de M. le ministre sur ce point. J’ai déjà tenu ce discours à ceux qui voulaient modifier l’IR-PME : il n’est pas opportun de changer des éléments notifiés à la Commission, car cela peut porter préjudice à la stabilité juridique du texte. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2295. Je ne suis pas radicale, pas encore (Sourires) , mais j’ai déposé, au nom de mon groupe, un amendement fixant le délai à dix-huit mois. Il me semble qu’il s’agit d’un bon compromis entre les vingt-quatre mois du texte et les douze de Mme Louwagie.
Nous avons intérêt à favoriser le rachat d’entreprises par les salariés, sachant que le crédit d’impôt est aujourd’hui très peu utilisé. Tout ce qui facilitera ces opérations de rachat ira dans le bon sens. Quel est l’avis de la commission ? Je demande à Mme Louwagie de retirer son amendement et je donne, bien entendu, un avis favorable à l’amendement de Mme Pires Beaune, identique à celui de la commission. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je pense que la mesure prévue par l’article 49 est très importante, et sera très efficace pour la reprise d’une entreprise en difficulté. Avant la modification issue de la loi PACTE, un salarié voulant reprendre une entreprise et bénéficier du crédit d’impôt devait être accompagné de quatorze autres. Cette condition réservait le dispositif à un nombre limité d’entreprises.
Nous avons supprimé ce seuil, ce qui est un assouplissement considérable. Un seul salarié suffira désormais pour reprendre l’entreprise, et il bénéficiera du crédit d’impôt. Je suis convaincu que cela facilitera la reprise de nombreuses entreprises en difficulté par les salariés et que le nombre ridicule d’entreprises actuellement concernées – soixante-trois – augmentera fortement.
Mais il faut éviter les abus, car le crédit d’impôt est très puissant. Nous avons donc retenu une condition minimale d’ancienneté dans l’entreprise de deux ans pour le salarié voulant la reprendre. Ce seuil offre une garantie de connaissance de l’entreprise, de maîtrise de ses arcanes, de son plan de financement et de son carnet de commandes – en un mot de compétence.
Monsieur le rapporteur général, nous avons notifié cette condition de deux ans d’ancienneté à la Commission européenne. Car, si l’on ne veut pas qu’elle retoque ce crédit d’impôt, il faut présenter une clause solide contre les abus. Deux ans nous paraissent constituer un socle solide, et il serait compliqué de revenir vers la Commission européenne pour lui soumettre une clause considérablement assouplie.
Madame Louwagie, je comprends vos motivations, mais le délai d’une année me semble insuffisant, si bien que j’émets un avis défavorable à l’adoption de votre amendement. Vous voulez encore simplifier les choses, mais cela me paraît aller trop loin. Et, m’étant engagé sur deux ans auprès de la Commission européenne, je donne un avis de sagesse sur les amendements portant le délai à dix-huit mois. Madame Louwagie, maintenez-vous votre amendement ? Oui. (L’amendement no 1552 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 1951 et 2295, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.) La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1952. Il s’agit d’un amendement de précision. (L’amendement no 1952, accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, les amendements nos 2252 et 2037 tombent.) (L’article 49, amendé, est adopté.)
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 1549.
Il est défendu.
(L’amendement no 1549, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Les amendements nos 2294 et 2253 peuvent être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2294. Il vise à faire en sorte que l’élargissement du dispositif du crédit-vendeur ne soit pas limité aux seules petites entreprises mais bénéficie également aux PME. Pour ce faire, nous proposons de modifier le seuil d’éligibilité, en remplaçant d’une part « entreprise » par « et moyennes entreprises » et d’autre part « cinquante » par « deux cent cinquante ». La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 2253. Il va dans le même sens. S’en tenir aux petites entreprises me semble beaucoup trop restrictif, compte tenu de la réalité des rachats d’entreprises. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Tel qu’il est prévu, le dispositif concerne surtout les rachats tels que la cession d’un fonds de commerce. Il est donc centré sur les entreprises dont les bénéfices sont imposés à l’impôt sur le revenu, et non à l’impôt sur les sociétés.
Il est assez rare qu’une PME y ait recours, car elle est en général vendue hors du cadre du crédit-vendeur. La commission est défavorable à la modification du dispositif. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. En outre, les amendements posent problème au regard de la définition de la PME par le droit communautaire. Ils risquent donc de compliquer l’élargissement du dispositif. Je suggère leur retrait. À défaut, avis défavorable. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. J’estime que nous passons à côté d’une occasion d’améliorer le dispositif. Au demeurant, mes deux amendements suivants visent à l’encadrer en limitant le bénéfice du crédit-vendeur dans le temps, ce qui n’est pas le cas dans le texte. Ainsi, la récupération de cette créance par l’État serait bien identifiée dans le temps. Il me semble vraiment dommage de se priver de ces améliorations.
Monsieur le rapporteur général, vous évoquiez les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu. Or le texte se réfère aux parts sociales et laisse de côté la notion de translucidité fiscale.
Il me semble dommage de renoncer à l’améliorer. En pratique, le crédit-vendeur fonctionne bien, y compris pour les entreprises de taille un peu plus importante que celles visées ici. Adopter les amendements donnerait un peu de fluidité aux cessions d’entreprises. La reprise des entreprises par les salariés en bénéficierait également.
Il s’agit de favoriser le vendeur de l’entreprise en faisant en sorte qu’il ne soit pas obligé de verser immédiatement l’impôt sur la plus-value, ce qui l’oblige souvent à souscrire un crédit-vendeur d’un montant au moins équivalent à la première tranche de l’impôt qu’il doit acquitter. L’adoption de l’amendement permettrait de fluidifier les cessions d’entreprises. Je le maintiens donc. (Les amendements nos 2294 et 2253, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Les amendements nos 2254 et 2255 peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour les soutenir. Ils étaient liés à l’amendement précédent. Je les retire. (Les amendements nos 2254 et 2255 sont retirés.) Les amendements nos 12, 76, 456 et 1638 peuvent être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 12, 76 et 456 sont identiques.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 12. Nous sommes tous d’accord sur l’importance de la transmission et de la reprise d’entreprises. Nous sommes tous d’accord pour considérer que le crédit-vendeur constitue une solution intéressante. La question, que soulevait à l’instant Jean-Paul Mattei, est de savoir où l’on place la barre d’éligibilité. Pour ma part, je propose de la placer non pas à 50 salariés, ce qui est trop limité, mais à 250.
Monsieur le ministre, vous évoquiez le problème de compatibilité avec le droit européen qui est susceptible d’advenir. Je propose précisément d’en rester au seuil retenu par la définition européenne de la PME, lequel, sauf erreur de ma part, est fixé à 250 salariés, afin d’éviter tout problème de cette nature.
Dans certains secteurs, par exemple celui de l’agro-alimentaire que je connais bien et vous également, monsieur le ministre, le nombre de salariés augmente très vite. Fixer la barre à 250 salariés me semble possible, raisonnable et intéressant. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 76. Il est identique à celui que vient de présenter Marc Le Fur et vise à étendre le bénéfice du crédit-vendeur aux petites et moyennes entreprises au sens de la définition européenne. J’évoquerai deux points.
Monsieur le ministre, à l’heure actuelle, ce sont souvent les difficultés de financement des acquéreurs éventuels qui font échouer les reprises d’entreprise. Il faut donc favoriser le recours au crédit-vendeur, lequel constitue un excellent moyen de résoudre cette difficulté et d’apporter une solution aux repreneurs d’entreprises. Sans ce dispositif, de nombreuses cessions d’entreprise n’auraient pas lieu. Il s’agit d’un point essentiel.
Monsieur le rapporteur général, vous indiquez qu’il n’est pas utile de modifier le seuil d’éligibilité du dispositif au motif que celui-ci concerne les entreprises individuelles, lesquelles dépassent rarement le seuil de 50 salariés. Rien de grave à cela : si ce cas est rare, le dispositif demeurera de toute façon centré sur les petites entreprises ! Ce n’est donc pas un problème en soi. Mais, même si c’est rare, si cela peut favoriser quelques cessions d’entreprises supplémentaires, ce sera intéressant. Tel est le sens de l’amendement. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 456. Je serai brève, car tout a déjà été dit. Cet amendement est identique aux deux précédents. Si nous voulons vraiment nous donner les moyens de développer le recours au crédit-vendeur, il faut que le champ du mécanisme soit un peu plus large qu’il ne l’est à l’heure actuelle. Le problème est double.
Monsieur le ministre, vous mettez en avant un problème de définition de la notion de PME. Nous proposons de retenir la définition du droit européen, qui est très claire.
Par ailleurs, comme le rappelait M. le rapporteur général, la plupart des entreprises concernées relèvent non de l’impôt sur les sociétés, mais de l’impôt sur le revenu. Du point de vue de la translucidité fiscale, qu’il faut renforcer, notre collègue Mattei l’a évoqué, le dispositif que nous proposons est suffisamment solide. Il présente le bénéfice de la clarté. Il faut simplement procéder à un accroissement des seuils d’éligibilité en matière de nombre de salariés et de montant de chiffre d’affaires. La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l’amendement no 1638. Il va dans le même sens que les précédents et vise à étendre l’élargissement du dispositif aux PME, telles qu’elles sont définies par le droit communautaire. Nous gagnerions en clarté en adoptant une seule et même définition de la PME, en l’espèce celle du droit européen. Tâchons de simplifier un peu notre droit. Quel est l’avis de la commission ? Comme sur les amendements précédents, j’émets un avis défavorable. Je comprends bien les arguments qui ont été avancés. Nous sommes bien d’accord : il s’agit d’une question de trésorerie.
Toutefois, nous nous heurtons ici au problème classique des extensions de champs d’application : on ne sait pas les évaluer, et on ne sait pas où on va. Je maintiens donc un avis défavorable sur l’ensemble des amendements, même si je comprends votre argumentation, chers collègues. C’est une question de coût ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je partage l’ambition de nombreux parlementaires visant à développer le recours au crédit-vendeur. Elle bute toutefois sur l’obstacle européen, que j’ai évoqué, et sur l’obstacle que vient d’indiquer M. le rapporteur général, qui a rappelé le problème de trésorerie pour l’État qui se pose : dès lors que l’on étale le paiement de l’impôt, il en résulte un problème de trésorerie pour l’État, dont je ne puis prendre la responsabilité. Cela, nous l’admettons ! Ce que je vous propose, car l’idée est intéressante, c’est d’évaluer, dans un an, le nouveau fonctionnement de l’étalement de l’impôt, afin de déterminer s’il est véritablement efficace en matière de reprise d’entreprises et de recours au crédit-vendeur. Si tel est le cas, prévoyons une clause de revoyure pour l’année prochaine afin d’étendre à 250 salariés le seuil d’éligibilité au bénéfice du crédit-vendeur.
Ainsi, nous poursuivrons notre objectif de développer les reprises d’entreprise, mais en disposant de chiffres précis et en évitant de faire peser une menace sur la trésorerie de l’État. Je suggère donc le retrait des amendements. À défaut, avis défavorable. La parole est à Mme Véronique Louwagie. Monsieur le ministre, je vous remercie de prendre en compte nos arguments. Vous évoquez un problème de trésorerie pour l’État. Nous voulons bien l’entendre. Mais je ne partage pas votre analyse. En effet, s’il n’y avait pas de crédit-vendeur, dans certains cas, les cessions d’entreprises n’auraient pas lieu. Il n’y aurait donc aucune entrée de trésorerie pour l’État non plus, faute de plus-value. En revanche, il en résulterait, comme nous en constatons souvent, un certain nombre de fermetures d’entreprises, faute de repreneur, avec les pertes d’emplois qui vont avec.
Certes, il faut mesurer l’impact du dispositif en termes de trésorerie, mais je ne suis pas sûre qu’il soit forcément sensible. D’ailleurs, le calcul sera difficile à faire : comment savoir combien d’entreprises fermeraient réellement, sans le dispositif ? Mais bref, nous nous rangeons à votre analyse et retirons nos amendements. (L’amendement no 76 est retiré.) La parole est à M. Marc Le Fur. Nous progressons. Se donner un délai d’un an, pourquoi pas ? Tout cela est raisonnable. Je retire mon amendement. (L’amendement no 12 est retiré.) Retirez-vous également le vôtre, madame Dalloz ? Oui, madame la présidente. (L’amendement no 456 est retiré.) Madame Magnier ? Je le retire également. (L’amendement no 1638 est retiré.) La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1588. C’est un amendement rédactionnel. (L’amendement no 1588, accepté par le Gouvernement, est adopté.) (L’article 50, amendé, est adopté.)
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2294. Il vise à faire en sorte que l’élargissement du dispositif du crédit-vendeur ne soit pas limité aux seules petites entreprises mais bénéficie également aux PME. Pour ce faire, nous proposons de modifier le seuil d’éligibilité, en remplaçant d’une part « entreprise » par « et moyennes entreprises » et d’autre part « cinquante » par « deux cent cinquante ». La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 2253. Il va dans le même sens. S’en tenir aux petites entreprises me semble beaucoup trop restrictif, compte tenu de la réalité des rachats d’entreprises. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Tel qu’il est prévu, le dispositif concerne surtout les rachats tels que la cession d’un fonds de commerce. Il est donc centré sur les entreprises dont les bénéfices sont imposés à l’impôt sur le revenu, et non à l’impôt sur les sociétés.
Il est assez rare qu’une PME y ait recours, car elle est en général vendue hors du cadre du crédit-vendeur. La commission est défavorable à la modification du dispositif. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. En outre, les amendements posent problème au regard de la définition de la PME par le droit communautaire. Ils risquent donc de compliquer l’élargissement du dispositif. Je suggère leur retrait. À défaut, avis défavorable. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. J’estime que nous passons à côté d’une occasion d’améliorer le dispositif. Au demeurant, mes deux amendements suivants visent à l’encadrer en limitant le bénéfice du crédit-vendeur dans le temps, ce qui n’est pas le cas dans le texte. Ainsi, la récupération de cette créance par l’État serait bien identifiée dans le temps. Il me semble vraiment dommage de se priver de ces améliorations.
Monsieur le rapporteur général, vous évoquiez les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu. Or le texte se réfère aux parts sociales et laisse de côté la notion de translucidité fiscale.
Il me semble dommage de renoncer à l’améliorer. En pratique, le crédit-vendeur fonctionne bien, y compris pour les entreprises de taille un peu plus importante que celles visées ici. Adopter les amendements donnerait un peu de fluidité aux cessions d’entreprises. La reprise des entreprises par les salariés en bénéficierait également.
Il s’agit de favoriser le vendeur de l’entreprise en faisant en sorte qu’il ne soit pas obligé de verser immédiatement l’impôt sur la plus-value, ce qui l’oblige souvent à souscrire un crédit-vendeur d’un montant au moins équivalent à la première tranche de l’impôt qu’il doit acquitter. L’adoption de l’amendement permettrait de fluidifier les cessions d’entreprises. Je le maintiens donc. (Les amendements nos 2294 et 2253, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Les amendements nos 2254 et 2255 peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour les soutenir. Ils étaient liés à l’amendement précédent. Je les retire. (Les amendements nos 2254 et 2255 sont retirés.) Les amendements nos 12, 76, 456 et 1638 peuvent être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 12, 76 et 456 sont identiques.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 12. Nous sommes tous d’accord sur l’importance de la transmission et de la reprise d’entreprises. Nous sommes tous d’accord pour considérer que le crédit-vendeur constitue une solution intéressante. La question, que soulevait à l’instant Jean-Paul Mattei, est de savoir où l’on place la barre d’éligibilité. Pour ma part, je propose de la placer non pas à 50 salariés, ce qui est trop limité, mais à 250.
Monsieur le ministre, vous évoquiez le problème de compatibilité avec le droit européen qui est susceptible d’advenir. Je propose précisément d’en rester au seuil retenu par la définition européenne de la PME, lequel, sauf erreur de ma part, est fixé à 250 salariés, afin d’éviter tout problème de cette nature.
Dans certains secteurs, par exemple celui de l’agro-alimentaire que je connais bien et vous également, monsieur le ministre, le nombre de salariés augmente très vite. Fixer la barre à 250 salariés me semble possible, raisonnable et intéressant. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 76. Il est identique à celui que vient de présenter Marc Le Fur et vise à étendre le bénéfice du crédit-vendeur aux petites et moyennes entreprises au sens de la définition européenne. J’évoquerai deux points.
Monsieur le ministre, à l’heure actuelle, ce sont souvent les difficultés de financement des acquéreurs éventuels qui font échouer les reprises d’entreprise. Il faut donc favoriser le recours au crédit-vendeur, lequel constitue un excellent moyen de résoudre cette difficulté et d’apporter une solution aux repreneurs d’entreprises. Sans ce dispositif, de nombreuses cessions d’entreprise n’auraient pas lieu. Il s’agit d’un point essentiel.
Monsieur le rapporteur général, vous indiquez qu’il n’est pas utile de modifier le seuil d’éligibilité du dispositif au motif que celui-ci concerne les entreprises individuelles, lesquelles dépassent rarement le seuil de 50 salariés. Rien de grave à cela : si ce cas est rare, le dispositif demeurera de toute façon centré sur les petites entreprises ! Ce n’est donc pas un problème en soi. Mais, même si c’est rare, si cela peut favoriser quelques cessions d’entreprises supplémentaires, ce sera intéressant. Tel est le sens de l’amendement. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 456. Je serai brève, car tout a déjà été dit. Cet amendement est identique aux deux précédents. Si nous voulons vraiment nous donner les moyens de développer le recours au crédit-vendeur, il faut que le champ du mécanisme soit un peu plus large qu’il ne l’est à l’heure actuelle. Le problème est double.
Monsieur le ministre, vous mettez en avant un problème de définition de la notion de PME. Nous proposons de retenir la définition du droit européen, qui est très claire.
Par ailleurs, comme le rappelait M. le rapporteur général, la plupart des entreprises concernées relèvent non de l’impôt sur les sociétés, mais de l’impôt sur le revenu. Du point de vue de la translucidité fiscale, qu’il faut renforcer, notre collègue Mattei l’a évoqué, le dispositif que nous proposons est suffisamment solide. Il présente le bénéfice de la clarté. Il faut simplement procéder à un accroissement des seuils d’éligibilité en matière de nombre de salariés et de montant de chiffre d’affaires. La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l’amendement no 1638. Il va dans le même sens que les précédents et vise à étendre l’élargissement du dispositif aux PME, telles qu’elles sont définies par le droit communautaire. Nous gagnerions en clarté en adoptant une seule et même définition de la PME, en l’espèce celle du droit européen. Tâchons de simplifier un peu notre droit. Quel est l’avis de la commission ? Comme sur les amendements précédents, j’émets un avis défavorable. Je comprends bien les arguments qui ont été avancés. Nous sommes bien d’accord : il s’agit d’une question de trésorerie.
Toutefois, nous nous heurtons ici au problème classique des extensions de champs d’application : on ne sait pas les évaluer, et on ne sait pas où on va. Je maintiens donc un avis défavorable sur l’ensemble des amendements, même si je comprends votre argumentation, chers collègues. C’est une question de coût ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je partage l’ambition de nombreux parlementaires visant à développer le recours au crédit-vendeur. Elle bute toutefois sur l’obstacle européen, que j’ai évoqué, et sur l’obstacle que vient d’indiquer M. le rapporteur général, qui a rappelé le problème de trésorerie pour l’État qui se pose : dès lors que l’on étale le paiement de l’impôt, il en résulte un problème de trésorerie pour l’État, dont je ne puis prendre la responsabilité. Cela, nous l’admettons ! Ce que je vous propose, car l’idée est intéressante, c’est d’évaluer, dans un an, le nouveau fonctionnement de l’étalement de l’impôt, afin de déterminer s’il est véritablement efficace en matière de reprise d’entreprises et de recours au crédit-vendeur. Si tel est le cas, prévoyons une clause de revoyure pour l’année prochaine afin d’étendre à 250 salariés le seuil d’éligibilité au bénéfice du crédit-vendeur.
Ainsi, nous poursuivrons notre objectif de développer les reprises d’entreprise, mais en disposant de chiffres précis et en évitant de faire peser une menace sur la trésorerie de l’État. Je suggère donc le retrait des amendements. À défaut, avis défavorable. La parole est à Mme Véronique Louwagie. Monsieur le ministre, je vous remercie de prendre en compte nos arguments. Vous évoquez un problème de trésorerie pour l’État. Nous voulons bien l’entendre. Mais je ne partage pas votre analyse. En effet, s’il n’y avait pas de crédit-vendeur, dans certains cas, les cessions d’entreprises n’auraient pas lieu. Il n’y aurait donc aucune entrée de trésorerie pour l’État non plus, faute de plus-value. En revanche, il en résulterait, comme nous en constatons souvent, un certain nombre de fermetures d’entreprises, faute de repreneur, avec les pertes d’emplois qui vont avec.
Certes, il faut mesurer l’impact du dispositif en termes de trésorerie, mais je ne suis pas sûre qu’il soit forcément sensible. D’ailleurs, le calcul sera difficile à faire : comment savoir combien d’entreprises fermeraient réellement, sans le dispositif ? Mais bref, nous nous rangeons à votre analyse et retirons nos amendements. (L’amendement no 76 est retiré.) La parole est à M. Marc Le Fur. Nous progressons. Se donner un délai d’un an, pourquoi pas ? Tout cela est raisonnable. Je retire mon amendement. (L’amendement no 12 est retiré.) Retirez-vous également le vôtre, madame Dalloz ? Oui, madame la présidente. (L’amendement no 456 est retiré.) Madame Magnier ? Je le retire également. (L’amendement no 1638 est retiré.) La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1588. C’est un amendement rédactionnel. (L’amendement no 1588, accepté par le Gouvernement, est adopté.) (L’article 50, amendé, est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article.
La parole est à M. Gilles Carrez. J’étais consterné lorsque j’ai appris, au mois de mai dernier, par le magazine américain Forbes , que le président Macron avait décidé de supprimer l’exit tax. Je me suis rendu compte alors qu’une fois de plus, l’élite financière – les fonds d’investissement, les startuppers – avait frappé.
Vous le savez, monsieur le ministre : pendant dix ans, de 2002 à 2012, nous avions su résister. Nous avons également su résister de 2012 à 2017.
Je rappelle que cette taxe avait été instaurée à l’initiative de Dominique Strauss-Kahn en 1999. Elle avait été annulée par une décision aberrante de la Cour de justice de l’Union européenne consistant à faire primer la libre circulation des capitaux sur la souveraineté fiscale du pays. Nous avions su résister en convainquant Nicolas Sarkozy, vous vous en souvenez probablement, de la rétablir en 2011.
Cette taxe n’existe pas uniquement pour des raisons techniques, mais aussi pour des raisons morales et civiques. C’est sur ces dernières que j’insisterai, car les raisons techniques sont connues. Comment admettre qu’il existe à nos portes, au sein de l’Union européenne, un paradis fiscal, la Belgique, qui taxe à zéro les plus-values sur les valeurs mobilières ?
Ce manque d’harmonisation fiscale à l’échelle européenne provoque un problème moral et civique. Beaucoup de nos concitoyens créateurs d’entreprise décident de quitter temporairement le pays et de rejoindre des cieux fiscalement plus favorables dans le seul but d’éviter l’impôt sur des plus-values qui s’élèvent à plusieurs millions d’euros, voire plusieurs dizaines ou plusieurs centaines de millions. N’exagérons rien… Vous en connaissez des exemples comme moi, monsieur le ministre !
Si on y réfléchit, la plus-value est certes due au talent du chef d’entreprise, mais elle est d’abord due au talent des salariés,… À la valeur travail ! …à la qualité de leur travail, à leur formation, aux équipements et aux services publics financés par la collectivité, par nos impôts ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, SOC, GDR et FI.– M. Jean-Paul Mattei applaudit également.)
Par conséquent, je me réjouis que nous prévoyions de revenir, par le biais de l’article 51, sur cette décision malencontreuse. Monsieur le ministre, je souhaite que vous acceptiez sans réserve l’amendement no 1953 déposé par la commission des finances, car il concilie justice fiscale et efficacité économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. Sébastien Jumel. J’approuve l’esprit, la lettre et la tonalité de l’intervention de Gilles Carrez.
Lorsqu’Emmanuel Macron a décidé de supprimer l’exit tax, il n’avait pas prévu de se faire rattraper après-demain, le 17 novembre, par des millions de Français – ceux qui « clopent », ceux qui « roulent au diesel » – qui n’ont pas, eux, la possibilité d’échapper aux taxes qu’on leur met sur la carafe. Eh oui, c’est bien de cela qu’il s’agit !
On essaie de nous empapaouter, avec cette histoire. Le Figaro titre : « Les députés veulent durcir la nouvelle exit tax ». Les Échos titrent : « Les députés renforcent la nouvelle exit tax ». Pourtant, vous le savez bien, le dispositif que vous proposez permet l’opportunisme fiscal ; il encourage, au bout du compte, l’évasion fiscale !
Vous voulez passer de quinze à deux ans. Drôle de progrès ! Drôle de symbole ! Belle provocation au moment où la France qui travaille n’en peut plus de voir les inégalités fiscales monter, de voir les plus riches recevoir des cadeaux alors que les plus nombreux, les retraités, les travailleurs, sont la variable d’ajustement.
Alors, il y a des débats. On nous dit que le rendement n’est pas suffisant – il y a même des débats sur le rendement de l’exit tax ! Peu importe, puisque sa vocation est d’être dissuasive ! C’est de la prévention : il s’agit d’affirmer un principe, de dire que délocaliser ses actions pour échapper à l’impôt n’est pas un comportement citoyen.
C’est la raison pour laquelle nous proposerons des amendements, soit pour supprimer l’article, soit pour ramener à quinze ans l’interdiction d’échapper à l’impôt. Sur les amendements de suppression de l’article, nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Éric Coquerel. J’entendais hier le Président de la République expliquer que le poids de l’impôt par rapport à la richesse produite avait été réduit depuis son arrivée au pouvoir. Avec cet article, on voit bien le problème : il se réduit peut-être, mais de façon absolument inégalitaire. En réalité, vous réduisez l’impôt des plus riches de nos concitoyens, mettant de côté tant son aspect redistributif que l’idée républicaine de contribution égalitaire.
Un peu de pédagogie : l’exit tax, c’est une taxe qui frappe ceux qui, disposant de plus de 800 000 euros d’actions ou d’obligations, quittent la France pour profiter du dumping fiscal permis par l’Union européenne – qui, je le rappelle, interdit l’harmonisation fiscale en son sein alors que le libre-échange est non seulement autorisé mais encouragé. Ils payent alors 30 % de la plus-value latente de cette vente.
Cet article est une hypocrisie. Face à la levée de boucliers qui a suivi l’article de Forbes laissant penser que M. Macron voulait carrément supprimer l’exit tax, vous décidez de ramener la période pendant laquelle on doit conserver les actions de quinze à deux ans. Mais vous savez très bien qu’un délai de deux ans ne sera absolument pas dissuasif pour quelqu’un qui veut faire des bénéfices en utilisant ce jeu de bonneteau fiscal permis, je le répète, par les règles européennes.
Vous nous dites aussi que cet impôt ne sert à rien. Mais justement ! Pour une fois qu’un impôt est dissuasif ! Dans votre évaluation préalable, vous estimez vous-même que l’État peut perdre jusqu’à 5,4 milliards d’euros dans les années à venir en cas de suppression de cet impôt, parce que les gens n’auront plus aucune contrainte. Bref, c’est un dispositif dissuasif, et l’on devrait s’en réjouir plutôt que de le supprimer. Merci de conclure, monsieur Coquerel… Il y a des gens en France qui n’ont pas besoin de barrages ou de mobilisations pour se faire entendre. Ils ont des gilets dorés, eux – et vous leur facilitez le travail en favorisant systématiquement l’intérêt privé par rapport à l’intérêt général. Cette politique-là devrait cesser. La parole est à M. Charles de Courson. Mes chers collègues, je suis toujours un peu étonné de la discussion sur l’exit tax. Moi, je l’ai toujours combattue. Son objet était de freiner les départs vers l’étranger : cela a-t-il réussi ? Nullement. Et, au cours des six dernières années, elle n’a rapporté que 25 millions par an. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR, FI et SOC.) Cela prouve qu’elle a réussi ! Non, pas du tout, elle n’a pas réussi ! Les droits suspendus atteignent 5,3 milliards d’euros à la fin de l’année 2017. Justement ! C’est la démonstration de la réussite. Non, et cette taxe a même un effet pervers : elle accélère les départs. Les gens se disent que, puisqu’il faut attendre quinze ans, autant partir très tôt !
Je suis profondément pro-européen. Le vrai problème, c’est l’attractivité de la France, pas l’exit tax !
Certains invoquent des principes moraux : partir à l’étranger, ce ne serait pas bien. Mais l’on peut partir à l’étranger pour de nombreuses raisons : des raisons familiales, des raisons climatiques, que sais-je… Ouais, bien sûr… Non seulement l’exit tax n’a pas d’effet positif, mais elle a un effet négatif : ce sont les faits, mes chers collègues. Soyons pragmatiques.
Bref, j’ai toujours combattu l’exit tax, qui devrait être supprimée. Le Gouvernement propose une mesure intermédiaire, avec la réduction du délai à deux ans. Mais je crois qu’il faut être clair, dans la vie ! L’ISF sur les valeurs mobilières a été supprimé ; on peut être pour, on peut être contre, mais il faut être logique. C’est vrai, c’est la même logique ! Donc, si le pays est attractif, il n’a pas besoin d’exit tax. D’ailleurs, pourrait-on ouvrir les fenêtres de la France de temps en temps ? Beaucoup de pays ont-ils créé de telles taxes ? Tous ! L’Allemagne, l’Espagne… Mais pas du tout ! Prenez la Belgique ! (Exclamations.) C’est bien le problème ! Les Belges ne taxent pas les plus-values. Voilà pourquoi je suis pour la suppression pure et simple de cet impôt. Mes chers collègues, je précise que la demande de scrutin public sur les amendements de suppression émane également du groupe Socialistes et apparentés.
La parole est à Mme Émilie Cariou. Je ne partage pas du tout l’opinion de M. de Courson, mais je ne partage pas non plus ce qui a été dit à gauche de cet hémicycle.
Monsieur de Courson, je suis désolée, mais nous ne serons jamais attractifs vis-à-vis des paradis fiscaux ! Exactement ! Nous n’allons pas passer à une imposition zéro, ce n’est pas possible. Nous sommes un État développé, nous devons financer nos services publics. Chacun doit contribuer à l’impôt, qui a de surcroît une vertu redistributive. Nous n’allons pas passer à 0 % pour nous aligner sur la Belgique ! Des choses pareilles ne sont pas acceptables.
L’exit tax a une vertu, comme l’a dit M. Carrez : c’est un impôt qui vise à éviter l’optimisation fiscale de ceux qui partent à l’étranger pour céder leur portefeuille d’actions.
Le Gouvernement ne propose pas de supprimer le dispositif : l’exit tax est maintenue, avec un sursis de paiement, celui-ci se déclenchant dans certaines situations. Le Gouvernement propose, en revanche, de ramener le délai de mise sous surveillance de quinze à deux ans. Nous avons voté en commission des finances un amendement visant à faire passer ce délai à cinq ans, une durée régulièrement utilisée pour les mécanismes anti-abus. Cela me paraît raisonnable. Deux ans, ce n’est pas suffisant : il est alors très facile de se délocaliser pour liquider ses actions.
Je crois qu’il faut maintenir ce dispositif. L’amendement de la commission des finances sécurise à mon sens la lutte contre les abus. Car, vous avez raison, monsieur de Courson, on peut partir à l’étranger pour de nombreuses raisons : le problème, c’est quand on part uniquement pour pouvoir liquider son portefeuille d’actions. En effet, comme l’a dit M. Carrez, la valeur a été créée en France, par les travailleurs français, par les consommateurs français. Ces départs sont donc choquants.
Nous vous proposerons un autre amendement, de précision, au sujet des titres à prépondérance immobilière. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Christine Pires Beaune. Monsieur le ministre, trop, c’est trop ! Après la suppression de l’ISF, après l’instauration de la flat tax, dont je rappelle qu’elle bénéficie aux 5 % des Français les plus riches, voilà le coup de rabot sur l’exit tax – et encore, si le Président de la République n’avait pas reculé, elle serait tout simplement supprimée ! Cet article revient sur cette promesse, mais vise quand même à réduire fortement cet impôt.
L’exit tax est en effet un mécanisme anti-abus, une taxe dissuasive : par définition, moins elle rapporte, mieux elle joue son rôle. En outre, elle ne concerne que très peu de contribuables, en raison du seuil élevé retenu. Contrairement à ce que vous disiez, monsieur de Courson, la plupart des pays développés disposent d’un système similaire, M. Carrez a raison ! Pas tous ! Sur un autre point encore, je rejoindrai M. Carrez : c’est surtout une question d’équité fiscale. Car ces plus-values, à quoi sont-elles dues ? Aux infrastructures publiques, aux crédits d’impôts comme le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ou le crédit impôt recherche, au système éducatif, au système de formation continue… et surtout au travail des salariés de ces entreprises !
Le groupe socialiste a déposé un amendement de suppression de cet article, ainsi que des amendements de repli. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Je m’exprime ici à titre personnel : l’exit tax est à mon sens un système qui fonctionne bien. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement de suppression de l’article.
En effet, les rentrées ne sont pas importantes, mais il s’agit d’un régime de report : c’est le principe même ! Exactement ! C’est le principe même ! Dire que cela ne rapporte rien est un non-sens.
D’ailleurs, il est légitime de payer l’impôt ! J’ai soutenu la flat tax, même si j’aurais peut-être fixé un taux un peu plus élevé. J’étais favorable à une suppression complète de l’ISF. Mais en l’occurrence, cet impôt est dû et il doit être payé ! Ce n’est pas parce qu’on quitte le pays qu’on ne doit plus rien. Qu’est-ce que c’est que ce système où il suffirait de quitter le pays pour être exonéré ?
Franchement, je pense que le système fonctionne bien, y compris avec la durée actuelle. Je me rallierai certainement à la proposition de la commission des finances, mais je trouverais vraiment dommage de supprimer ou d’aménager trop profondément cet impôt. Il fonctionne, il est dissuasif, et le principe de moralité ainsi affirmé me paraît fondamental. Nous en venons aux amendements.
Je suis saisie de cinq amendements de suppression, nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1402. Il est défendu. La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l’amendement no 2115. Je crois beaucoup à la force symbolique du consentement à l’impôt, principe consubstantiel à notre modèle social français. Vous êtes en train d’abîmer ce consentement en multipliant chaque jour les injustices fiscales. Le sentiment est profond dans l’opinion publique qu’il vaut mieux être riche et bien portant que pauvre et en mauvaise santé.
C’est un symbole que vous attaquez. Vous envoyez un signal désastreux en supprimant cette taxe – car le dispositif est tellement affadi qu’on peut parler de suppression. Mais non ! Bien sûr, l’outil n’est pas idéal, et nous avons d’ailleurs fait des propositions pour que l’évasion fiscale soit moins facile dans notre pays, pour que les plus riches n’échappent pas à l’impôt grâce aux conseils, grâce aux experts, grâce à l’élite financière. Mais au-delà de la bataille des chiffres, le fait est que vous balayez d’un revers de main la portée préventive, dissuasive et symbolique de l’exit tax. Ce faisant, vous continuez à abîmer le consentement à l’impôt et vous nourrissez le sentiment de l’injustice fiscale.
Ce sentiment-là va vous rattraper, il va même vous mordre les fesses samedi. Car cela n’est plus possible : trop c’est trop !
Charles de Courson est cohérent : il était favorable à la suppression de l’ISF et aux divers cadeaux fiscaux. Nous le sommes aussi en refusant ce cadeau supplémentaire. La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l’amendement no 2145. En réponse à ceux qui nous disent que cet article ne supprimera pas l’exit tax, je préfère me référer au Gouvernement, lorsqu’il l’a présenté. Le 24 septembre, devant la commission des finances, Bruno Le Maire a dit : « Oui, nous supprimons l’exit tax. Nous la supprimons en mettant fin au délai de quinze ans qui avait conduit nombre de contribuables à quitter le territoire français. » Les mots sont clairs. Mme Cariou nous a expliqué qu’en réalité, l’exit tax n’était pas supprimée. Mais si, le nouveau délai aboutit bien à une suppression de l’exit tax. Ce n’est pas le texte ! Et je dirai à ceux qui essaient de se donner bonne conscience, car ce n’est que ça, en proposant un délai de cinq ans au lieu de deux ans, que cela ne changera pas fondamentalement le problème : en réalité, les gens qui veulent profiter du dumping fiscal permis par l’Union européenne pourront toujours tricher, tricher et tricher encore.
Revenons à ce qu’a dit Charles de Courson – qui, effectivement, est cohérent. Une chose est sûre : avec cet article, ceux qui voudront partir le feront encore plus vite, et ils auront une bonne raison : en profiter avant 2022 ! Car figurez-vous qu’à un moment, la période dorée des plus riches cessera dans ce pays. Les Français en auront assez. Ne croyez pas, chers collègues, que votre majorité continuera à se perpétuer ainsi, en faisant des cadeaux fiscaux au 1 % des plus riches sur le dos de tous les Français qui produisent des richesses.
Cet article prévoit la suppression de l’exit tax. Arrêtons de tourner en rond ! D’ailleurs, son exposé des motifs indique que son incidence budgétaire n’est pas chiffrable. C’est bien un aveu, face à tous ceux qui expliquent que cet impôt ne rapporte rien ! Si l’incidence n’est pas chiffrable, c’est qu’en réalité, cet impôt est dissuasif.
Nous avançons le chiffre de 5,4 milliards pour l’ensemble des plus-values, si tout le monde vendait aujourd’hui ses valeurs. Cela signifie bien que, sur plusieurs années, c’est ce niveau de recettes que l’État perdrait.
Cet article est donc mauvais. C’est un article pour les plus riches, comme l’ont été la suppression de l’ISF ou la flat tax, et qui résume bien la politique du Gouvernement. La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 2167. Il est défendu, madame la présidente. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2309. Dans quelques mois se tiendront des élections européennes. C’est donc cela ! Tout ce qui favorise l’évasion ou l’optimisation fiscale donnera des arguments aux populistes de tous genres.
L’exit tax, dispositif contre l’abus fiscal, fonctionne bien. Je vous invite donc, monsieur le ministre à le garder et à supprimer l’article 51. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ? Je ne me suis pas inscrit sur l’article car j’estime que cela n’est pas mon rôle, mais permettez-moi, madame la présidente, de m’exprimer un peu longuement pour expliquer la position de la commission sur l’ensemble de cet article.
Premièrement, il s’agit bien dans cet article d’un recentrage du dispositif de l’exit tax sur un mécanisme anti abus.
Deuxièmement, nous avons effectivement adopté en commission un amendement qui prévoit un délai plus long, de cinq ans, pour les participations les plus importantes. Le seuil fixé est courant : c’était celui de l’ISF, devenu IFI – impôt sur la fortune immobilière. Ce seuil de 2,57 millions d’euros n’est donc pas sorti d’un chapeau.
À ceux qui estiment que cet amendement n’est que cosmétique, je voudrais dire que ce n’est pas du tout le cas. Sinon, moins de plus-values seraient concernées. En effet, la lecture de l’évaluation des voies et moyens montre que, sur 336 dossiers d’exit tax déposés, les quatre derniers déciles concernent des montants supérieurs à 2,5 millions. Ainsi, 35 % des déposants sont concernés, ce qui n’est pas anodin. La réalité des montants l’est encore moins : le délai de cinq ans s’applique à 2,7 milliards sur 2,9 milliards de plus-values. Cela signifie que l’amendement adopté par la commission, que j’ai corédigé avec Mme Cariou, concerne 90 % du montant cumulé des plus-values de 2015.
À ce stade je donnerai donc un avis défavorable à tous les amendements, hormis celui de la commission et de Mme Cariou. Je donnerai un avis favorable aux amendements rédactionnels ou de précision. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est bon que nous ayons ce débat, un débat global sur la politique fiscale du Gouvernement, sur les choix que nous avons faits en termes de fiscalité du capital et sur l’exit tax car c’est la cohérence globale qui compte.
En ce moment, je passe beaucoup de temps à essayer de trouver un financement afin d’assurer la reprise d’Ascoval par Altifort. L’obstacle principal auquel nous nous heurtons est que, pour le moment – j’ai bon espoir que nous y parvenions au bout du compte – nous n’arrivons pas à trouver des financeurs, un fonds d’investissement qui puisse payer une partie des 180 millions d’euros nécessaires pour investir dans un train à fil afin d’obtenir un fil de haute qualité, pour rendre l’entreprise compétitive et de lui offrir des débouchés.
S’il y a bien une vision totalement inadaptée, qui a fait beaucoup de tort à notre industrie et à notre économie, c’est celle qui consiste à faire croire que l’on peut avoir une économie puissante sans les financements nécessaires ; c’est celle qui oppose d’un côté l’industrie, qui serait bonne, et la finance, qui serait mauvaise.
La réalité est que, si nous voulons mener à bien la reconquête industrielle de la France, nous avons besoin de financements et d’une politique fiscale sur le capital différente. Les choix que cette majorité a faits sont effectivement difficiles à expliquer aux Français car cela fait quinze, vingt ou vingt-cinq ans qu’on leur explique exactement le contraire.
Cela fait quinze, vingt ou vingt-cinq ans qu’ils entendent que le travail, c’est bien, et que le capital, c’est mal. Oui, le travail c’est bien, mais le capital, c’est nécessaire,… Le capital productif ! …pour qu’il y ait des industries, des usines, des ouvriers, et des salaires.
La désindustrialisation de la France doit beaucoup à des choix économiques et politiques désastreux, faits par manque de courage et de vision, parce que l’on n’a pas été capable d’expliquer que, pour financer la sidérurgie, il faut des moyens financiers, du rendement du capital, des fonds d’investissement et du capital disponible. L’industrie lourde demande du capital.
Je voudrais donc replacer ce débat dans les choix de politique économique et dans les choix fiscaux qui ont été faits par le Gouvernement et le Président de la République depuis dix-huit mois. Oui, il faut du courage à cette majorité pour assumer un changement de la fiscalité du capital qui permette le financement de l’industrie française et son redressement.
S’il y a bien une chose dont vous pouvez être fiers, mesdames, messieurs les députés, c’est que depuis une année, nous avons réussi à créer 6 900 emplois dans l’industrie. C’est la première fois depuis dix ans que l’industrie française recrée de l’emploi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Croyez-moi, il y a un lien entre les choix faits en matière de capital et les résultats obtenus en termes industriels. (« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe LaREM.)
Deuxième élément sur lequel je veux insister : l’attractivité de la France. L’exit tax n’est pas un élément d’attractivité de notre pays.
Avec le Brexit, les Britanniques vont quitter l’Union européenne. Nous avons la possibilité de redevenir la première place financière en Europe. Et nous sommes sur le point de réussir : nombre de grandes banques anglo-saxonnes relocalisent leurs emplois, leurs richesses et leurs activités dans notre pays. Ça va ruisseler ! Soyons attractifs ! N’ayons pas peur de récupérer ces emplois, cette richesse !
Nous avons la possibilité de réussir, en France. On voit partout, dans le reste de l’Europe, y compris en Allemagne, venir des difficultés économiques. N’hésitons pas à jouer nos atouts, à être attractifs, à faire venir les grandes institutions financières, les grandes banques avec les emplois, les richesses, les activités qui vont avec, car cela bénéficiera à tous les Français et à tout le territoire français.
Troisième remarque : je refuse l’évasion fiscale, comme le dumping fiscal en Europe. Dans le fond, ce sont les deux sujets posés aujourd’hui, dans le cadre de la politique économique globale que je viens de vous présenter.
Nous ne voulons pas d’évasion fiscale. Nous ne voulons pas qu’un contribuable au patrimoine mobilier supérieur à 800 000 euros puisse gagner un pays d’Europe où il n’y a pas de taxation des plus-values mobilières, réaliser sa plus-value et revenir en France. Très bien ! Le dispositif que nous avons proposé, qui comprend deux années de résidence obligatoire dans le pays, permet de prévenir ce risque d’abus. Absolument pas ! Cela n’avait jamais été fait ! Je refuse catégoriquement l’évasion fiscale. Quant à l’exit tax avec un délai de quinze ans, si le dispositif avait été efficace, cela se saurait ! Vous savez aussi bien que moi, monsieur Carrez, qu’il n’a pas été efficace et qu’il n’a pas prévenu les départs. Au contraire, comme l’a très bien dit Charles de Courson tout à l’heure, de nombreux contribuables en ont conclu qu’ils devaient partir au plus vite, pour commencer à faire courir le délai au plus tôt.
Les deux années que nous proposons sont un dispositif anti abus efficace, qui permettra d’encadrer le risque d’évasion fiscale.
J’ajoute, pour ceux qui évaluent les plus-values latentes à plus de 6 milliards d’euros, que le dispositif ne s’appliquera qu’aux départs à partir du 1er janvier 2019. Il rendra notre territoire attractif, tout en nous permettant de contrôler les abus.
En réalité, le vrai sujet est celui du dumping fiscal en Europe. Et le dumping social ! C’est cela le vrai sujet, sur lequel je me bats avec le Président de la République depuis dix-sept mois. Il est évident qu’une zone euro comprenant dix-neuf dispositifs fiscaux différents, tant en matière d’impôt sur les sociétés que d’impôt sur les plus-values mobilières, ne peut pas fonctionner.
À un moment donné, il sera temps que chaque État prenne ses responsabilités, pour aller vers une harmonisation et une convergence fiscales en Europe. Tant qu’il y aura des effets d’évasion comme ceux qui peuvent exister aujourd’hui, du dumping fiscal en Europe, de telles divergences de taux sur des impôts aussi importants que l’impôt sur les sociétés ou les plus-values mobilières, nous n’aurons pas une zone euro solide, stable et capable de résister à de nouvelles crises économiques et financières.
Je vous engage donc à voter ce dispositif anti-abus de deux ans et à m’accompagner dans ce combat pour l’harmonisation fiscale en Europe, qui est le seul qui compte. Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Gilles Carrez. Monsieur le ministre, je partage votre préoccupation concernant le renforcement de l’attractivité fiscale de notre pays.
Cependant, vous qui êtes très attaché aux comparaisons européennes, en particulier avec l’Allemagne, je voudrais vous rappeler que, lorsque nous avons recréé l’exit tax avec un délai de huit ans, nous nous sommes inspirés de ce qui existait en Allemagne, où le délai est de dix ans, en Suède, en Espagne ou en Italie. Car tous les pays européens, ou presque, se sont protégés de ce paradis fiscal qu’est la Belgique, où toute fiscalité est supprimée. Nous nous insérions donc dans la pratique européenne.
Le prélèvement forfaitaire unique à 30 %, que j’ai voté, a conduit à un niveau de fiscalité sur les plus-values raisonnable qui, hors prélèvements sociaux, s’établit en-dessous de 14 %, taux de la première tranche de l’impôt sur le revenu.
Sous la précédente législature, nos collègues socialistes ont jugé bon de porter le délai de huit à quinze ans. Nous n’avons pas voté cette mesure car nous estimions que c’était trop long. Mais les deux ans que vous proposez ne permettent en aucun cas de résoudre le problème. C’est évident, il y aura des allers-retours, pendant ce laps de deux ans !
Madame Peyrol, vous avez insisté dans votre amendement tout à l’heure pour que la définition de l’abus de droit fiscal se fonde sur la motivation « principalement » fiscale de l’auteur de l’opération, et non « exclusivement » fiscale. Et vous avez raison ! Mais quand on s’installe à Uccle ou à Ixelles, à côté de Bruxelles, c’est certainement pour profiter de la chaleur et du soleil rayonnant ! Des croquettes de crevettes ! Des frites ! Bref, ce n’est absolument pas dans un but principalement fiscal !
Sérieusement, nous plaidons pour un délai raisonnable. Je défendrai un amendement le fixant à six ans. La commission des finances a préféré cinq ans, ce qui reste assez raisonnable. Merci de conclure… Mais je veux vous convaincre que deux ans, c’est beaucoup trop court, et contraire à la pratique européenne à laquelle vous tenez tant. La parole est à M. François Pupponi. Monsieur le ministre, l’exercice est difficile. L’exit tax fait globalement consensus dans cet hémicycle, à droite comme à gauche, depuis de nombreuses années. Nous pouvions diverger sur le délai – dix ans, quinze, huit – mais nous nous accordions pour considérer comme anormal le fait que des personnes ayant bâti leur fortune en France partent à l’étranger pour être exonérées de plus-values et, une fois les plus-values réalisées, reviennent en France. Nous étions unanimes pour approuver la taxation.
Et voilà que le Président de la République annonce dans la presse… Étrangère ! …son intention de supprimer cette taxe. Surprise… Tout cela vous amène à devoir affirmer qu’on ne la supprime pas, mais qu’on la supprime.
Le rapporteur général fait valoir que, sur l’ensemble des contribuables taxés avec un délai de quinze ans, 90 % d’entre eux seront taxés avec le délai de cinq ans. Mais combien de personnes ont été taxées pour des plus-values réalisées dans un délai de deux ans, puisque c’est ce que propose le Gouvernement ? Vous semblez considérer que nombre de plus-values sont réalisées dans les deux ans, mais combien précisément ? Selon vous, le délai de deux ans suffira pour être efficace, mais tout le monde sait que le contribuable voudra bien attendre trois ans avant de vendre !
Et vous affirmez que l’exit tax n’est pas efficace. Mais comment savoir si une taxe qui vise à empêcher les départs est efficace ? Heureusement d’ailleurs qu’elle ne rapporte pas suffisamment, cela signifie que des contribuables ont préféré rester et payer leurs impôts ! On peut voir les choses sous cet angle. Si vous doutez de son efficacité, monsieur le ministre, proposez des mesures pour la rendre plus efficace. La parole est à M. Éric Coquerel. J’ai toujours plaisir à échanger avec vous, monsieur le ministre, parce que vous assumez votre politique. Mais j’ai quelques éléments de réponse, même si le temps manque pour discuter au fond.
D’abord, il n’y a jamais de capital sans travail, mais l’inverse n’est pas vrai. Les entreprises de service public montrent qu’il est possible de produire des richesses sans actionnaires.
Vous avez évoqué Ascoval. C’est un bon exemple, et ce n’est pas sans lien avec ce que nous avons dit tout à l’heure sur l’autorisation de la Commission européenne. Nous souhaiterions que l’État investisse seul dans Ascoval, voire nationalise l’entreprise, parce que notre pays a toujours besoin d’acier. Vous ne pouvez pas le faire, parce que la Commission européenne vous l’interdit. Elle exige la présence d’investisseurs privés. Mais si les investisseurs privés que vous allez encourager cherchent à faire du profit à très court terme, en profitant de nos infrastructures, de nos services publics et de notre activité économique sans investir à long terme, je ne vois pas quels avantages il y a à les attirer dans notre pays. Cela ne servira, une fois de plus, qu’à leur permettre de s’enrichir.
Le fond du problème, c’est votre volonté de faire de Paris la nouvelle City. Mais à ce compte-là, puisque la finance choisit toujours l’endroit dont elle peut tirer le maximum d’avantages, afin que la rente soit la plus élevée possible, nous serons toujours poussés vers le moins-disant fiscal ! Cela n’aura pas de fin ! C’est ce qui justifie la suppression de l’exit tax – car vous avez admis devant la commission des finances que ramener le délai de quinze à deux ans revenait à la supprimer. Merci, monsieur le député… Cette course à l’échalote est mauvaise. Vous pouvez invoquer tous les chiffres que vous voulez, rien ne prouve que l’économie se porte bien dès lors que la finance se porte bien. Les deux sont déconnectées car l’une vampirise la richesse que nous produisons tous.
Je ne souhaite pas que Paris soit la nouvelle City si la contrepartie en est l’augmentation continue du chômage et la destruction de l’économie réelle La parole est à M. Sébastien Jumel. Nous pouvons nous mettre d’accord sur une chose : le ministre est talentueux, il est de droite décomplexée, et il ne manque pas de toupet.
D’abord, il supprime l’exit tax, à laquelle il substitue un prétendu dispositif anti abus.
Ensuite, voyant que l’opinion publique grince, il affirme que cet allégement, cet affadissement, cette suppression de l’exit tax va nous permettre de sauver notre industrie. Et vient le discours sur la France et ses usines, tout à fait sincère je suppose – sauf que je n’ai toujours pas compris comment, en assouplissant l’exit tax, nous trouverons des investisseurs pour Ascoval. Moi non plus ! Mon esprit est peut-être lent, mais il faudra m’expliquer comment, en favorisant la délocalisation des actions, vous trouverez des investisseurs. Vous le savez, monsieur le ministre, cent de nos fleurons sont, à tout moment, à la merci de fonds d’investissement prédateurs étrangers venant siphonner notre tissu industriel. C’est ce sujet que nous devrions évoquer.
On aurait pu doter la France d’outils d’investissement public permettant d’être réactifs face à des cas comme celui d’Ascoval, plutôt que de gaspiller l’argent public dans un CICE – crédit d’impôt compétitivité emploi – dont tout le monde sait l’inefficacité. Merci, monsieur le député… Enfin, extrême toupet, vous plaidez pour une harmonisation fiscale européenne – oubliant l’harmonisation sociale par la même occasion. Mais votre dispositif en est l’antithèse puisque, Gilles Carrez vient de le démontrer, il n’est pas aligné sur nos voisins européens ! La parole est à Mme Amélie de Montchalin. La convergence européenne, c’est le combat sur lequel toute notre énergie doit être focalisée. Le véritable combat, c’est l’instauration d’un mécanisme mettant fin au dumping entre les pays, à cette lutte pour savoir qui possède le meilleur régime pour la création d’entreprise, qui pour la croissance, qui pour la transmission, qui pour les héritages. La majorité soutient pleinement le Gouvernement dans ce combat. L’amendement qui a été adopté par la commission des finances vise bien à nous rapprocher de ce que font le Royaume-Uni et l’Allemagne.
Sur ce sujet, il ne faut pas s’intéresser à l’opinion publique, mais aux résultats. Si vous faisiez attention à l’opinion publique, cela se saurait ! La politique fiscale que nous menons de manière cohérente depuis dix-huit mois a des résultats. Les investissements en fonds propres dans les entreprises innovantes ont augmenté de 61 % entre le premier semestre 2017 et le premier semestre 2018. (Mme Bénédicte Peyrol applaudit.) Ils représentent 2 milliards d’euros, soit trois fois plus qu’en 2015, où ils étaient de 750 millions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Ces fonds propres vont partout en France : les régions qui ont le plus de projets nouvellement financés sont la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie et la Bourgogne-Franche-Comté – le pays profond, là où se trouvent les industries, là où il faut récréer de l’emploi. Les entreprises qui se financent aujourd’hui sont plus grandes. Ce ne sont pas seulement des start-up dont la durée de vie est courte, mais des entreprises qui arrivent à lever plus de 50 millions d’euros chacune.
Autre résultat : l’attractivité. En la matière, 2017 a été la meilleure année depuis dix ans. Ainsi, 40 000 emplois ont été créés ou sauvegardés ; 1 300 projets ont été développés, vingt-cinq projets supplémentaires par semaine sont annoncés ;… On verra en 2018 ! …et il y aura 16 % de projets supplémentaires sur l’année.
Ces chiffres nous permettent de penser que oui, la cohérence paie, oui, il existe un lien entre notre réforme fiscale et ce que nous faisons aujourd’hui. Nous cherchons des résultats plutôt que des débats. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Fabien Di Filippo. Petit clin d’œil à Gilles Carrez qui me faisait remarquer que, parmi les 2 milliards d’investissement que vous évoquiez, nombre de fonds proviennent de Chine – par exemple pour l’aéroport de Toulouse. Est-ce un progrès pour notre économie ? Je laisse chacun juge de la manipulation des chiffres à laquelle vous êtes capable de vous livrer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Bien vu ! Votre discours, monsieur le ministre, est très ambivalent. À l’étranger, vous parlez d’une suppression de l’exit tax pour convaincre les investisseurs de venir en France. Devant les Français, vous niez tout cadeau fiscal aux plus riches. Je m’interroge sur ce double langage. L’instauration du délai de deux ans est une suppression de fait de l’exit tax.
Nous voulons tous diminuer les impôts pour tout le monde – ce serait merveilleux. Mais la réalité, c’est que la dépense publique augmente, encore et encore. Il y aura près de 100 milliards d’euros de déficit l’année prochaine. Vous serez le ministre de l’économie qui, sans doute, durant son mandat – je vous souhaite qu’il dure encore un peu – aura vu le pourcentage de la dette dépasser la barre des 100 % du PIB. Tant que nous sommes dans cette dynamique, il n’y a pas de baisse des dépenses possible.
Moi qui suis un exégète rigoureux de la parole présidentielle, je l’ai entendu dire que tout le monde doit faire des efforts. Les riches surtout ! Symboliquement, comment pouvez-vous expliquer à nos compatriotes que sur la CSG, le carburant, le fioul, les classes moyennes et les travailleurs modestes doivent faire des efforts mais qu’il faut alléger l’exit tax ?
J’en viens au cœur du débat : ces relocalisations de patrimoine contribuent-elles plus à notre économie que la consommation des classes moyennes, des retraités et des travailleurs modestes ? Depuis le début de l’année, l’effondrement de la consommation et de la croissance, l’augmentation de la dette, les pertes de recettes vous apportent une réponse, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à Mme Véronique Louwagie. Madame de Montchalin, vous dites que notre combat doit porter sur la convergence des dispositions fiscales au niveau européen. Nous en convenons tous. Depuis que j’ai été élue députée, en 2012, j’entends parler de cette convergence. Mais force est de constater qu’aucun progrès n’a été accompli en la matière. Tant que les fiscalités des pays européens divergeront, la France devra se protéger. Nous ne pouvons pas supprimer nos dispositifs de protection. Or, c’est que le Gouvernement s’apprête à faire au travers de l’article 51.
Nous avons tous été surpris par la déclaration du Président de la République, à commencer par la forme : s’exprimer dans un journal étranger sur un tel sujet est pour le moins étonnant. Sur le fond, j’ai l’impression qu’au travers de l’article 51, vous cherchez à maquiller la suppression de l’exit tax : le délai de deux ans est suffisamment court pour ne pas être trop contraignant pour ceux qui veulent quitter la France pour procéder à des cessions. Nous ne pouvons pas l’accepter. La durée de deux ans n’est pas suffisante pour protéger notre pays. Je le dis à M. le ministre qui a émis un avis quasi défavorable à une éventuelle extension du délai au-delà de deux ans. Non… La durée de six ans que nous proposons présente l’avantage d’être cohérent avec le délai prévu pour le pacte Dutreil, qui, sans poursuivre le même objectif, concerne également les cessions et transmissions d’entreprises. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Je souscris à ce qui a été dit sur les effets bénéfiques des mesures prises. Mais on peut parfaitement soutenir la politique économique menée par le Gouvernement et considérer que l’article 51 pose un problème et qu’il a pour effet la suppression de l’exit tax. Je suis très à l’aise sur ce point.
Le dispositif de l’exit tax, qui a connu des aménagements successifs, marche assez bien. Il est dissuasif. Ce n’est pas un drame de défendre la suppression de l’article 51 qui vise, directement ou indirectement, à supprimer l’exit tax tout en soutenant toutes les mesures qui ont été prises par le Gouvernement. J’assume complètement cette position.
C’est ridicule, nous nous prenons les pieds dans le tapis. Les répercussions sur le plan financier prouvent que le dispositif marche bien. Je ne pense pas qu’il soit un élément de non-attractivité. C’est un instrument d’équité fiscale. Il me semble légitime que toute personne paie l’impôt, surtout quand elle réalise des plus-values grâce à un environnement rendu très favorable par la politique actuelle du Gouvernement. Mes chers collègues, j’ai laissé la discussion se déployer assez largement. De nombreux arguments ayant déjà été échangés, j’invite chacun à se montrer synthétique pour l’examen des amendements qui suivent. Très bien, madame la présidente ! La parole est à M. le ministre. Je constate que le débat prospère, et excède parfois la question de l’exit tax, mais c’est un débat intéressant. Je voudrais revenir sur quelques éléments afin de clarifier la politique que je défends. J’ai effectivement l’honnêteté de la présenter et de la défendre. Je n’aime pas le double langage, ni en politique ni en dehors.
Pour répondre à la question qui m’a été posée, le nombre de contribuables ayant quitté le territoire national et déposé une déclaration d’exit tax s’est établi à 330 en 2012, à 437 en 2013, à 399 en 2014 et à 374 en 2015.
Le lien entre industrie et finance est le sujet qui me préoccupe le plus, parce que je crois profondément à la reconquête industrielle de notre pays. Depuis dix ans, il y a tout de même quelque chose qui a buggé : on ne perd pas une centaine d’entreprises industrielles par an, 1 million d’emplois, 12 à 18 % de notre richesse nationale – alors que d’autres pays sont arrivés à conserver leur industrie – sans que des erreurs majeures de politique économique aient été commises.
Et l’erreur économique majeure, c’est que nos coûts de production ont été plus élevés que ceux de tous les autres pays européens, qui plus est à un moment où l’on ouvrait l’Union européenne à d’autres pays industriels, notamment de l’Est. Nous avons perdu, année après année, de la profitabilité. Dès lors, nos entreprises n’ont pas pu investir suffisamment, et cela s’est traduit par une vraie saignée industrielle partout dans le pays. Sans compter certaines idées très brillantes intellectuellement mais stupides économiquement, comme « l’industrie sans usines ». Pourquoi pas l’industrie sans ouvriers, tant qu’on y est ? Ça, c’est vrai ! Tout cela a créé un désastre industriel dans notre pays.
Il est donc temps de revenir sur Terre, d’atterrir, avec des idées simples : si nous sommes trop chers, nous ne vendrons pas ; si notre compétitivité-coût n’est pas à la hauteur, c’est la ruine de nos usines. Vous pourrez faire toutes les déclarations que vous voudrez : si un industriel trouve de l’acier moins cher ailleurs, il ira l’acheter ailleurs, et cela vaut aussi pour l’acier performant. Autrement dit, la compétitivité-coût, ce n’est pas négociable.
L’investissement est donc indispensable, et il ne peut pas se faire uniquement par endettement, monsieur Coquerel : il doit se faire aussi par des fonds propres. C’est parce que nos entreprises n’étaient pas assez profitables et ne disposaient pas d’assez de fonds propres qu’elles n’ont pas investi suffisamment. Non seulement elles ont perdu en compétitivité-coût, mais aussi en qualité des produits, et nous avons perdu part de marché après part de marché. C’est cette tendance que nous voulons inverser.
Je voudrais néanmoins marquer mon accord sur un point avec MM. Coquerel et Jumel : ce n’est pas parce que nous faisons le choix du capital, des fonds propres, de l’investissement et de l’innovation que le cours de bourse doit compter plus que la viabilité à long terme de l’entreprise, et qu’il faut accepter n’importe quel comportement, un comportement irresponsable, un comportement de prédateur.
Je vous donne un exemple très précis : je suis obligé de me battre avec les dirigeants de Ford pour qu’ils acceptent la reprise par Punch de l’usine de Blanquefort, près de Bordeaux. Je trouve que l’on pourrait s’épargner ce combat. (Mme Dominique David applaudit.) J’appelle Ford au sens des responsabilités, à comprendre qu’une reprise solide est proposée par un repreneur crédible, en l’espèce Punch, qui a déjà apporté la preuve de sa solidité ailleurs en France, notamment à Strasbourg. Quand je vois le comportement responsable des salariés de Blanquefort, qui sont prêts à accepter des efforts, parce qu’ils veulent sauver leur outil de production, et que je vois que Ford n’a toujours pas répondu à la proposition honnête et solide formulée par Punch ni tenu compte du comportement responsable des salariés, j’estime que cela dépasse les limites de l’acceptable.
Nous ne réussirons collectivement en matière économique que si chacun fait preuve de sens des responsabilités. Pour notre part, nous menons une politique économique, volontariste et responsable, de reconquête industrielle. L’immense majorité des salariés français, notamment dans les usines, ont un comportement courageux et responsable. (Mme Dominique David et M. Daniel Labaronne applaudissent.) J’aimerais donc que ceux qui dirigent les plus grandes entreprises du monde, notamment Ford, soient à la hauteur du sens des responsabilités des ouvriers et des salariés français. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Quel est le rapport avec l’exit tax ? Monsieur Di Filippo, je ne sais pas ce que vous buvez le matin, mais je vous incite à prendre de la tisane plutôt que du café. C’est de la loyauté aux valeurs ! Vous ne connaissez pas cela ! Vos termes sont dignes d’un Savonarole de la droite française. Vous parlez d’un effondrement de la croissance française. Atterrissez, monsieur Di Filippo ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La France a obtenu, au troisième trimestre, le meilleur résultat de la zone euro en termes de croissance. Atterrissez !
Vous parlez d’effondrement de la consommation. Or la consommation est en train de repartir, en cette fin d’année 2018. Atterrissez, monsieur Di Filippo ! Cessez vos philippiques contre le Gouvernement, ou essayez au moins d’atterrir et de citer des faits un peu plus exacts : cela vous rendra un tout petit peu plus crédible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Répondez sur le fond ! Vos attaques contre le Gouvernement sont surtout des attaques contre les Français, qui ont réussi à obtenir, à la fin de l’année 2018, le meilleur résultat économique de la zone euro. Soyez-en fier, plutôt que de le dénigrer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Rendez-vous au début de l’année prochaine ! Les secteurs du bâtiment et du logement vont s’effondrer ! Je reviens à l’exit tax. Vous proposez, madame Louwagie, des délais plus longs. Je ne suis absolument pas fermé à cette idée pour les contribuables qui détiennent le patrimoine mobilier le plus important. Nous vous proposons deux ans comme délai de base, en vue d’éviter tout effet de contournement et toute évasion fiscale. Deux ans, cela oblige les intéressés à partir avec leur famille, à s’installer réellement : cela prévient toute possibilité d’évasion fiscale. Si vous estimez qu’il faut une garantie plus forte, et donc des délais plus longs, pour des contribuables dont le patrimoine mobilier est plus élevé, et s’il y a des propositions en ce sens au cours du débat, j’y suis tout à fait ouvert. Et je le prends sur moi, car je veux que la mesure soit efficace et garantisse l’attractivité de notre pays, mais aussi qu’elle soit juste et évite toute possibilité d’évasion fiscale. (M. Daniel Labaronne applaudit.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 72
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 12
Contre 50 (Les amendements identiques nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l’amendement no 2142. Nous aurions envie de poursuivre ce débat avec vous, monsieur le ministre. Vous dites que les dirigeants de Ford donnent exactement l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Je vous répondrai que la politique qui consiste à donner des aides sans contrepartie, comme le CICE, aux entreprises, y compris à celles que vous dénoncez avec justesse, permet précisément les pratiques de ce genre.
Il y a un paradoxe dans votre réforme de l’exit tax : vous nous dites qu’il s’agit de faire revenir des capitaux dans notre pays, alors qu’il s’agit d’un système qui permet aux capitaux de sortir plus rapidement de notre pays, et même de le fuir ! Vous avez d’ailleurs manié un paradoxe un peu du même genre lorsque vous nous avez expliqué que le fait d’autoriser plus facilement les licenciements allait créer de l’embauche. Cela ne fonctionne pas, nous y reviendrons.
Au-delà de la question de la durée, nous voulons pointer un deuxième problème posé par l’article 51 : désormais, l’assujetti à l’impôt pourra s’affranchir des garanties qu’il devait auparavant fournir à l’administration fiscale en cas de départ à l’étranger dans un pays non membre de l’Union européenne.
Le 24 septembre dernier, monsieur le ministre, vous avez déclaré devant la commission des finances : « Cette mesure nous permet de supprimer également les modalités administratives complexes dont elle était assortie, notamment la constitution de garanties auprès d’un comptable public, sauf pour les pays qui n’auraient pas de convention d’assistance fiscale avec la France. »
Auparavant, on ne demandait pas de garantie en cas de départ vers un pays de l’Union européenne, ce qui est déjà exagéré selon moi. Maintenant, vous voulez élargir considérablement la liste des pays concernés. Je ne comprends pas. On demande je ne sais combien de garanties à toute personne qui veut louer un appartement, mais s’agissant de plus-values sur des valeurs dépassant 800 000 euros, on ne veut pas permettre à l’administration fiscale d’être sûre de récupérer ce qui lui est dû ! Merci, monsieur Coquerel…
La parole est à M. Gilles Carrez. J’étais consterné lorsque j’ai appris, au mois de mai dernier, par le magazine américain Forbes , que le président Macron avait décidé de supprimer l’exit tax. Je me suis rendu compte alors qu’une fois de plus, l’élite financière – les fonds d’investissement, les startuppers – avait frappé.
Vous le savez, monsieur le ministre : pendant dix ans, de 2002 à 2012, nous avions su résister. Nous avons également su résister de 2012 à 2017.
Je rappelle que cette taxe avait été instaurée à l’initiative de Dominique Strauss-Kahn en 1999. Elle avait été annulée par une décision aberrante de la Cour de justice de l’Union européenne consistant à faire primer la libre circulation des capitaux sur la souveraineté fiscale du pays. Nous avions su résister en convainquant Nicolas Sarkozy, vous vous en souvenez probablement, de la rétablir en 2011.
Cette taxe n’existe pas uniquement pour des raisons techniques, mais aussi pour des raisons morales et civiques. C’est sur ces dernières que j’insisterai, car les raisons techniques sont connues. Comment admettre qu’il existe à nos portes, au sein de l’Union européenne, un paradis fiscal, la Belgique, qui taxe à zéro les plus-values sur les valeurs mobilières ?
Ce manque d’harmonisation fiscale à l’échelle européenne provoque un problème moral et civique. Beaucoup de nos concitoyens créateurs d’entreprise décident de quitter temporairement le pays et de rejoindre des cieux fiscalement plus favorables dans le seul but d’éviter l’impôt sur des plus-values qui s’élèvent à plusieurs millions d’euros, voire plusieurs dizaines ou plusieurs centaines de millions. N’exagérons rien… Vous en connaissez des exemples comme moi, monsieur le ministre !
Si on y réfléchit, la plus-value est certes due au talent du chef d’entreprise, mais elle est d’abord due au talent des salariés,… À la valeur travail ! …à la qualité de leur travail, à leur formation, aux équipements et aux services publics financés par la collectivité, par nos impôts ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, SOC, GDR et FI.– M. Jean-Paul Mattei applaudit également.)
Par conséquent, je me réjouis que nous prévoyions de revenir, par le biais de l’article 51, sur cette décision malencontreuse. Monsieur le ministre, je souhaite que vous acceptiez sans réserve l’amendement no 1953 déposé par la commission des finances, car il concilie justice fiscale et efficacité économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. Sébastien Jumel. J’approuve l’esprit, la lettre et la tonalité de l’intervention de Gilles Carrez.
Lorsqu’Emmanuel Macron a décidé de supprimer l’exit tax, il n’avait pas prévu de se faire rattraper après-demain, le 17 novembre, par des millions de Français – ceux qui « clopent », ceux qui « roulent au diesel » – qui n’ont pas, eux, la possibilité d’échapper aux taxes qu’on leur met sur la carafe. Eh oui, c’est bien de cela qu’il s’agit !
On essaie de nous empapaouter, avec cette histoire. Le Figaro titre : « Les députés veulent durcir la nouvelle exit tax ». Les Échos titrent : « Les députés renforcent la nouvelle exit tax ». Pourtant, vous le savez bien, le dispositif que vous proposez permet l’opportunisme fiscal ; il encourage, au bout du compte, l’évasion fiscale !
Vous voulez passer de quinze à deux ans. Drôle de progrès ! Drôle de symbole ! Belle provocation au moment où la France qui travaille n’en peut plus de voir les inégalités fiscales monter, de voir les plus riches recevoir des cadeaux alors que les plus nombreux, les retraités, les travailleurs, sont la variable d’ajustement.
Alors, il y a des débats. On nous dit que le rendement n’est pas suffisant – il y a même des débats sur le rendement de l’exit tax ! Peu importe, puisque sa vocation est d’être dissuasive ! C’est de la prévention : il s’agit d’affirmer un principe, de dire que délocaliser ses actions pour échapper à l’impôt n’est pas un comportement citoyen.
C’est la raison pour laquelle nous proposerons des amendements, soit pour supprimer l’article, soit pour ramener à quinze ans l’interdiction d’échapper à l’impôt. Sur les amendements de suppression de l’article, nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Éric Coquerel. J’entendais hier le Président de la République expliquer que le poids de l’impôt par rapport à la richesse produite avait été réduit depuis son arrivée au pouvoir. Avec cet article, on voit bien le problème : il se réduit peut-être, mais de façon absolument inégalitaire. En réalité, vous réduisez l’impôt des plus riches de nos concitoyens, mettant de côté tant son aspect redistributif que l’idée républicaine de contribution égalitaire.
Un peu de pédagogie : l’exit tax, c’est une taxe qui frappe ceux qui, disposant de plus de 800 000 euros d’actions ou d’obligations, quittent la France pour profiter du dumping fiscal permis par l’Union européenne – qui, je le rappelle, interdit l’harmonisation fiscale en son sein alors que le libre-échange est non seulement autorisé mais encouragé. Ils payent alors 30 % de la plus-value latente de cette vente.
Cet article est une hypocrisie. Face à la levée de boucliers qui a suivi l’article de Forbes laissant penser que M. Macron voulait carrément supprimer l’exit tax, vous décidez de ramener la période pendant laquelle on doit conserver les actions de quinze à deux ans. Mais vous savez très bien qu’un délai de deux ans ne sera absolument pas dissuasif pour quelqu’un qui veut faire des bénéfices en utilisant ce jeu de bonneteau fiscal permis, je le répète, par les règles européennes.
Vous nous dites aussi que cet impôt ne sert à rien. Mais justement ! Pour une fois qu’un impôt est dissuasif ! Dans votre évaluation préalable, vous estimez vous-même que l’État peut perdre jusqu’à 5,4 milliards d’euros dans les années à venir en cas de suppression de cet impôt, parce que les gens n’auront plus aucune contrainte. Bref, c’est un dispositif dissuasif, et l’on devrait s’en réjouir plutôt que de le supprimer. Merci de conclure, monsieur Coquerel… Il y a des gens en France qui n’ont pas besoin de barrages ou de mobilisations pour se faire entendre. Ils ont des gilets dorés, eux – et vous leur facilitez le travail en favorisant systématiquement l’intérêt privé par rapport à l’intérêt général. Cette politique-là devrait cesser. La parole est à M. Charles de Courson. Mes chers collègues, je suis toujours un peu étonné de la discussion sur l’exit tax. Moi, je l’ai toujours combattue. Son objet était de freiner les départs vers l’étranger : cela a-t-il réussi ? Nullement. Et, au cours des six dernières années, elle n’a rapporté que 25 millions par an. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR, FI et SOC.) Cela prouve qu’elle a réussi ! Non, pas du tout, elle n’a pas réussi ! Les droits suspendus atteignent 5,3 milliards d’euros à la fin de l’année 2017. Justement ! C’est la démonstration de la réussite. Non, et cette taxe a même un effet pervers : elle accélère les départs. Les gens se disent que, puisqu’il faut attendre quinze ans, autant partir très tôt !
Je suis profondément pro-européen. Le vrai problème, c’est l’attractivité de la France, pas l’exit tax !
Certains invoquent des principes moraux : partir à l’étranger, ce ne serait pas bien. Mais l’on peut partir à l’étranger pour de nombreuses raisons : des raisons familiales, des raisons climatiques, que sais-je… Ouais, bien sûr… Non seulement l’exit tax n’a pas d’effet positif, mais elle a un effet négatif : ce sont les faits, mes chers collègues. Soyons pragmatiques.
Bref, j’ai toujours combattu l’exit tax, qui devrait être supprimée. Le Gouvernement propose une mesure intermédiaire, avec la réduction du délai à deux ans. Mais je crois qu’il faut être clair, dans la vie ! L’ISF sur les valeurs mobilières a été supprimé ; on peut être pour, on peut être contre, mais il faut être logique. C’est vrai, c’est la même logique ! Donc, si le pays est attractif, il n’a pas besoin d’exit tax. D’ailleurs, pourrait-on ouvrir les fenêtres de la France de temps en temps ? Beaucoup de pays ont-ils créé de telles taxes ? Tous ! L’Allemagne, l’Espagne… Mais pas du tout ! Prenez la Belgique ! (Exclamations.) C’est bien le problème ! Les Belges ne taxent pas les plus-values. Voilà pourquoi je suis pour la suppression pure et simple de cet impôt. Mes chers collègues, je précise que la demande de scrutin public sur les amendements de suppression émane également du groupe Socialistes et apparentés.
La parole est à Mme Émilie Cariou. Je ne partage pas du tout l’opinion de M. de Courson, mais je ne partage pas non plus ce qui a été dit à gauche de cet hémicycle.
Monsieur de Courson, je suis désolée, mais nous ne serons jamais attractifs vis-à-vis des paradis fiscaux ! Exactement ! Nous n’allons pas passer à une imposition zéro, ce n’est pas possible. Nous sommes un État développé, nous devons financer nos services publics. Chacun doit contribuer à l’impôt, qui a de surcroît une vertu redistributive. Nous n’allons pas passer à 0 % pour nous aligner sur la Belgique ! Des choses pareilles ne sont pas acceptables.
L’exit tax a une vertu, comme l’a dit M. Carrez : c’est un impôt qui vise à éviter l’optimisation fiscale de ceux qui partent à l’étranger pour céder leur portefeuille d’actions.
Le Gouvernement ne propose pas de supprimer le dispositif : l’exit tax est maintenue, avec un sursis de paiement, celui-ci se déclenchant dans certaines situations. Le Gouvernement propose, en revanche, de ramener le délai de mise sous surveillance de quinze à deux ans. Nous avons voté en commission des finances un amendement visant à faire passer ce délai à cinq ans, une durée régulièrement utilisée pour les mécanismes anti-abus. Cela me paraît raisonnable. Deux ans, ce n’est pas suffisant : il est alors très facile de se délocaliser pour liquider ses actions.
Je crois qu’il faut maintenir ce dispositif. L’amendement de la commission des finances sécurise à mon sens la lutte contre les abus. Car, vous avez raison, monsieur de Courson, on peut partir à l’étranger pour de nombreuses raisons : le problème, c’est quand on part uniquement pour pouvoir liquider son portefeuille d’actions. En effet, comme l’a dit M. Carrez, la valeur a été créée en France, par les travailleurs français, par les consommateurs français. Ces départs sont donc choquants.
Nous vous proposerons un autre amendement, de précision, au sujet des titres à prépondérance immobilière. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Christine Pires Beaune. Monsieur le ministre, trop, c’est trop ! Après la suppression de l’ISF, après l’instauration de la flat tax, dont je rappelle qu’elle bénéficie aux 5 % des Français les plus riches, voilà le coup de rabot sur l’exit tax – et encore, si le Président de la République n’avait pas reculé, elle serait tout simplement supprimée ! Cet article revient sur cette promesse, mais vise quand même à réduire fortement cet impôt.
L’exit tax est en effet un mécanisme anti-abus, une taxe dissuasive : par définition, moins elle rapporte, mieux elle joue son rôle. En outre, elle ne concerne que très peu de contribuables, en raison du seuil élevé retenu. Contrairement à ce que vous disiez, monsieur de Courson, la plupart des pays développés disposent d’un système similaire, M. Carrez a raison ! Pas tous ! Sur un autre point encore, je rejoindrai M. Carrez : c’est surtout une question d’équité fiscale. Car ces plus-values, à quoi sont-elles dues ? Aux infrastructures publiques, aux crédits d’impôts comme le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ou le crédit impôt recherche, au système éducatif, au système de formation continue… et surtout au travail des salariés de ces entreprises !
Le groupe socialiste a déposé un amendement de suppression de cet article, ainsi que des amendements de repli. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Je m’exprime ici à titre personnel : l’exit tax est à mon sens un système qui fonctionne bien. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement de suppression de l’article.
En effet, les rentrées ne sont pas importantes, mais il s’agit d’un régime de report : c’est le principe même ! Exactement ! C’est le principe même ! Dire que cela ne rapporte rien est un non-sens.
D’ailleurs, il est légitime de payer l’impôt ! J’ai soutenu la flat tax, même si j’aurais peut-être fixé un taux un peu plus élevé. J’étais favorable à une suppression complète de l’ISF. Mais en l’occurrence, cet impôt est dû et il doit être payé ! Ce n’est pas parce qu’on quitte le pays qu’on ne doit plus rien. Qu’est-ce que c’est que ce système où il suffirait de quitter le pays pour être exonéré ?
Franchement, je pense que le système fonctionne bien, y compris avec la durée actuelle. Je me rallierai certainement à la proposition de la commission des finances, mais je trouverais vraiment dommage de supprimer ou d’aménager trop profondément cet impôt. Il fonctionne, il est dissuasif, et le principe de moralité ainsi affirmé me paraît fondamental. Nous en venons aux amendements.
Je suis saisie de cinq amendements de suppression, nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1402. Il est défendu. La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l’amendement no 2115. Je crois beaucoup à la force symbolique du consentement à l’impôt, principe consubstantiel à notre modèle social français. Vous êtes en train d’abîmer ce consentement en multipliant chaque jour les injustices fiscales. Le sentiment est profond dans l’opinion publique qu’il vaut mieux être riche et bien portant que pauvre et en mauvaise santé.
C’est un symbole que vous attaquez. Vous envoyez un signal désastreux en supprimant cette taxe – car le dispositif est tellement affadi qu’on peut parler de suppression. Mais non ! Bien sûr, l’outil n’est pas idéal, et nous avons d’ailleurs fait des propositions pour que l’évasion fiscale soit moins facile dans notre pays, pour que les plus riches n’échappent pas à l’impôt grâce aux conseils, grâce aux experts, grâce à l’élite financière. Mais au-delà de la bataille des chiffres, le fait est que vous balayez d’un revers de main la portée préventive, dissuasive et symbolique de l’exit tax. Ce faisant, vous continuez à abîmer le consentement à l’impôt et vous nourrissez le sentiment de l’injustice fiscale.
Ce sentiment-là va vous rattraper, il va même vous mordre les fesses samedi. Car cela n’est plus possible : trop c’est trop !
Charles de Courson est cohérent : il était favorable à la suppression de l’ISF et aux divers cadeaux fiscaux. Nous le sommes aussi en refusant ce cadeau supplémentaire. La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l’amendement no 2145. En réponse à ceux qui nous disent que cet article ne supprimera pas l’exit tax, je préfère me référer au Gouvernement, lorsqu’il l’a présenté. Le 24 septembre, devant la commission des finances, Bruno Le Maire a dit : « Oui, nous supprimons l’exit tax. Nous la supprimons en mettant fin au délai de quinze ans qui avait conduit nombre de contribuables à quitter le territoire français. » Les mots sont clairs. Mme Cariou nous a expliqué qu’en réalité, l’exit tax n’était pas supprimée. Mais si, le nouveau délai aboutit bien à une suppression de l’exit tax. Ce n’est pas le texte ! Et je dirai à ceux qui essaient de se donner bonne conscience, car ce n’est que ça, en proposant un délai de cinq ans au lieu de deux ans, que cela ne changera pas fondamentalement le problème : en réalité, les gens qui veulent profiter du dumping fiscal permis par l’Union européenne pourront toujours tricher, tricher et tricher encore.
Revenons à ce qu’a dit Charles de Courson – qui, effectivement, est cohérent. Une chose est sûre : avec cet article, ceux qui voudront partir le feront encore plus vite, et ils auront une bonne raison : en profiter avant 2022 ! Car figurez-vous qu’à un moment, la période dorée des plus riches cessera dans ce pays. Les Français en auront assez. Ne croyez pas, chers collègues, que votre majorité continuera à se perpétuer ainsi, en faisant des cadeaux fiscaux au 1 % des plus riches sur le dos de tous les Français qui produisent des richesses.
Cet article prévoit la suppression de l’exit tax. Arrêtons de tourner en rond ! D’ailleurs, son exposé des motifs indique que son incidence budgétaire n’est pas chiffrable. C’est bien un aveu, face à tous ceux qui expliquent que cet impôt ne rapporte rien ! Si l’incidence n’est pas chiffrable, c’est qu’en réalité, cet impôt est dissuasif.
Nous avançons le chiffre de 5,4 milliards pour l’ensemble des plus-values, si tout le monde vendait aujourd’hui ses valeurs. Cela signifie bien que, sur plusieurs années, c’est ce niveau de recettes que l’État perdrait.
Cet article est donc mauvais. C’est un article pour les plus riches, comme l’ont été la suppression de l’ISF ou la flat tax, et qui résume bien la politique du Gouvernement. La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 2167. Il est défendu, madame la présidente. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2309. Dans quelques mois se tiendront des élections européennes. C’est donc cela ! Tout ce qui favorise l’évasion ou l’optimisation fiscale donnera des arguments aux populistes de tous genres.
L’exit tax, dispositif contre l’abus fiscal, fonctionne bien. Je vous invite donc, monsieur le ministre à le garder et à supprimer l’article 51. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ? Je ne me suis pas inscrit sur l’article car j’estime que cela n’est pas mon rôle, mais permettez-moi, madame la présidente, de m’exprimer un peu longuement pour expliquer la position de la commission sur l’ensemble de cet article.
Premièrement, il s’agit bien dans cet article d’un recentrage du dispositif de l’exit tax sur un mécanisme anti abus.
Deuxièmement, nous avons effectivement adopté en commission un amendement qui prévoit un délai plus long, de cinq ans, pour les participations les plus importantes. Le seuil fixé est courant : c’était celui de l’ISF, devenu IFI – impôt sur la fortune immobilière. Ce seuil de 2,57 millions d’euros n’est donc pas sorti d’un chapeau.
À ceux qui estiment que cet amendement n’est que cosmétique, je voudrais dire que ce n’est pas du tout le cas. Sinon, moins de plus-values seraient concernées. En effet, la lecture de l’évaluation des voies et moyens montre que, sur 336 dossiers d’exit tax déposés, les quatre derniers déciles concernent des montants supérieurs à 2,5 millions. Ainsi, 35 % des déposants sont concernés, ce qui n’est pas anodin. La réalité des montants l’est encore moins : le délai de cinq ans s’applique à 2,7 milliards sur 2,9 milliards de plus-values. Cela signifie que l’amendement adopté par la commission, que j’ai corédigé avec Mme Cariou, concerne 90 % du montant cumulé des plus-values de 2015.
À ce stade je donnerai donc un avis défavorable à tous les amendements, hormis celui de la commission et de Mme Cariou. Je donnerai un avis favorable aux amendements rédactionnels ou de précision. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est bon que nous ayons ce débat, un débat global sur la politique fiscale du Gouvernement, sur les choix que nous avons faits en termes de fiscalité du capital et sur l’exit tax car c’est la cohérence globale qui compte.
En ce moment, je passe beaucoup de temps à essayer de trouver un financement afin d’assurer la reprise d’Ascoval par Altifort. L’obstacle principal auquel nous nous heurtons est que, pour le moment – j’ai bon espoir que nous y parvenions au bout du compte – nous n’arrivons pas à trouver des financeurs, un fonds d’investissement qui puisse payer une partie des 180 millions d’euros nécessaires pour investir dans un train à fil afin d’obtenir un fil de haute qualité, pour rendre l’entreprise compétitive et de lui offrir des débouchés.
S’il y a bien une vision totalement inadaptée, qui a fait beaucoup de tort à notre industrie et à notre économie, c’est celle qui consiste à faire croire que l’on peut avoir une économie puissante sans les financements nécessaires ; c’est celle qui oppose d’un côté l’industrie, qui serait bonne, et la finance, qui serait mauvaise.
La réalité est que, si nous voulons mener à bien la reconquête industrielle de la France, nous avons besoin de financements et d’une politique fiscale sur le capital différente. Les choix que cette majorité a faits sont effectivement difficiles à expliquer aux Français car cela fait quinze, vingt ou vingt-cinq ans qu’on leur explique exactement le contraire.
Cela fait quinze, vingt ou vingt-cinq ans qu’ils entendent que le travail, c’est bien, et que le capital, c’est mal. Oui, le travail c’est bien, mais le capital, c’est nécessaire,… Le capital productif ! …pour qu’il y ait des industries, des usines, des ouvriers, et des salaires.
La désindustrialisation de la France doit beaucoup à des choix économiques et politiques désastreux, faits par manque de courage et de vision, parce que l’on n’a pas été capable d’expliquer que, pour financer la sidérurgie, il faut des moyens financiers, du rendement du capital, des fonds d’investissement et du capital disponible. L’industrie lourde demande du capital.
Je voudrais donc replacer ce débat dans les choix de politique économique et dans les choix fiscaux qui ont été faits par le Gouvernement et le Président de la République depuis dix-huit mois. Oui, il faut du courage à cette majorité pour assumer un changement de la fiscalité du capital qui permette le financement de l’industrie française et son redressement.
S’il y a bien une chose dont vous pouvez être fiers, mesdames, messieurs les députés, c’est que depuis une année, nous avons réussi à créer 6 900 emplois dans l’industrie. C’est la première fois depuis dix ans que l’industrie française recrée de l’emploi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Croyez-moi, il y a un lien entre les choix faits en matière de capital et les résultats obtenus en termes industriels. (« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe LaREM.)
Deuxième élément sur lequel je veux insister : l’attractivité de la France. L’exit tax n’est pas un élément d’attractivité de notre pays.
Avec le Brexit, les Britanniques vont quitter l’Union européenne. Nous avons la possibilité de redevenir la première place financière en Europe. Et nous sommes sur le point de réussir : nombre de grandes banques anglo-saxonnes relocalisent leurs emplois, leurs richesses et leurs activités dans notre pays. Ça va ruisseler ! Soyons attractifs ! N’ayons pas peur de récupérer ces emplois, cette richesse !
Nous avons la possibilité de réussir, en France. On voit partout, dans le reste de l’Europe, y compris en Allemagne, venir des difficultés économiques. N’hésitons pas à jouer nos atouts, à être attractifs, à faire venir les grandes institutions financières, les grandes banques avec les emplois, les richesses, les activités qui vont avec, car cela bénéficiera à tous les Français et à tout le territoire français.
Troisième remarque : je refuse l’évasion fiscale, comme le dumping fiscal en Europe. Dans le fond, ce sont les deux sujets posés aujourd’hui, dans le cadre de la politique économique globale que je viens de vous présenter.
Nous ne voulons pas d’évasion fiscale. Nous ne voulons pas qu’un contribuable au patrimoine mobilier supérieur à 800 000 euros puisse gagner un pays d’Europe où il n’y a pas de taxation des plus-values mobilières, réaliser sa plus-value et revenir en France. Très bien ! Le dispositif que nous avons proposé, qui comprend deux années de résidence obligatoire dans le pays, permet de prévenir ce risque d’abus. Absolument pas ! Cela n’avait jamais été fait ! Je refuse catégoriquement l’évasion fiscale. Quant à l’exit tax avec un délai de quinze ans, si le dispositif avait été efficace, cela se saurait ! Vous savez aussi bien que moi, monsieur Carrez, qu’il n’a pas été efficace et qu’il n’a pas prévenu les départs. Au contraire, comme l’a très bien dit Charles de Courson tout à l’heure, de nombreux contribuables en ont conclu qu’ils devaient partir au plus vite, pour commencer à faire courir le délai au plus tôt.
Les deux années que nous proposons sont un dispositif anti abus efficace, qui permettra d’encadrer le risque d’évasion fiscale.
J’ajoute, pour ceux qui évaluent les plus-values latentes à plus de 6 milliards d’euros, que le dispositif ne s’appliquera qu’aux départs à partir du 1er janvier 2019. Il rendra notre territoire attractif, tout en nous permettant de contrôler les abus.
En réalité, le vrai sujet est celui du dumping fiscal en Europe. Et le dumping social ! C’est cela le vrai sujet, sur lequel je me bats avec le Président de la République depuis dix-sept mois. Il est évident qu’une zone euro comprenant dix-neuf dispositifs fiscaux différents, tant en matière d’impôt sur les sociétés que d’impôt sur les plus-values mobilières, ne peut pas fonctionner.
À un moment donné, il sera temps que chaque État prenne ses responsabilités, pour aller vers une harmonisation et une convergence fiscales en Europe. Tant qu’il y aura des effets d’évasion comme ceux qui peuvent exister aujourd’hui, du dumping fiscal en Europe, de telles divergences de taux sur des impôts aussi importants que l’impôt sur les sociétés ou les plus-values mobilières, nous n’aurons pas une zone euro solide, stable et capable de résister à de nouvelles crises économiques et financières.
Je vous engage donc à voter ce dispositif anti-abus de deux ans et à m’accompagner dans ce combat pour l’harmonisation fiscale en Europe, qui est le seul qui compte. Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Gilles Carrez. Monsieur le ministre, je partage votre préoccupation concernant le renforcement de l’attractivité fiscale de notre pays.
Cependant, vous qui êtes très attaché aux comparaisons européennes, en particulier avec l’Allemagne, je voudrais vous rappeler que, lorsque nous avons recréé l’exit tax avec un délai de huit ans, nous nous sommes inspirés de ce qui existait en Allemagne, où le délai est de dix ans, en Suède, en Espagne ou en Italie. Car tous les pays européens, ou presque, se sont protégés de ce paradis fiscal qu’est la Belgique, où toute fiscalité est supprimée. Nous nous insérions donc dans la pratique européenne.
Le prélèvement forfaitaire unique à 30 %, que j’ai voté, a conduit à un niveau de fiscalité sur les plus-values raisonnable qui, hors prélèvements sociaux, s’établit en-dessous de 14 %, taux de la première tranche de l’impôt sur le revenu.
Sous la précédente législature, nos collègues socialistes ont jugé bon de porter le délai de huit à quinze ans. Nous n’avons pas voté cette mesure car nous estimions que c’était trop long. Mais les deux ans que vous proposez ne permettent en aucun cas de résoudre le problème. C’est évident, il y aura des allers-retours, pendant ce laps de deux ans !
Madame Peyrol, vous avez insisté dans votre amendement tout à l’heure pour que la définition de l’abus de droit fiscal se fonde sur la motivation « principalement » fiscale de l’auteur de l’opération, et non « exclusivement » fiscale. Et vous avez raison ! Mais quand on s’installe à Uccle ou à Ixelles, à côté de Bruxelles, c’est certainement pour profiter de la chaleur et du soleil rayonnant ! Des croquettes de crevettes ! Des frites ! Bref, ce n’est absolument pas dans un but principalement fiscal !
Sérieusement, nous plaidons pour un délai raisonnable. Je défendrai un amendement le fixant à six ans. La commission des finances a préféré cinq ans, ce qui reste assez raisonnable. Merci de conclure… Mais je veux vous convaincre que deux ans, c’est beaucoup trop court, et contraire à la pratique européenne à laquelle vous tenez tant. La parole est à M. François Pupponi. Monsieur le ministre, l’exercice est difficile. L’exit tax fait globalement consensus dans cet hémicycle, à droite comme à gauche, depuis de nombreuses années. Nous pouvions diverger sur le délai – dix ans, quinze, huit – mais nous nous accordions pour considérer comme anormal le fait que des personnes ayant bâti leur fortune en France partent à l’étranger pour être exonérées de plus-values et, une fois les plus-values réalisées, reviennent en France. Nous étions unanimes pour approuver la taxation.
Et voilà que le Président de la République annonce dans la presse… Étrangère ! …son intention de supprimer cette taxe. Surprise… Tout cela vous amène à devoir affirmer qu’on ne la supprime pas, mais qu’on la supprime.
Le rapporteur général fait valoir que, sur l’ensemble des contribuables taxés avec un délai de quinze ans, 90 % d’entre eux seront taxés avec le délai de cinq ans. Mais combien de personnes ont été taxées pour des plus-values réalisées dans un délai de deux ans, puisque c’est ce que propose le Gouvernement ? Vous semblez considérer que nombre de plus-values sont réalisées dans les deux ans, mais combien précisément ? Selon vous, le délai de deux ans suffira pour être efficace, mais tout le monde sait que le contribuable voudra bien attendre trois ans avant de vendre !
Et vous affirmez que l’exit tax n’est pas efficace. Mais comment savoir si une taxe qui vise à empêcher les départs est efficace ? Heureusement d’ailleurs qu’elle ne rapporte pas suffisamment, cela signifie que des contribuables ont préféré rester et payer leurs impôts ! On peut voir les choses sous cet angle. Si vous doutez de son efficacité, monsieur le ministre, proposez des mesures pour la rendre plus efficace. La parole est à M. Éric Coquerel. J’ai toujours plaisir à échanger avec vous, monsieur le ministre, parce que vous assumez votre politique. Mais j’ai quelques éléments de réponse, même si le temps manque pour discuter au fond.
D’abord, il n’y a jamais de capital sans travail, mais l’inverse n’est pas vrai. Les entreprises de service public montrent qu’il est possible de produire des richesses sans actionnaires.
Vous avez évoqué Ascoval. C’est un bon exemple, et ce n’est pas sans lien avec ce que nous avons dit tout à l’heure sur l’autorisation de la Commission européenne. Nous souhaiterions que l’État investisse seul dans Ascoval, voire nationalise l’entreprise, parce que notre pays a toujours besoin d’acier. Vous ne pouvez pas le faire, parce que la Commission européenne vous l’interdit. Elle exige la présence d’investisseurs privés. Mais si les investisseurs privés que vous allez encourager cherchent à faire du profit à très court terme, en profitant de nos infrastructures, de nos services publics et de notre activité économique sans investir à long terme, je ne vois pas quels avantages il y a à les attirer dans notre pays. Cela ne servira, une fois de plus, qu’à leur permettre de s’enrichir.
Le fond du problème, c’est votre volonté de faire de Paris la nouvelle City. Mais à ce compte-là, puisque la finance choisit toujours l’endroit dont elle peut tirer le maximum d’avantages, afin que la rente soit la plus élevée possible, nous serons toujours poussés vers le moins-disant fiscal ! Cela n’aura pas de fin ! C’est ce qui justifie la suppression de l’exit tax – car vous avez admis devant la commission des finances que ramener le délai de quinze à deux ans revenait à la supprimer. Merci, monsieur le député… Cette course à l’échalote est mauvaise. Vous pouvez invoquer tous les chiffres que vous voulez, rien ne prouve que l’économie se porte bien dès lors que la finance se porte bien. Les deux sont déconnectées car l’une vampirise la richesse que nous produisons tous.
Je ne souhaite pas que Paris soit la nouvelle City si la contrepartie en est l’augmentation continue du chômage et la destruction de l’économie réelle La parole est à M. Sébastien Jumel. Nous pouvons nous mettre d’accord sur une chose : le ministre est talentueux, il est de droite décomplexée, et il ne manque pas de toupet.
D’abord, il supprime l’exit tax, à laquelle il substitue un prétendu dispositif anti abus.
Ensuite, voyant que l’opinion publique grince, il affirme que cet allégement, cet affadissement, cette suppression de l’exit tax va nous permettre de sauver notre industrie. Et vient le discours sur la France et ses usines, tout à fait sincère je suppose – sauf que je n’ai toujours pas compris comment, en assouplissant l’exit tax, nous trouverons des investisseurs pour Ascoval. Moi non plus ! Mon esprit est peut-être lent, mais il faudra m’expliquer comment, en favorisant la délocalisation des actions, vous trouverez des investisseurs. Vous le savez, monsieur le ministre, cent de nos fleurons sont, à tout moment, à la merci de fonds d’investissement prédateurs étrangers venant siphonner notre tissu industriel. C’est ce sujet que nous devrions évoquer.
On aurait pu doter la France d’outils d’investissement public permettant d’être réactifs face à des cas comme celui d’Ascoval, plutôt que de gaspiller l’argent public dans un CICE – crédit d’impôt compétitivité emploi – dont tout le monde sait l’inefficacité. Merci, monsieur le député… Enfin, extrême toupet, vous plaidez pour une harmonisation fiscale européenne – oubliant l’harmonisation sociale par la même occasion. Mais votre dispositif en est l’antithèse puisque, Gilles Carrez vient de le démontrer, il n’est pas aligné sur nos voisins européens ! La parole est à Mme Amélie de Montchalin. La convergence européenne, c’est le combat sur lequel toute notre énergie doit être focalisée. Le véritable combat, c’est l’instauration d’un mécanisme mettant fin au dumping entre les pays, à cette lutte pour savoir qui possède le meilleur régime pour la création d’entreprise, qui pour la croissance, qui pour la transmission, qui pour les héritages. La majorité soutient pleinement le Gouvernement dans ce combat. L’amendement qui a été adopté par la commission des finances vise bien à nous rapprocher de ce que font le Royaume-Uni et l’Allemagne.
Sur ce sujet, il ne faut pas s’intéresser à l’opinion publique, mais aux résultats. Si vous faisiez attention à l’opinion publique, cela se saurait ! La politique fiscale que nous menons de manière cohérente depuis dix-huit mois a des résultats. Les investissements en fonds propres dans les entreprises innovantes ont augmenté de 61 % entre le premier semestre 2017 et le premier semestre 2018. (Mme Bénédicte Peyrol applaudit.) Ils représentent 2 milliards d’euros, soit trois fois plus qu’en 2015, où ils étaient de 750 millions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Ces fonds propres vont partout en France : les régions qui ont le plus de projets nouvellement financés sont la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie et la Bourgogne-Franche-Comté – le pays profond, là où se trouvent les industries, là où il faut récréer de l’emploi. Les entreprises qui se financent aujourd’hui sont plus grandes. Ce ne sont pas seulement des start-up dont la durée de vie est courte, mais des entreprises qui arrivent à lever plus de 50 millions d’euros chacune.
Autre résultat : l’attractivité. En la matière, 2017 a été la meilleure année depuis dix ans. Ainsi, 40 000 emplois ont été créés ou sauvegardés ; 1 300 projets ont été développés, vingt-cinq projets supplémentaires par semaine sont annoncés ;… On verra en 2018 ! …et il y aura 16 % de projets supplémentaires sur l’année.
Ces chiffres nous permettent de penser que oui, la cohérence paie, oui, il existe un lien entre notre réforme fiscale et ce que nous faisons aujourd’hui. Nous cherchons des résultats plutôt que des débats. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Fabien Di Filippo. Petit clin d’œil à Gilles Carrez qui me faisait remarquer que, parmi les 2 milliards d’investissement que vous évoquiez, nombre de fonds proviennent de Chine – par exemple pour l’aéroport de Toulouse. Est-ce un progrès pour notre économie ? Je laisse chacun juge de la manipulation des chiffres à laquelle vous êtes capable de vous livrer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Bien vu ! Votre discours, monsieur le ministre, est très ambivalent. À l’étranger, vous parlez d’une suppression de l’exit tax pour convaincre les investisseurs de venir en France. Devant les Français, vous niez tout cadeau fiscal aux plus riches. Je m’interroge sur ce double langage. L’instauration du délai de deux ans est une suppression de fait de l’exit tax.
Nous voulons tous diminuer les impôts pour tout le monde – ce serait merveilleux. Mais la réalité, c’est que la dépense publique augmente, encore et encore. Il y aura près de 100 milliards d’euros de déficit l’année prochaine. Vous serez le ministre de l’économie qui, sans doute, durant son mandat – je vous souhaite qu’il dure encore un peu – aura vu le pourcentage de la dette dépasser la barre des 100 % du PIB. Tant que nous sommes dans cette dynamique, il n’y a pas de baisse des dépenses possible.
Moi qui suis un exégète rigoureux de la parole présidentielle, je l’ai entendu dire que tout le monde doit faire des efforts. Les riches surtout ! Symboliquement, comment pouvez-vous expliquer à nos compatriotes que sur la CSG, le carburant, le fioul, les classes moyennes et les travailleurs modestes doivent faire des efforts mais qu’il faut alléger l’exit tax ?
J’en viens au cœur du débat : ces relocalisations de patrimoine contribuent-elles plus à notre économie que la consommation des classes moyennes, des retraités et des travailleurs modestes ? Depuis le début de l’année, l’effondrement de la consommation et de la croissance, l’augmentation de la dette, les pertes de recettes vous apportent une réponse, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à Mme Véronique Louwagie. Madame de Montchalin, vous dites que notre combat doit porter sur la convergence des dispositions fiscales au niveau européen. Nous en convenons tous. Depuis que j’ai été élue députée, en 2012, j’entends parler de cette convergence. Mais force est de constater qu’aucun progrès n’a été accompli en la matière. Tant que les fiscalités des pays européens divergeront, la France devra se protéger. Nous ne pouvons pas supprimer nos dispositifs de protection. Or, c’est que le Gouvernement s’apprête à faire au travers de l’article 51.
Nous avons tous été surpris par la déclaration du Président de la République, à commencer par la forme : s’exprimer dans un journal étranger sur un tel sujet est pour le moins étonnant. Sur le fond, j’ai l’impression qu’au travers de l’article 51, vous cherchez à maquiller la suppression de l’exit tax : le délai de deux ans est suffisamment court pour ne pas être trop contraignant pour ceux qui veulent quitter la France pour procéder à des cessions. Nous ne pouvons pas l’accepter. La durée de deux ans n’est pas suffisante pour protéger notre pays. Je le dis à M. le ministre qui a émis un avis quasi défavorable à une éventuelle extension du délai au-delà de deux ans. Non… La durée de six ans que nous proposons présente l’avantage d’être cohérent avec le délai prévu pour le pacte Dutreil, qui, sans poursuivre le même objectif, concerne également les cessions et transmissions d’entreprises. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Je souscris à ce qui a été dit sur les effets bénéfiques des mesures prises. Mais on peut parfaitement soutenir la politique économique menée par le Gouvernement et considérer que l’article 51 pose un problème et qu’il a pour effet la suppression de l’exit tax. Je suis très à l’aise sur ce point.
Le dispositif de l’exit tax, qui a connu des aménagements successifs, marche assez bien. Il est dissuasif. Ce n’est pas un drame de défendre la suppression de l’article 51 qui vise, directement ou indirectement, à supprimer l’exit tax tout en soutenant toutes les mesures qui ont été prises par le Gouvernement. J’assume complètement cette position.
C’est ridicule, nous nous prenons les pieds dans le tapis. Les répercussions sur le plan financier prouvent que le dispositif marche bien. Je ne pense pas qu’il soit un élément de non-attractivité. C’est un instrument d’équité fiscale. Il me semble légitime que toute personne paie l’impôt, surtout quand elle réalise des plus-values grâce à un environnement rendu très favorable par la politique actuelle du Gouvernement. Mes chers collègues, j’ai laissé la discussion se déployer assez largement. De nombreux arguments ayant déjà été échangés, j’invite chacun à se montrer synthétique pour l’examen des amendements qui suivent. Très bien, madame la présidente ! La parole est à M. le ministre. Je constate que le débat prospère, et excède parfois la question de l’exit tax, mais c’est un débat intéressant. Je voudrais revenir sur quelques éléments afin de clarifier la politique que je défends. J’ai effectivement l’honnêteté de la présenter et de la défendre. Je n’aime pas le double langage, ni en politique ni en dehors.
Pour répondre à la question qui m’a été posée, le nombre de contribuables ayant quitté le territoire national et déposé une déclaration d’exit tax s’est établi à 330 en 2012, à 437 en 2013, à 399 en 2014 et à 374 en 2015.
Le lien entre industrie et finance est le sujet qui me préoccupe le plus, parce que je crois profondément à la reconquête industrielle de notre pays. Depuis dix ans, il y a tout de même quelque chose qui a buggé : on ne perd pas une centaine d’entreprises industrielles par an, 1 million d’emplois, 12 à 18 % de notre richesse nationale – alors que d’autres pays sont arrivés à conserver leur industrie – sans que des erreurs majeures de politique économique aient été commises.
Et l’erreur économique majeure, c’est que nos coûts de production ont été plus élevés que ceux de tous les autres pays européens, qui plus est à un moment où l’on ouvrait l’Union européenne à d’autres pays industriels, notamment de l’Est. Nous avons perdu, année après année, de la profitabilité. Dès lors, nos entreprises n’ont pas pu investir suffisamment, et cela s’est traduit par une vraie saignée industrielle partout dans le pays. Sans compter certaines idées très brillantes intellectuellement mais stupides économiquement, comme « l’industrie sans usines ». Pourquoi pas l’industrie sans ouvriers, tant qu’on y est ? Ça, c’est vrai ! Tout cela a créé un désastre industriel dans notre pays.
Il est donc temps de revenir sur Terre, d’atterrir, avec des idées simples : si nous sommes trop chers, nous ne vendrons pas ; si notre compétitivité-coût n’est pas à la hauteur, c’est la ruine de nos usines. Vous pourrez faire toutes les déclarations que vous voudrez : si un industriel trouve de l’acier moins cher ailleurs, il ira l’acheter ailleurs, et cela vaut aussi pour l’acier performant. Autrement dit, la compétitivité-coût, ce n’est pas négociable.
L’investissement est donc indispensable, et il ne peut pas se faire uniquement par endettement, monsieur Coquerel : il doit se faire aussi par des fonds propres. C’est parce que nos entreprises n’étaient pas assez profitables et ne disposaient pas d’assez de fonds propres qu’elles n’ont pas investi suffisamment. Non seulement elles ont perdu en compétitivité-coût, mais aussi en qualité des produits, et nous avons perdu part de marché après part de marché. C’est cette tendance que nous voulons inverser.
Je voudrais néanmoins marquer mon accord sur un point avec MM. Coquerel et Jumel : ce n’est pas parce que nous faisons le choix du capital, des fonds propres, de l’investissement et de l’innovation que le cours de bourse doit compter plus que la viabilité à long terme de l’entreprise, et qu’il faut accepter n’importe quel comportement, un comportement irresponsable, un comportement de prédateur.
Je vous donne un exemple très précis : je suis obligé de me battre avec les dirigeants de Ford pour qu’ils acceptent la reprise par Punch de l’usine de Blanquefort, près de Bordeaux. Je trouve que l’on pourrait s’épargner ce combat. (Mme Dominique David applaudit.) J’appelle Ford au sens des responsabilités, à comprendre qu’une reprise solide est proposée par un repreneur crédible, en l’espèce Punch, qui a déjà apporté la preuve de sa solidité ailleurs en France, notamment à Strasbourg. Quand je vois le comportement responsable des salariés de Blanquefort, qui sont prêts à accepter des efforts, parce qu’ils veulent sauver leur outil de production, et que je vois que Ford n’a toujours pas répondu à la proposition honnête et solide formulée par Punch ni tenu compte du comportement responsable des salariés, j’estime que cela dépasse les limites de l’acceptable.
Nous ne réussirons collectivement en matière économique que si chacun fait preuve de sens des responsabilités. Pour notre part, nous menons une politique économique, volontariste et responsable, de reconquête industrielle. L’immense majorité des salariés français, notamment dans les usines, ont un comportement courageux et responsable. (Mme Dominique David et M. Daniel Labaronne applaudissent.) J’aimerais donc que ceux qui dirigent les plus grandes entreprises du monde, notamment Ford, soient à la hauteur du sens des responsabilités des ouvriers et des salariés français. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Quel est le rapport avec l’exit tax ? Monsieur Di Filippo, je ne sais pas ce que vous buvez le matin, mais je vous incite à prendre de la tisane plutôt que du café. C’est de la loyauté aux valeurs ! Vous ne connaissez pas cela ! Vos termes sont dignes d’un Savonarole de la droite française. Vous parlez d’un effondrement de la croissance française. Atterrissez, monsieur Di Filippo ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La France a obtenu, au troisième trimestre, le meilleur résultat de la zone euro en termes de croissance. Atterrissez !
Vous parlez d’effondrement de la consommation. Or la consommation est en train de repartir, en cette fin d’année 2018. Atterrissez, monsieur Di Filippo ! Cessez vos philippiques contre le Gouvernement, ou essayez au moins d’atterrir et de citer des faits un peu plus exacts : cela vous rendra un tout petit peu plus crédible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Répondez sur le fond ! Vos attaques contre le Gouvernement sont surtout des attaques contre les Français, qui ont réussi à obtenir, à la fin de l’année 2018, le meilleur résultat économique de la zone euro. Soyez-en fier, plutôt que de le dénigrer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Rendez-vous au début de l’année prochaine ! Les secteurs du bâtiment et du logement vont s’effondrer ! Je reviens à l’exit tax. Vous proposez, madame Louwagie, des délais plus longs. Je ne suis absolument pas fermé à cette idée pour les contribuables qui détiennent le patrimoine mobilier le plus important. Nous vous proposons deux ans comme délai de base, en vue d’éviter tout effet de contournement et toute évasion fiscale. Deux ans, cela oblige les intéressés à partir avec leur famille, à s’installer réellement : cela prévient toute possibilité d’évasion fiscale. Si vous estimez qu’il faut une garantie plus forte, et donc des délais plus longs, pour des contribuables dont le patrimoine mobilier est plus élevé, et s’il y a des propositions en ce sens au cours du débat, j’y suis tout à fait ouvert. Et je le prends sur moi, car je veux que la mesure soit efficace et garantisse l’attractivité de notre pays, mais aussi qu’elle soit juste et évite toute possibilité d’évasion fiscale. (M. Daniel Labaronne applaudit.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 72
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 12
Contre 50 (Les amendements identiques nos 1402, 2115, 2145, 2167 et 2309 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l’amendement no 2142. Nous aurions envie de poursuivre ce débat avec vous, monsieur le ministre. Vous dites que les dirigeants de Ford donnent exactement l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Je vous répondrai que la politique qui consiste à donner des aides sans contrepartie, comme le CICE, aux entreprises, y compris à celles que vous dénoncez avec justesse, permet précisément les pratiques de ce genre.
Il y a un paradoxe dans votre réforme de l’exit tax : vous nous dites qu’il s’agit de faire revenir des capitaux dans notre pays, alors qu’il s’agit d’un système qui permet aux capitaux de sortir plus rapidement de notre pays, et même de le fuir ! Vous avez d’ailleurs manié un paradoxe un peu du même genre lorsque vous nous avez expliqué que le fait d’autoriser plus facilement les licenciements allait créer de l’embauche. Cela ne fonctionne pas, nous y reviendrons.
Au-delà de la question de la durée, nous voulons pointer un deuxième problème posé par l’article 51 : désormais, l’assujetti à l’impôt pourra s’affranchir des garanties qu’il devait auparavant fournir à l’administration fiscale en cas de départ à l’étranger dans un pays non membre de l’Union européenne.
Le 24 septembre dernier, monsieur le ministre, vous avez déclaré devant la commission des finances : « Cette mesure nous permet de supprimer également les modalités administratives complexes dont elle était assortie, notamment la constitution de garanties auprès d’un comptable public, sauf pour les pays qui n’auraient pas de convention d’assistance fiscale avec la France. »
Auparavant, on ne demandait pas de garantie en cas de départ vers un pays de l’Union européenne, ce qui est déjà exagéré selon moi. Maintenant, vous voulez élargir considérablement la liste des pays concernés. Je ne comprends pas. On demande je ne sais combien de garanties à toute personne qui veut louer un appartement, mais s’agissant de plus-values sur des valeurs dépassant 800 000 euros, on ne veut pas permettre à l’administration fiscale d’être sûre de récupérer ce qui lui est dû ! Merci, monsieur Coquerel…