XVe législature
Session ordinaire de 2019-2020
Séance du lundi 21 octobre 2019
- Présidence de M. Hugues Renson
- 1. Projet de loi de finances pour 2020
- Première partie (suite)
- Article 27 (appelé par priorité)
- M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation
- M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Nicolas Turquois
- M. Hervé Saulignac
- M. Thierry Benoit
- M. Charles de Courson
- M. Éric Coquerel
- M. Jean-Paul Dufrègne
- Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas
- M. Fabrice Brun
- Mme Emmanuelle Ménard
- Amendements nos 465, 2046, 93, deuxième rectification, 304, deuxième rectification, 807, 326, 408, 83, 325, 798, 336, 1088, deuxième rectification, 1134, deuxième rectification, 2812, 2258, 2931 et 1436
- M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire
- Amendements nos 2055, 2815, 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067, 2085, 254, 365, 559, 879, 2251, 100, 191, 312, 403, 549, 878, 1125, 1297, 2070, 2497, 2403, 3096 (sous-amendement) et 2114
- M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics
- Amendements nos 1992, 2461, 2357, 2122 et 2120, 2133
- Suspension et reprise de la séance
- Amendements nos 2327, 2965, 2342, 2962, 2944, 2347, 2578, 990, 3104 rectifié, 1833, 3106, 3110, 3109 (sous-amendement), 2932, 82 rectifié, 180 rectifié, 1141, 2072, 2227, 2341, 2367, 2438, 2537, 2679, 2810, 3100 (sous-amendement), 1712, 2068, 42, 108, 122, 183, 296, 350, 367, 372, 375, 451, 519, 553, 574, 601, 683, 880, 890, 933, 1013, 1060, 1264, 1294, 1403, 1530, 1814, 1892, 1947, 2155, 2199, 2200, 2287, 2377, 2606, 2800, 2482, 1987, 1402, 1670, 1978, 2487, 1224, 2481, 2489, 406, 1989, 2479, 3107, 2933, 2217, 2490, 2119, 2816, 2016, 3108, 2549, 2934, 2627, 3097 (sous-amendement), 56, 816, 1071, 2343, 819, 57, 2485, 3105, 2935, 2789, 2936, 2678, 2546 rectifié, 2540 rectifié, 2521, 2488, 2817, 2793, 2829, 2831, 2832, 2495 et 772
- Après l’article 27 (amendements appelés par priorité)
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 26 (suite)
- Amendements nos 2654, 826, 399, 400, 874, 939, 1089 rectifié, 875, 2672, 931, 1735, 1721, 2224, 1722, 2223, 476 rectifié, 1165 rectifié, 1725, 1723, 92, 473 rectifié, 2263 rectifié et 497
- Article 28
- Amendements nos 1823, 1822
- Après l’article 28
- Amendement no 2785
- Articles 29 et 30
- Article 31
- Après l’article 31
- Article 32
- Amendements nos 2466, 1812, 3098 (sous-amendement), 2938 rectifié, 1385 et 2464
- Article 33
- Après l’article 33
- Article 34
- Article 35
- M. Jean-Paul Dufrègne
- M. Gilles Lurton
- M. Charles de Courson
- Amendements nos 2463 et 2691
- Article 37 et état A
- Amendement no 3114
- Suspension et reprise de la séance
- Article 27 (appelé par priorité)
- Seconde délibération
- Première partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
2e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2020 (nos 2272, 2301).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 27.
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 27.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Je souhaite, au nom du Gouvernement, intervenir sur les dispositions de l’article 27 relatives aux chambres d’agriculture, à la baisse du plafond de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti – TA-TFNB – et à la régionalisation de son affectation.
Sous la pression, vous avez fini par lâcher !
Aujourd’hui, l’agriculture est en grande difficulté.
C’est bien de le reconnaître !
Il faut absolument parvenir à ce qu’elle s’en sorte. Elle le peut parce qu’elle est forte ; elle le peut parce que les agriculteurs et les agricultrices sont des hommes et des femmes qui aiment leur métier et qui sont capables d’avancer. Mais elle n’en sortira pas seule : nous devons, au sein de l’Union européenne, mettre fin au dumping et réduire les disparités entre les États membres. De même, il faut que les standards et les forces des agricultures française et européenne leur permettent de rayonner et d’être compétitives au niveau mondial.
S’agissant du volet français de l’agriculture, les États généraux de l’alimentation – EGA –, auxquels ont participé des milliers de personnes, ont permis de rassembler tous les acteurs de la filière, d’amont en aval. Plusieurs enseignements très clairs en ont été tirés : tout d’abord, il faut relever le revenu des agriculteurs au-dessus du plancher actuel et assurer une meilleure répartition de la valeur. C’était l’enjeu des EGA, cela a été inscrit et adopté dans la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite EGALIM.
La première année, qui a vu l’application de la loi et des ordonnances, était une année d’expérimentation : c’est aujourd’hui que les choses commencent réellement. Elles commencent avec les discussions sur les marques de distributeur ; elles se prolongeront, en fin d’année 2019 et début d’année 2020, avec les négociations commerciales. C’est là, avec l’inversion de la construction des prix et la mise en place par les filières des indicateurs de prix, que nous devrons parvenir à une meilleure répartition de la valeur économique pour les agriculteurs.
Deuxièmement, ainsi que cela figurait dans le titre II de la loi EGALIM, il faut que la transition agroécologique soit encore plus prégnante dans l’ensemble de l’agriculture française. Aujourd’hui, nous demandons beaucoup aux agriculteurs et aux chambres d’agriculture. Beaucoup trop ! Non, monsieur le député, pas trop du tout !
Il faut essentiellement assurer le revenu des agriculteurs car, sans cela, on n’arrivera jamais, quoi que l’on fasse, à les entraîner dans la transition agroécologique. Or je m’aperçois que, dans l’ensemble des filières, cette transition a bien lieu. En effet, nombre d’exploitations sont dans une démarche de certification haute valeur environnementale – HVE – de niveau 1, voire de niveau 2. L’engagement est fort.
Les chambres d’agriculture, grâce à leurs conseillers, jouent un rôle essentiel de conseil et d’animation sur les territoires. Elles doivent également accompagner la transition agroécologique. Initialement, le Gouvernement avait envisagé de demander un effort aux chambres d’agriculture... C’est bien de le reconnaître. ...en inscrivant dans le projet de loi de finances pour 2020 la diminution du plafond de la TA-TFNB et l’affectation régionale de sa collecte, mais le Premier ministre a entendu les parlementaires. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir. – « Enfin ! » sur les bancs du groupe LR.)
Le Premier ministre a entendu le Parlement. Tout le Parlement. Il a également été sensible aux arguments des groupes de sa majorité. C’est cela aussi, le travail politique ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs. – Protestations sur les bancs du groupe LR.) Il a également entendu les chambres d’agriculture et pris acte du vote acquis il y a quelques jours en commission des affaires économiques… En commission des finances ! Oui, pardonnez-moi, monsieur Brun ! En commission des finances, bien entendu. Partant, après avoir écouté tout le monde, le Premier ministre a rendu un arbitrage et décidé de retirer de l’article 27 du projet de loi de finances les mesures qui étaient afférentes aux chambres d’agriculture, à la régionalisation et à la baisse du plafond de la TA-TFNB. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR et LT.)
Tel est le contenu de l’amendement que le Gouvernement vous proposera d’adopter ce soir. À voir la réaction des députés – et sachant ce que nous avions compris de leur position depuis déjà quelques semaines –, le vote devrait connaître une issue très favorable.
Reste que nous devrons nous occuper de la forêt et de filière forestière, très importantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Nicolas Turquois applaudit également.) Je tiens à saluer le travail de tous les députés, en particulier M. Hervé Pellois, M. Nicolas Turquois et Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, et le vote qui a eu lieu en commission ( « Bravo ! » sur les bancs du groupe LaREM.) Et nous ? C’est vraiment de l’autosatisfaction ! J’espère maintenant que les parlementaires, sur tous les bancs, avanceront dans cette direction.
Je mène actuellement des discussions avec le président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture, l’APCA, sur le nouveau contrat d’objectifs et de performance – COP – des chambres d’agriculture. Celui-ci doit permettre d’avancer dans deux directions : accélérer la transition agroécologique afin d’affronter l’enjeu essentiel du dérèglement climatique, et travailler à une nouvelle gouvernance, afin d’appréhender les territoires d’une nouvelle façon. Je demanderai à ce que chaque COP ne soit pas, comme cela se fait dans tant d’autres secteurs, un rapport de 100 ou 200 pages, mais qu’il énonce dix à quinze priorités fortes que vous puissiez partager et sur lesquelles nous travaillerons dans la durée.
Enfin, l’amendement no 3104 présenté par le Gouvernement prévoit la remise d’un rapport au Parlement. Cela va en faire, des rapports… Il lui appartiendra de s’en saisir. Jusqu’ici, vous avez, sur tous les bancs, tiré dans le même sens ; continuez à le faire, pour que les chambres d’agriculture soient de plus en plus efficaces et qu’elles puissent transformer au mieux l’économie de notre pays. C’est pourquoi je vous demanderai de soutenir cette position en remerciant le Premier ministre pour son arbitrage. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Et M. Brun ! La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. La décision prise aujourd’hui est sage ; elle est susceptible de conduire à l’apaisement sur un dossier qui a beaucoup préoccupé la commission des finances car – soyons francs – il n’était pas très bien ficelé. Très bien, monsieur le rapporteur général ! Pour nous en apercevoir, il a fallu soulever la question de l’affectation de plusieurs fonds destinés à la forêt.
Je suis satisfait du compromis trouvé. En tout état de cause, devant les difficultés, j’aurais demandé à ce que l’amendement de la commission des finances, adopté à l’initiative de M. Fabrice Brun, et l’amendement identique de M. Hervé Pellois, soient adoptés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, LR, FI et LT.)
Il manquait cependant la demande de remise d’un rapport. En effet, à l’image de toutes les autres, la filière agricole doit se moderniser et se réformer. Cela est absolument indispensable pour leur survie, car, comme dans tout réseau consulaire, toutes les chambres ne fonctionnent pas exactement de la même façon, même si la plupart – et c’est ce qui est important – mènent des actions très intéressantes en faveur de l’implantation de jeunes agriculteurs.
Nous avons plusieurs inscrits avant de débattre des 130 amendements déposés sur l’article 27. Les dispositions de l’amendement no 2932, adopté par la commission des finances à l’initiative de M. Fabrice Brun, et du no 1141 de M. Hervé Pellois sont reprises et complétées par l’amendement no 3104 du Gouvernement. Pour afficher mon soutien à cette démarche, j’ai déposé un amendement rigoureusement identique no 3106, qui inclut la demande de rapport sur les modalités de financement des affectataires de la TA-TFPNB et sur le processus de modernisation et de mutualisation du réseau des chambres d’agriculture. En effet, dans ce domaine, l’immobilisme n’est pas souhaitable, même s’il n’était pas encore temps de mener une réforme, d’autant qu’elle n’était ni comprise, ni acceptée.
Le compromis auquel nous sommes parvenus permet de respecter le travail législatif qui a été effectué. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et UDI-Agir ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR.) La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Le bon sens reprend ses droits. La disposition proposée n’était en effet pas de bon sens, car elle attaquait directement les chambres d’agriculture à un moment où l’agriculture a besoin de soutien... Et de proximité ! ...et non pas de voir ses moyens diminués. Or, quel que soit le territoire où elles sont implantées, le rôle des chambres d’agriculture est éminemment important pour l’agriculture française. La commission des finances avait donc adopté plusieurs amendements – un de M. le rapporteur et deux de M. Fabrice Brun – réduisant la portée des dispositions voulues par le Gouvernement, au point de les dévitaliser.
Il me paraissait souhaitable d’éviter un débat parlementaire trop polémique ou agressif sur le sujet. Le Gouvernement a pourtant décidé de réserver l’examen de l’article pour ce soir – était-ce pour faire le compte des troupes, ce qui aurait signifié qu’il était prêt à la bataille ? Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, vous êtes revenu sur votre décision et je m’en réjouis pour l’agriculture française et nos chambres d’agriculture. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Nicolas Turquois. Au nom du groupe MODEM, je remercie le ministre d’avoir annoncé le retrait de ces dispositions. Cela étant, j’aimerais que la polémique née autour de ce sujet nous interroge sur la façon dont nous construisons le budget de notre pays. En effet, s’il était en effet insupportable, pour les chambres d’agriculture, de découvrir une mesure de cette ampleur quelques mois seulement avant son application, mais en réalité, chaque projet de budget contient des dispositions de ce genre.
Il faut donc en finir avec de telles pratiques et anticiper davantage la préparation du budget – d’autant que les chambres sont un acteur utile pour accompagner la transformation de l’agriculture.
Il est dommage qu’à la faveur de cette polémique, la forme ait pris le pas sur le fond. Car, en tant qu’agriculteur, j’estime que l’on peut s’interroger sur le modèle des chambres d’agriculture. Au cours des dernières années, plusieurs rapports – dont l’un émanait de la Cour des comptes – ont relevé des dysfonctionnements, des différences d’orientation d’un département à l’autre, des dépenses de représentation excessives pour des organismes financés par de l’argent public. S’il n’est pas souhaitable de procéder à la diminution brutale des ressources qui était initialement programmée, une vraie stratégie reste à adopter concernant la gouvernance des chambres d’agriculture. Il y a des instances de contrôle pour ça ! Les règles adoptées en la matière dans les années 1920 ou 1930 n’ont en effet plus la même pertinence de nos jours. Monsieur le ministre, je vous engage donc à mener une action déterminée sur le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.) La parole est à M. Hervé Saulignac. Avant que d’aucuns ne pensent que nous serons deux orateurs du groupe socialiste à prendre la parole, je précise que je m’exprime en lieu et place de ma collègue Christine Pires Beaune.
À mon tour, je salue la sage décision qui a été prise, tout en regrettant qu’elle l’ait été dans ces conditions. Nous aurions pu éviter de mettre sous pression les chambres d’agriculture qui, comme nous l’avons constaté en rencontrant leurs représentants, nourrissaient de très grandes inquiétudes. Nos collègues Fabrice Brun et Michèle Victory pourraient en témoigner puisque, aujourd’hui encore, nous avons participé à une réunion avec eux.
J’ai presque envie de dire : tout ça pour ça ! Eh oui ! Nous savions pourtant dès le début que cette mesure n’aurait pas eu la moindre incidence sur le pouvoir d’achat des agriculteurs, mais qu’elle aurait fortement compromis le fonctionnement des chambres d’agriculture, où 750 emplois d’ingénierie étaient menacés. Un véritable plan social ! Par conséquent, il était nécessaire d’y renoncer.
Cependant le communiqué qui a été publié il y a quelques minutes n’est pas le reflet de la réalité. Car des parlementaires de tous les groupes et de toutes les sensibilités se sont mobilisés sur le sujet : des députés comme des sénateurs, beaucoup de membres de l’opposition mais aussi des représentants de la majorité. Une tribune, parue ce week-end, a été signée par 180 parlementaires et présidents de département. Une telle initiative n’est sans doute pas pour rien dans la décision finalement prise ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et LT. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.) Quoi qu’il en soit, je salue leur engagement.
Les chambres d’agriculture ont besoin de retrouver avec le Gouvernement un dialogue de confiance qui, je le crains, est durablement rompu. Mais c’est aussi avec les parlementaires qu’il doit renouer ce dialogue. Merci, monsieur Saulignac. J’en termine, monsieur le président. J’observe qu’aucun amendement du groupe socialiste n’aura été adopté dans le cadre de cette discussion. C’est assez révélateur. La parole est à M. Thierry Benoit. Naturellement, je ne vais pas féliciter le ministre de l’agriculture pour ce qu’il vient de déclarer. Et pourquoi pas ? Il était inadmissible de rogner les crédits des chambres d’agriculture compte tenu de ce qu’on leur fait vivre depuis deux ans. Parce qu’avant, c’était mieux ? Pour ma part, j’aimerais que le ministre de l’agriculture nous précise plutôt quelle est la feuille de route : quel est le champ d’intervention des chambres d’agriculture ? Quelles sont les missions assignées aux agriculteurs ?
Il y a trente ou quarante ans, les agriculteurs de France se réjouissaient d’avoir Jacques Chirac comme ministre de l’agriculture. Normal ! À l’époque, le ministre était le seul interlocuteur des chambres d’agriculture. À présent, tout le monde parle d’agriculture : Bercy, le ministère de la santé, le ministère de l’environnement. Même au niveau territorial, dans les intercommunalités ou les régions, il existe des collaborateurs chargés de cette question. Le message est totalement dispersé. Pour ma part, je souhaite que la politique agricole française soit conduite depuis le ministère de l’agriculture et par le ministre de l’agriculture.
Monsieur le ministre, vous êtes dans un corner, tout comme votre prédécesseur. Il y a deux ans, après avoir annoncé l’inversion de la construction des prix, le Président de la République avait remercié Stéphane Travert. On ne sait toujours pas pourquoi, tant ce dernier avait fait un excellent travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir.) Et aujourd’hui, je ne vois pas quelle est la feuille de route du nouveau ministre de l’agriculture. C’est la question que je pose clairement ce soir. La parole est à M. Charles de Courson. Au nom du groupe Libertés et territoires, monsieur le ministre de l’agriculture, je voulais vous dire la chose suivante : si, en commission des finances, nous avons majoritairement voté contre l’abaissement de 15 % des taxes affectées aux chambres d’agriculture, c’est parce qu’une partie de la majorité a rejoint l’ensemble de l’opposition pour approuver un amendement de cette dernière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Or que dit votre communiqué de presse ? « À la demande du Premier ministre, qui a entendu à la fois les remarques des parlementaires de la majorité comme des responsables des chambres d’agriculture (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR) , le Gouvernement proposera la suppression des dispositions relatives aux chambres d’agriculture dans l’article 27 du projet de loi de finances. » Voyez-vous, ce n’est pas une attitude très républicaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Cécile Untermaier applaudit également.)
Je vous félicite donc, monsieur le ministre, d’avoir à l’instant rendu hommage à l’ensemble de la représentation nationale, ou du moins aux parlementaires, de la majorité comme de l’opposition, qui se sont opposés à ces dispositions.
En réalité, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, à travers cette affaire des chambres d’agriculture, c’est la conception même de l’organisation de la société qui est en cause. Cela illustre en effet la volonté du Gouvernement d’affaiblir les corps intermédiaires. Pourtant, dans une société libre, on respecte les corps intermédiaires : les chambres consulaires, les chambres d’agriculture, les chambres de métiers, les chambres de commerce et d’industrie et les syndicats. Même quand on n’est pas d’accord avec eux, on discute et on négocie !
Par ailleurs, l’article 27 pose un vrai problème de fond dont nous discutons depuis des années en commission des finances : l’affectation des taxes. Avec un tel mécanisme, nous contrôlons la recette affectée, mais pas les dépenses. Il serait sage de rebudgétiser non pas toutes ces taxes mais une partie d’entre elles. (Applaudissements sur les bancs du groupe LT.) La parole est à M. Éric Coquerel. Je m’associe aux propos des précédents orateurs. J’ai vu certains collègues de la majorité réagir violemment lorsque l’adoption de l’amendement de Fabrice Brun en commission des finances a été présentée comme une victoire du Parlement. C’est pourtant une bonne chose et ils devraient en être satisfaits. Non seulement toute l’opposition a soutenu cet amendement,… Des membres de la majorité aussi ! En effet, et vous en particulier, mon cher collègue. Des membres de la majorité l’ont soutenu, jugeant qu’il était de bon sens.
Ce soir, ce bon sens l’emporte, et j’aimerais que cela soit le cas un peu plus souvent. Ainsi, je suis à peu près sûr que la semaine dernière, certains députés de la majorité ont été sensibles aux arguments soulevés par toute l’opposition sur le caractère néfaste de la baisse du financement des chambres de commerce et d’industrie. Si nos débats de ce soir pouvaient augurer d’une nouvelle pratique, si le Parlement pouvait désormais peser un peu plus sur les décisions sans que le Gouvernement ait besoin de donner son aval à un moment donné, j’en serais particulièrement satisfait.
En tout état de cause, c’est une bonne nouvelle pour les chambres d’agriculture, d’autant qu’au-delà du plafond de la taxe, il ne faut pas oublier le maintien de la départementalisation.
En revanche, je regrette que soient maintenues d’autres dispositions de l’article 27 tendant à diminuer le plafond de taxes affectées à d’autres organismes comme l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs – ANDRA. Nous y reviendrons. J’espère que mon amendement sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, qui a également été repris à son compte par la commission des finances, sera, lui aussi, adopté ce soir. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. Messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, je reprendrai volontiers à mon compte la formule de notre rapporteur général : la décision annoncée par M. le ministre de l’agriculture est une décision sage.
Cette mesure désormais supprimée, vous l’aviez pourtant imaginée. Eh oui ! Cela montre qu’il ne faut pas toujours écouter Bercy. Cette ponction sur les moyens des chambres d’agriculture était malvenue à un moment où l’agriculture est en crise, notamment dans les départements d’élevage comme le mien. Elle était malvenue à un moment où il faut repenser les modèles pour produire une alimentation de qualité et s’adapter au réchauffement climatique.
C’était une mesure dirigée contre le monde rural dans sa globalité, car celui-ci est fortement lié à l’agriculture.
Mais la régionalisation était également une très mauvaise idée à laquelle il convient de renoncer définitivement. Prenons l’exemple de ma région : quelles similitudes peut-il y avoir entre l’Allier, où l’on élève des bovins pour leur viande, et la Savoie ?
Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas donner aux chambres d’agriculture des objectifs clairs ni qu’elles ne devront pas, pour les atteindre, accroître leurs compétences dans certains domaines. Quoi qu’il en soit, réjouissons-nous ce soir que le bon sens l’ait emporté. La parole est à Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Je voudrais vraiment associer tous les députés de la majorité à cette intervention, surtout Hervé Pellois qui a été parmi les premiers à monter au créneau en faveur des chambres d’agriculture. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Il est important, pour la suite de nos travaux sur le sujet, de rappeler que nous étions sur la voie d’un compromis.
Cela étant, je voudrais quand même rétablir certaines vérités. La tribune dans Le Parisien ? Certes, bravo, mesdames et messieurs, mais je vous rappelle que les députés de la majorité ont été les premiers à publier une tribune à ce sujet, fin août. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs des groupes LR et LT.)
Vous dites que l’amendement de M. Brun a été le premier à être déposé en commission des finances. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.) Un peu de calme, mes chers collègues. Mais ceux de Hervé Pellois et de Michel Lauzzana revenaient exactement au même. Il ne sert à rien de tirer la couverture à soi (Vives exclamations sur les bancs des groupes LR et LT) et il serait bon de revenir sur le fond.
Quel est le fond ? (Exclamations prolongées les bancs du groupe LR.) Mes chers collègues, je crois avoir noté que M. Brun allait s’exprimer dans quelques instants. Laissez votre orateur prendre la parole pour s’exprimer distinctement plutôt que de vociférer des propos que personne ne comprend.
Poursuivez, madame Verdier-Jouclas. Avant d’en revenir au fond, je vous signale, monsieur Brun, que votre amendement était incomplet puisqu’il ne prévoyait pas la suppression de l’alinéa 66. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) L’amendement de la commission, et surtout celui du Gouvernement, sont à cet égard plus complets.
Sur le fond, nous sommes tous d’accord pour dire que nous avons besoin des chambres d’agriculture, qu’elles sont d’autant plus nécessaires que nous leur demandons beaucoup en matière de transition écologique.
Mais elles ont aussi besoin de se restructurer, car des inégalités demeurent. Merci de conclure, madame la députée. Il faut les amener à mutualiser leurs moyens, en y travaillant tranquillement avec elles pour les aider à y parvenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Fabrice Brun. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.) N’en venez pas non plus, mes chers collègues, à couvrir par vos applaudissements la voix de l’orateur de votre groupe ! Je serai plus consensuel que l’intervenante précédente. Il n’est pas fréquent qu’opposition et majorité se rejoignent en commission des finances pour annuler le projet de régionalisation des chambres d’agriculture – en effet, c’est d’abord de proximité et de terrain dont nous avons besoin –, et pour annuler la réduction de 45 millions d’euros de ressources. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM, SOC, UDI-Agir et LT.) Cette réforme aurait en effet été inutile, inopérante et incohérente, et sans effet significatif sur le revenu des agriculteurs. En revanche, elle aurait remis en cause l’équilibre financier des chambres. Ce n’est pas moi qui l’affirme mais la Cour des comptes, tout comme les 200 députés, sénateurs et présidents de conseils départements signataires de la tribune parue hier dans la presse nationale.
Monsieur le ministre de l’agriculture, nous ne sommes pas dupes. Vous relâchez la pression car le risque était grand de vous voir battu en séance aujourd’hui, comme vous l’avez été en commission des finances. Vous savez très bien, fort de votre expérience, que « les emmerdes volent souvent en escadrille ». J’aime d’ailleurs à penser que l’esprit de Jacques Chirac plane sur nos débats agricoles ce soir. Dans le contexte inflammable de nos campagnes, vous avez enfin compris que désarmer techniquement les agriculteurs constituerait une grave erreur, au moment même où ils sont confrontés à des enjeux colossaux, qu’ils soient sanitaires, climatiques, environnementaux ou économiques, et au défi titanesque du renouvellement des générations.
Vous n’en avez pas parlé, mais sachez que les représentants des chambres d’agriculture partiront demain à la rencontre des 160 000 agriculteurs qui céderont leur exploitation au cours des années à venir. C’est aussi cela, la mission publique de ces chambres. L’enjeu de l’installation de jeunes agriculteurs est un sujet majeur pour l’emploi, pour l’aménagement du territoire mais aussi pour la souveraineté alimentaire de notre pays. Veuillez conclure. Pour continuer à produire demain, nous aurons besoin du réseau consulaire, de ses élus et de ses techniciens, pour que nos agriculteurs puissent toujours innover pour inventer demain. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, SOC, UDI-Agir, GDR et LT.) La parole est à Mme Emmanuelle Ménard. Pour ma part, je me réjouis de cette véritable union sacrée de près de 200 élus qui s’est organisée pour protéger nos chambres d’agriculture, nos agriculteurs et, dans le cas de mon département, nos viticulteurs. La coupe budgétaire sans précédent qui avait été prévue aurait porté une grave atteinte au monde agricole mais aussi au monde forestier. La Cour des comptes semblait elle aussi juger cette décision inutile et inopérante. Oui, réduire les budgets des chambres d’agriculture aurait été une grave erreur, comme l’a malheureusement été la réduction des budgets des chambres de commerce et d’industrie. Oui, le recul du Gouvernement sur cette mesure est une bonne chose et constitue une victoire de l’Assemblée nationale dans son ensemble – je tiens à le souligner –, qui montre là son souci de soutenir les agriculteurs et sa volonté de protéger l’agriculture et la viticulture françaises. (Applaudissements parmi les députés non inscrits.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 465 et 2046.
La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 465. Il s’agit d’un amendement de portée générale sur les taxes affectées. Vous avez souhaité diminuer le plafond de la taxe affectée aux chambres d’agriculture ; nous plaidons, nous, pour une remise à plat du système, et surtout en faveur la suppression du plafond de ces taxes, qui concernent des filières essentielles en France comme le cuir et la plasturgie – j’y reviendrai ultérieurement, avec un amendement spécifique sur le sujet. Cet amendement d’appel a pour but de travailler sur ce déplafonnement. Il est en effet injuste que l’État récupère une partie du produit des taxes affectées, souvent prélevées sur les entreprises. La parole est à M. Éric Woerth, président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement no 2046. Je suis intervenu à plusieurs reprises sur le sujet, non pas, comme Charles de Courson, pour contester le principe même de l’affectation du produit de certaines taxes – même si l’on peut admettre que les dépenses, dans un tel système, sont moins lisibles que les dépenses budgétaires – mais pour remettre en cause son plafonnement. Si j’en crois le rapporteur général – ce que je fais bien volontiers –, le produit des taxes affectées s’élève à 26,4 milliards d’euros en 2019. Sur cette somme, 9,5 milliards d’euros sont plafonnés. Une partie de l’excédent est reversée au budget général – ce qui était d’ailleurs souhaité dans le cas des chambres d’agriculture. Ce sont donc 1 milliard d’euros qui ont été prélevés sur des acteurs économiques en vue d’une affectation mais qui se retrouvent de fait dans le budget général. C’est une sorte de détournement de la fiscalité : ces taxes ne sont pas prélevées dans l’intention d’être versées au budget général.
Je propose donc que l’on supprime les plafonds actuels et que l’on plafonne chaque année non pas le montant mais le taux de ces taxes en fonction des besoins des organismes. Quel est l’avis de la commission ? Notre avis est défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’article 27 dépasse en effet le cas des chambres d’agriculture, puisqu’il concerne de nombreuses taxes affectées. Nous pouvons effectivement ouvrir cet intéressant débat, monsieur le président de la commission, mais je rappelle que c’est Valérie Pécresse qui avait institué le plafonnement des taxes affectées, lorsqu’elle était ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État ; en tant que parlementaire, vous aviez voté en faveur de cette mesure. Vous aussi ! Il se trouve que je n’étais pas parlementaire en décembre 2011. Je n’ai pas eu le plaisir de siéger avec vous et ne le regrette pas, d’ailleurs. (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.)
Deuxième point : M. de Courson évoque la piste de l’abandon du principe d’affectation des recettes – certes par pour toutes les taxes. On peut en effet être en accord avec le M. Woerth lorsqu’il affirme que le plafonnement conduit à verser au budget général le produit de prélèvements effectués sur des acteurs économiques alors qu’ils n’étaient pas prévus pour cela. Cependant, je constate, monsieur de Courson, que vous-même parfois, et d’autres ici, se rendent parfois coupables de ce qu’ils récusent. Hier, vous avez ainsi défendu le principe du prélèvement des cotisations INAO directement auprès des viticulteurs et aujourd’hui, vous affirmez qu’il faut mettre fin aux affectations ! Il s’agit dans ce cas d’une contribution volontaire obligatoire ! Non, les cotisations INAO ne sont pas une CVO. Davantage de cohérence serait souhaitable entre vos propos de vendredi dernier et ceux d’aujourd’hui – même s’il est vrai que nous avons tous nos contradictions…
Enfin, il est un troisième point que je souhaiterais évoquer avec vous. Même s’il se trouve que je donnerai un avis défavorable aux amendements de MM. Abad et Woerth, je trouve assez sain le principe mis en avant par M. le président de la commission des finances. J’illustrerai mon propos avec la redevance télévisuelle : lorsque son montant atteint le plafonnement prévu par le Gouvernement, et que 25 millions d’euros sont prélevés en surplus, il est effectivement préférable de le rendre aux Français plutôt que de le verser au budget général, ce qui reviendrait à taxer davantage les acteurs économiques – les contribuables, en l’occurrence. C’est justement pour cette raison que le Gouvernement propose de réduire la redevance de 1 euro – baisse jugée dérisoire par certains membres de votre groupe politique, monsieur Woerth. Or si l’on considère que le surplus au-delà du plafonnement ne doit pas être versé au budget général et que la fiscalité devrait être réduite, même modestement, alors on est tenu d’admettre la réduction du montant de la redevance sans tourner cette disposition en dérision. La parole est à Mme Annie Genevard. Je souhaiterais, à la faveur de ces amendements, revenir sur le sujet des taxes affectées, un débat que nous avons malheureusement déjà eu l’an dernier. Monsieur le ministre, vous avez rappelé que le principe du plafonnement avait été adopté par Valérie Pécresse. Le problème est que vous modifiez ce plafond, comme vous l’avez déjà fait en 2018. Chaque année, vous réduisez les marges de manœuvre des entreprises soumises à ces taxes dont le produit est redistribué entre elles, dans les filières du cuir, de l’habillement, de l’horlogerie, de la bijouterie ou encore de la joaillerie. Ces secteurs sont pourvoyeurs de nombreux emplois et sont à la pointe de l’innovation. Ces taxes s’avèrent donc réellement utiles aux filières. On ne peut pas d’un côté promouvoir l’esprit de filière dans de nombreux domaines économiques et, de l’autre, les priver des moyens nécessaires à leur fonctionnement, en particulier en ce qui concerne les centres techniques.
Vous répondez par un argument politicien, monsieur le ministre, alors que nous vous objectons l’intérêt économique, l’intérêt de l’emploi et l’image de la France dans des secteurs où elle rayonne et où elle est reconnue. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. le ministre. Je ne peux pas laisser dire ce qu’affirme Mme Genevard, qui me semble faire écho au débat de l’an dernier, au cours duquel elle avait longuement défendu des amendements visant spécifiquement certains milieux professionnels – peut-être le fera-t-elle encore cette année. Madame Genevard, vous défendez finalement l’existence de la taxe. Le problème n’est pas le plafond ! Non ! Ce sont des moyens collectifs. Les entreprises le demandent ! Vous défendez bien le principe de la taxe ! Il est votre droit de penser qu’une taxe est nécessaire pour réguler un secteur mais je ne pensais pas que cela correspondait à votre philosophie. Par ailleurs, si le produit de chaque taxe était affecté à une filière ou un secteur – le cuir, le sport, la culture, etc. – il ne resterait en définitive aucune ressource pour l’éducation nationale ou l’armée ! Les membres de la commission des finances le savent bien. Il n’y a heureusement aucune taxe possible sur les enfants ou les soldats. Il est donc bien nécessaire que des ressources soient affectées au budget général ; Charles de Courson tout comme Éric Woerth ont bien posé le problème. Certes, on peut accepter le principe de l’affectation dans un certain nombre de cas, mais malheureusement, chacun est attaché à la taxe affectée dans le secteur qui le regarde et qui concerne sa circonscription et souhaite supprimer la taxe affectée de son voisin. Il y a donc sans doute un équilibre à trouver. (Les amendements identiques nos 465 et 2046 ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 93, deuxième rectification, 304, deuxième rectification, 807, 326, 408, 83, 325, 798, et 336 pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 93, deuxième rectification, 304, deuxième rectification, et 807 sont identiques, de même que les amendements nos 326 et 408 et que les amendements nos 83, 325 et 798.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 93, deuxième rectification. Le Président de la République s’est engagé à doubler l’enveloppe du fonds chaleur. Cette hausse a été partiellement confirmée par la programmation pluriannuelle de l’énergie mais risque de se faire au détriment des autres politiques soutenues par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, si des moyens complémentaires ne sont pas affectés à l’Agence. Cet amendement propose d’y suppléer. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 304, deuxième rectification. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte avait inscrit, parmi les ambitions liées à l’économie circulaire, un objectif de développement des combustibles solides de récupération. Toutefois, le développement de cette filière reste balbutiant en France, faute de soutien suffisant. Cet amendement vise donc à doter l’ADEME de moyens permettant de lancer une véritable filière industrielle de valorisation des combustibles solides de récupération via une affectation des recettes de la taxe générale sur les activités polluantes appliquée aux déchets – TGAP. Cela permettra notamment de réduire le stockage des déchets non recyclables, conformément aux objectifs nationaux en matière d’économie circulaire et au but visé par la TGAP-déchets. Elle contribuera ainsi à renforcer la cohérence de la fiscalité écologique des déchets. La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 807. Ce projet de loi de finances ne prévoit pas d’augmentation du budget de l’ADEME. Or si l’augmentation du fonds chaleur est confirmée à hauteur de 350 millions d’euros, elle se fera au détriment des autres politiques soutenues par l’Agence, notamment les politiques de développement de l’économie circulaire. Cet amendement vise donc à doter l’ADEME des moyens nécessaires pour augmenter le fonds chaleur. L’amendement no 326 de M. Guy Bricout est défendu.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 408. Un tiers des déchets est issu de produits de grande consommation non recyclables. Pour ces derniers, la valorisation énergétique représente une solution alternative au stockage. La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 83. D’ici à 2024, les collectivités doivent mettre en place une solution de tri à la source, ce qui, de l’avis des experts, s’avérera coûteux. Or aucun dispositif d’accompagnement n’est prévu. Cet amendement vise donc à affecter à l’ADEME les moyens nécessaires pour lancer un grand plan national de déploiement du tri à la source des biodéchets. Son adoption permettrait d’éviter que l’augmentation de la TGAP ne se limite à une simple hausse de la fiscalité, certes supportée par les collectivités, mais qui se répercutera sur le contribuable. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 325. Il est évident pour nous tous que le traitement des biodéchets doit être doté de moyens à la hauteur des enjeux de l’économie circulaire. Ce doit être un objectif pour le Gouvernement. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement no 798. Il s’agit là aussi de faire en sorte que cette taxe, qui va considérablement augmenter, ne grève pas trop les budgets des collectivités locales et que son produit soit affecté à l’ADEME. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 336. Le dispositif appelé « 1 % solidarité eau », créé par la loi « Oudin-Santini », permet à chaque structure de gestion de l’eau d’affecter jusqu’à 1 % de ses recettes à la coopération internationale en matière d’accès à l’eau et à l’assainissement. Mais son équivalent pour les déchets, le « 1 % déchet », ne suscite pas pour l’instant une mobilisation équivalente des collectivités, notamment en raison de l’absence d’incitations financières. On ne peut pas travailler au niveau national à développer le recyclage des déchets sans œuvrer à cette politique dans le reste du monde. Quel est l’avis de la commission ? Tous ces amendements visent à revenir sur la rebudgétisation des taxes dont le produit était auparavant affecté à l’ADEME, notamment la TGAP. Je le comprendrais si cette opération avait été un marché de dupes, mais s’est accompagnée d’une augmentation des crédits de l’Agence, qui sont passés de 450 à 600 millions d’euros. Ainsi le projet de loi consacre 307 millions au fonds chaleur, dont les crédits s’élevaient à 258 millions en 2018.
La rebudgétisation n’est pas forcément satanique si elle est réalisée correctement. J’inviterai donc les auteurs de ces amendements à les retirer, sinon l’avis sera défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’Assemblée est en train de rediscuter une décision prise l’année dernière. Et alors ? Je me contente de le souligner sans contester votre droit d’avoir une discussion sur ce point.
Les crédits du fonds chaleur vont passer de 197 millions en 2017 à 350 millions en 2020, soit une augmentation de 60 millions d’euros par rapport à l’an dernier : nous ne pouvons pas vous laisser dire que nous ne lui consacrons pas les moyens nécessaires. Le projet de loi de finances pour 2021 sera sans doute l’occasion de faire le point mais ce projet de budget permet d’ores et déjà de répondre à vos préoccupations et d’honorer les engagements du Président de la République.
Je ferai remarque sur l’affectation. Je crois que chacun, sur tous les bancs de cet hémicycle, a envie que notre démarche écologique bénéficie d’un financement écologique. Or je le dis notamment à l’attention de Bénédicte Peyrol : affecter le produit d’une taxe à des dépenses écologiques, c’est grever la capacité de l’État à émettre des OAT – obligations assimilables du Trésor – dites vertes sur les marchés financiers. En effet, les OAT vertes s’adressent par définition à des prêteurs très attentifs à l’objectif de transition écologique. Si vous affectez le produit d’une taxe – la TGAP, par exemple – à une dépense, ils considéreront que celle-ci est déjà financée et n’a donc rien d’écologique. Ainsi, plus vous affecterez de taxes « écologiques » à des dépenses écologiques, plus vous handicaperez l’État sur le marché de la finance verte, qui est beaucoup plus vertueux, pas simplement en France mais dans le monde entier.
Aujourd’hui sur plus de 200 milliards d’euros, nous émettons 5 milliards d’OAT vertes et l’objectif de la France est d’augmenter la part de la finance verte dans ses emprunts. Toute affectation du produit d’une taxe particulière à une dépense écologique aurait pour effet de réduire cette ambition. Cela ne serait pas conforme à notre volonté de penser global et d’agir local. Avis défavorable donc. La parole est à Mme Sophie Auconie. Monsieur le ministre, chers collègues, écoutez-moi et surtout entendez-moi ! Nous pouvons nous féliciter de tous les dispositifs qui favorisent la collecte et le recyclage des déchets, notamment plastiques. Tout cela va indiscutablement dans le bon sens. Cela étant, il faut aussi aider les pays d’Afrique, d’Asie du Sud-Est, des Caraïbes à limiter leur pollution plastique. Certes, nous avons adopté le « 1 % déchets », sur le modèle du « 1 % solidarité eau » qui vise à favoriser leur accès à l’assainissement mais il n’est pas mis en œuvre avec toute l’ambition qu’il mérite.
Ce que je souhaite, monsieur le ministre, c’est que vous nous envoyiez le signal que le Gouvernement appliquera le « 1 % déchets » de manière beaucoup plus offensive. (Les amendements identiques nos 93, deuxième rectification, 304 deuxième rectification, et 807 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 326 et 408 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 83, 325 et 798 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 336 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements, nos 1088, deuxième rectification et 1134, deuxième rectification, qui peuvent être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 1088, deuxième rectification. Défendu. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 1134, deuxième rectification. Défendu. (Les amendements nos 1088, deuxième rectification et 1134, deuxième rectification, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) L’amendement no 2812 de M. le rapporteur général est rédactionnel. (L’amendement no 2812, accepté par le Gouvernement, est adopté.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 2258, 2931, 1436 et 2055, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2931, 1436 et 2055 sont identiques.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2258. Défendu. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2931. Cet amendement ayant été adopté à l’initiative de M. Zulesi, je le laisse le présenter. La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour soutenir l’amendement no 1436. Cet amendement vise à inscrire dans la loi la promesse faite par Mme la ministre Élisabeth Borne que les 2 centimes par litre de gazole de déremboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE – seront directement affectés, via l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, à nos infrastructures du quotidien. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2055. Défendu. Quel est l’avis de la commission ? Favorable sur les identiques et demande de retrait pour l’amendement no 2258. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je sais, monsieur Zulesi, que vous connaissez bien ces questions mais je vous demanderai, après en avoir discuté avec la ministre de la transition écologique et solidaire et le secrétaire d’État chargé des transports, de retirer votre amendement. En effet, nous parlons d’une recette qui sera perçue à partir de 2021 – elle figurera donc dans le prochain projet de loi de finances –, et dont l’intégralité, soit 70 millions dans un premier temps puis 110 millions ensuite, ira à l’AFITF. En l’absence de retrait des amendements, l’avis serait défavorable. (L’amendement no 2258 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 2931, 1436 et 2055 ne sont pas adoptés.) L’amendement no 2815 de M. le rapporteur général est rédactionnel. (L’amendement no 2815, accepté par le Gouvernement, est adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067, 2085, 254, 365, 559 et 879, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067 et 2085 ainsi que 254, 365, 559 et 879 sont identiques.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 98. Cet amendement remet en cause le mécanisme du « plafond mordant ». En effet, la ponction opérée par l’État prive de ressources les agences de l’eau, ce qui est tout à fait regrettable au moment même où elles doivent faire face au défi du réchauffement climatique. La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 190. Le plafond mordant qui s’applique au budget des agences de l’eau réduit leurs ambitions alors qu’il est indispensable de poursuivre l’amélioration de la qualité écologique des milieux aquatiques. À chaque fois, monsieur le ministre, que vous empruntez ce déversoir budgétaire pour alimenter le budget de l’État – cela représente quand même près de 1 milliard d’euros –, vous hypothéquez des investissements concrets dans la préservation de nos rivières, l’entretien de nos réseaux d’assainissement et d’eau potable et le stockage hivernal de l’eau, tout cela sur fond de dérèglement climatique, dossier cher à notre ministre de l’agriculture.
Cet amendement vise à supprimer le plafond mordant pour que l’eau continue à payer l’eau et la biodiversité – c’est en effet le cas aujourd’hui via la contribution des agences à l’AFB, l’Agence française pour la biodiversité –, le principe « l’eau paie l’eau » ayant fait ses preuves dans notre pays. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 310. Je vous rappelle que le modèle français de gestion intégrée par bassin est aujourd’hui décliné dans chacun des 28 États membres de l’Union européenne. Hors Union européenne, ce sont 80 États qui appliquent ce modèle de gestion de l’eau à leur territoire.
Le principe en est que « l’eau paie l’eau ». Aujourd’hui, alors que nous sommes soumis à des stress hydriques – le dérèglement climatique ayant avant tout un impact sur la ressource en eau –, les agences de l’eau doivent bénéficier d’un maximum de moyens pour gérer cette ressource. Il n’est donc pas acceptable que leurs moyens continuent à diminuer comme c’est le cas depuis plusieurs années. La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l’amendement no 402. Défendu. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 644. Un projet de loi de finances, c’est aussi l’occasion de faire le bilan des relations entre l’État, les divers opérateurs auxquels il a confié une mission de service public et les collectivités territoriales. Force est de constater que dans le passé, les agences de l’eau menaient une politique très volontariste d’accompagnement des collectivités – des départements notamment – dans des projets soit d’adduction d’eau potable, soit de création ou de rénovation de réseaux d’assainissement.
Aujourd’hui, les agences de l’eau sont de moins en moins présentes ; les collectivités territoriales paient davantage. Or, l’une des conséquences du plafond mordant, c’est bien cette moindre implication des agences de l’eau, et je le déplore chaque année. Eh oui, ce seront les départements qui paieront ! La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 733. Comme d’autres, nous demandons la suppression du plafonnement des ressources affectées aux agences de l’eau.
Alors que dans le cadre du onzième programme, celles-ci voient leur champ d’action étendu notamment à la lutte contre le changement climatique, l’institution d’un plafond mordant induit nécessairement la diminution, voire l’arrêt de certaines aides pourtant toujours nécessaires pour les territoires – et en particulier les territoires ruraux, dont les charges sont souvent proportionnellement plus importantes, car leur densité de population est moindre.
Avec le plafond prévu, les budgets des agences se verront amputés de plus de 1 milliard d’euros par rapport au dixième programme. Cet amendement vise donc à supprimer une mesure qui remet en cause le principe « l’eau paie l’eau », et ainsi à donner aux agences de l’eau les moyens de faire face aux défis liés au réchauffement climatique. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 877. Mon amendement est identique aux précédents.
Je voudrais revenir, d’une façon plus générale, sur la question du plafonnement des taxes affectées. En elles-mêmes, ces taxes ne constituent pas un problème, mais le plafonnement, lui, contribue finalement à une fiscalité déguisée : la taxe prélevée pour une cause, pour un objectif, se trouve détournée de son affectation initialement prévue, et ainsi dévoyée ; au-delà du plafond, son produit tombe dans un puits sans fond. Nous assistons finalement à une ponction de l’État sur des fonds qui ne lui étaient pas destinés !
Nous parlons beaucoup de consentement à l’impôt : le mécanisme des plafonds imposés aux taxes affectées me semble, de ce point de vue, poser un vrai problème. Nous devons nous pencher sur cette question, qui est une question de justice fiscale et de transparence. La parole est à M. Jean-Yves Bony, pour soutenir l’amendement no 1319. Il est défendu. La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 1888. Nous avons déjà débattu du financement des agences de l’eau lors des deux dernières discussions budgétaires, puisqu’il y a déjà eu des prélèvements. Les agences de l’eau ne s’en remettent d’ailleurs que difficilement, grâce à une forme de péréquation horizontale que vous avez fini par instaurer, et qui permet – à certaines, en tout cas – de continuer à agir sur leur territoire.
Cette mesure-ci ressemble à celle que vous entendiez prendre à l’endroit des chambres d’agriculture : vous ne voulez pas de l’auto-administration des territoires ; vous ne voulez pas qu’ils gèrent certaines questions de façon intégrée. Le périmètre de certaines agences de l’eau est déjà extrêmement vaste ; la qualité de leur travail est, je crois, reconnue, et jamais nous n’avons eu autant besoin d’elles.
Je ne comprends pas ce qui justifie ce plafond imposé aux ressources des agences de l’eau. La parole est à M. Alain David, pour soutenir l’amendement no 2066. Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à supprimer le plafonnement des ressources affectées aux agences de l’eau.
Avec le plafond prévu actuellement, les budgets des agences se verront amputés de plus de 1 milliard d’euros par rapport au dixième programme. Il convient donc de le supprimer pour donner aux agences de l’eau les moyens de faire face aux défis liés au réchauffement climatique.
Les députés du groupe Socialistes et apparentés sont attachés au principe « l’eau paie l’eau ». La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 2067. Les Français, en payant leur facture d’eau, finissent par renflouer le budget de l’État – ce qui peut se discuter à l’infini, nous le comprenons. Je ne répéterai pas tout ce qui a été dit : ce mécanisme de plafond mordant remet en cause le principe « l’eau paie l’eau », et les agences perdront plus de 1 milliard d’euros. Notre amendement vise donc, comme les précédents, à supprimer ce plafond. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement no 2085. Il faut, en effet, préserver les moyens des agences de l’eau. Nous en venons à une deuxième série d’amendements identiques, toujours en discussion commune.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 254. Aujourd’hui plus que jamais, les agences de l’eau ont besoin de moyens pour aider les collectivités locales à investir dans l’assainissement, dans la biodiversité, mais aussi dans la rénovation de leur réseau parfois vieillissant. Je pense notamment aux collectivités de montagne, dont les réseaux sont très étendus, car ils doivent réunir plusieurs villages. Les coûts sont très importants et ne peuvent absolument pas être supportés par ces seules collectivités : sans accompagnement, des travaux ne seront pas réalisés, des rénovations ne seront pas menées à bien ; il y aura des fuites, et donc du gaspillage d’eau.
Depuis deux ans, les agences ont dû radicalement revoir à la baisse leur accompagnement des collectivités, en raison des ponctions budgétaires de l’État. Je le constate sur mon territoire : il y a des projets de nos communes qui ne sont plus menés à bien en raison des tensions budgétaires.
L’intégralité des recettes des redevances de l’eau doit être utilisée pour remplir les missions et objectifs de ces agences, comme c’était le cas auparavant. La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l’amendement no 365. Les agences de l’eau ont besoin de moyens ; il serait préjudiciable à leur autonomie administrative et financière de limiter les budgets indispensables pour remplir leurs missions. La parole est à M. Charles de la Verpillière, pour soutenir l’amendement no 559. Il est défendu. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 879. Défendu également. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ? Lorsque les conditions de financement des agences de l’eau ont été modifiées, un certain nombre d’élus, dont j’étais, ont voulu savoir si les ressources maintenues étaient suffisantes. Nous avons travaillé cette question aussi bien avec Barbara Pompili, présidente de la commission du développement durable, qu’avec Martial Saddier, qui appartient au groupe Les Républicains.
Nous sommes arrivés aujourd’hui, je crois, à un équilibre. Le projet de loi modifie le plafond de ressources des agences de l’eau uniquement pour tirer les conséquences de la création de l’Agence française pour la biodiversité. À périmètre constant, le budget des agences de l’eau est donc stable.
J’émets donc un avis défavorable à tous les amendements qui proposent soit de déplafonner les taxes affectées aux agences de l’eau, soit de relever le plafond.
J’ajouterai que, souvent, certains projets ne voient pas le jour, notamment dans des territoires ruraux ou de montagne, parce qu’ils sortent des critères fixés par certaines agences. Eh bien, faisons évoluer ces critères pour mieux prendre en considération les besoins des territoires. Nous travaillons d’ailleurs souvent avec des présidents d’agence de l’eau – j’ai cité à l’instant le nom de l’un d’entre eux, qui siège dans cet hémicycle. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. André Chassaigne. Vous dites que le budget est stable à périmètre constant, mais le périmètre a justement été modifié ! Dans la réalité, depuis un an, un texte précise que, désormais, les agences de l’eau devront financer en particulier les projets de stockage de l’eau dont les agriculteurs ont besoin. Leurs missions, bloquées dans ce domaine depuis 2015, ont été élargies. Et vous ne tenez pas compte de cette nouvelle responsabilité ! Soixante projets de stockage de l’eau ont été annoncés par le ministre de l’agriculture ; on fait des promesses au monde agricole, mais on sait très bien que les agences de l’eau n’auront pas les moyens d’apporter les financements nécessaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) La parole est à M. Martial Saddier. Je suis très souvent intervenu depuis deux ans, pour parler des agences de l’eau, dans cet hémicycle et ailleurs – je salue d’ailleurs quelques collègues qui siègent dans les comités de bassin, dont notre rapporteur général du budget.
Je comprends les amendements qui tendent à supprimer le plafond mordant. Mais, par honnêteté intellectuelle, je dois faire quelques rappels ce soir.
Tout d’abord, mes chers collègues, je dois vous remercier car il y a deux ans, nous n’étions que trois dans cet hémicycle pour défendre les agences de l’eau ; je salue donc tous les parlementaires, de toutes les sensibilités, qui sont intervenus à ce sujet. Ce sont là autant de signaux, monsieur le ministre, qu’il faut préserver les ressources de ces agences, afin de protéger l’eau et la biodiversité.
Mais l’opération qu’effectue le Gouvernement – en toute transparence, avec les présidents de comités de bassin et les directeurs des agences de l’eau – permet de maintenir un budget équivalent à celui de l’année dernière. Le plafond mordant, c’est une autre discussion ; mais, alors que nous avions des craintes l’an dernier en raison de la baisse du prix du permis de chasse, je me dois de rappeler que nous avons été entendus sur ce point.
À quelques euros près, les agences de l’eau auront le même budget que l’année dernière. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.) Très bien ! La parole est à M. Dino Cinieri. Pour rebondir sur ce qui vient d’être dit, je voudrais dire qu’il est essentiel de préserver les moyens de nos agences de l’eau, qui sont d’importants acteurs de la préservation des ressources et qui accompagnent les projets de nos territoires. Elles ont déjà été beaucoup mises à contribution sous la précédente législature, alors qu’un travail immense doit être accompli pour remettre en état les réseaux d’eau.
Élu d’un département dans lequel toutes les communes n’ont pas accès au réseau d’eau, je peux vous dire qu’il s’agit là d’un sujet sensible. (Les amendements identiques nos 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067 et 2085 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 254, 365, 559 et 879 ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de nombreux amendements, nos 2251, 100, 191, 312, 403, 549, 878, 1125, 1297 et 2070, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 100, 191, 312, 403, 549 et 878 d’une part, nos 1125, 1297 et 2070 d’autre part sont identiques.
La parole est à Mme Sabine Rubin, pour soutenir l’amendement no 2251. J’ai bien entendu que le rapporteur général refusait non seulement de supprimer, mais même de relever le plafond des taxes affectées aux agences de l’eau.
Par cet amendement, nous insistons malgré tout pour porter le plafond de ressources à son niveau de 2018, c’est-à-dire 2,3 milliards au lieu des 2,1 milliards fixés par le projet de loi. Cela a été brillamment dit et redit : les missions des agences de l’eau se diversifient, et elles sont de plus en plus complexes, alors que leurs effectifs diminuent.
Par ailleurs, si notre amendement est comparable aux suivants, l’originalité de notre démarche est de prévoir une compensation de la perte de recettes pour l’État par l’augmentation du produit des redevances liées à la chasse : nous proposerons en effet en seconde partie de porter également celles-ci à leur niveau antérieur, c’est-à-dire à 72 millions au lieu des 46 millions prévus. Le Président de la République a voulu diminuer ces redevances ; nous proposons d’annuler cette diminution et d’affecter la différence aux agences de l’eau. Nous en venons à une première série d’amendements identiques.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 100. Il est défendu. La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 191. L’amendement précédent supprimait le plafond mordant ; celui-ci se contente de le rehausser. Je lance une alerte : le secteur de l’eau et de l’assainissement en France s’engage dans une impasse économique ! Moins de moyens pour les agences de l’eau, c’est moins de financement pour les projets sur le terrain. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 312. J’irai dans le même sens. Les agences de l’eau doivent aujourd’hui gérer à la fois le petit cycle de l’eau, qui subit de plein fouet les effets du dérèglement climatique, mais aussi le grand cycle de l’eau, et ce avec des moyens qui ont été réduits de programme en programme. Prenons conscience du fait que l’urgence climatique touche d’abord la ressource en eau et qu’il faut nous donner, à travers les agences de l’eau, les moyens de gérer cette ressource. Les amendements identiques nos 403 de Mme Lise Magnier et 549 de M. Bertrand Pancher sont défendus.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 878. C’est un amendement de repli par rapport au précédent. Les enjeux sont devant nous, et la gestion de l’eau va devoir relever de très nombreux défis. L’abaissement du plafond au niveau proposé n’est pas du tout opportun. Cet amendement tend donc à revenir à un niveau correspondant aux moyens annuels dont les agences de l’eau disposaient pour la période 2013-2018. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 1125. Il s’agit de la réutilisation des eaux usées traitées. C’est un sujet très important puisque l’objectif de multiplier par trois les quantités d’eaux usées traitées et réutilisées a été évoqué dans les conclusions des assises de l’eau.
Nous devons également répondre à la question des moyens des agences de l’eau, puisque, on le sait, les départements sont souvent obligés, hélas, de compenser cette perte de moyens pour l’ensemble des projets relatifs à l’eau et à son assainissement dans les territoires. L’amendement no 1297 de M. Stéphane Viry est défendu.
La parole est à M. Alain David, pour soutenir l’amendement no 2070. Cet amendement de repli vise à relever de 100 millions d’euros le plafond des ressources affectées aux agences de l’eau. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ? Il est défavorable, pour les raisons exposées précédemment. (L’amendement no 2251, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 100, 191, 312, 403, 549 et 878, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 1125, 1297 et 2070, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Marjolaine Meynier-Millefert, pour soutenir l’amendement no 2497. Je propose que la totalité des recettes de la vente des quotas carbone, soit 920 millions d’euros, soit fléchée vers la rénovation énergétique en général, et vers l’Agence nationale de l’habitat – ANAH – en particulier. C’était le cas auparavant, puis ces recettes fléchées ont été plafonnées à 420 millions. Ce sont donc 500 millions qui retournent au budget général, alors que nous cherchons des solutions pour donner à l’ANAH les moyens d’accélérer la lutte contre la précarité énergétique, et, en même temps, des solutions pour garder les ménages des neuvième et dixième déciles engagés dans la transition énergétique de manière ambitieuse, notamment grâce au crédit d’impôt pour la transition énergétique – CITE.
Non seulement le fléchage de ces 500 millions vers l’ANAH serait plus lisible et plus acceptable pour nos concitoyens, qui demandent, avec raison selon moi, que les taxes écologiques financent des mesures écologiques, mais ce serait aussi un moyen budgétaire de maintenir le CITE à son niveau actuel et d’augmenter le budget de l’ANAH.
Dans la mesure où ces recettes sont en hausse, il semble pertinent qu’elles soient mises au service de la rénovation énergétique des bâtiments, dont le Gouvernement a fait l’une des priorités de l’acte II du quinquennat. Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? La raison pour laquelle je ne peux pas être d’accord – je vous demande donc de retirer cet amendement, faute de quoi mon avis sera défavorable –, c’est que la trésorerie de l’ANAH est très importante : en 2018, elle atteignait 470 millions d’euros ; elle se situe, à la fin de 2019, à 330 millions. Si la question d’un fléchage des quotas carbone devait se poser, ce serait, comme pour le fonds chaleur, à partir de 2021, peut-être au profit du futur plan chaudières de l’ANAH, dont vous devez être informée. Quoi qu’il en soit, nous partageons vos objectifs. La parole est à Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Les budgets de l’ANAH sont effectivement en hausse, mais c’est aussi, précisément, parce que l’on transforme une partie du CITE en primes. Autrement dit, pour renforcer la lutte contre la précarité énergétique, on augmente les budgets de l’ANAH, et c’est pour renforcer ces budgets que l’on prive, en contrepartie, le CITE d’une partie de ses financements.
Or il n’est pas nécessaire de ponctionner les crédits alloués au CITE, puisque ces quotas carbone nous fournissent des crédits disponibles, lesquels, encore une fois, sont en hausse depuis plusieurs années : ils atteignent 920 millions d’euros cette année, et s’élevaient déjà à 780 millions l’année dernière. Or, je le répète, la part fléchée vers l’ANAH est écrêtée chaque année à 420 millions. Ainsi, 300 millions ont été reversés au budget général l’année dernière, et 500 millions le seront cette année.
Nous avons donc les moyens de financer la transition énergétique en même temps pour les foyers aisés et pour les foyers précaires, donc de lutter à la fois contre la précarité énergétique et contre le changement climatique. Les deux politiques doivent être menées de front, avec des budgets suffisants des deux côtés. La parole est à M. Charles de Courson. Permettez-moi, ma chère collègue, de ne pas être tout à fait d’accord avec vous. Lorsque la vente aux enchères des quotas carbone a été instituée, elle a rapporté 500 millions d’euros. Étant alors dans l’opposition, j’avais expliqué au ministre de l’agriculture de l’ancienne majorité que 20 % du produit de cette vente, soit 100 millions, devraient revenir à une politique forestière.
Pourquoi 20 % ? C’est tout simple : les forêts françaises absorbent 20 % du carbone dégagé par les activités de notre pays. Ces 100 millions permettraient de conduire une vraie politique forestière. Il est dommage que M. le ministre de l’agriculture nous ait quittés pour quelques instants… Il va revenir ! Oui… En tout cas, ce serait à lui d’essayer de persuader le ministre chargé du budget que 20 % de ces sommes reviennent à la filière bois, afin qu’une véritable politique forestière soit possible. (L’amendement no 2497 n’est pas adopté.) Je suis saisi d’un amendement no 2403 qui fait l’objet d’un sous-amendement no 3096.
La parole est à M. Éric Woerth, pour soutenir l’amendement. Il s’agit de l’Autorité des marchés financiers – AMF. Benjamin Dirx et moi-même avons mené une mission d’information sur l’activisme actionnarial ; des sociétés françaises sont, d’une manière ou d’une autre, attaquées par des fonds, souvent étrangers.
L’idée est de rehausser la capacité de travail de l’AMF. On ne peut pas vouloir que Paris devienne une grande place financière au moment du Brexit en ayant un superviseur qui est probablement l’un des moins dotés des grands marchés financiers. C’est le cas par rapport à l’Autorité fédérale de supervision financière allemande – BaFin –, mais aussi par rapport aux autorités de supervision luxembourgeoise et britannique, pour ne rien dire, évidemment, des États-Unis.
Nous avons besoin d’une AMF renforcée pour mener toute une série de travaux sur les activistes. Le temps de décision de l’AMF est aujourd’hui totalement décorrélé du temps économique.
Ses ressources proviennent notamment d’une taxe affectée prélevée sur les entreprises qu’elle est censée contrôler, et qui rapporte 120 millions d’euros. Nous proposons par cet amendement que le budget de l’AMF atteigne ce niveau en trois ans, donc qu’il passe de 99 millions à 120 millions. Cela permettrait à l’AMF de figurer parmi les superviseurs à peu près correctement dotés, avec des moyens suffisants.
Cet amendement est nécessaire et ne coûterait pas d’argent supplémentaire. Certes, ces sommes n’iraient pas au budget général, mais, selon la logique que j’indiquais tout à l’heure, iraient là où elles doivent aller. Ce ne serait donc pas de l’argent détourné de son objet, comme c’est souvent le cas aujourd’hui avec les taxes affectées, par lesquelles on détourne de leur objet des moyens financiers. Cela permettrait à l’AMF d’exercer son rôle dans des conditions à peu près efficaces dans les années qui viennent. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir le sous-amendement no 3096. Je partage la préoccupation du président Woerth. Nous avons entendu le président de l’AMF, qui nous a fait part des difficultés qu’il risquait de rencontrer, ainsi que de la différence entre l’AMF et les régulateurs des marchés financiers des autres pays. Je propose simplement une trajectoire plus douce : le budget de l’AMF connaîtrait une augmentation moindre la première année et atteindrait 110 millions d’euros en 2022. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est défavorable, et je voudrais m’en expliquer quelques instants. J’ai reçu le président Ophèle à de nombreuses reprises et nous avons conclu un accord, si j’ose dire, sur une trajectoire d’augmentation des moyens de l’AMF – j’ai ai discuté en aparté avec M. le président de la commission des finances. Cette augmentation est réelle, puisqu’il s’agit de 2,5 millions d’euros par an, auxquels il faut ajouter une dizaine d’équivalents temps plein – ETP – supplémentaires.
L’AMF a donc les moyens de travailler et d’être la structure dont a besoin la place de Paris – besoin justement souligné par le travail que vous avez conduit avec M. Benjamin Dirx. Pour avoir échangé avec le président de l’AMF, je ne crois pas, d’ailleurs, monsieur le président, que votre demande corresponde à la sienne.
Je me permettrai en outre de corriger un peu votre propos, monsieur le président. Comme vous attendiez sans doute l’argument du ministre de l’action et des comptes publics, vous avez dit que cet amendement ne coûterait rien. Or il aurait bel et bien un coût, car ce qui ne va plus au budget général creuse évidemment notre déficit – modestement, certes, en l’occurrence, puisqu’il s’agit de quelques millions d’euros. Vous souriez, monsieur le président, j’en déduis que c’était là un argument de séance… Le déficit, disais-je, s’en trouverait accru, puisqu’il s’agirait d’une affectation à l’objet. D’où la question du plafonnement des taxes affectées.
Le débat n’est pas médiocre, mais le Gouvernement souhaite s’en tenir à l’augmentation déjà prévue des crédits de l’AMF, qui est importante, de même que celle de ses ETP. Tous les opérateurs aimeraient avoir les mêmes augmentations. Je suis donc également défavorable au sous-amendement de M. le rapporteur général. La parole est à Mme Émilie Cariou. Nous avions adopté cet amendement à la suite d’un rapport qui soulignait l’importance du rôle de l’AMF en matière de contrôle, notamment de la déontologie financière, mais aussi de surveillance des marchés.
J’entends ce que vient de nous dire le ministre : une trajectoire a été négociée avec l’AMF – une maison que je connais bien –, prévoyant déjà une augmentation de 2,5 millions d’euros de ses ressources et l’attribution de nouveaux ETP. J’appelle donc à rejoindre la position du ministre et à s’en tenir à cette trajectoire négociée. La parole est à M. le président de la commission des finances. Je note, sans vouloir allonger le débat, que la différence entre la position du Gouvernement et notre proposition sous-amendée par le rapporteur général – qui souhaite diviser par deux l’augmentation que nous demandons – s’établit peu ou prou à un million d’euros par an. Si l’on table, pendant au moins trois ans, sur les 2,5 millions par an que vous annoncez, l’écart est d’un million. On peut considérer que notre position est mesquine par rapport à cette trajectoire, ou l’on peut considérer que le Gouvernement est mesquin par rapport à la position qui est la nôtre. (Le sous-amendement no 3096 n’est pas adopté.) (L’amendement no 2403 n’est pas adopté.) La parole est à M. Xavier Roseren, pour soutenir l’amendement no 2114. Nous débattons chaque année du financement des centres techniques industriels – CTI – et des comités professionnels de développement économique – CPDE. L’année dernière, lors de l’examen du budget, Olivia Grégoire et moi-même avions obtenu que la baisse des plafonds de la taxe affectée s’accompagne d’une réduction de son taux.
Cette année, lors du printemps de l’évaluation, nous avons insisté, dans notre rapport sur le développement des entreprises et la mission « Économie », sur la politique industrielle. À l’occasion de la présentation de ce rapport devant la commission des finances, la secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher a pris l’engagement de maintenir le financement des CTI et des CPDE pour 2020. Le budget que nous examinons respecte cet engagement, et je tiens à vous en remercier.
Cependant, comme nous l’avons relevé dans notre rapport, et comme l’a indiqué notre collègue Anne-Laure Cattelot à l’issue de sa mission, le plafonnement de la taxe affectée aux CTI et CPDE n’a pas vraiment de sens. Le déplafonnement permettrait aux CTI de mieux exercer leur mission de service public et, surtout, de mieux accompagner nos PME et TPE.
Nous avons bien noté que le déplafonnement était conditionné à la signature d’un contrat d’objectifs et de performance – COP. C’est pourquoi nous proposons de déplafonner la taxe uniquement pour les CTI et les CPDE dont le COP a de grandes chances d’être signé avant la fin de l’année. Vous l’aurez peut-être noté, mes chers collègues, le dérouleur connaît quelques ratés ce soir. Sachez que le dossier en ma possession et les amendements que j’appelle sont évidemment dans le bon ordre et que les tablettes fonctionnent correctement. Cela n’affecte donc pas le bon déroulement de nos débats.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement ? Je ne vois pas, dans le dérouleur, l’amendement no 3107 du Gouvernement ; peut-être vient-il bien après, je l’ignore. Toujours est-il que je propose à M. Roseren de retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement, qui tend à déplafonner les taxes affectées au centre technique des industries mécaniques et du décolletage – CETIM – et au centre technique industriel de la construction métallique – CTICM. Je ne sais pas ce qu’il en est advenu : il est apparu brièvement puis il a disparu. Si vous pouviez par magie le faire réapparaître, monsieur le président… Je crains de ne pas être magicien, monsieur le rapporteur général. En l’état, je comprends que vous êtes défavorable à l’amendement. Je demande son retrait. À défaut, mon avis sera effectivement défavorable. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement. Il est défavorable. Les amendements identiques nos 1992 et 2461 ainsi qu’un autre qui sera examiné plus tard sont plus ciblés. Celui de M. Roseren est trop large. C’est pourquoi j’en demande le retrait, au profit des amendements que j’ai mentionnés. Retirez-vous l’amendement, monsieur Roseren ? Oui. Anne-Laure Cattelot et moi-même avons effectivement déposé des amendements plus précis, qui seront examinés sous peu. (L’amendement no 2114 est retiré.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1992 et 2461.
Monsieur Roseren, vous conservez la parole pour soutenir l’amendement no 1992. Dans le même esprit que l’amendement précédent, il s’agit de maintenir le financement des CTI et des CPDE afin d’améliorer l’accompagnement des TPE et PME. Pour ce faire, il est proposé de déplafonner la taxe affectée, sous réserve de la signature d’un COP.
L’amendement vise à réserver le déplafonnement au centre d’études et de recherches de l’industrie du béton – CERIB – et au centre technique de matériaux naturels de construction – CTMNC. La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l’amendement no 2461. Monsieur le rapporteur général, je vous rassure, les amendements sont à venir, mais, je ne sais pourquoi, ils ont été classés de manière un peu bizarroïde. Les différents amendements relatifs aux CTI sont disséminés un peu n’importe comment dans la liste des amendements à l’article, car ils sont regroupés par catégorie de centres industriels.
Le Premier ministre m’a confié, ainsi qu’à deux industriels, en octobre dernier, une mission sur les plateformes d’accélération vers l’industrie du futur, afin de définir les outils d’une politique industrielle 4.0. Il en ressort que les CTI, répartis sur l’ensemble du territoire et par filière professionnelle, possèdent deux atouts majeurs : ils existent et ils sont le parfait outil de transfert de la recherche appliquée à des modèles d’industrialisation. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons les valoriser.
Le Gouvernement a aimablement accepté de revoir sa philosophie sur les taxes affectées à ces organismes. Après avoir reconnu que la contribution volontaire obligatoire n’était pas un mode de financement pérenne pour eux, il a consenti à déplafonner les taxes affectées sous condition d’un COP abouti pour chacun des centres industriels. En l’occurrence, l’amendement concerne le CERIB et le CTMNC. Le but est de faire des CTI les bras armés de notre politique industrielle. D’autres centres techniques seront visés dans les amendements à venir. Madame Cattelot, le classement n’est pas fait de manière bizarroïde, ni par catégorie de centres industriels, mais, sur ce texte, comme sur tous les autres, en fonction des alinéas auxquels se rapportent les amendements.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ? Je cherche toujours l’amendement du Gouvernement, je vais finir par le trouver. En attendant, mon avis est favorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Favorable. La parole est à Mme Annie Genevard. L’avis est favorable, je m’en réjouis pour les filières du béton et des matériaux naturels de construction, mais quelque chose m’échappe : le ministre, Gérald Darmanin, nous expliquait il y a peu à quel point le principe même des taxes affectées était mauvais et voilà que, s’agissant du béton et de la construction, il redevient un bon principe. Si le principe de la taxe affectée est bon pour le béton et la construction, pourquoi ne le serait-il pas pour le vêtement, le cuir, l’horlogerie ou la bijouterie, pour toutes ces filières industrielles qui sont très utiles en matière d’emploi, de rayonnement de la France et d’innovation technologique ? Il y a manifestement là une contradiction qui est non seulement incompréhensible mais je dirais, à bien des égards, intellectuellement malhonnête. La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot. Cette intervention me permet de préciser la philosophie qui a guidé le Gouvernement après sa lecture du rapport. En effet, le principe des taxes affectées ne correspond guère à la philosophie de Bercy – le ministre le redira sans doute. En revanche, nous nous sommes demandé, en collaboration avec le Conseil des prélèvements obligatoires notamment, quelle était la fiscalité la plus appropriée pour faire fonctionner les CTI et les CPDE, quel que soit leur domaine. Nous avons dressé la liste de l’ensemble des politiques industrielles et des CTI – il n’y a pas que le béton et les matériaux naturels de construction, vous trouverez ceux qui vous intéressent dans les prochains amendements, madame Genevard. Nous sommes arrivés à la conclusion que la taxe affectée était utile car elle permet une mutualisation.
Pourquoi Bercy a-t-il accordé de la souplesse dans cette matière ? Parce que la taxe affectée permet d’obtenir des contributions importantes de la part des grands groupes importateurs et exportateurs et que les bénéficiaires en sont le tissu des PME françaises. Cet outil nous a donc paru le plus vertueux même s’il déroge à l’orthodoxie budgétaire habituelle.
S’agissant du volet français de l’agriculture, les États généraux de l’alimentation – EGA –, auxquels ont participé des milliers de personnes, ont permis de rassembler tous les acteurs de la filière, d’amont en aval. Plusieurs enseignements très clairs en ont été tirés : tout d’abord, il faut relever le revenu des agriculteurs au-dessus du plancher actuel et assurer une meilleure répartition de la valeur. C’était l’enjeu des EGA, cela a été inscrit et adopté dans la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite EGALIM.
La première année, qui a vu l’application de la loi et des ordonnances, était une année d’expérimentation : c’est aujourd’hui que les choses commencent réellement. Elles commencent avec les discussions sur les marques de distributeur ; elles se prolongeront, en fin d’année 2019 et début d’année 2020, avec les négociations commerciales. C’est là, avec l’inversion de la construction des prix et la mise en place par les filières des indicateurs de prix, que nous devrons parvenir à une meilleure répartition de la valeur économique pour les agriculteurs.
Deuxièmement, ainsi que cela figurait dans le titre II de la loi EGALIM, il faut que la transition agroécologique soit encore plus prégnante dans l’ensemble de l’agriculture française. Aujourd’hui, nous demandons beaucoup aux agriculteurs et aux chambres d’agriculture. Beaucoup trop ! Non, monsieur le député, pas trop du tout !
Il faut essentiellement assurer le revenu des agriculteurs car, sans cela, on n’arrivera jamais, quoi que l’on fasse, à les entraîner dans la transition agroécologique. Or je m’aperçois que, dans l’ensemble des filières, cette transition a bien lieu. En effet, nombre d’exploitations sont dans une démarche de certification haute valeur environnementale – HVE – de niveau 1, voire de niveau 2. L’engagement est fort.
Les chambres d’agriculture, grâce à leurs conseillers, jouent un rôle essentiel de conseil et d’animation sur les territoires. Elles doivent également accompagner la transition agroécologique. Initialement, le Gouvernement avait envisagé de demander un effort aux chambres d’agriculture... C’est bien de le reconnaître. ...en inscrivant dans le projet de loi de finances pour 2020 la diminution du plafond de la TA-TFNB et l’affectation régionale de sa collecte, mais le Premier ministre a entendu les parlementaires. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir. – « Enfin ! » sur les bancs du groupe LR.)
Le Premier ministre a entendu le Parlement. Tout le Parlement. Il a également été sensible aux arguments des groupes de sa majorité. C’est cela aussi, le travail politique ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs. – Protestations sur les bancs du groupe LR.) Il a également entendu les chambres d’agriculture et pris acte du vote acquis il y a quelques jours en commission des affaires économiques… En commission des finances ! Oui, pardonnez-moi, monsieur Brun ! En commission des finances, bien entendu. Partant, après avoir écouté tout le monde, le Premier ministre a rendu un arbitrage et décidé de retirer de l’article 27 du projet de loi de finances les mesures qui étaient afférentes aux chambres d’agriculture, à la régionalisation et à la baisse du plafond de la TA-TFNB. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR et LT.)
Tel est le contenu de l’amendement que le Gouvernement vous proposera d’adopter ce soir. À voir la réaction des députés – et sachant ce que nous avions compris de leur position depuis déjà quelques semaines –, le vote devrait connaître une issue très favorable.
Reste que nous devrons nous occuper de la forêt et de filière forestière, très importantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Nicolas Turquois applaudit également.) Je tiens à saluer le travail de tous les députés, en particulier M. Hervé Pellois, M. Nicolas Turquois et Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, et le vote qui a eu lieu en commission ( « Bravo ! » sur les bancs du groupe LaREM.) Et nous ? C’est vraiment de l’autosatisfaction ! J’espère maintenant que les parlementaires, sur tous les bancs, avanceront dans cette direction.
Je mène actuellement des discussions avec le président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture, l’APCA, sur le nouveau contrat d’objectifs et de performance – COP – des chambres d’agriculture. Celui-ci doit permettre d’avancer dans deux directions : accélérer la transition agroécologique afin d’affronter l’enjeu essentiel du dérèglement climatique, et travailler à une nouvelle gouvernance, afin d’appréhender les territoires d’une nouvelle façon. Je demanderai à ce que chaque COP ne soit pas, comme cela se fait dans tant d’autres secteurs, un rapport de 100 ou 200 pages, mais qu’il énonce dix à quinze priorités fortes que vous puissiez partager et sur lesquelles nous travaillerons dans la durée.
Enfin, l’amendement no 3104 présenté par le Gouvernement prévoit la remise d’un rapport au Parlement. Cela va en faire, des rapports… Il lui appartiendra de s’en saisir. Jusqu’ici, vous avez, sur tous les bancs, tiré dans le même sens ; continuez à le faire, pour que les chambres d’agriculture soient de plus en plus efficaces et qu’elles puissent transformer au mieux l’économie de notre pays. C’est pourquoi je vous demanderai de soutenir cette position en remerciant le Premier ministre pour son arbitrage. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Et M. Brun ! La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. La décision prise aujourd’hui est sage ; elle est susceptible de conduire à l’apaisement sur un dossier qui a beaucoup préoccupé la commission des finances car – soyons francs – il n’était pas très bien ficelé. Très bien, monsieur le rapporteur général ! Pour nous en apercevoir, il a fallu soulever la question de l’affectation de plusieurs fonds destinés à la forêt.
Je suis satisfait du compromis trouvé. En tout état de cause, devant les difficultés, j’aurais demandé à ce que l’amendement de la commission des finances, adopté à l’initiative de M. Fabrice Brun, et l’amendement identique de M. Hervé Pellois, soient adoptés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, LR, FI et LT.)
Il manquait cependant la demande de remise d’un rapport. En effet, à l’image de toutes les autres, la filière agricole doit se moderniser et se réformer. Cela est absolument indispensable pour leur survie, car, comme dans tout réseau consulaire, toutes les chambres ne fonctionnent pas exactement de la même façon, même si la plupart – et c’est ce qui est important – mènent des actions très intéressantes en faveur de l’implantation de jeunes agriculteurs.
Nous avons plusieurs inscrits avant de débattre des 130 amendements déposés sur l’article 27. Les dispositions de l’amendement no 2932, adopté par la commission des finances à l’initiative de M. Fabrice Brun, et du no 1141 de M. Hervé Pellois sont reprises et complétées par l’amendement no 3104 du Gouvernement. Pour afficher mon soutien à cette démarche, j’ai déposé un amendement rigoureusement identique no 3106, qui inclut la demande de rapport sur les modalités de financement des affectataires de la TA-TFPNB et sur le processus de modernisation et de mutualisation du réseau des chambres d’agriculture. En effet, dans ce domaine, l’immobilisme n’est pas souhaitable, même s’il n’était pas encore temps de mener une réforme, d’autant qu’elle n’était ni comprise, ni acceptée.
Le compromis auquel nous sommes parvenus permet de respecter le travail législatif qui a été effectué. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et UDI-Agir ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR.) La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Le bon sens reprend ses droits. La disposition proposée n’était en effet pas de bon sens, car elle attaquait directement les chambres d’agriculture à un moment où l’agriculture a besoin de soutien... Et de proximité ! ...et non pas de voir ses moyens diminués. Or, quel que soit le territoire où elles sont implantées, le rôle des chambres d’agriculture est éminemment important pour l’agriculture française. La commission des finances avait donc adopté plusieurs amendements – un de M. le rapporteur et deux de M. Fabrice Brun – réduisant la portée des dispositions voulues par le Gouvernement, au point de les dévitaliser.
Il me paraissait souhaitable d’éviter un débat parlementaire trop polémique ou agressif sur le sujet. Le Gouvernement a pourtant décidé de réserver l’examen de l’article pour ce soir – était-ce pour faire le compte des troupes, ce qui aurait signifié qu’il était prêt à la bataille ? Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, vous êtes revenu sur votre décision et je m’en réjouis pour l’agriculture française et nos chambres d’agriculture. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Nicolas Turquois. Au nom du groupe MODEM, je remercie le ministre d’avoir annoncé le retrait de ces dispositions. Cela étant, j’aimerais que la polémique née autour de ce sujet nous interroge sur la façon dont nous construisons le budget de notre pays. En effet, s’il était en effet insupportable, pour les chambres d’agriculture, de découvrir une mesure de cette ampleur quelques mois seulement avant son application, mais en réalité, chaque projet de budget contient des dispositions de ce genre.
Il faut donc en finir avec de telles pratiques et anticiper davantage la préparation du budget – d’autant que les chambres sont un acteur utile pour accompagner la transformation de l’agriculture.
Il est dommage qu’à la faveur de cette polémique, la forme ait pris le pas sur le fond. Car, en tant qu’agriculteur, j’estime que l’on peut s’interroger sur le modèle des chambres d’agriculture. Au cours des dernières années, plusieurs rapports – dont l’un émanait de la Cour des comptes – ont relevé des dysfonctionnements, des différences d’orientation d’un département à l’autre, des dépenses de représentation excessives pour des organismes financés par de l’argent public. S’il n’est pas souhaitable de procéder à la diminution brutale des ressources qui était initialement programmée, une vraie stratégie reste à adopter concernant la gouvernance des chambres d’agriculture. Il y a des instances de contrôle pour ça ! Les règles adoptées en la matière dans les années 1920 ou 1930 n’ont en effet plus la même pertinence de nos jours. Monsieur le ministre, je vous engage donc à mener une action déterminée sur le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.) La parole est à M. Hervé Saulignac. Avant que d’aucuns ne pensent que nous serons deux orateurs du groupe socialiste à prendre la parole, je précise que je m’exprime en lieu et place de ma collègue Christine Pires Beaune.
À mon tour, je salue la sage décision qui a été prise, tout en regrettant qu’elle l’ait été dans ces conditions. Nous aurions pu éviter de mettre sous pression les chambres d’agriculture qui, comme nous l’avons constaté en rencontrant leurs représentants, nourrissaient de très grandes inquiétudes. Nos collègues Fabrice Brun et Michèle Victory pourraient en témoigner puisque, aujourd’hui encore, nous avons participé à une réunion avec eux.
J’ai presque envie de dire : tout ça pour ça ! Eh oui ! Nous savions pourtant dès le début que cette mesure n’aurait pas eu la moindre incidence sur le pouvoir d’achat des agriculteurs, mais qu’elle aurait fortement compromis le fonctionnement des chambres d’agriculture, où 750 emplois d’ingénierie étaient menacés. Un véritable plan social ! Par conséquent, il était nécessaire d’y renoncer.
Cependant le communiqué qui a été publié il y a quelques minutes n’est pas le reflet de la réalité. Car des parlementaires de tous les groupes et de toutes les sensibilités se sont mobilisés sur le sujet : des députés comme des sénateurs, beaucoup de membres de l’opposition mais aussi des représentants de la majorité. Une tribune, parue ce week-end, a été signée par 180 parlementaires et présidents de département. Une telle initiative n’est sans doute pas pour rien dans la décision finalement prise ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et LT. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.) Quoi qu’il en soit, je salue leur engagement.
Les chambres d’agriculture ont besoin de retrouver avec le Gouvernement un dialogue de confiance qui, je le crains, est durablement rompu. Mais c’est aussi avec les parlementaires qu’il doit renouer ce dialogue. Merci, monsieur Saulignac. J’en termine, monsieur le président. J’observe qu’aucun amendement du groupe socialiste n’aura été adopté dans le cadre de cette discussion. C’est assez révélateur. La parole est à M. Thierry Benoit. Naturellement, je ne vais pas féliciter le ministre de l’agriculture pour ce qu’il vient de déclarer. Et pourquoi pas ? Il était inadmissible de rogner les crédits des chambres d’agriculture compte tenu de ce qu’on leur fait vivre depuis deux ans. Parce qu’avant, c’était mieux ? Pour ma part, j’aimerais que le ministre de l’agriculture nous précise plutôt quelle est la feuille de route : quel est le champ d’intervention des chambres d’agriculture ? Quelles sont les missions assignées aux agriculteurs ?
Il y a trente ou quarante ans, les agriculteurs de France se réjouissaient d’avoir Jacques Chirac comme ministre de l’agriculture. Normal ! À l’époque, le ministre était le seul interlocuteur des chambres d’agriculture. À présent, tout le monde parle d’agriculture : Bercy, le ministère de la santé, le ministère de l’environnement. Même au niveau territorial, dans les intercommunalités ou les régions, il existe des collaborateurs chargés de cette question. Le message est totalement dispersé. Pour ma part, je souhaite que la politique agricole française soit conduite depuis le ministère de l’agriculture et par le ministre de l’agriculture.
Monsieur le ministre, vous êtes dans un corner, tout comme votre prédécesseur. Il y a deux ans, après avoir annoncé l’inversion de la construction des prix, le Président de la République avait remercié Stéphane Travert. On ne sait toujours pas pourquoi, tant ce dernier avait fait un excellent travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir.) Et aujourd’hui, je ne vois pas quelle est la feuille de route du nouveau ministre de l’agriculture. C’est la question que je pose clairement ce soir. La parole est à M. Charles de Courson. Au nom du groupe Libertés et territoires, monsieur le ministre de l’agriculture, je voulais vous dire la chose suivante : si, en commission des finances, nous avons majoritairement voté contre l’abaissement de 15 % des taxes affectées aux chambres d’agriculture, c’est parce qu’une partie de la majorité a rejoint l’ensemble de l’opposition pour approuver un amendement de cette dernière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Or que dit votre communiqué de presse ? « À la demande du Premier ministre, qui a entendu à la fois les remarques des parlementaires de la majorité comme des responsables des chambres d’agriculture (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR) , le Gouvernement proposera la suppression des dispositions relatives aux chambres d’agriculture dans l’article 27 du projet de loi de finances. » Voyez-vous, ce n’est pas une attitude très républicaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Cécile Untermaier applaudit également.)
Je vous félicite donc, monsieur le ministre, d’avoir à l’instant rendu hommage à l’ensemble de la représentation nationale, ou du moins aux parlementaires, de la majorité comme de l’opposition, qui se sont opposés à ces dispositions.
En réalité, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, à travers cette affaire des chambres d’agriculture, c’est la conception même de l’organisation de la société qui est en cause. Cela illustre en effet la volonté du Gouvernement d’affaiblir les corps intermédiaires. Pourtant, dans une société libre, on respecte les corps intermédiaires : les chambres consulaires, les chambres d’agriculture, les chambres de métiers, les chambres de commerce et d’industrie et les syndicats. Même quand on n’est pas d’accord avec eux, on discute et on négocie !
Par ailleurs, l’article 27 pose un vrai problème de fond dont nous discutons depuis des années en commission des finances : l’affectation des taxes. Avec un tel mécanisme, nous contrôlons la recette affectée, mais pas les dépenses. Il serait sage de rebudgétiser non pas toutes ces taxes mais une partie d’entre elles. (Applaudissements sur les bancs du groupe LT.) La parole est à M. Éric Coquerel. Je m’associe aux propos des précédents orateurs. J’ai vu certains collègues de la majorité réagir violemment lorsque l’adoption de l’amendement de Fabrice Brun en commission des finances a été présentée comme une victoire du Parlement. C’est pourtant une bonne chose et ils devraient en être satisfaits. Non seulement toute l’opposition a soutenu cet amendement,… Des membres de la majorité aussi ! En effet, et vous en particulier, mon cher collègue. Des membres de la majorité l’ont soutenu, jugeant qu’il était de bon sens.
Ce soir, ce bon sens l’emporte, et j’aimerais que cela soit le cas un peu plus souvent. Ainsi, je suis à peu près sûr que la semaine dernière, certains députés de la majorité ont été sensibles aux arguments soulevés par toute l’opposition sur le caractère néfaste de la baisse du financement des chambres de commerce et d’industrie. Si nos débats de ce soir pouvaient augurer d’une nouvelle pratique, si le Parlement pouvait désormais peser un peu plus sur les décisions sans que le Gouvernement ait besoin de donner son aval à un moment donné, j’en serais particulièrement satisfait.
En tout état de cause, c’est une bonne nouvelle pour les chambres d’agriculture, d’autant qu’au-delà du plafond de la taxe, il ne faut pas oublier le maintien de la départementalisation.
En revanche, je regrette que soient maintenues d’autres dispositions de l’article 27 tendant à diminuer le plafond de taxes affectées à d’autres organismes comme l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs – ANDRA. Nous y reviendrons. J’espère que mon amendement sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, qui a également été repris à son compte par la commission des finances, sera, lui aussi, adopté ce soir. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. Messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, je reprendrai volontiers à mon compte la formule de notre rapporteur général : la décision annoncée par M. le ministre de l’agriculture est une décision sage.
Cette mesure désormais supprimée, vous l’aviez pourtant imaginée. Eh oui ! Cela montre qu’il ne faut pas toujours écouter Bercy. Cette ponction sur les moyens des chambres d’agriculture était malvenue à un moment où l’agriculture est en crise, notamment dans les départements d’élevage comme le mien. Elle était malvenue à un moment où il faut repenser les modèles pour produire une alimentation de qualité et s’adapter au réchauffement climatique.
C’était une mesure dirigée contre le monde rural dans sa globalité, car celui-ci est fortement lié à l’agriculture.
Mais la régionalisation était également une très mauvaise idée à laquelle il convient de renoncer définitivement. Prenons l’exemple de ma région : quelles similitudes peut-il y avoir entre l’Allier, où l’on élève des bovins pour leur viande, et la Savoie ?
Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas donner aux chambres d’agriculture des objectifs clairs ni qu’elles ne devront pas, pour les atteindre, accroître leurs compétences dans certains domaines. Quoi qu’il en soit, réjouissons-nous ce soir que le bon sens l’ait emporté. La parole est à Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Je voudrais vraiment associer tous les députés de la majorité à cette intervention, surtout Hervé Pellois qui a été parmi les premiers à monter au créneau en faveur des chambres d’agriculture. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Il est important, pour la suite de nos travaux sur le sujet, de rappeler que nous étions sur la voie d’un compromis.
Cela étant, je voudrais quand même rétablir certaines vérités. La tribune dans Le Parisien ? Certes, bravo, mesdames et messieurs, mais je vous rappelle que les députés de la majorité ont été les premiers à publier une tribune à ce sujet, fin août. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs des groupes LR et LT.)
Vous dites que l’amendement de M. Brun a été le premier à être déposé en commission des finances. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.) Un peu de calme, mes chers collègues. Mais ceux de Hervé Pellois et de Michel Lauzzana revenaient exactement au même. Il ne sert à rien de tirer la couverture à soi (Vives exclamations sur les bancs des groupes LR et LT) et il serait bon de revenir sur le fond.
Quel est le fond ? (Exclamations prolongées les bancs du groupe LR.) Mes chers collègues, je crois avoir noté que M. Brun allait s’exprimer dans quelques instants. Laissez votre orateur prendre la parole pour s’exprimer distinctement plutôt que de vociférer des propos que personne ne comprend.
Poursuivez, madame Verdier-Jouclas. Avant d’en revenir au fond, je vous signale, monsieur Brun, que votre amendement était incomplet puisqu’il ne prévoyait pas la suppression de l’alinéa 66. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) L’amendement de la commission, et surtout celui du Gouvernement, sont à cet égard plus complets.
Sur le fond, nous sommes tous d’accord pour dire que nous avons besoin des chambres d’agriculture, qu’elles sont d’autant plus nécessaires que nous leur demandons beaucoup en matière de transition écologique.
Mais elles ont aussi besoin de se restructurer, car des inégalités demeurent. Merci de conclure, madame la députée. Il faut les amener à mutualiser leurs moyens, en y travaillant tranquillement avec elles pour les aider à y parvenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Fabrice Brun. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.) N’en venez pas non plus, mes chers collègues, à couvrir par vos applaudissements la voix de l’orateur de votre groupe ! Je serai plus consensuel que l’intervenante précédente. Il n’est pas fréquent qu’opposition et majorité se rejoignent en commission des finances pour annuler le projet de régionalisation des chambres d’agriculture – en effet, c’est d’abord de proximité et de terrain dont nous avons besoin –, et pour annuler la réduction de 45 millions d’euros de ressources. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM, SOC, UDI-Agir et LT.) Cette réforme aurait en effet été inutile, inopérante et incohérente, et sans effet significatif sur le revenu des agriculteurs. En revanche, elle aurait remis en cause l’équilibre financier des chambres. Ce n’est pas moi qui l’affirme mais la Cour des comptes, tout comme les 200 députés, sénateurs et présidents de conseils départements signataires de la tribune parue hier dans la presse nationale.
Monsieur le ministre de l’agriculture, nous ne sommes pas dupes. Vous relâchez la pression car le risque était grand de vous voir battu en séance aujourd’hui, comme vous l’avez été en commission des finances. Vous savez très bien, fort de votre expérience, que « les emmerdes volent souvent en escadrille ». J’aime d’ailleurs à penser que l’esprit de Jacques Chirac plane sur nos débats agricoles ce soir. Dans le contexte inflammable de nos campagnes, vous avez enfin compris que désarmer techniquement les agriculteurs constituerait une grave erreur, au moment même où ils sont confrontés à des enjeux colossaux, qu’ils soient sanitaires, climatiques, environnementaux ou économiques, et au défi titanesque du renouvellement des générations.
Vous n’en avez pas parlé, mais sachez que les représentants des chambres d’agriculture partiront demain à la rencontre des 160 000 agriculteurs qui céderont leur exploitation au cours des années à venir. C’est aussi cela, la mission publique de ces chambres. L’enjeu de l’installation de jeunes agriculteurs est un sujet majeur pour l’emploi, pour l’aménagement du territoire mais aussi pour la souveraineté alimentaire de notre pays. Veuillez conclure. Pour continuer à produire demain, nous aurons besoin du réseau consulaire, de ses élus et de ses techniciens, pour que nos agriculteurs puissent toujours innover pour inventer demain. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, SOC, UDI-Agir, GDR et LT.) La parole est à Mme Emmanuelle Ménard. Pour ma part, je me réjouis de cette véritable union sacrée de près de 200 élus qui s’est organisée pour protéger nos chambres d’agriculture, nos agriculteurs et, dans le cas de mon département, nos viticulteurs. La coupe budgétaire sans précédent qui avait été prévue aurait porté une grave atteinte au monde agricole mais aussi au monde forestier. La Cour des comptes semblait elle aussi juger cette décision inutile et inopérante. Oui, réduire les budgets des chambres d’agriculture aurait été une grave erreur, comme l’a malheureusement été la réduction des budgets des chambres de commerce et d’industrie. Oui, le recul du Gouvernement sur cette mesure est une bonne chose et constitue une victoire de l’Assemblée nationale dans son ensemble – je tiens à le souligner –, qui montre là son souci de soutenir les agriculteurs et sa volonté de protéger l’agriculture et la viticulture françaises. (Applaudissements parmi les députés non inscrits.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 465 et 2046.
La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 465. Il s’agit d’un amendement de portée générale sur les taxes affectées. Vous avez souhaité diminuer le plafond de la taxe affectée aux chambres d’agriculture ; nous plaidons, nous, pour une remise à plat du système, et surtout en faveur la suppression du plafond de ces taxes, qui concernent des filières essentielles en France comme le cuir et la plasturgie – j’y reviendrai ultérieurement, avec un amendement spécifique sur le sujet. Cet amendement d’appel a pour but de travailler sur ce déplafonnement. Il est en effet injuste que l’État récupère une partie du produit des taxes affectées, souvent prélevées sur les entreprises. La parole est à M. Éric Woerth, président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement no 2046. Je suis intervenu à plusieurs reprises sur le sujet, non pas, comme Charles de Courson, pour contester le principe même de l’affectation du produit de certaines taxes – même si l’on peut admettre que les dépenses, dans un tel système, sont moins lisibles que les dépenses budgétaires – mais pour remettre en cause son plafonnement. Si j’en crois le rapporteur général – ce que je fais bien volontiers –, le produit des taxes affectées s’élève à 26,4 milliards d’euros en 2019. Sur cette somme, 9,5 milliards d’euros sont plafonnés. Une partie de l’excédent est reversée au budget général – ce qui était d’ailleurs souhaité dans le cas des chambres d’agriculture. Ce sont donc 1 milliard d’euros qui ont été prélevés sur des acteurs économiques en vue d’une affectation mais qui se retrouvent de fait dans le budget général. C’est une sorte de détournement de la fiscalité : ces taxes ne sont pas prélevées dans l’intention d’être versées au budget général.
Je propose donc que l’on supprime les plafonds actuels et que l’on plafonne chaque année non pas le montant mais le taux de ces taxes en fonction des besoins des organismes. Quel est l’avis de la commission ? Notre avis est défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’article 27 dépasse en effet le cas des chambres d’agriculture, puisqu’il concerne de nombreuses taxes affectées. Nous pouvons effectivement ouvrir cet intéressant débat, monsieur le président de la commission, mais je rappelle que c’est Valérie Pécresse qui avait institué le plafonnement des taxes affectées, lorsqu’elle était ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État ; en tant que parlementaire, vous aviez voté en faveur de cette mesure. Vous aussi ! Il se trouve que je n’étais pas parlementaire en décembre 2011. Je n’ai pas eu le plaisir de siéger avec vous et ne le regrette pas, d’ailleurs. (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.)
Deuxième point : M. de Courson évoque la piste de l’abandon du principe d’affectation des recettes – certes par pour toutes les taxes. On peut en effet être en accord avec le M. Woerth lorsqu’il affirme que le plafonnement conduit à verser au budget général le produit de prélèvements effectués sur des acteurs économiques alors qu’ils n’étaient pas prévus pour cela. Cependant, je constate, monsieur de Courson, que vous-même parfois, et d’autres ici, se rendent parfois coupables de ce qu’ils récusent. Hier, vous avez ainsi défendu le principe du prélèvement des cotisations INAO directement auprès des viticulteurs et aujourd’hui, vous affirmez qu’il faut mettre fin aux affectations ! Il s’agit dans ce cas d’une contribution volontaire obligatoire ! Non, les cotisations INAO ne sont pas une CVO. Davantage de cohérence serait souhaitable entre vos propos de vendredi dernier et ceux d’aujourd’hui – même s’il est vrai que nous avons tous nos contradictions…
Enfin, il est un troisième point que je souhaiterais évoquer avec vous. Même s’il se trouve que je donnerai un avis défavorable aux amendements de MM. Abad et Woerth, je trouve assez sain le principe mis en avant par M. le président de la commission des finances. J’illustrerai mon propos avec la redevance télévisuelle : lorsque son montant atteint le plafonnement prévu par le Gouvernement, et que 25 millions d’euros sont prélevés en surplus, il est effectivement préférable de le rendre aux Français plutôt que de le verser au budget général, ce qui reviendrait à taxer davantage les acteurs économiques – les contribuables, en l’occurrence. C’est justement pour cette raison que le Gouvernement propose de réduire la redevance de 1 euro – baisse jugée dérisoire par certains membres de votre groupe politique, monsieur Woerth. Or si l’on considère que le surplus au-delà du plafonnement ne doit pas être versé au budget général et que la fiscalité devrait être réduite, même modestement, alors on est tenu d’admettre la réduction du montant de la redevance sans tourner cette disposition en dérision. La parole est à Mme Annie Genevard. Je souhaiterais, à la faveur de ces amendements, revenir sur le sujet des taxes affectées, un débat que nous avons malheureusement déjà eu l’an dernier. Monsieur le ministre, vous avez rappelé que le principe du plafonnement avait été adopté par Valérie Pécresse. Le problème est que vous modifiez ce plafond, comme vous l’avez déjà fait en 2018. Chaque année, vous réduisez les marges de manœuvre des entreprises soumises à ces taxes dont le produit est redistribué entre elles, dans les filières du cuir, de l’habillement, de l’horlogerie, de la bijouterie ou encore de la joaillerie. Ces secteurs sont pourvoyeurs de nombreux emplois et sont à la pointe de l’innovation. Ces taxes s’avèrent donc réellement utiles aux filières. On ne peut pas d’un côté promouvoir l’esprit de filière dans de nombreux domaines économiques et, de l’autre, les priver des moyens nécessaires à leur fonctionnement, en particulier en ce qui concerne les centres techniques.
Vous répondez par un argument politicien, monsieur le ministre, alors que nous vous objectons l’intérêt économique, l’intérêt de l’emploi et l’image de la France dans des secteurs où elle rayonne et où elle est reconnue. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. le ministre. Je ne peux pas laisser dire ce qu’affirme Mme Genevard, qui me semble faire écho au débat de l’an dernier, au cours duquel elle avait longuement défendu des amendements visant spécifiquement certains milieux professionnels – peut-être le fera-t-elle encore cette année. Madame Genevard, vous défendez finalement l’existence de la taxe. Le problème n’est pas le plafond ! Non ! Ce sont des moyens collectifs. Les entreprises le demandent ! Vous défendez bien le principe de la taxe ! Il est votre droit de penser qu’une taxe est nécessaire pour réguler un secteur mais je ne pensais pas que cela correspondait à votre philosophie. Par ailleurs, si le produit de chaque taxe était affecté à une filière ou un secteur – le cuir, le sport, la culture, etc. – il ne resterait en définitive aucune ressource pour l’éducation nationale ou l’armée ! Les membres de la commission des finances le savent bien. Il n’y a heureusement aucune taxe possible sur les enfants ou les soldats. Il est donc bien nécessaire que des ressources soient affectées au budget général ; Charles de Courson tout comme Éric Woerth ont bien posé le problème. Certes, on peut accepter le principe de l’affectation dans un certain nombre de cas, mais malheureusement, chacun est attaché à la taxe affectée dans le secteur qui le regarde et qui concerne sa circonscription et souhaite supprimer la taxe affectée de son voisin. Il y a donc sans doute un équilibre à trouver. (Les amendements identiques nos 465 et 2046 ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 93, deuxième rectification, 304, deuxième rectification, 807, 326, 408, 83, 325, 798, et 336 pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 93, deuxième rectification, 304, deuxième rectification, et 807 sont identiques, de même que les amendements nos 326 et 408 et que les amendements nos 83, 325 et 798.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 93, deuxième rectification. Le Président de la République s’est engagé à doubler l’enveloppe du fonds chaleur. Cette hausse a été partiellement confirmée par la programmation pluriannuelle de l’énergie mais risque de se faire au détriment des autres politiques soutenues par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, si des moyens complémentaires ne sont pas affectés à l’Agence. Cet amendement propose d’y suppléer. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 304, deuxième rectification. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte avait inscrit, parmi les ambitions liées à l’économie circulaire, un objectif de développement des combustibles solides de récupération. Toutefois, le développement de cette filière reste balbutiant en France, faute de soutien suffisant. Cet amendement vise donc à doter l’ADEME de moyens permettant de lancer une véritable filière industrielle de valorisation des combustibles solides de récupération via une affectation des recettes de la taxe générale sur les activités polluantes appliquée aux déchets – TGAP. Cela permettra notamment de réduire le stockage des déchets non recyclables, conformément aux objectifs nationaux en matière d’économie circulaire et au but visé par la TGAP-déchets. Elle contribuera ainsi à renforcer la cohérence de la fiscalité écologique des déchets. La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 807. Ce projet de loi de finances ne prévoit pas d’augmentation du budget de l’ADEME. Or si l’augmentation du fonds chaleur est confirmée à hauteur de 350 millions d’euros, elle se fera au détriment des autres politiques soutenues par l’Agence, notamment les politiques de développement de l’économie circulaire. Cet amendement vise donc à doter l’ADEME des moyens nécessaires pour augmenter le fonds chaleur. L’amendement no 326 de M. Guy Bricout est défendu.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 408. Un tiers des déchets est issu de produits de grande consommation non recyclables. Pour ces derniers, la valorisation énergétique représente une solution alternative au stockage. La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 83. D’ici à 2024, les collectivités doivent mettre en place une solution de tri à la source, ce qui, de l’avis des experts, s’avérera coûteux. Or aucun dispositif d’accompagnement n’est prévu. Cet amendement vise donc à affecter à l’ADEME les moyens nécessaires pour lancer un grand plan national de déploiement du tri à la source des biodéchets. Son adoption permettrait d’éviter que l’augmentation de la TGAP ne se limite à une simple hausse de la fiscalité, certes supportée par les collectivités, mais qui se répercutera sur le contribuable. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 325. Il est évident pour nous tous que le traitement des biodéchets doit être doté de moyens à la hauteur des enjeux de l’économie circulaire. Ce doit être un objectif pour le Gouvernement. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement no 798. Il s’agit là aussi de faire en sorte que cette taxe, qui va considérablement augmenter, ne grève pas trop les budgets des collectivités locales et que son produit soit affecté à l’ADEME. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 336. Le dispositif appelé « 1 % solidarité eau », créé par la loi « Oudin-Santini », permet à chaque structure de gestion de l’eau d’affecter jusqu’à 1 % de ses recettes à la coopération internationale en matière d’accès à l’eau et à l’assainissement. Mais son équivalent pour les déchets, le « 1 % déchet », ne suscite pas pour l’instant une mobilisation équivalente des collectivités, notamment en raison de l’absence d’incitations financières. On ne peut pas travailler au niveau national à développer le recyclage des déchets sans œuvrer à cette politique dans le reste du monde. Quel est l’avis de la commission ? Tous ces amendements visent à revenir sur la rebudgétisation des taxes dont le produit était auparavant affecté à l’ADEME, notamment la TGAP. Je le comprendrais si cette opération avait été un marché de dupes, mais s’est accompagnée d’une augmentation des crédits de l’Agence, qui sont passés de 450 à 600 millions d’euros. Ainsi le projet de loi consacre 307 millions au fonds chaleur, dont les crédits s’élevaient à 258 millions en 2018.
La rebudgétisation n’est pas forcément satanique si elle est réalisée correctement. J’inviterai donc les auteurs de ces amendements à les retirer, sinon l’avis sera défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’Assemblée est en train de rediscuter une décision prise l’année dernière. Et alors ? Je me contente de le souligner sans contester votre droit d’avoir une discussion sur ce point.
Les crédits du fonds chaleur vont passer de 197 millions en 2017 à 350 millions en 2020, soit une augmentation de 60 millions d’euros par rapport à l’an dernier : nous ne pouvons pas vous laisser dire que nous ne lui consacrons pas les moyens nécessaires. Le projet de loi de finances pour 2021 sera sans doute l’occasion de faire le point mais ce projet de budget permet d’ores et déjà de répondre à vos préoccupations et d’honorer les engagements du Président de la République.
Je ferai remarque sur l’affectation. Je crois que chacun, sur tous les bancs de cet hémicycle, a envie que notre démarche écologique bénéficie d’un financement écologique. Or je le dis notamment à l’attention de Bénédicte Peyrol : affecter le produit d’une taxe à des dépenses écologiques, c’est grever la capacité de l’État à émettre des OAT – obligations assimilables du Trésor – dites vertes sur les marchés financiers. En effet, les OAT vertes s’adressent par définition à des prêteurs très attentifs à l’objectif de transition écologique. Si vous affectez le produit d’une taxe – la TGAP, par exemple – à une dépense, ils considéreront que celle-ci est déjà financée et n’a donc rien d’écologique. Ainsi, plus vous affecterez de taxes « écologiques » à des dépenses écologiques, plus vous handicaperez l’État sur le marché de la finance verte, qui est beaucoup plus vertueux, pas simplement en France mais dans le monde entier.
Aujourd’hui sur plus de 200 milliards d’euros, nous émettons 5 milliards d’OAT vertes et l’objectif de la France est d’augmenter la part de la finance verte dans ses emprunts. Toute affectation du produit d’une taxe particulière à une dépense écologique aurait pour effet de réduire cette ambition. Cela ne serait pas conforme à notre volonté de penser global et d’agir local. Avis défavorable donc. La parole est à Mme Sophie Auconie. Monsieur le ministre, chers collègues, écoutez-moi et surtout entendez-moi ! Nous pouvons nous féliciter de tous les dispositifs qui favorisent la collecte et le recyclage des déchets, notamment plastiques. Tout cela va indiscutablement dans le bon sens. Cela étant, il faut aussi aider les pays d’Afrique, d’Asie du Sud-Est, des Caraïbes à limiter leur pollution plastique. Certes, nous avons adopté le « 1 % déchets », sur le modèle du « 1 % solidarité eau » qui vise à favoriser leur accès à l’assainissement mais il n’est pas mis en œuvre avec toute l’ambition qu’il mérite.
Ce que je souhaite, monsieur le ministre, c’est que vous nous envoyiez le signal que le Gouvernement appliquera le « 1 % déchets » de manière beaucoup plus offensive. (Les amendements identiques nos 93, deuxième rectification, 304 deuxième rectification, et 807 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 326 et 408 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 83, 325 et 798 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 336 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements, nos 1088, deuxième rectification et 1134, deuxième rectification, qui peuvent être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 1088, deuxième rectification. Défendu. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 1134, deuxième rectification. Défendu. (Les amendements nos 1088, deuxième rectification et 1134, deuxième rectification, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) L’amendement no 2812 de M. le rapporteur général est rédactionnel. (L’amendement no 2812, accepté par le Gouvernement, est adopté.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 2258, 2931, 1436 et 2055, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2931, 1436 et 2055 sont identiques.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2258. Défendu. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2931. Cet amendement ayant été adopté à l’initiative de M. Zulesi, je le laisse le présenter. La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour soutenir l’amendement no 1436. Cet amendement vise à inscrire dans la loi la promesse faite par Mme la ministre Élisabeth Borne que les 2 centimes par litre de gazole de déremboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE – seront directement affectés, via l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, à nos infrastructures du quotidien. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 2055. Défendu. Quel est l’avis de la commission ? Favorable sur les identiques et demande de retrait pour l’amendement no 2258. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je sais, monsieur Zulesi, que vous connaissez bien ces questions mais je vous demanderai, après en avoir discuté avec la ministre de la transition écologique et solidaire et le secrétaire d’État chargé des transports, de retirer votre amendement. En effet, nous parlons d’une recette qui sera perçue à partir de 2021 – elle figurera donc dans le prochain projet de loi de finances –, et dont l’intégralité, soit 70 millions dans un premier temps puis 110 millions ensuite, ira à l’AFITF. En l’absence de retrait des amendements, l’avis serait défavorable. (L’amendement no 2258 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 2931, 1436 et 2055 ne sont pas adoptés.) L’amendement no 2815 de M. le rapporteur général est rédactionnel. (L’amendement no 2815, accepté par le Gouvernement, est adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067, 2085, 254, 365, 559 et 879, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067 et 2085 ainsi que 254, 365, 559 et 879 sont identiques.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 98. Cet amendement remet en cause le mécanisme du « plafond mordant ». En effet, la ponction opérée par l’État prive de ressources les agences de l’eau, ce qui est tout à fait regrettable au moment même où elles doivent faire face au défi du réchauffement climatique. La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 190. Le plafond mordant qui s’applique au budget des agences de l’eau réduit leurs ambitions alors qu’il est indispensable de poursuivre l’amélioration de la qualité écologique des milieux aquatiques. À chaque fois, monsieur le ministre, que vous empruntez ce déversoir budgétaire pour alimenter le budget de l’État – cela représente quand même près de 1 milliard d’euros –, vous hypothéquez des investissements concrets dans la préservation de nos rivières, l’entretien de nos réseaux d’assainissement et d’eau potable et le stockage hivernal de l’eau, tout cela sur fond de dérèglement climatique, dossier cher à notre ministre de l’agriculture.
Cet amendement vise à supprimer le plafond mordant pour que l’eau continue à payer l’eau et la biodiversité – c’est en effet le cas aujourd’hui via la contribution des agences à l’AFB, l’Agence française pour la biodiversité –, le principe « l’eau paie l’eau » ayant fait ses preuves dans notre pays. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 310. Je vous rappelle que le modèle français de gestion intégrée par bassin est aujourd’hui décliné dans chacun des 28 États membres de l’Union européenne. Hors Union européenne, ce sont 80 États qui appliquent ce modèle de gestion de l’eau à leur territoire.
Le principe en est que « l’eau paie l’eau ». Aujourd’hui, alors que nous sommes soumis à des stress hydriques – le dérèglement climatique ayant avant tout un impact sur la ressource en eau –, les agences de l’eau doivent bénéficier d’un maximum de moyens pour gérer cette ressource. Il n’est donc pas acceptable que leurs moyens continuent à diminuer comme c’est le cas depuis plusieurs années. La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l’amendement no 402. Défendu. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 644. Un projet de loi de finances, c’est aussi l’occasion de faire le bilan des relations entre l’État, les divers opérateurs auxquels il a confié une mission de service public et les collectivités territoriales. Force est de constater que dans le passé, les agences de l’eau menaient une politique très volontariste d’accompagnement des collectivités – des départements notamment – dans des projets soit d’adduction d’eau potable, soit de création ou de rénovation de réseaux d’assainissement.
Aujourd’hui, les agences de l’eau sont de moins en moins présentes ; les collectivités territoriales paient davantage. Or, l’une des conséquences du plafond mordant, c’est bien cette moindre implication des agences de l’eau, et je le déplore chaque année. Eh oui, ce seront les départements qui paieront ! La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 733. Comme d’autres, nous demandons la suppression du plafonnement des ressources affectées aux agences de l’eau.
Alors que dans le cadre du onzième programme, celles-ci voient leur champ d’action étendu notamment à la lutte contre le changement climatique, l’institution d’un plafond mordant induit nécessairement la diminution, voire l’arrêt de certaines aides pourtant toujours nécessaires pour les territoires – et en particulier les territoires ruraux, dont les charges sont souvent proportionnellement plus importantes, car leur densité de population est moindre.
Avec le plafond prévu, les budgets des agences se verront amputés de plus de 1 milliard d’euros par rapport au dixième programme. Cet amendement vise donc à supprimer une mesure qui remet en cause le principe « l’eau paie l’eau », et ainsi à donner aux agences de l’eau les moyens de faire face aux défis liés au réchauffement climatique. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 877. Mon amendement est identique aux précédents.
Je voudrais revenir, d’une façon plus générale, sur la question du plafonnement des taxes affectées. En elles-mêmes, ces taxes ne constituent pas un problème, mais le plafonnement, lui, contribue finalement à une fiscalité déguisée : la taxe prélevée pour une cause, pour un objectif, se trouve détournée de son affectation initialement prévue, et ainsi dévoyée ; au-delà du plafond, son produit tombe dans un puits sans fond. Nous assistons finalement à une ponction de l’État sur des fonds qui ne lui étaient pas destinés !
Nous parlons beaucoup de consentement à l’impôt : le mécanisme des plafonds imposés aux taxes affectées me semble, de ce point de vue, poser un vrai problème. Nous devons nous pencher sur cette question, qui est une question de justice fiscale et de transparence. La parole est à M. Jean-Yves Bony, pour soutenir l’amendement no 1319. Il est défendu. La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 1888. Nous avons déjà débattu du financement des agences de l’eau lors des deux dernières discussions budgétaires, puisqu’il y a déjà eu des prélèvements. Les agences de l’eau ne s’en remettent d’ailleurs que difficilement, grâce à une forme de péréquation horizontale que vous avez fini par instaurer, et qui permet – à certaines, en tout cas – de continuer à agir sur leur territoire.
Cette mesure-ci ressemble à celle que vous entendiez prendre à l’endroit des chambres d’agriculture : vous ne voulez pas de l’auto-administration des territoires ; vous ne voulez pas qu’ils gèrent certaines questions de façon intégrée. Le périmètre de certaines agences de l’eau est déjà extrêmement vaste ; la qualité de leur travail est, je crois, reconnue, et jamais nous n’avons eu autant besoin d’elles.
Je ne comprends pas ce qui justifie ce plafond imposé aux ressources des agences de l’eau. La parole est à M. Alain David, pour soutenir l’amendement no 2066. Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à supprimer le plafonnement des ressources affectées aux agences de l’eau.
Avec le plafond prévu actuellement, les budgets des agences se verront amputés de plus de 1 milliard d’euros par rapport au dixième programme. Il convient donc de le supprimer pour donner aux agences de l’eau les moyens de faire face aux défis liés au réchauffement climatique.
Les députés du groupe Socialistes et apparentés sont attachés au principe « l’eau paie l’eau ». La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 2067. Les Français, en payant leur facture d’eau, finissent par renflouer le budget de l’État – ce qui peut se discuter à l’infini, nous le comprenons. Je ne répéterai pas tout ce qui a été dit : ce mécanisme de plafond mordant remet en cause le principe « l’eau paie l’eau », et les agences perdront plus de 1 milliard d’euros. Notre amendement vise donc, comme les précédents, à supprimer ce plafond. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement no 2085. Il faut, en effet, préserver les moyens des agences de l’eau. Nous en venons à une deuxième série d’amendements identiques, toujours en discussion commune.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 254. Aujourd’hui plus que jamais, les agences de l’eau ont besoin de moyens pour aider les collectivités locales à investir dans l’assainissement, dans la biodiversité, mais aussi dans la rénovation de leur réseau parfois vieillissant. Je pense notamment aux collectivités de montagne, dont les réseaux sont très étendus, car ils doivent réunir plusieurs villages. Les coûts sont très importants et ne peuvent absolument pas être supportés par ces seules collectivités : sans accompagnement, des travaux ne seront pas réalisés, des rénovations ne seront pas menées à bien ; il y aura des fuites, et donc du gaspillage d’eau.
Depuis deux ans, les agences ont dû radicalement revoir à la baisse leur accompagnement des collectivités, en raison des ponctions budgétaires de l’État. Je le constate sur mon territoire : il y a des projets de nos communes qui ne sont plus menés à bien en raison des tensions budgétaires.
L’intégralité des recettes des redevances de l’eau doit être utilisée pour remplir les missions et objectifs de ces agences, comme c’était le cas auparavant. La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l’amendement no 365. Les agences de l’eau ont besoin de moyens ; il serait préjudiciable à leur autonomie administrative et financière de limiter les budgets indispensables pour remplir leurs missions. La parole est à M. Charles de la Verpillière, pour soutenir l’amendement no 559. Il est défendu. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 879. Défendu également. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ? Lorsque les conditions de financement des agences de l’eau ont été modifiées, un certain nombre d’élus, dont j’étais, ont voulu savoir si les ressources maintenues étaient suffisantes. Nous avons travaillé cette question aussi bien avec Barbara Pompili, présidente de la commission du développement durable, qu’avec Martial Saddier, qui appartient au groupe Les Républicains.
Nous sommes arrivés aujourd’hui, je crois, à un équilibre. Le projet de loi modifie le plafond de ressources des agences de l’eau uniquement pour tirer les conséquences de la création de l’Agence française pour la biodiversité. À périmètre constant, le budget des agences de l’eau est donc stable.
J’émets donc un avis défavorable à tous les amendements qui proposent soit de déplafonner les taxes affectées aux agences de l’eau, soit de relever le plafond.
J’ajouterai que, souvent, certains projets ne voient pas le jour, notamment dans des territoires ruraux ou de montagne, parce qu’ils sortent des critères fixés par certaines agences. Eh bien, faisons évoluer ces critères pour mieux prendre en considération les besoins des territoires. Nous travaillons d’ailleurs souvent avec des présidents d’agence de l’eau – j’ai cité à l’instant le nom de l’un d’entre eux, qui siège dans cet hémicycle. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. André Chassaigne. Vous dites que le budget est stable à périmètre constant, mais le périmètre a justement été modifié ! Dans la réalité, depuis un an, un texte précise que, désormais, les agences de l’eau devront financer en particulier les projets de stockage de l’eau dont les agriculteurs ont besoin. Leurs missions, bloquées dans ce domaine depuis 2015, ont été élargies. Et vous ne tenez pas compte de cette nouvelle responsabilité ! Soixante projets de stockage de l’eau ont été annoncés par le ministre de l’agriculture ; on fait des promesses au monde agricole, mais on sait très bien que les agences de l’eau n’auront pas les moyens d’apporter les financements nécessaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) La parole est à M. Martial Saddier. Je suis très souvent intervenu depuis deux ans, pour parler des agences de l’eau, dans cet hémicycle et ailleurs – je salue d’ailleurs quelques collègues qui siègent dans les comités de bassin, dont notre rapporteur général du budget.
Je comprends les amendements qui tendent à supprimer le plafond mordant. Mais, par honnêteté intellectuelle, je dois faire quelques rappels ce soir.
Tout d’abord, mes chers collègues, je dois vous remercier car il y a deux ans, nous n’étions que trois dans cet hémicycle pour défendre les agences de l’eau ; je salue donc tous les parlementaires, de toutes les sensibilités, qui sont intervenus à ce sujet. Ce sont là autant de signaux, monsieur le ministre, qu’il faut préserver les ressources de ces agences, afin de protéger l’eau et la biodiversité.
Mais l’opération qu’effectue le Gouvernement – en toute transparence, avec les présidents de comités de bassin et les directeurs des agences de l’eau – permet de maintenir un budget équivalent à celui de l’année dernière. Le plafond mordant, c’est une autre discussion ; mais, alors que nous avions des craintes l’an dernier en raison de la baisse du prix du permis de chasse, je me dois de rappeler que nous avons été entendus sur ce point.
À quelques euros près, les agences de l’eau auront le même budget que l’année dernière. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.) Très bien ! La parole est à M. Dino Cinieri. Pour rebondir sur ce qui vient d’être dit, je voudrais dire qu’il est essentiel de préserver les moyens de nos agences de l’eau, qui sont d’importants acteurs de la préservation des ressources et qui accompagnent les projets de nos territoires. Elles ont déjà été beaucoup mises à contribution sous la précédente législature, alors qu’un travail immense doit être accompli pour remettre en état les réseaux d’eau.
Élu d’un département dans lequel toutes les communes n’ont pas accès au réseau d’eau, je peux vous dire qu’il s’agit là d’un sujet sensible. (Les amendements identiques nos 98, 190, 310, 402, 644, 733, 877, 1319, 1888, 2066, 2067 et 2085 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 254, 365, 559 et 879 ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de nombreux amendements, nos 2251, 100, 191, 312, 403, 549, 878, 1125, 1297 et 2070, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 100, 191, 312, 403, 549 et 878 d’une part, nos 1125, 1297 et 2070 d’autre part sont identiques.
La parole est à Mme Sabine Rubin, pour soutenir l’amendement no 2251. J’ai bien entendu que le rapporteur général refusait non seulement de supprimer, mais même de relever le plafond des taxes affectées aux agences de l’eau.
Par cet amendement, nous insistons malgré tout pour porter le plafond de ressources à son niveau de 2018, c’est-à-dire 2,3 milliards au lieu des 2,1 milliards fixés par le projet de loi. Cela a été brillamment dit et redit : les missions des agences de l’eau se diversifient, et elles sont de plus en plus complexes, alors que leurs effectifs diminuent.
Par ailleurs, si notre amendement est comparable aux suivants, l’originalité de notre démarche est de prévoir une compensation de la perte de recettes pour l’État par l’augmentation du produit des redevances liées à la chasse : nous proposerons en effet en seconde partie de porter également celles-ci à leur niveau antérieur, c’est-à-dire à 72 millions au lieu des 46 millions prévus. Le Président de la République a voulu diminuer ces redevances ; nous proposons d’annuler cette diminution et d’affecter la différence aux agences de l’eau. Nous en venons à une première série d’amendements identiques.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 100. Il est défendu. La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 191. L’amendement précédent supprimait le plafond mordant ; celui-ci se contente de le rehausser. Je lance une alerte : le secteur de l’eau et de l’assainissement en France s’engage dans une impasse économique ! Moins de moyens pour les agences de l’eau, c’est moins de financement pour les projets sur le terrain. La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 312. J’irai dans le même sens. Les agences de l’eau doivent aujourd’hui gérer à la fois le petit cycle de l’eau, qui subit de plein fouet les effets du dérèglement climatique, mais aussi le grand cycle de l’eau, et ce avec des moyens qui ont été réduits de programme en programme. Prenons conscience du fait que l’urgence climatique touche d’abord la ressource en eau et qu’il faut nous donner, à travers les agences de l’eau, les moyens de gérer cette ressource. Les amendements identiques nos 403 de Mme Lise Magnier et 549 de M. Bertrand Pancher sont défendus.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 878. C’est un amendement de repli par rapport au précédent. Les enjeux sont devant nous, et la gestion de l’eau va devoir relever de très nombreux défis. L’abaissement du plafond au niveau proposé n’est pas du tout opportun. Cet amendement tend donc à revenir à un niveau correspondant aux moyens annuels dont les agences de l’eau disposaient pour la période 2013-2018. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 1125. Il s’agit de la réutilisation des eaux usées traitées. C’est un sujet très important puisque l’objectif de multiplier par trois les quantités d’eaux usées traitées et réutilisées a été évoqué dans les conclusions des assises de l’eau.
Nous devons également répondre à la question des moyens des agences de l’eau, puisque, on le sait, les départements sont souvent obligés, hélas, de compenser cette perte de moyens pour l’ensemble des projets relatifs à l’eau et à son assainissement dans les territoires. L’amendement no 1297 de M. Stéphane Viry est défendu.
La parole est à M. Alain David, pour soutenir l’amendement no 2070. Cet amendement de repli vise à relever de 100 millions d’euros le plafond des ressources affectées aux agences de l’eau. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ? Il est défavorable, pour les raisons exposées précédemment. (L’amendement no 2251, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 100, 191, 312, 403, 549 et 878, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 1125, 1297 et 2070, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Marjolaine Meynier-Millefert, pour soutenir l’amendement no 2497. Je propose que la totalité des recettes de la vente des quotas carbone, soit 920 millions d’euros, soit fléchée vers la rénovation énergétique en général, et vers l’Agence nationale de l’habitat – ANAH – en particulier. C’était le cas auparavant, puis ces recettes fléchées ont été plafonnées à 420 millions. Ce sont donc 500 millions qui retournent au budget général, alors que nous cherchons des solutions pour donner à l’ANAH les moyens d’accélérer la lutte contre la précarité énergétique, et, en même temps, des solutions pour garder les ménages des neuvième et dixième déciles engagés dans la transition énergétique de manière ambitieuse, notamment grâce au crédit d’impôt pour la transition énergétique – CITE.
Non seulement le fléchage de ces 500 millions vers l’ANAH serait plus lisible et plus acceptable pour nos concitoyens, qui demandent, avec raison selon moi, que les taxes écologiques financent des mesures écologiques, mais ce serait aussi un moyen budgétaire de maintenir le CITE à son niveau actuel et d’augmenter le budget de l’ANAH.
Dans la mesure où ces recettes sont en hausse, il semble pertinent qu’elles soient mises au service de la rénovation énergétique des bâtiments, dont le Gouvernement a fait l’une des priorités de l’acte II du quinquennat. Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? La raison pour laquelle je ne peux pas être d’accord – je vous demande donc de retirer cet amendement, faute de quoi mon avis sera défavorable –, c’est que la trésorerie de l’ANAH est très importante : en 2018, elle atteignait 470 millions d’euros ; elle se situe, à la fin de 2019, à 330 millions. Si la question d’un fléchage des quotas carbone devait se poser, ce serait, comme pour le fonds chaleur, à partir de 2021, peut-être au profit du futur plan chaudières de l’ANAH, dont vous devez être informée. Quoi qu’il en soit, nous partageons vos objectifs. La parole est à Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Les budgets de l’ANAH sont effectivement en hausse, mais c’est aussi, précisément, parce que l’on transforme une partie du CITE en primes. Autrement dit, pour renforcer la lutte contre la précarité énergétique, on augmente les budgets de l’ANAH, et c’est pour renforcer ces budgets que l’on prive, en contrepartie, le CITE d’une partie de ses financements.
Or il n’est pas nécessaire de ponctionner les crédits alloués au CITE, puisque ces quotas carbone nous fournissent des crédits disponibles, lesquels, encore une fois, sont en hausse depuis plusieurs années : ils atteignent 920 millions d’euros cette année, et s’élevaient déjà à 780 millions l’année dernière. Or, je le répète, la part fléchée vers l’ANAH est écrêtée chaque année à 420 millions. Ainsi, 300 millions ont été reversés au budget général l’année dernière, et 500 millions le seront cette année.
Nous avons donc les moyens de financer la transition énergétique en même temps pour les foyers aisés et pour les foyers précaires, donc de lutter à la fois contre la précarité énergétique et contre le changement climatique. Les deux politiques doivent être menées de front, avec des budgets suffisants des deux côtés. La parole est à M. Charles de Courson. Permettez-moi, ma chère collègue, de ne pas être tout à fait d’accord avec vous. Lorsque la vente aux enchères des quotas carbone a été instituée, elle a rapporté 500 millions d’euros. Étant alors dans l’opposition, j’avais expliqué au ministre de l’agriculture de l’ancienne majorité que 20 % du produit de cette vente, soit 100 millions, devraient revenir à une politique forestière.
Pourquoi 20 % ? C’est tout simple : les forêts françaises absorbent 20 % du carbone dégagé par les activités de notre pays. Ces 100 millions permettraient de conduire une vraie politique forestière. Il est dommage que M. le ministre de l’agriculture nous ait quittés pour quelques instants… Il va revenir ! Oui… En tout cas, ce serait à lui d’essayer de persuader le ministre chargé du budget que 20 % de ces sommes reviennent à la filière bois, afin qu’une véritable politique forestière soit possible. (L’amendement no 2497 n’est pas adopté.) Je suis saisi d’un amendement no 2403 qui fait l’objet d’un sous-amendement no 3096.
La parole est à M. Éric Woerth, pour soutenir l’amendement. Il s’agit de l’Autorité des marchés financiers – AMF. Benjamin Dirx et moi-même avons mené une mission d’information sur l’activisme actionnarial ; des sociétés françaises sont, d’une manière ou d’une autre, attaquées par des fonds, souvent étrangers.
L’idée est de rehausser la capacité de travail de l’AMF. On ne peut pas vouloir que Paris devienne une grande place financière au moment du Brexit en ayant un superviseur qui est probablement l’un des moins dotés des grands marchés financiers. C’est le cas par rapport à l’Autorité fédérale de supervision financière allemande – BaFin –, mais aussi par rapport aux autorités de supervision luxembourgeoise et britannique, pour ne rien dire, évidemment, des États-Unis.
Nous avons besoin d’une AMF renforcée pour mener toute une série de travaux sur les activistes. Le temps de décision de l’AMF est aujourd’hui totalement décorrélé du temps économique.
Ses ressources proviennent notamment d’une taxe affectée prélevée sur les entreprises qu’elle est censée contrôler, et qui rapporte 120 millions d’euros. Nous proposons par cet amendement que le budget de l’AMF atteigne ce niveau en trois ans, donc qu’il passe de 99 millions à 120 millions. Cela permettrait à l’AMF de figurer parmi les superviseurs à peu près correctement dotés, avec des moyens suffisants.
Cet amendement est nécessaire et ne coûterait pas d’argent supplémentaire. Certes, ces sommes n’iraient pas au budget général, mais, selon la logique que j’indiquais tout à l’heure, iraient là où elles doivent aller. Ce ne serait donc pas de l’argent détourné de son objet, comme c’est souvent le cas aujourd’hui avec les taxes affectées, par lesquelles on détourne de leur objet des moyens financiers. Cela permettrait à l’AMF d’exercer son rôle dans des conditions à peu près efficaces dans les années qui viennent. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir le sous-amendement no 3096. Je partage la préoccupation du président Woerth. Nous avons entendu le président de l’AMF, qui nous a fait part des difficultés qu’il risquait de rencontrer, ainsi que de la différence entre l’AMF et les régulateurs des marchés financiers des autres pays. Je propose simplement une trajectoire plus douce : le budget de l’AMF connaîtrait une augmentation moindre la première année et atteindrait 110 millions d’euros en 2022. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est défavorable, et je voudrais m’en expliquer quelques instants. J’ai reçu le président Ophèle à de nombreuses reprises et nous avons conclu un accord, si j’ose dire, sur une trajectoire d’augmentation des moyens de l’AMF – j’ai ai discuté en aparté avec M. le président de la commission des finances. Cette augmentation est réelle, puisqu’il s’agit de 2,5 millions d’euros par an, auxquels il faut ajouter une dizaine d’équivalents temps plein – ETP – supplémentaires.
L’AMF a donc les moyens de travailler et d’être la structure dont a besoin la place de Paris – besoin justement souligné par le travail que vous avez conduit avec M. Benjamin Dirx. Pour avoir échangé avec le président de l’AMF, je ne crois pas, d’ailleurs, monsieur le président, que votre demande corresponde à la sienne.
Je me permettrai en outre de corriger un peu votre propos, monsieur le président. Comme vous attendiez sans doute l’argument du ministre de l’action et des comptes publics, vous avez dit que cet amendement ne coûterait rien. Or il aurait bel et bien un coût, car ce qui ne va plus au budget général creuse évidemment notre déficit – modestement, certes, en l’occurrence, puisqu’il s’agit de quelques millions d’euros. Vous souriez, monsieur le président, j’en déduis que c’était là un argument de séance… Le déficit, disais-je, s’en trouverait accru, puisqu’il s’agirait d’une affectation à l’objet. D’où la question du plafonnement des taxes affectées.
Le débat n’est pas médiocre, mais le Gouvernement souhaite s’en tenir à l’augmentation déjà prévue des crédits de l’AMF, qui est importante, de même que celle de ses ETP. Tous les opérateurs aimeraient avoir les mêmes augmentations. Je suis donc également défavorable au sous-amendement de M. le rapporteur général. La parole est à Mme Émilie Cariou. Nous avions adopté cet amendement à la suite d’un rapport qui soulignait l’importance du rôle de l’AMF en matière de contrôle, notamment de la déontologie financière, mais aussi de surveillance des marchés.
J’entends ce que vient de nous dire le ministre : une trajectoire a été négociée avec l’AMF – une maison que je connais bien –, prévoyant déjà une augmentation de 2,5 millions d’euros de ses ressources et l’attribution de nouveaux ETP. J’appelle donc à rejoindre la position du ministre et à s’en tenir à cette trajectoire négociée. La parole est à M. le président de la commission des finances. Je note, sans vouloir allonger le débat, que la différence entre la position du Gouvernement et notre proposition sous-amendée par le rapporteur général – qui souhaite diviser par deux l’augmentation que nous demandons – s’établit peu ou prou à un million d’euros par an. Si l’on table, pendant au moins trois ans, sur les 2,5 millions par an que vous annoncez, l’écart est d’un million. On peut considérer que notre position est mesquine par rapport à cette trajectoire, ou l’on peut considérer que le Gouvernement est mesquin par rapport à la position qui est la nôtre. (Le sous-amendement no 3096 n’est pas adopté.) (L’amendement no 2403 n’est pas adopté.) La parole est à M. Xavier Roseren, pour soutenir l’amendement no 2114. Nous débattons chaque année du financement des centres techniques industriels – CTI – et des comités professionnels de développement économique – CPDE. L’année dernière, lors de l’examen du budget, Olivia Grégoire et moi-même avions obtenu que la baisse des plafonds de la taxe affectée s’accompagne d’une réduction de son taux.
Cette année, lors du printemps de l’évaluation, nous avons insisté, dans notre rapport sur le développement des entreprises et la mission « Économie », sur la politique industrielle. À l’occasion de la présentation de ce rapport devant la commission des finances, la secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher a pris l’engagement de maintenir le financement des CTI et des CPDE pour 2020. Le budget que nous examinons respecte cet engagement, et je tiens à vous en remercier.
Cependant, comme nous l’avons relevé dans notre rapport, et comme l’a indiqué notre collègue Anne-Laure Cattelot à l’issue de sa mission, le plafonnement de la taxe affectée aux CTI et CPDE n’a pas vraiment de sens. Le déplafonnement permettrait aux CTI de mieux exercer leur mission de service public et, surtout, de mieux accompagner nos PME et TPE.
Nous avons bien noté que le déplafonnement était conditionné à la signature d’un contrat d’objectifs et de performance – COP. C’est pourquoi nous proposons de déplafonner la taxe uniquement pour les CTI et les CPDE dont le COP a de grandes chances d’être signé avant la fin de l’année. Vous l’aurez peut-être noté, mes chers collègues, le dérouleur connaît quelques ratés ce soir. Sachez que le dossier en ma possession et les amendements que j’appelle sont évidemment dans le bon ordre et que les tablettes fonctionnent correctement. Cela n’affecte donc pas le bon déroulement de nos débats.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement ? Je ne vois pas, dans le dérouleur, l’amendement no 3107 du Gouvernement ; peut-être vient-il bien après, je l’ignore. Toujours est-il que je propose à M. Roseren de retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement, qui tend à déplafonner les taxes affectées au centre technique des industries mécaniques et du décolletage – CETIM – et au centre technique industriel de la construction métallique – CTICM. Je ne sais pas ce qu’il en est advenu : il est apparu brièvement puis il a disparu. Si vous pouviez par magie le faire réapparaître, monsieur le président… Je crains de ne pas être magicien, monsieur le rapporteur général. En l’état, je comprends que vous êtes défavorable à l’amendement. Je demande son retrait. À défaut, mon avis sera effectivement défavorable. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement. Il est défavorable. Les amendements identiques nos 1992 et 2461 ainsi qu’un autre qui sera examiné plus tard sont plus ciblés. Celui de M. Roseren est trop large. C’est pourquoi j’en demande le retrait, au profit des amendements que j’ai mentionnés. Retirez-vous l’amendement, monsieur Roseren ? Oui. Anne-Laure Cattelot et moi-même avons effectivement déposé des amendements plus précis, qui seront examinés sous peu. (L’amendement no 2114 est retiré.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1992 et 2461.
Monsieur Roseren, vous conservez la parole pour soutenir l’amendement no 1992. Dans le même esprit que l’amendement précédent, il s’agit de maintenir le financement des CTI et des CPDE afin d’améliorer l’accompagnement des TPE et PME. Pour ce faire, il est proposé de déplafonner la taxe affectée, sous réserve de la signature d’un COP.
L’amendement vise à réserver le déplafonnement au centre d’études et de recherches de l’industrie du béton – CERIB – et au centre technique de matériaux naturels de construction – CTMNC. La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l’amendement no 2461. Monsieur le rapporteur général, je vous rassure, les amendements sont à venir, mais, je ne sais pourquoi, ils ont été classés de manière un peu bizarroïde. Les différents amendements relatifs aux CTI sont disséminés un peu n’importe comment dans la liste des amendements à l’article, car ils sont regroupés par catégorie de centres industriels.
Le Premier ministre m’a confié, ainsi qu’à deux industriels, en octobre dernier, une mission sur les plateformes d’accélération vers l’industrie du futur, afin de définir les outils d’une politique industrielle 4.0. Il en ressort que les CTI, répartis sur l’ensemble du territoire et par filière professionnelle, possèdent deux atouts majeurs : ils existent et ils sont le parfait outil de transfert de la recherche appliquée à des modèles d’industrialisation. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons les valoriser.
Le Gouvernement a aimablement accepté de revoir sa philosophie sur les taxes affectées à ces organismes. Après avoir reconnu que la contribution volontaire obligatoire n’était pas un mode de financement pérenne pour eux, il a consenti à déplafonner les taxes affectées sous condition d’un COP abouti pour chacun des centres industriels. En l’occurrence, l’amendement concerne le CERIB et le CTMNC. Le but est de faire des CTI les bras armés de notre politique industrielle. D’autres centres techniques seront visés dans les amendements à venir. Madame Cattelot, le classement n’est pas fait de manière bizarroïde, ni par catégorie de centres industriels, mais, sur ce texte, comme sur tous les autres, en fonction des alinéas auxquels se rapportent les amendements.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ? Je cherche toujours l’amendement du Gouvernement, je vais finir par le trouver. En attendant, mon avis est favorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Favorable. La parole est à Mme Annie Genevard. L’avis est favorable, je m’en réjouis pour les filières du béton et des matériaux naturels de construction, mais quelque chose m’échappe : le ministre, Gérald Darmanin, nous expliquait il y a peu à quel point le principe même des taxes affectées était mauvais et voilà que, s’agissant du béton et de la construction, il redevient un bon principe. Si le principe de la taxe affectée est bon pour le béton et la construction, pourquoi ne le serait-il pas pour le vêtement, le cuir, l’horlogerie ou la bijouterie, pour toutes ces filières industrielles qui sont très utiles en matière d’emploi, de rayonnement de la France et d’innovation technologique ? Il y a manifestement là une contradiction qui est non seulement incompréhensible mais je dirais, à bien des égards, intellectuellement malhonnête. La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot. Cette intervention me permet de préciser la philosophie qui a guidé le Gouvernement après sa lecture du rapport. En effet, le principe des taxes affectées ne correspond guère à la philosophie de Bercy – le ministre le redira sans doute. En revanche, nous nous sommes demandé, en collaboration avec le Conseil des prélèvements obligatoires notamment, quelle était la fiscalité la plus appropriée pour faire fonctionner les CTI et les CPDE, quel que soit leur domaine. Nous avons dressé la liste de l’ensemble des politiques industrielles et des CTI – il n’y a pas que le béton et les matériaux naturels de construction, vous trouverez ceux qui vous intéressent dans les prochains amendements, madame Genevard. Nous sommes arrivés à la conclusion que la taxe affectée était utile car elle permet une mutualisation.
Pourquoi Bercy a-t-il accordé de la souplesse dans cette matière ? Parce que la taxe affectée permet d’obtenir des contributions importantes de la part des grands groupes importateurs et exportateurs et que les bénéficiaires en sont le tissu des PME françaises. Cet outil nous a donc paru le plus vertueux même s’il déroge à l’orthodoxie budgétaire habituelle.