Première séance du mardi 12 novembre 2019
- Présidence de M. Richard Ferrand
- 1. Questions au Gouvernement
- Laïcité
- Service national universel
- Séisme en Ardèche
- Projet de loi de finances rectificative pour 2019
- Réforme des retraites
- Moyens de l’hôpital public
- Immolation d’un étudiant à Lyon
- Évacuation de camps de migrant
- Retour de djihadistes en France
- Lutte contre le démarchage téléphonique
- Situation en Haïti
- Avenir des trains du quotidien
- Situation en Bolivie
- Politique migratoire
- Hommage aux soldats morts en opérations extérieures
- Moyens de l’hôpital public
- Moyens de l’hôpital public
- Maîtrise de la dépense publique
- Conseil national consultatif des personnes handicapées
- Maladie de Lyme
- Précarité étudiante
- Perspectives du triangle de Gonesse
- Jeux olympiques du sport scolaire de 2022
- Rapatriement de djihadistes français
- Suppression d’emplois chez Mahle Behr
- Précarité étudiante
- 2. Projet de loi de finances pour 2020
- Seconde partie (suite)
- Culture
- Mme Dominique David, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Gilles Carrez, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
- Mme Marie-George Buffet
- Mme Aurore Bergé
- Mme Brigitte Kuster
- M. Laurent Garcia
- Mme Valérie Rabault
- M. Pierre-Yves Bournazel
- M. Olivier Falorni
- M. Michel Larive
- M. Franck Riester, ministre de la culture
- M. Stéphane Testé
- M. Franck Riester, ministre
- Mme Michèle Victory
- M. Franck Riester, ministre
- Mission « Culture » (état B)
- Après l’article 75
- Culture
- Seconde partie (suite)
- 3. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de M. Richard Ferrand
M. le président
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Questions au Gouvernement
M. le président
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Laïcité
M. le président
Avant de donner la parole à M. Damien Abad pour poser la première question, je tiens à le féliciter de son élection à la présidence du groupe Les Républicains. Nous lui adressons tous nos vœux pour l’exercice de sa mission. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Vous avez la parole, monsieur le député.
M. Damien Abad
Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le Premier ministre, où est passée la promesse du Président de la République de réconcilier les Français ? La République n’a jamais été autant fracturée au sein de ses territoires, l’unité de la société n’a jamais été autant attaquée, attaquée par une montée des communautarismes et de l’islamisme radical, comme ce fut encore malheureusement le cas ce dimanche, avec cette manifestation qui est venue défier la République de manière intolérable.
Face à de telles menaces, vous ne pouvez plus tergiverser, vous ne pouvez plus hésiter, vous ne pouvez plus reculer. Vous et le Gouvernement, vous êtes devenus prisonniers de votre propre marque de fabrique, cette politique du « en même temps » qui fait de l’indécision votre principe d’action et de l’inaction votre seul horizon. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Vous renoncez à réformer notre pays et vous nous plongez dans la paralysie. Vous dîtes vouloir une grande réforme des retraites mais, « en même temps », vous reportez son application aux calendes grecques. Vous dites vouloir baisser les impôts mais, « en même temps », vous augmentez le déficit et la dette, donc les impôts de demain. Vous dites que l’immigration est un problème mais, « en même temps », vous réduisez le budget consacré à la lutte contre l’immigration irrégulière et vous augmentez le nombre de régularisations.
Mme Marine Le Pen
Il a raison.
M. Damien Abad
Toutefois, c’est sur la question de la laïcité que votre obsession du « en même temps » vous paralyse le plus. La lutte contre le fondamentalisme religieux et l’islam politique ne laisse pas de place pour le « en même temps », et nous attendons de vous des actes clairs et des réponses concrètes.
Monsieur le Premier ministre, dites-nous si, oui ou non, vous allez rétablir la laïcité partout sur le territoire de la République. Dites-nous si, oui ou non, vous êtes prêt à interdire les listes communautaristes dès les prochaines élections municipales. Quand renoncerez-vous à votre silence coupable et à vos ambiguïtés permanentes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur quelques bancs du groupe UDI-Agir. – Mme Agnès Thill applaudit également.)
M. le président
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Monsieur le président Abad, avant de répondre à vos nombreuses questions, permettez-moi de vous féliciter, à mon tour, pour votre élection à la tête du groupe Les Républicains de l’Assemblée nationale. J’adresse également un message à tous ceux qui s’y sont présentés, ainsi qu’à M. Christian Jacob, qui vous a précédé dans vos fonctions. J’espère que nous aurons l’occasion de travailler ensemble, par-delà nos divergences, dans le cadre d’échanges aussi directs que respectueux, comme nous en avons pris l’habitude.
Au détour d’une de vos nombreuses questions – je ne veux pas jouer sur les mots –, vous m’avez demandé si nous souhaitions réinstaurer – je ne me rappelle plus le mot précis que vous avez employé – la laïcité sur tout le territoire. Eh bien, je ne tergiverse pas sur la question de la laïcité, je ne recule pas : j’explique le droit français et notre conception de la laïcité, laquelle est un principe de liberté et de neutralité, qui exige que, sans aucune naïveté, nous ne fassions pas référence à la confession de tel ou tel citoyen mais bien que nous nous adressions à la communauté nationale dans son ensemble.
Je tiens également à rappeler, même si je sais que cette aspect-là de la question ne peut échapper à un député siégeant sur vos bancs, que la loi de 1905 ne s’applique pas à la totalité du territoire national, les deux départements alsaciens et la Moselle n’y étant pas soumis. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Je ne sache pas, d’ailleurs, que vous vouliez revenir sur cet état de fait. Ou alors, dites-le, ce serait intéressant. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Nous ne reculons pas et ne voulons pas reculer sur la laïcité. Nous l’entendons clairement : principe de liberté pour les citoyens, principe de neutralité pour les agents publics.
M. Michel Herbillon
Les Français attendent des décisions, monsieur le Premier ministre, pas des explications !
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Nous ne cédons rien sur le sujet. Lorsque le Parlement français a adopté le texte issu de la proposition de loi de Mme la sénatrice Françoise Gatel, visant à renforcer le contrôle sur la création des écoles hors contrat et à éviter la radicalisation au sein de l’école ou à côté de l’école, nous avons approuvé ce texte : aujourd’hui, nous l’appliquons.
Lorsque j’affirme vouloir lutter encore plus efficacement contre la déscolarisation, laquelle passe souvent par une scolarisation à domicile, en vérifiant que les obligations éducatives sont bien respectées non seulement par des contrôles physiques sur place mais aussi par un contrôle collectif des connaissances, je m’inscris exactement dans le combat que vous évoquez, celui de l’unité de la communauté nationale et du respect de la loi. C’est une des conditions indispensables de l’existence de notre communauté nationale.
Je le répète, la laïcité ne vient pas en plus, n’est pas un supplément d’âme : elle est la condition qui nous permet de vivre ensemble. Alors que nous ne sommes pas identiques et que nous ne croyons pas à la même chose, nous respectons la loi. L’État et les collectivités territoriales ne se mêlent pas de la religion, ni des confessions. Toute la loi et rien que la loi : telle sera toujours notre position, monsieur le président Abad. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Service national universel
M. le président
La parole est à M. Christophe Blanchet.
M. Christophe Blanchet
Monsieur le secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, le service national universel, dont vous êtes chargé, est un projet de société indispensable pour une France unie. Cet engagement du Président de la République est un projet ambitieux, aux retombées à court et moyen termes, fondé, avec nos jeunes et pour nos jeunes, sur un pacte de confiance réciproque.
Il est un projet nécessaire et utile pour passer du monde adolescent au monde adulte et donner les clefs de la réussite. Il est un projet d’avenir pour une société plus solidaire et plus fraternelle, engagée dans le respect et la défense des valeurs de la République.
Cette ambition nationale innovante est critiquée depuis le premier appel de juin dernier, sous le prétexte que le service ne concernait que 2 000 volontaires et que son coût était important. Or ce sont précisément déjà 2 000 jeunes qui se sont engagés à nos côtés et qui nous font confiance. Oui, notre jeunesse a un coût, mais elle n’a pas de prix. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.)
Aujourd’hui, les sceptiques spéculent encore sur le devenir de notre ambition, soulevant la question de la sanction qui doit être envisagée pour celles et ceux qui refuseraient de servir : c’est qu’ils ne comprennent pas l’essentiel. L’essentiel est que nous en sommes à la construction de ce projet, une construction née d’une page blanche et qui, montant en puissance en s’appuyant sur les retours d’expérience des phases pilotes, a vocation à rendre le SNU si valorisant, si attractif, si pertinent et si utile aux yeux des jeunes, qu’aucun d’entre eux ne puisse imaginer un seul instant ne pas le faire.
Ces phases pilotes ne sont pas des expérimentations, car on ne saurait envisager de revenir en arrière. Nous sommes en marche, en avant toute !
Monsieur le secrétaire d’État, pour continuer à construire, avec nos jeunes et pour nos jeunes, notre avenir commun, le futur de la nation, comment comptez-vous améliorer ce projet qui doit être, pour nous tous, une ardente obligation de tous les jours ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse
Monsieur le député, hier, des jeunes appelés du service national universel assistaient aux cérémonies du 11-novembre, aux côtés du Président de la République sous l’Arc de Triomphe. D’autres étaient présents aux cérémonies qui se déroulaient dans treize villes de France, afin d’honorer ce grand épisode de notre histoire.
Ils étaient le visage du service national universel,…
M. Pierre Cordier
Combien ça coûte ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État
…qui est un grand moment fédérateur, autour des valeurs de la République, de notre histoire et de notre mémoire, un moment à même également de donner à la jeunesse la capacité de se projeter dans l’avenir en s’engageant de façon utile aux autres, donc, à elle-même.
Vous avez employé le mot juste : cette phase de 2019 est une préfiguration visant à tester notre organisation et nos objectifs, en vue d’améliorer en permanence notre dispositif. C’est la raison pour laquelle Jean-Michel Blanquer et moi-même avons missionné des chercheurs, des sociologues et des statisticiens indépendants, qui ont suivi cette phase pilote du service national universel : ils ont remis leurs préconisations.
Elles visent à maintenir ce grand moment de creuset républicain, au service de l’engagement, qui a permis à des jeunes de vivre leur première expérience de mobilité,…
M. Pierre Cordier
Combien ça coûte ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État
…de découvrir d’autres territoires et de se projeter dans l’avenir avec une plus grande confiance.
Il convient évidemment d’améliorer plusieurs points : les plus concrets sont peut-être les plus simples, comme la densité des emplois du temps et des programmes. D’autres, plus importants, visent à rendre le service national universel encore plus participatif, plus interactif et plus pédagogique, au sens actif et non vertical du terme. Voilà à quoi nous allons nous atteler.
Dès l’an prochain, plusieurs dizaines de milliers de jeunes participeront au service national universel dans tous les départements. Nous continuerons de construire ce dispositif avec vous et les élus locaux qui y participent très directement, afin de mettre en valeur leur territoire et de donner un avenir à leur jeunesse. (Applaudissementssur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Séisme en Ardèche
M. le président
La parole est à M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac
Monsieur le Premier ministre, j’associe à ma question mes collègues Michèle Victory et Fabrice Brun.
Hier, à onze heures cinquante-deux, les communes de l’Ardèche achevaient paisiblement les commémorations quand la terre s’est mise à trembler. Des murs sont tombés, des balcons se sont décrochés, des cheminées ont traversé les toits. Le bilan humain relève du miracle, même s’il faut déplorer quatre blessés, dont un sérieux du côté drômois.
La commune du Teil a été la plus durement frappée, même si je n’oublie pas les communes de Viviers, d’Alba-la-Romaine, d’Aubignas, de Saint-Thomé et de Saint-Jean-le-Centenier, qui ont également été durement touchées. Je veux ici saluer le travail remarquable des gendarmes et des sapeurs-pompiers de l’Ardèche, qui ont fait la preuve de leur très grand professionnalisme, dans une situation de crise aussi dramatique qu’inédite dans ce territoire. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Monsieur le Premier ministre, j’ai vu hier après-midi des visages atterrés, des enfants apeurés. J’ai vu des personnes modestes en pleurs, lorsqu’il a fallu leur expliquer qu’elles ne rentreraient pas dormir chez elles. J’ai vu les yeux rougis du maire, Olivier Péverelli, qui avait mal à sa ville.
Maintenant, il faut faire face et réparer. On fera face, avec dignité et intelligence, comme on sait le faire en Ardèche. Toutefois la ville du Teil ne se relèvera pas toute seule. Si le conseil départemental est à ses côtés, elle aura aussi besoin de la solidarité nationale, car cette ville modeste n’a pas les moyens de se reconstruire. J’ai cru comprendre que le ministre de l’intérieur sera prochainement en Ardèche : c’est une bonne chose car sa parole est attendue.
Je vous demande d’ores et déjà qu’un premier fonds d’urgence soit débloqué sans délai pour aider la commune du Teil ; je vous demande également que l’état de catastrophe naturelle soit déclaré au plus vite et que les personnes privées ne soient pas soumises à d’interminables délais pour la prise en charge des réparations. Au nom des Ardéchois, je vous remercie.
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur
Un séisme de magnitude 5,4 sur l’échelle de Richter, dont l’épicentre était situé à proximité de la commune du Teil, s’est déclenché hier, à onze heures cinquante-deux, avec les conséquences que vous avez rappelées.
Avec Olivier Dussopt et Elisabeth Borne, et sous l’autorité du Premier ministre, nous avons immédiatement fait un point sur l’ensemble des forces d’intervention et de secours. Encadrées par les deux préfets directement concernés, elles étaient fortement mobilisées : 115 interventions ont eu lieu dans sept communes de la Drôme, et soixante-quinze sapeurs-pompiers ont mené soixante-seize interventions dans le département voisin de l’Ardèche, afin d’accompagner les citoyens et de protéger ceux qui devaient l’être. Une personne, qui a brutalement chuté d’un échafaudage, a été gravement blessée : mes pensées vont vers elle et ses proches, plongés dans l’inquiétude, même si son état de santé est plutôt rassurant.
Toutefois, comme vous l’avez souligné, des dégâts matériels importants ont déjà été constatés et, à l’heure où nous parlons, les évaluations se poursuivent. Environ 250 bâtiments ont été fissurés et un bâtiment non habité s’est totalement effondré. La très grande majorité des dégâts sont situés sur la commune du Teil : je m’y rendrai donc tout à l’heure, pour dresser un état des lieux précis avec l’ensemble des élus – au premier rang desquels le maire –, les préfets et les services de l’État, afin de déclencher au plus vite la commission qui devra se prononcer sur la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Je ne doute pas que cet état sera caractérisé, nous permettant de répondre aux besoins ; néanmoins, je souhaite respecter le cadre délibératif et l’examen scientifique qui doit être réalisé.
Je ne doute pas non plus que l’État, sous l’autorité de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, se mobilisera entièrement pour accompagner les collectivités dans leur reconstruction : il y va de notre dignité autant que des exigences portées par les habitants de votre département. Nous devons répondre activement à leur demande. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Projet de loi de finances rectificative pour 2019
M. le président
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, la commission des finances a examiné ce matin le projet de loi de finances rectificative pour 2019. La situation, nous la connaissons : même si la croissance résiste mieux que chez nos partenaires européens et que le chômage recule grâce aux créations d’emplois, le déficit public stagne à 2,2 % – sans compter l’effet temporaire de sortie du crédit d’impôts pour la compétitivité et l’emploi, le CICE –, conséquence prévisible des mesures de pouvoir d’achat adoptées cette année pour plus de dix milliards d’euros.
Dans un contexte de diminution des prélèvements obligatoires et de hausse de la dette, l’écart se creuse pourtant avec l’objectif, pris dans la loi de programmation des finances publiques, de ramener le déficit public à 0,3 % en 2022. Certes, les règles fixées par le traité de Maastricht peuvent paraître obsolètes et ne permettent pas d’apprécier l’effort d’investissement des États dans l’économie, mais nous nous approchons dangereusement du seuil de déclenchement du mécanisme de correction.
Le groupe MODEM et apparentés ayant largement soutenu les décisions prises l’année dernière, je vous interrogerai en son nom sur deux points : tout d’abord, quand la trajectoire des finances publiques sera-t-elle mise en conformité avec la réalité des engagements pris ? Afin de faciliter notre travail de contrôle parlementaire, nous présenterez-vous une loi rectificative de programmation des finances publiques ?
Par ailleurs, peut-on espérer une réforme de la fiscalité pour taxer mieux toutes les plus-values et plus justement certains stocks, tant les marges de manœuvres sont importantes en la matière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics
Je souhaite tout d’abord saluer le très important travail que vous menez à la commission des finances depuis désormais deux ans et demi, ainsi que votre compétence reconnue en matière d’immobilier de l’État. Depuis que nous travaillons ensemble, le Gouvernement a la chance de pouvoir compter sur vous pour l’aider, l’aiguillonner, le questionner aussi parfois sur des sujets précis.
Y aura-t-il une loi de programmation des finances publiques ? Comme le Premier ministre l’a indiqué aux rapporteurs généraux et présidents des deux commissions parlementaires des finances, elle sera présentée au printemps prochain, en avril, à l’aune du Brexit et de la réforme des retraites, qui influenceront très fortement nos comptes publics. Elle permettra aux parlementaires de vérifier les engagements pluriannuels pris par le Gouvernement.
Vous m’interrogez également sur la date à laquelle la France tiendra enfin les engagements pris depuis de très nombreuses années. Pour la première fois depuis plus de quinze ans, nous sommes enfin parvenus à la fois à sortir d’un déficit excessif, en le ramenant sous le seuil de 3 % dès la première année de mandat du Président de la République…
M. Éric Diard
C’est faux !
M. Gérald Darmanin, ministre
…et à être écoutés par l’Union européenne, grâce à plusieurs engagements de transformation très forts qui ont en effet montré que, malgré la crise sociale et la baisse de la croissance économique – dans la zone euro de manière générale, mais singulièrement en France –, nous tenons nos engagements. Certes, nous ne remplissons pas l’engagement sur l’ajustement structurel inscrit dans le traité de Maastricht par le Conseil de l’Union européenne, qui recommandait de limiter les dépenses à 0,6 % du PIB – je crois que le ministre de l’économie et des finances, qui porte notre voix en Europe, l’avait évoqué devant vous. Mais le but que nous devons tous atteindre est la diminution du déficit nominal et des impôts.
Vous nous demandez de contribuer à travailler pour limiter cet endettement, monsieur le ministre…
M. Pierre Cordier
Il va prendre votre place, il est meilleur !
M. Gérald Darmanin, ministre
…monsieur le député, pardon !
Je sais que le MODEM y est très attaché, et nous y travaillons.
Réforme des retraites
M. le président
La parole est à M. Éric Woerth.
M. Éric Woerth
Monsieur le Premier ministre, le sujet des retraites stresse la société française ; avec une réforme d’une grande complexité, incluant beaucoup de détails – et donc beaucoup de diables ! –, le Gouvernement stresse plus encore les Français. Alors que vous devriez être d’une clarté extrême, vous entretenez une confusion extrême et plus personne n’y comprend rien.
Sur la forme, la méthode est lunaire pour savoir qui sera concerné par la réforme et à partir de quand : s’appliquera-t-elle seulement aux nouveaux entrants, c’est-à-dire dans quarante ans – c’est la fameuse clause du grand-père ? Votre méthode consiste essentiellement à gagner du temps, alors même que vous travaillez à la réforme depuis deux ans déjà.
M. Maxime Minot
Eh oui !
M. Éric Woerth
Les débats parlementaires n’ont pas encore commencé qu’on assiste déjà à un double recul, sur l’âge légal et sur les régimes spéciaux. De report en report, cette réforme, censée être la mère de toutes les batailles, en deviendrait plutôt la grand-mère ! On prend un temps fou, alors qu’il est impératif de poursuivre les réformes entamées en profondeur ces dernières années.
Sur le fond, oui, il faut réformer ! Mais poser un mauvais diagnostic, c’est accoucher d’une mauvaise solution. Car non, notre système de retraite n’est pas globalement injuste : ce qui le serait, c’est de ne rien faire pour garantir son financement. Ce n’est pas au régime des retraites de venir à bout des inégalités salariales entre hommes et femmes ou des inégalités de carrières entre les Français ; il faut résoudre ces injustices bien avant, car le système de retraites ne saurait résoudre à lui seul toutes les injustices d’une vie.
Mme Valérie Lacroute
Très bien !
M. Éric Woerth
Le régime universel est un bien grand mot ; c’est surtout le meilleur moyen d’être universellement injuste. (Protestations sur les bancs du groupe LaREM.) Si votre méthode et vos idées sont confuses, c’est le symptôme d’un mal plus profond : vous ignorez ce que vous voulez faire exactement.
M. Patrick Hetzel
Ça navigue à vue !
M. Éric Woerth
Pour porter une réforme des retraites, toujours sensible, il faut du courage et de la clairvoyance. Un gouvernement ne peut réussir que si ses convictions sont fortes dans leur contenu et dans leur application. Je suis sûr, monsieur le haut-commissaire que vous êtes d’accord avec moi à ce sujet.
M. le président
La parole est à M. le haut-commissaire aux retraites.
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire aux retraites
Je dois d’abord rendre hommage à l’autorité avec laquelle vous exercez votre responsabilité de président de la commission des finances. Je rends également hommage, à vous et à d’autres, pour toutes les réformes engagées : en reculant l’âge de départ à la retraite de deux ans, vous nous avez rapprochés du déficit.
Vous avez parlé rapidité et courage.
M. Franck Marlin
On attend des réponses !
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire
Je peux porter témoignage de l’investissement total du Premier ministre et de son gouvernement qui, chaque semaine, se réunit pour rendre des arbitrages.
M. Pierre Cordier
Ah bon ? Lesquels ?
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire
La détermination est totale et l’objectif est clair. J’ai entendu la formule « Le régime universel […] est le meilleur moyen d’être universellement injuste. »
M. Stéphane Peu
Il commence à trembler.
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire
J’ai du mal à intégrer votre raisonnement, car notre volonté est bien de corriger les injustices et d’aboutir à un régime plus favorable pour les femmes, puisque nos propositions visent une réduction de 10 % à 20 % de l’écart actuellement constaté entre les hommes et les femmes.
Vous avez raison sur un point : le régime économique doit corriger les inégalités, car la retraite sera le reflet du travail.
M. Éric Ciotti
Et la clause du grand-père, alors ?
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire
Sur les plateformes, nos concitoyens sont très demandeurs de l’universalité, très demandeurs de mêmes règles pour tous, très demandeurs d’une majoration dès le premier enfant. (Protestations sur les bancs du groupe LR.)
Mme Valérie Lacroute
Ce n’est pas vrai !
M. Maxime Minot
Pipeau !
M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire
Par conséquent, monsieur Woerth, j’espère que vous nous rejoindrez dans le courage qui nous anime ! (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.)
Mme Constance Le Grip
Zéro !
Moyens de l’hôpital public
M. le président
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Madame la ministre des solidarités et de la santé, la situation de nos hôpitaux n’est plus tenable et les blouses blanches sont à bout. De plus en plus de services d’urgence et de personnels sont en grève ; jeudi 14 novembre, une journée de mobilisation importante est attendue. Médecins, infirmiers, internes : tous s’unissent et nous interpellent pour sauver l’hôpital public. La conférence nationale des doyens des facultés de médecine rejoint également le mouvement, en organisant une journée « Faculté morte ».
Si chacun sait que le ministère des solidarités et de la santé vit une situation difficile, voilà trente mois que vous êtes aux responsabilités et trente mois que la situation s’aggrave. Les solutions ne sont simples, les moyens clairement insuffisants, et ce n’est pas le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous venons d’adopter…
M. Alain Bruneel
Nous, nous ne l’avons pas voté !
M. Philippe Vigier
…qui nous permettra d’envisager sereinement l’avenir de l’hôpital public.
Les 750 millions d’euros annoncés en septembre lors du pacte de refondation des urgences ne sont que des redéploiements de crédits existants, et nous sommes toujours en attente du numéro unique d’appel d’urgence généralisé à tout le territoire. Au-delà du plan « Ma santé 2022 » et du virage ambulatoire que nous encourageons tous, nous devons répondre à l’appel des personnels hospitaliers : engagés quotidiennement, ils nous disent qu’ils n’en peuvent plus et qu’ils craignent pour leur sécurité et celle de leurs patients.
Un plan avait été annoncé pour novembre : nous y sommes ! Quelles mesures concrètes allez-vous prendre et comment allez-vous les financer ? L’effacement de la dette des hôpitaux n’étant pas à l’ordre du jour, allez-vous augmenter les moyens des hôpitaux et revaloriser les carrières ? Il y va de l’avenir de l’hôpital public !
M. Sébastien Jumel
Excellent !
M. le président
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre
La ministre des solidarités et de la santé étant retenue au Sénat pour la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je répondrai à sa place. J’en suis d’autant plus heureux que je ne méconnais en rien le caractère particulièrement sensible et délicat du sujet qu’est notre hôpital public. Il va mal, ceux qui le font vivre souffrent et le disent, sincèrement et directement. Il faut les entendre, car ils ne feignent pas.
Les multiples causes de la difficulté rencontrée par l’hôpital public, vous les connaissez – au fond, nous les connaissons tous : elles tiennent tout d’abord à la très rude régulation budgétaire qui l’affecte depuis dix ans. Cette régulation a-t-elle été trop rude ?
M. Sébastien Jumel
Ah oui !
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Il faudrait interroger tous ceux qui, à un moment, la jugeaient nécessaire.
M. Sébastien Jumel
Ah non !
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Il faut néanmoins reconnaître qu’elle a été très rude.
M. Sébastien Jumel
Ah oui !
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Elles tiennent également aux difficultés de recrutement, qui sont parfois les conséquences du nombre insuffisant de médecins formés durant de longues années. Vous le savez, cela nous a d’ailleurs conduits à revenir sur le numerus clausus. En effet, nous pensons que former plus de médecins dans les années qui viennent est une nécessité.
Finalement, cette difficulté traduit une organisation du système de soins – hospitaliers, mais également de ville, puisque les deux sont intimement liés – à bout et qu’il faut revoir dans son ensemble.
Plusieurs réponses ont d’ores et déjà été apportées. Tout d’abord, sur le plan financier, nous – la majorité – avons augmenté les tarifs hospitaliers, c’est-à-dire les recettes d’un certain nombre d’hôpitaux. Vous savez comme nous, monsieur le député, qu’ils ont baissé pendant dix ans, car il s’agissait de l’un des éléments de régulation budgétaire de l’hôpital public. Après neuf années de baisse, nous avons donc décidé cette année de les augmenter de 0,5 %.
M. Sébastien Jumel
C’est peanuts !
M. Édouard Philippe, Premier ministre
De 2014 à 2017, l’objectif national des dépenses d’assurance maladie – ONDAM – avait toujours été inférieur à 2 %. Nous l’avons relevé assez nettement et nous nous sommes placés sur une trajectoire qui a d’ailleurs été corrigée l’année dernière. Mais j’ai parfaitement conscience que donner des moyens supplémentaires est à la fois indispensable et non suffisant. C’est la raison pour laquelle la ministre de la santé et le Gouvernement se sont engagés à entreprendre des réformes de fond comme Ma santé 2022. Vous observerez, monsieur le député, que les professionnels de santé reconnaissent eux-mêmes que, pour l’hôpital public, le passage d’une tarification à l’acte à une tarification en partie fondée sur la pertinence de soins est extrêmement bienvenue.
M. Sébastien Jumel
À condition d’avoir le budget !
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Nombre d’entre eux la demandait d’ailleurs depuis longtemps sans obtenir quoi que ce soit. Nous nous lançons dans cette opération. La meilleure organisation entre la médecine de ville et la médecine hospitalière, que nous appelons de nos vœux et qui est prévue dans Ma santé 2022, va évidemment dans le bon sens. Le pacte de refondation des urgences est indispensable, qu’il s’agisse de son aspect immobilier – la disposition des services a son importance –, de la formation ou de l’organisation des services. Sans compter la suppression du numerus clausus que j’ai déjà citée.
Si la direction générale que nous avons fixée nous paraît bonne, nous devons régler la période de transition. C’est pourquoi, dans le plan hôpital qui sera annoncé prochainement, nous avons prévu des mesures pour l’attractivité des carrières. D’autres mesures concernent l’investissement car nous savons que la régulation budgétaire dans le monde hospitalier a conduit à une diminution de l’investissement dans l’immobilier mais aussi dans des matériels de soins et des équipements indispensables pour continuer à faire la médecine d’excellente qualité que nous aspirons tous à préserver dans l’hôpital public.
Des moyens supplémentaires seront nécessaires et nous nous sommes engagés à les fournir.
M. Marc Le Fur
Que faites-vous du respect du temps de parole, monsieur le Président ?
M. Édouard Philippe, Premier ministre
Nous travaillons avec les professionnels et d’autres acteurs du monde hospitalier à définir ce plan avec précision. Le moment venu, c’est-à-dire très prochainement, nous présenterons l’ensemble des mesures que nous entendons prendre.
Je suis heureux qu’à l’occasion de ces annonces, nous puissions discuter d’une richesse commune : l’hôpital public. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Immolation d’un étudiant à Lyon
M. le président
La parole est à Mme Danièle Obono.
Mme Danièle Obono
Il y a les chiffres : plus 400 000 pauvres en 2018 selon l’INSEE, en lien avec les mesures fiscales prises par votre Gouvernement. Il y a les faits : le Secours catholique alerte sur la précarité croissante des femmes, salariés, retraités, jeunes. Il suffit désormais de bien peu pour perdre pied. De petits incidents comme une perte de revenus, une facture plus élevée que prévu, des droits versés avec un peu de retard, peuvent vous faire basculer.
Il y a les basculements et en particulier celui de cet étudiant, un môme de vingt-deux ans, qui s’est immolé par le feu vendredi dernier, devant le centre régional des œuvres universitaires et scolaires – CROUS – de Lyon, et qui est actuellement entre la vie et la mort.
Il y a ses mots, implacables, qui accusent et obligent : « Aujourd’hui, je vais commettre l’irréparable », écrit-il. « Si je vise le bâtiment du CROUS à Lyon, ce n’est pas par hasard, je vise un lieu politique, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et, par extension, le Gouvernement. Cette année […] je n’avais pas de bourse, et même quand j’en avais, 450 euros mois, est-ce suffisant pour vivre ? Doit-on continuer à survivre comme nous le faisons aujourd’hui ? Et après ces études, combien de temps devrons-nous travailler, cotiser pour une retraite décente ? Pourrons-nous cotiser avec un chômage de masse ? »
Monsieur le Premier ministre, la précarité tue. Elle est une composante et une conséquence de vos politiques antisociales. À partir de combien de morts et de mortes y mettrez-vous un terme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse
Ce qui s’est passé à Lyon, vendredi dernier, est une tragédie. C’est un drame de voir un jeune chercher à mettre fin à ses jours en s’immolant. C’est un drame de lire ce qu’écrit ce jeune sur les difficultés qu’il rencontrait dans sa vie quotidienne au point de voir cet acte d’immolation comme une forme de solution.
Frédérique Vidal s’est rendue à Lyon, dès vendredi dernier, pour échanger avec la communauté universitaire. Une enquête a été diligentée afin de nous permettre de comprendre pourquoi la situation de ce jeune n’a pas été connue de l’université alors que les dispositifs d’urgence existants auraient peut-être pu l’aider dans son quotidien.
Vous interrogez le Gouvernement sur les conditions de vie des étudiants, un enjeu sur lequel nous travaillons depuis maintenant deux ans. En 2018, nous avons supprimé la cotisation de 217 euros que les étudiants devaient verser à la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Il y a deux mois, Frédérique Vidal a annoncé une augmentation des bourses pour un montant de 46 millions. (Mêmes mouvements.)
Nous avançons mais, évidemment, certains étudiants restent dans une situation difficile et nous devons continuer à agir. Au sein d’un collège, présidé par Frédérique Vidal et moi-même, nous réfléchissons au revenu universel d’activité pour les jeunes. Nous allons continuer à y travailler. (Mêmes mouvements.)
M. le président
La parole est à Mme Danièle Obono.
Mme Danièle Obono
Monsieur Premier ministre, votre silence est assourdissant. Ce jeune homme a donné les réponses que vous cherchez et il accuse votre politique.
Je ne parlais pas et il ne parlait pas de la condition de vie des étudiants. Il parlait de vos politiques qui produisent la précarité. Les rapports et les statistiques le disent encore et encore. Cette politique va faire de nouveaux morts.
Je crois que beaucoup de gens ont compris qu’en vérité, vous n’en avez rien à faire de leur vie. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Vous préférez les laisser crever (Mêmes mouvements) et désigner comme boucs émissaires, parmi nous, les migrants et les musulmans, plutôt que de cesser vos politiques mortifères. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. Rémy Rebeyrotte
Quelle honte ! Quelle manipulation ! Quel scandale !
Mme Danièle Obono
Pour notre part, nous appelons à être présents cet après-midi devant tous les CROUS, à l’appel des syndicats. Nous appelons également à être présents le 14…
M. le président
Merci, madame la députée.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État
Madame la députée, votre expression fait écho aux prises de positions auxquelles nous avons assisté depuis quelques jours, qualifiant de politique cet événement dramatique, cette tentative de suicide.
J’aurais aimé vous entendre dire que tenter de mettre fin à ses jours n’est jamais un acte politique. Pensez à tous les jeunes et à tous les enfants qui vous écoutent (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM et sur quelques bancs du groupe LR), qui vous prennent peut-être comme modèle. Pensez à eux. La responsabilité, ce n’est pas d’attiser ces braises et de donner à certains jeunes le sentiment que la solution peut être d’en arriver à un tel acte. Nous, nous agissons alors que vous, vous êtes dans l’incantation dangereuse. Soyez un peu responsable ! (Les députés des groupes LaREM et MODEM et plusieurs députés du groupe LR se lèvent et applaudissent.)
Évacuation de camps de migrant
M. le président
La parole est à M. Mounir Mahjoubi.
M. Mounir Mahjoubi
Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur.
Gouverner c’est décider et agir avec éthique, c’est réconcilier justice et amour, comme le rappelait Paul Ricœur. S’il est un sujet qui occupe le cœur et l’esprit des habitants de ma circonscription et de nombreux Français, c’est bien celui du sort des personnes migrantes qui campent à trois portes de Paris – celle de la Chapelle, madame Obono (Mme Obono proteste – Exclamations sur les bancs du groupe FI), celle d’Aubervilliers et celle de la Villette – et aussi à Saint-Denis.
Quelque 2 500 personnes sont échouées dans les interstices de villes et de quartiers abandonnés. La semaine dernière, vous avez procédé à la mise à l’abri et à l’évacuation de près de 1 600 personnes.
Pour ma part, monsieur le ministre, je crois que vous avez agi avec justice et humanité et que c’était la seule solution possible. Mais j’en veux terriblement à ceux qui, avec leurs indignations confortables, madame Obono (Mêmes mouvements), ont tenté d’instrumentaliser et de manipuler la situation.
Je veux remercier les services de la préfecture de police et de la préfecture de région, qui se sont engagés depuis de nombreux mois pour avancer. Vous avez annoncé la sécurisation à long terme de ces quartiers. Cette sécurisation, madame Obono, nous la devons aux habitants de nos quartiers. (Mêmes mouvements.)
M. Éric Coquerel
C’est la troisième fois qu’il la cite nommément, monsieur le président !
M. Mounir Mahjoubi
Nous la leur devons parce qu’ils habitent dans les quartiers les plus pauvres de Paris et même de France. Ces habitants qui cumulent les précarités avaient face à eux des migrants qui, eux aussi, avaient été abandonnés. (Vives exclamations continues sur les bancs du groupe FI.)
La mise à l’abri, nous la devons à ces personnes. (Mêmes mouvements.)
Mme Bérangère Abba
Ces hurlements sont insupportables !
M. le président
Arrêtez maintenant, s’il vous plaît !
M. Mounir Mahjoubi
Nous la leur devons du simple fait de leur humanité, du simple fait de leur présence.
Mme Danièle Obono
Pourquoi m’interpelle-t-il ?
M. Mounir Mahjoubi
Monsieur le ministre, quel bilan tirez-vous de ce début d’opération ? Quand les portes d’Aubervilliers et de la Villette seront-elles concernées ? Nous serons vigilants, nous serons présents avec près d’une quinzaine de députés mais pas vous, madame Obono. (Vives exclamations sur les bancs du groupe FI.) Nous sommes allés rencontrer les associations, les habitants et les migrants… (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. le président
Il y a des règles : on n’interpelle pas un autre collègue qui se sent ensuite dans l’obligation de vociférer puisqu’il est privé de la possibilité de répondre. Il est utile d’interroger le Gouvernement qui va vous répondre, pas d’interpeller.
Quant à vous, n’en profitez pas pour laisser libre cours à votre propension.
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur
Après des opérations menées à Nantes, Grande-Synthe et Calais, nous avons en effet procédé, la semaine dernière, à la mise à l’abri de quelque 2 500 migrants – des hommes mais aussi des femmes et des enfants – qui vivaient dans des campements au nord de Paris : à la porte de la Chapelle, sur le boulevard Wilson de la commune de Saint-Denis et à la porte d’Aubervilliers. Au milieu, se trouve ce que l’on appelle la colline du crack, hélas bien connue de celles et ceux qui vivent dans ce territoire.
En lien avec la préfecture de police et la préfecture régionale d’Île-de-France, nous avons mis ces personnes à l’abri dans des centres dédiés afin que chacune d’elles fasse l’objet d’un examen individuel et que, en fonction de sa situation administrative, elle puisse être prise en charge et orientée.
Certains de ces migrants attendent l’instruction de leur demande d’asile et nous avons des centres spécialisés pour les accueillir. Le nombre de places a été doublé depuis 2015, sous l’action de plusieurs gouvernements. D’ici à l’année prochaine, près de 105 000 places seront à notre disposition.
D’autres n’ont pas vocation à rester dans notre pays puisqu’ils sont arrivés au terme de toutes les procédures administratives et de tous les recours juridiques qu’ils ont engagés.
Enfin, d’autres ne sont pas hébergés alors que nous leur avons accordé la protection. Il nous faut augmenter le nombre de place d’accueil mais aussi les aider à s’intégrer. Au cours des dix-huit derniers mois, nous avons mobilisé 15 000 logements du parc social privé et nous souhaitons en mobiliser 16 000 supplémentaires l’année prochaine.
Avec Julien Denormandie, nous avons reçu tous les maires concernés pour trouver des solutions, commune par commune, territoire par territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.)
Retour de djihadistes en France
M. le président
La parole est à M. Joaquim Pueyo.
M. Joaquim Pueyo
Ma question s’adresse à Monsieur le Premier ministre.
Hier, nous étions rassemblés pour l’inauguration par le chef de l’État du monument dédié aux militaires morts pour la France au cours d’opérations extérieures. Nous saluons solennellement leur sacrifice. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)
Demain, nous rendrons hommage aux victimes des attentats qui ont frappé notre pays le 13 novembre 2015. Nous avons une pensée émue pour les disparus, leurs proches et les rescapés. Nous ne les oublions pas. (Mêmes mouvements.)
Quatre ans plus tard, l’organisation terroriste Daesh ne dispose plus de territoire mais ses derniers partisans sont éparpillés entre la Syrie et l’Irak. Certains étaient emprisonnés en Syrie. Entre 370 et 500 Français étaient détenus par les Forces démocratiques syriennes.
Le 9 octobre dernier, l’offensive turque dans le nord de la Syrie a replongé la région dans l’incertitude. Plusieurs centaines de djihadistes ont pu s’échapper.
Le vendredi 8 novembre, les autorités turques annonçaient la capture de 287 membres de Daech, échappés des prisons kurdes. Dans la foulée, le ministre de l’intérieur turc annonçait l’expulsion des combattants étrangers vers leurs pays d’origine.
Nous apprenons que onze Français devraient être transférés vers la France dans les jours à venir. Pouvez-vous nous indiquer les profils de ces personnes et les conditions de ce transfert ? Le retour des djihadistes vers la France inquiète, à juste raison, nos compatriotes.
Depuis 2014, un protocole dit Cazeneuve prévoit que les policiers français se rendent en Turquie pour s’assurer que ces individus soient judiciarisés dès leur retour sur le territoire national. Ce protocole s’appliquera-t-il à tous les cas de transfert ?
Monsieur le Premier ministre, pourriez-vous nous indiquer précisément le nombre de Français détenus par les forces kurdes et par la Turquie ? Quelles relations diplomatiques le Gouvernement entretient-il avec les autorités turques sur cette question qui a des conséquences sur notre sécurité nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur
Comme vous l’avez précisé dans votre question, il y a deux types de prisonniers, correspondant à deux situations différentes.
Première catégorie : les Français qui ont rejoint Daech et qui sont prisonniers dans le nord-est syrien et détenus par les forces kurdes. Conformément au principe énoncé par la France, nous souhaitons que ces prisonniers puissent être jugés au plus près du lieu où ils ont commis leurs actes criminels. Nous ne souhaitons pas leur rapatriement dans la mesure où il est possible, comme c’est le cas en Irak, de les appréhender et de les juger sur place.
M. Éric Straumann
Très bien !
M. Christophe Castaner, ministre
Deuxième catégorie : ceux qui ont tenté d’aller sur les théâtres de guerre et qui ont été arrêtés en Turquie. Dans ce cas, le protocole dit Cazeneuve permet, en lien avec les autorités turques, de rapatrier des Français qui vont commettre des actes de guerre contre notre pays depuis l’étranger.
C’est sur cette base que nous procédons presque chaque semaine avec la Turquie. Près de 240 Français adultes interpellés en Turquie ont été mis à la disposition des autorités françaises.
C’est dans ce cadre qu’il est question que onze ressortissants français soient rapatriés. Vous comprendrez, M. le député, que nous ne souhaitions communiquer ni sur leur profil, ni sur leur âge, ni sur les faits. Je peux néanmoins vous assurer qu’ils sont connus, pris en charge, et qu’ils seront placés sous l’autorité de la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le président
La parole est à M. Joaquim Pueyo.
M. Joaquim Pueyo
Monsieur le ministre, je souscris en grande partie à votre réponse mais j’aurais apprécié des informations plus précises quant à nos relations diplomatiques actuelles avec les autorités turques.
Lutte contre le démarchage téléphonique
M. le président
La parole est à M. Stéphane Demilly.
M. Stéphane Demilly
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances. En tant que parlementaires, il est de notre rôle de remonter au Gouvernement les situations qui excèdent nos concitoyens. N’importe quel député aurait pu vous poser la question que je soulève aujourd’hui. Je souhaite, une fois de plus, vous faire part de l’exaspération de nombre de Français face au démarchage téléphonique commercial. Celui-ci est vécu comme du harcèlement : le téléphone sonne n’importe quel jour, à n’importe quelle heure, aussi bien pour des compagnies d’assurance que pour des opérateurs de téléphonie mobile, des vendeurs de fenêtre ou encore pour la promotion de dispositifs d’isolation à 1 euro – sujet qui l’emporte probablement sur tous les autres. Les téléspectateurs qui nous regardent pourraient bien sûr compléter cette liste.
Ces pratiques abusives ne sont pas acceptables et le système actuel, Bloctel, qui consiste à s’inscrire sur une liste d’opposition à un tel démarchage, a montré ses limites : des millions de consommateurs inscrits sur ce registre continuent à être régulièrement démarchés. (Mme Delphine Batho applaudit).
Je vous ai alerté, il y a longtemps déjà, sur l’ampleur insupportable que prend ce fléau quotidien. Le député Christophe Naegelen, tout comme ses collègues MM. Le Fur et Brun, l’ont aussi fait au travers de propositions de loi. Mais ces propositions dérangent ou se retrouvent coincées dans les longs tuyaux législatifs. Monsieur le ministre, je conçois qu’il n’existe pas de solution facile et que les centrales d’appel exercent probablement sur vous un chantage à l’emploi. Mais le vécu de nos compatriotes, notamment les plus âgés, qui subissent quotidiennement cette véritable pression à l’achat, est devenu un enfer, en particulier à l’heure des repas. Monsieur le ministre, il est temps de faire preuve de pragmatisme et d’efficacité – bref, de siffler la fin de la partie ! Pouvons-nous compter sur vous ? (Applaudissements sur de nombreux bancs.)
M. le président
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances
Bloctel, ce sont effectivement 3,7 millions de personnes et 8,5 millions de numéros bloqués.
Plusieurs députés des groupes LR et GDR
Cela ne marche pas !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État
Le dispositif a permis de traiter 180 000 fichiers de démarchage et ainsi d’éviter plusieurs milliards d’appels.
M. Marc Le Fur
Il faut interdire le démarchage !
M. Patrick Hetzel
Nous attendons des actes !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État
Mais je partage absolument l’avis de M. Demilly, dont j’ai entendu qu’il était partagé sur l’ensemble des bancs de cette assemblée : cette pression téléphonique est insupportable pour nos concitoyens. Elle est souvent le fait de sociétés qui ne respectent pas la loi. Ce n’est pas cette dernière qui fait obstacle : ce sont souvent des appels venant de l’étranger ou automatisés qui sont en cause. C’est la raison pour laquelle nous agissons.
Depuis le 1er août, nous avons ainsi interdit aux opérateurs téléphoniques d’émettre des identifiants d’appelant pour les utilisateurs finaux localisés hors du territoire français. À compter du 1er janvier 2021, il en ira de même pour les numéros d’appel automatisés, dont vous savez qu’ils sont très fréquemment utilisés. Dans le cadre du plan de lutte contre la fraude à la rénovation thermique, nous examinons aussi un encadrement renforcé, voire une interdiction, du démarchage téléphonique, en lien avec les professionnels et les associations de consommateurs.
Nous poursuivons également nos travaux sur la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux : elle n’est pas restée coincée, comme vous l’affirmez, mais a été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat.
M. Patrick Hetzel
Cessez de nous enfumer !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État
Je crois savoir qu’elle reviendra en discussion devant cette assemblée en début d’année prochaine. Nous souhaitons continuer à y travailler avec M. le député Naegelen, qui était présent ce matin lors de la présentation de notre plan de lutte contre la fraude à la rénovation thermique, et que je remercie. Nous continuerons d’avancer clairement et fermement…
M. Patrick Hetzel
Il faut être efficace !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État
…y compris sur le dispositif Bloctel qui doit être renforcé, amélioré et dont l’efficacité doit être accrue.
M. le président
La parole est à M. Stéphane Demilly.
M. Stéphane Demilly
Bloctel ne marche pas ! La solution n’est pas de s’inscrire sur un registre pour ne pas recevoir d’appels, mais consisterait au contraire à s’inscrire sur un registre si l’on souhaite recevoir ces appels ! Le problème serait réglé ! («Bravo » et applaudissements sur les bancs des groupes UDI-Agir, LR et MODEM.)
M. Patrick Hetzel
Vous êtes sous la pression de lobbies !
Situation en Haïti
M. le président
La parole est à M. Gabriel Serville.
M. Gabriel Serville
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères ; j’y associe les collègues du groupe d’amitié France-Haïti.
Depuis début septembre, des manifestations fortement réprimées par le régime ont fait quarante-deux morts selon l’ONU, soixante-et-onze selon les ONG. Écoles fermées, administrations à l’arrêt, quartiers sous la coupe réglée de gangs armés et tolérés par le pouvoir en place : le pays a renoué avec le chaos. On assiste, dans l’indifférence générale, à la faillite d’un système imposé de l’extérieur, à la suite de l’incapacité récurrente des gouvernements à assurer un minimum de stabilité et de prospérité.
La crise couvait depuis les désastres naturels qui ont dévasté le pays à plusieurs reprises. Elle s’est aggravée avec le scandale Petrocaribe, dans lequel le Président est soupçonné de graves détournements de fonds. Les partis d’opposition et des groupes de la société civile ont annoncé, dans la soirée du samedi 9 novembre, être parvenus à un accord pour organiser la transition politique, mais le président Jovenel Moïse reste sourd aux manifestants qui exigent son départ.
Monsieur le ministre, la semaine dernière, notre collègue George Pau-Langevin sollicitait votre réaction face à cette crise insurrectionnelle qui pousse des milliers d’habitants à l’asile. La Guyane est en première ligne et se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences d’un afflux massif de population dans un contexte de fortes restrictions budgétaires. Hélas, votre réponse n’a pas été à la hauteur de nos attentes.
Il n’est pas question ici d’ingérence – d’autant plus que les Haïtiens n’en veulent pas. Mais l’on sait déjà que, sans réelle volonté des États partenaires d’accompagner le pays vers la stabilité politique, institutionnelle et sociale, la mission politique de l’ONU en Haïti ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau. Nous avons les moyens de cette volonté. De surcroît, l’histoire est têtue et les destins croisés de la France et d’Haïti nous obligent.
M. le président
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des affaires européennes.
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État chargée des affaires européennes
Comme vous l’avez rappelé, Haïti est entré manifestement depuis le mois de septembre dans une crise économique, sociale et politique. L’ensemble des manifestations appellent à la démission du président Jovenel Moïse. La plus faible mobilisation du dimanche 10 novembre laisse entrevoir un répit, après les deux mois de troubles particulièrement violents que vous avez rappelé : quarante-deux personnes ont perdu la vie selon l’ONU, dont dix-neuf tuées par les forces de l’ordre. La difficulté essentielle tient à l’absence du Gouvernement investi par le Parlement : la situation est de ce fait totalement bloquée et l’activité économique paralysée.
Dans l’immédiat, la position française est claire : il convient d’abord d’assurer la sécurité de nos compatriotes en Haïti, où la communauté française compte 1 900 inscrits. Il faut ensuite éviter une nouvelle crise humanitaire. On estime qu’en 2020, 4 millions de personnes se trouveront en insécurité alimentaire ; 2 millions d’enfants ne sont quant à eux plus scolarisé. Nous fournissons donc une aide alimentaire d’urgence et travaillons avec l’Union européenne pour nous tenir prêts à lancer une action concrète sur le terrain en cas de dégradation de la situation.
Notre priorité reste néanmoins le soutien à la reprise d’un dialogue réunissant l’ensemble des forces d’opposition et l’ensemble de la société civile. Nous avons signalé, je le répète devant vous, que nous sommes prêts à soutenir ce dialogue, en lien avec l’Union européenne et avec l’Organisation internationale de la francophonie. Nous estimons en effet que ce dialogue constitue la seule réponse possible à l’urgence sociale et la seule voie de sortie de la crise politique actuelle. La France ne veut pas d’une nouvelle situation chaotique en Haïti, dont les Haïtiens les plus vulnérables sont les premières victimes. C’est au président Haïtien de se montrer à la hauteur des circonstances de façon à éviter cette crise et à engager au plus vite le dialogue national dont le pays a plus que jamais besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Avenir des trains du quotidien
M. le président
La parole est à M. Bruno Duvergé.
M. Bruno Duvergé
Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé des transports. Après un an et demi de négociation, la convention TER 2019-2024, entre la région Hauts-de-France et la SNCF, a été votée le 15 octobre dernier par les élus régionaux. Elle régit l’ensemble des sujets relevant du transport express régional dans les Hauts-de-France. Avec un financement de 500 millions d’euros par an, soit 2,5 milliards sur 5 ans entièrement à la charge de la région, cette convention permettra d’assurer les trajets quotidiens de 200 000 voyageurs.
La région, qui a toute confiance en la SNCF, s’est félicitée de cet accord. Or nous venons d’apprendre que le trajet Amiens-Lille ne desservira plus la gare d’Achiet-le-Grand, quotidiennement fréquentée par 200 passagers. Pour les usagers, cette décision aura pour conséquences directes le recours au déplacement automobile et un surcoût de leur abonnement.
La SNCF a l’intention de jouer un rôle clé pour assurer nos mobilités dans le cadre de la transition énergétique. Mais elle ne peut réussir dans ce domaine qu’en impliquant les communautés de communes des territoires ruraux. En l’occurrence, la communauté de communes du Sud-Artois, qui a construit son plan de mobilité autour de la gare d’Achiet-le-Grand, a été mise à l’écart de cette concertation.
Alors que nos concitoyens nous interpellent quotidiennement sur la présence et le maintien de transports de proximité, alors que chaque jour le Parlement fait la promotion des mobilités douces, nous souhaitons que la SNCF demeure un acteur structurant des mobilités de nos territoires, qu’elle doit construire avec les élus locaux. Monsieur le secrétaire d’État, compte tenu de ces éléments, comment comptez-vous organiser le dialogue entre la SNCF et les territoires ?
M. Marc Le Fur
Ce n’est pas une question à poser le mardi après-midi !
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État chargé des transports
Monsieur le député, vous me faites part de votre préoccupation concernant la refonte de la desserte d’Achiet-le-Grand qui permettait à plus de 200 voyageurs d’emprunter la ligne directe vers Lille. Ce changement fait suite à la nouvelle convention TER signée entre la région Hauts-de-France et la SNCF le 15 octobre dernier. Vous le savez, les conseils régionaux exercent pleinement la compétence transport depuis 2002 – depuis 1997 même en l’occurrence, l’ancienne région Nord-Pas-de-Calais ayant été l’une des cinq régions expérimentatrices dans ce domaine.
Cette décentralisation a constitué une réussite, marquée par une croissance de 50 % de l’offre ferroviaire en dix ans et une fréquentation qui a plus que doublé dans votre région. Ainsi, il appartient à l’assemblée régionale – et à elle seule –, dans le strict respect de la libre administration des collectivités territoriales, de se prononcer sur l’évolution des dessertes du TER. La SNCF exécute dans ce domaine les décisions prises par les élus régionaux.
L’adoption du nouveau pacte ferroviaire respecte ce principe : les régions restent pleinement décisionnaires sur le sujet des dessertes TER et devront notamment organiser les nouveaux appels d’offres qui auront lieu après 2023. Par ailleurs, le projet de loi d’orientation des mobilités, dont nous débattrons de nouveau au cours des prochaines semaines, élargit encore les outils au bénéfice des autorités organisatrices pour assurer la présence des services de transport de proximité, notamment au travers des contrats opérationnels de mobilité.
C’est dans ce cadre que l’État sera pleinement au rendez-vous, assurant son rôle aux côtés des régions et des territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Situation en Bolivie
M. le président
La parole est à Mme Mathilde Panot.
Mme Mathilde Panot
Monsieur le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, avez-vous vu les images qui nous viennent de Bolivie ces derniers jours ? Avez-vous vu la maire de Vinto, Patricia Arce, kidnappée, le crâne rasé, traînée sur 5 kilomètres couverte de peinture rouge ? Avez-vous vu la police tirer à balles réelles sur les partisans du président ? Avez-vous vu le directeur de la radio du syndicat des travailleurs paysans ligoté à un arbre ? Avez-vous vu le dirigeant d’extrême droite Camacho, cet évangéliste fondamentaliste, prier sur le drapeau de l’État plurinational de Bolivie pendant que les symboles indigènes étaient brûlés ?
L’intégrité physique de plusieurs élus, poussés à la démission par l’armée, est en jeu. La vie de milliers de militants et des populations autochtones dans le pays est menacée par une opposition fasciste et une oligarchie nostalgique des privilèges perdus depuis l’arrivée au pouvoir du premier président amérindien de Bolivie. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR. – M. Jean Lassalle applaudit également.)
Evo Morales a été poussé à la démission par l’armée et il a dû trouver l’asile politique au Mexique. La France se serait honorée de la lui proposer également. Evo Morales a été expulsé du pouvoir par la force, la sédition et la menace sur la vie de ses proches. Soucieux de garantir la paix civile, il avait même accepté la convocation de nouvelles élections après celles qu’il avait gagnées.
Se taire sur la Bolivie, c’est préparer de nouveaux Bolsonaro. C’est approuver passivement les tweets pathologiques de Donald Trump, qui rêve de putschs permanents contre ses adversaires et de républiques andines où seuls les agents de la CIA pourraient voter. (« Exactement ! » et applaudissements sur les bancs du groupe FI, ainsi que sur les bancs du groupe GDR. – M. Jean Lasalle applaudit également.)
Monsieur le ministre, vous vous souvenez du Chili assassiné par Pinochet et de l’immense vague de solidarité qui venait alors de France. Nous devons être à la hauteur de notre histoire. Nous vous demandons d’ouvrir l’ambassade et les consulats pour les opposants persécutés. (Mêmes mouvements.)
Le Président Macron doit assurer le président Morales de la solidarité de la France. Nous vous demandons de suspendre toute relation diplomatique avec les putschistes. L’honneur international de la France est en jeu – et pour nous, il pèse plus lourd que quelques mines de lithium que convoitent les Étasuniens ! Monsieur le Ministre,…
M. le président
Merci, madame la députée. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des affaires européennes.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des affaires européennes.
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État chargée des affaires européennes
Notre honneur est de défendre partout la démocratie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. Laurent Saint-Martin
Très bien !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
Depuis les élections générales du 20 octobre dernier, la Bolivie vit effectivement une crise politique accompagnée de troubles et de violences qui ont débouché, dimanche, sur la démission du président Morales. Ces élections générales, il faut le rappeler, se sont déjà tenues dans un climat tendu, à la suite du référendum constitutionnel organisé par Evo Morales en 2016 pour l’autoriser à se présenter une troisième fois à l’élection présidentielle – il avait perdu ce référendum mais cela ne l’avait pas empêché de se représenter à l’époque.
M. Bruno Millienne
Eh oui !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
L’Organisation des États américains a réalisé un audit des résultats électoraux, dont M. Morales avait accepté de suivre les recommandations. Or la mission d’audit a révélé de sérieuses irrégularités dans le scrutin et a recommandé l’organisation de nouvelles élections.
M. Jean-Luc Mélenchon
Vous approuvez le putsch, quoi !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
L’Union européenne a également appelé le gouvernement bolivien à accepter un second tour. Ces recommandations n’ont pas été suivies, et nous le regrettons. Regardez où nous en sommes aujourd’hui :…
M. Éric Coquerel
Vous approuvez donc le putsch ! Vous vous alignez sur M. Trump !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
…le pays est en proie à la violence et le président a démissionné.
Plusieurs députés du groupe FI
Non, on ne peut pas dire qu’il a démissionné !
M. Éric Coquerel
Cela s’appelle un putsch !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
Il n’y a qu’une solution : organiser le plus rapidement possible un processus démocratique qui recrée de la confiance dans cette démocratie qu’il nous faut protéger.
Mme Mathilde Panot
La population se fait massacrer !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
Nous voulons que de nouvelles élections se tiennent le plus rapidement possible. L’Union européenne enverra bien évidemment des experts sur le terrain. Nous appelons désormais toutes les autorités de transition au calme et à la retenue (Exclamations sur les bancs du groupe FI)…
Mme Mathilde Panot
Tous ceux qui s’opposent à l’armée sont en prison !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
…pour qu’elles respectent la Constitution de ce pays, les droits civils et politiques. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe FI.)
M. le président
S’il vous plaît, mes chers collègues !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
Arrêtons d’alimenter la confrontation entre les différentes composantes de la société bolivienne. Nous n’acceptons en rien les manifestations violentes.
M. Éric Coquerel
C’est un putsch militaire !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
Nous cherchons à protéger la démocratie dans un pays où des élections doivent se tenir.
M. Éric Coquerel
C’est lamentable !
Mme Mathilde Panot
Honteux !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État
Nous sommes également vigilants quant à la situation des ressortissants français présents dans ce pays, qui doivent rester en lien avec notre ambassade pour rester en sécurité. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. André Chassaigne
Vous justifiez donc le putsch !
Politique migratoire
M. le président
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe Gosselin
Monsieur le Premier ministre, jeudi prochain, nous serons à mi-mandat du Président Macron. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Sa réélection est déjà dans toutes les têtes, dans la sienne en particulier. Vous nous avez même dit la semaine dernière que le président avait choisi son adversaire : Mme Le Pen. Bel aveu ! Les opérations de piratage et de siphonnage ont d’ailleurs déjà commencé.
Il en va ainsi de l’immigration. Le Président reconnaît que l’immigration est un problème : très bien, c’est une avancée ! Il installe le sujet dans son discours : parfait, nous n’attendions que cela ! Mais en réalité, c’est de la poudre aux yeux. Depuis deux ans, la lutte contre l’immigration illégale n’est absolument pas une priorité du Gouvernement. Sur 100 000 expulsions ordonnées en 2018, à peine 12 % ont été exécutées.
M. Damien Abad
Eh oui !
M. Philippe Gosselin
En outre, 256 000 titres de séjour ont été délivrés l’année dernière : c’est un record depuis quarante ans. On observe aussi, vous le savez, une explosion des demandes d’asile, qui ont augmenté de près de 25 % en 2018. La France est désormais sur la deuxième marche du podium européen.
Les mesures que vous venez d’annoncer ne vont pas améliorer les choses. Le Gouvernement annonce des quotas d’immigration économique. Très bien ! Pourquoi pas ? Mais le risque est grand d’augmenter davantage l’immigration légale. Il vaudrait mieux instaurer des plafonds qui concerneraient tous les types d’immigration.
L’inspection générale des affaires sociales décrit l’aide médicale d’État comme l’un des systèmes les plus généreux d’Europe. Il faut la restreindre aux interventions d’urgence et aux maladies contagieuses. Il faut aussi restaurer le droit de timbre. C’est ce que proposent Les Républicains. Êtes-vous prêt à nous suivre sur ce point ?
Monsieur le Premier ministre, en matière d’immigration, le « en même temps » n’est pas l’idéal. Au-delà des discours, que comptez-vous réellement faire dans les semaines et les mois qui viennent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. Éric Straumann
Le Gouvernement encourage Mme Le Pen, mais la prochaine fois, elle risque de gagner !
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur
Monsieur Gosselin, vous nous interrogez sur la politique migratoire menée par le Gouvernement. Je vous rappelle qu’un comité interministériel sur l’immigration et l’intégration s’est tenu la semaine dernière…
M. Philippe Gosselin
Justement !
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État
…et qu’un certain nombre de mesures y ont été prises afin d’adapter notre politique à la nouvelle donne européenne des flux migratoires.
Cette politique repose sur trois piliers qui vont dans le sens de la fermeté et de l’humanité, mais puisque vous nous interpellez sur la fermeté, permettez-moi de dire quelques mots à ce propos.
Au niveau international, nous mettons en place un comité stratégique des visas, qui nous permettra de mieux réguler la délivrance des visas et de faire coïncider le nombre de visas octroyés avec le nombre de laissez-passer accordés. Ainsi, nous pourrons procéder à des reconduites à la frontière effectives.
M. Claude Goasguen
Ce n’est pas la même chose !
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État
Quant à l’aide publique au développement, dont vous savez qu’elle atteindra 0,55 % de la richesse nationale, nous veillerons à ce qu’elle aide les pays de départ à mieux réguler les flux migratoires.
Au niveau européen, nous avons décidé de tout faire pour renforcer l’agence FRONTEX aux frontières extérieures. Cette force comprendra, dans les prochaines années, plus de 10 000 fonctionnaires de police de tous les pays, dont des fonctionnaires français, pour mieux tenir les frontières extérieures de l’Union européenne.
Nous essaierons également d’obtenir, dans les pays d’arrivée, la mise en place de centres contrôlés où seront examinées les demandes de protection. Nous participerons bien évidemment aux processus de relocalisation et de solidarité financière afin d’aider ces pays.
Au niveau national, nous avons augmenté les places dans les CRA – les centres de rétention administrative – et nous allons continuer à le faire. Nous augmentons également le nombre de laissez-passer délivrés, de même que les éloignements forcés – je vous assure, monsieur Gosselin, qu’ils augmentent en volume. Nous allons enfin poursuivre l’augmentation des transferts Dublin pour nous rapprocher de la moyenne européenne.
M. Jean-Pierre Door
Nous voilà donc sauvés !
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État
Nous allons continuer à mener avec beaucoup de fermeté cette politique, qui comporte aussi une lutte acharnée contre les filières d’immigration illégale – dans ce domaine, croyez bien que nous rencontrons un franc succès. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. le président
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe Gosselin
Ce discours est bien beau, monsieur le secrétaire d’État, mais le budget consacré à la lutte contre l’immigration clandestine va baisser de 10 % en 2020,…
M. Pierre Cordier
Eh oui !
M. Philippe Gosselin
…ce qui vient contredire vos propos.
M. Fabien Di Filippo
Il y a les mots et il y a les faits !
Hommage aux soldats morts en opérations extérieures
M. le président
La parole est à Mme Patricia Mirallès.
Mme Patricia Mirallès
Madame la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées, 549, c’est le nombre de militaires, dont 2 femmes, dont les noms sont inscrits sur le monument dédié aux soldats morts pour la France en opérations extérieures, inauguré hier par le Président de la République. Dans un jardin voulu ouvert, le monument est constitué d’une sculpture de bronze représentant six soldats portant un cercueil invisible, matérialisé par le vide – le vide laissé dans les familles, dans les fratries, dans nos vies, par l’absence de celles et ceux qui, par leur sacrifice et leur dignité, ont fait le choix de la France.
Depuis 1963, celles et ceux que l’armée appelle « la quatrième génération du feu » ont été tués sur dix-sept théâtres d’opérations. La France n’oublie pas ceux qui sont morts pour elle. Elle n’oublie aucun de ses enfants. C’est notre devoir et notre honneur. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
En inaugurant ce mémorial, inspiré par Nicolas Sarkozy…
M. Éric Straumann
Bravo !
Mme Patricia Mirallès
…et dont la construction a également été voulue par François Hollande, Emmanuel Macron a permis à la France de régler une dette d’honneur, dans la continuité républicaine qui fait la force de notre nation. Nos morts vivront tant qu’il y aura des vivants pour penser à eux. Mes remerciements sincères et appuyés vont à Mme la ministre Florence Parly et à vous-même, madame la secrétaire d’État, qui avez travaillé ardemment et non sans difficultés afin que ce mémorial soit inauguré le jour où la nation se recueillait en hommage à tous les combattants.
Le dernier nom inscrit sur ce monument est celui du brigadier-chef Ronan Pointeau, 24 ans, tué le 2 novembre au Mali, où sont déjà morts vingt-trois soldats français. Ronan Pointeau était montpelliérain de cœur. En ce moment précis, j’ai évidemment une pensée toute particulière pour lui et sa famille (Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent), pour ses frères d’armes et pour les quatre militaires morts pour la France cette année.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous confirmer le choix du Gouvernement de faire du 11 novembre le jour d’hommage à nos soldats morts pour la France en opérations extérieures, conformément à la loi du 28 février 2012 ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et UDI-Agir.)
M. le président
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées.
Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées
Je vous remercie, madame Mirallès, d’avoir évoqué ce 11 novembre si particulier – les 11 novembre sont toujours des grandes journées d’hommage aux morts pour la France mais, cette année, ce fut également été un très grand jour pour la communauté de défense. Nos soldats, nos aviateurs, nos marins, nos gendarmes attendaient en effet l’inauguration de ce lieu d’hommage à leur engagement sans faille pour la nation, allant jusqu’au sacrifice suprême. Ce fut également un grand jour pour les familles des 549 militaires morts pour la France en opérations extérieures, qui auront enfin un lieu pour se souvenir et qui sauront la profonde reconnaissance de la nation. Ce lieu était aussi nécessaire pour que le public puisse mesurer l’engagement continu des armées pour assurer notre liberté et notre sécurité.
J’ai également dévoilé hier soir, sous l’Arc de triomphe, une plaque en hommage à tous les combattants des opérations extérieures qui sera scellée à côté des plaques dédiées aux autres conflits.
Vous m’avez posé une question simple : le 11 novembre sera-t-il la journée des morts pour la France en opérations extérieures ? Vous le savez, depuis la loi du 28 février 2012, le 11 novembre est le jour d’hommage à tous les morts pour la France, de tous les conflits. Cette date, jour anniversaire de l’armistice de 1918 et de commémoration annuelle de la victoire et de la paix, permet ainsi de célébrer la mémoire de tous nos soldats morts pour la France. Cela crée un véritable lien entre les générations de combattants, un lien d’autant plus important que les combattants de nos armées, toutes générations confondues, sont partis au combat avec les mêmes valeurs pour défendre la République et notre démocratie. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et UDI-Agir.)
Moyens de l’hôpital public
M. le président
La parole est à M. Jean-Carles Grelier.
M. Jean-Carles Grelier
Monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, depuis de nombreux mois, les professionnels de santé et un grand nombre de parlementaires appellent l’attention du Gouvernement sur la crise de l’hôpital.
M. Sébastien Jumel
C’est vrai !
M. Jean-Carles Grelier
Nous pensions que ce message avait été entendu et aurait des traductions concrètes dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui nous a été soumis et sur lequel notre assemblée s’est prononcée en première lecture.
M. Gilles Lurton
Mais le PLFSS ne comportait aucune mesure sur l’hôpital !
M. Jean-Carles Grelier
Alors même que nous entamions cette discussion budgétaire, la ministre des solidarités et de la santé se répandait dans la presse sur un plan d’urgence pour l’hôpital, loin du Parlement et sans qu’une large concertation ne soit ouverte. Ce week-end encore, la presse s’est fait l’écho de mesures précises visant à revaloriser les moyens budgétaires alloués à l’hôpital ; or ni la commission des affaires sociales ni notre assemblée n’ont été préalablement informées de ces mesures. Il est assez vraisemblable que le budget que nous avons voté et qui s’apprête à être examiné par le Sénat…
M. Sébastien Jumel
Il est caduc !
M. Jean-Carles Grelier
…soit à ce jour caduc, pour ne pas dire mort-né.
Votre gouvernement n’aurait-il découvert qu’il y a quelques jours la crise que connaît l’hôpital depuis de nombreux mois ? Quelle curieuse conception du dialogue et du débat parlementaire ! Quel irrespect pour notre assemblée, affectée dans sa mission première de voter les autorisations budgétaires !
Monsieur le ministre, entendez-vous continuer à faire jouer aux députés que nous sommes le rôle d’idiots utiles de notre système de santé ? Combien de temps encore allez-vous considérer l’opinion des professionnels de santé comme la variable d’ajustement de votre trajectoire budgétaire ? Quel crédit apporter à la parole d’un gouvernement qui, un jour, fait voter un projet de budget et, le lendemain, le retire pour le modifier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.)
M. le président
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
M. Pierre Cordier
Marc Fesneau aurait pu répondre, c’est à lui que s’adressait la question !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Monsieur Grelier, la situation que vous décrivez est connue. La ministre Agnès Buzyn en a pris la mesure dès son arrivée à la tête du ministère des solidarités et de la santé, et peut-être même auparavant, au vu de son expérience professionnelle en tant que médecin dans un service, pas très éloigné d’ici, où elle a travaillé pendant plus de vingt ans. Si elle avait entendu, à l’époque, les annonces que nous avons faites il y a quelques semaines et que nous ferons encore dans les semaines à venir, je crois qu’elle aurait été heureuse de travailler dans un service disposant des moyens dont il a besoin. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Pierre Cordier
Je n’ai rien compris !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État
Comme l’a rappelé le Premier ministre il y a quelques instants, le Gouvernement est le premier, depuis plus de dix ans, à avoir augmenté les tarifs hospitaliers, qui étaient gelés. Nous permettrons ainsi aux établissements de disposer de la totalité des crédits mis en réserve, au profit de nos concitoyens qui ont besoin d’être soignés.
M. Maxime Minot
Ce n’est pas la question !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État
Nous assumons de relever l’ONDAM – l’objectif national de dépenses d’assurance maladie – de 2,3 % pour 2020, après des augmentations de 2,3 % puis 2,5 % les deux années précédentes. Le déficit des établissements publics de santé s’est ainsi réduit de près d’un tiers en 2018.
M. Dino Cinieri
Répondez à la question !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État
Nous entendons et comprenons parfaitement les difficultés et demandes des soignants sur le terrain. Le Gouvernement est très vigilant quant aux besoins de financement des hôpitaux. La ministre s’est engagée à ce que la campagne tarifaire de 2020 soit aussi favorable que celle de 2019. Nous avons engagé, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, des chantiers structurants afin de transformer le financement de l’hôpital, de sortir du tout-T2A – la tarification à l’activité – et d’allouer les financements au plus près des besoins des territoires.
En outre, pour la première fois, nous avons engagé des discussions avec les fédérations hospitalières pour leur donner une visibilité pluriannuelle sur l’évolution des ressources des établissements de santé, et un amendement a été adopté dans cet hémicycle même.
Mme Bérengère Poletti
Tout va très bien !
M. Maxime Minot
Madame la marquise !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État
Cela constitue un véritable changement de paradigme attendu et demandé par les hôpitaux. Agnès Buzyn consulte actuellement l’ensemble des parties prenantes et fera des annonces – j’y reviendrai dans quelques instants. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Moyens de l’hôpital public
M. le président
La parole est à M. Hubert Wulfranc.
M. Hubert Wulfranc
Il faut cracher des chiffres, monsieur le Premier ministre, madame la secrétaire d’État ! Il faut cracher des moyens !
Depuis le début de la mandature, les députés communistes ont effectué un tour de France des hôpitaux et posé seize questions au Gouvernement sur la politique de santé, vous le savez ! Alain Bruneel et Pierre Dharréville ont déposé, il y a trois semaines, une proposition de loi tendant à donner les moyens tangibles d’inverser votre logique d’austérité à cause de laquelle l’hôpital public est plongé dans la crise la plus grave de l’histoire de notre pays !
M. Pierre Cordier
Il a raison !
M. Hubert Wulfranc
Vos trois budgets de la sécurité sociale ont confisqué 3 milliards aux hôpitaux publics en trois ans et les trois plans que vous avez présentés en quatorze mois courent après le déficit chronique de notre système de santé que vous avez vous-même provoqué !
La situation exige des solutions qui prennent le contre-pied de votre politique d’austérité. Nous estimons que votre PLFSS pour 2020, qui soustrait 1 milliard d’euros supplémentaire aux établissements de santé, ne va pas dans ce sens. Il est temps d’arrêter de prendre en otage notre système de santé en laissant entendre qu’un arbitrage venu d’en haut en dehors de tout débat avec les Français et le monde de la santé inverserait les choses ! D’ailleurs, où en est cet arbitrage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs des groupes SOC et FI.)
M. Sébastien Jumel
Excellent !
M. le président
Je vous rappelle qu’hormis des chiffres, il est interdit de cracher dans l’hémicycle… (Rires.)
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État
Monsieur Wulfranc, la ministre des solidarités et de la santé agit depuis le début pour le financement des hôpitaux. Le fait d’avoir libéré l’ONDAM, ce sont 1,7 milliard d’euros supplémentaires donnés aux hôpitaux. Il est faux de prétendre que c’est notre politique qui a réduit de façon drastique le financement des hôpitaux. Nous ouvrons l’ONDAM comme jamais il n’a été ouvert et nous travaillons en concertation au quotidien, depuis des semaines et des mois, la ministre et moi, avec l’ensemble des parties prenantes – conférences hospitalières, fédérations d’établissements de santé, élus, organisations syndicales, représentants des usagers – à un plan global qui fera l’objet d’annonces très prochainement. Elles porteront sur les ressources hospitalières et l’investissement hospitalier ainsi que sur le renforcement de l’attractivité et la fidélisation des personnels hospitaliers.
Dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui a lieu ici et débute aujourd’hui au Sénat, la ministre prend en compte ces éléments pour apporter la meilleure réponse aux personnels et aux services hospitaliers dans lesquels nous croyons tous, auxquels nous tenons tous. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Mme Bérengère Poletti
Tout va bien !
M. Maxime Minot
Madame la marquise !
M. le président
La parole est à M. Hubert Wulfranc.
M. Hubert Wulfranc
Si vous le permettez, je vais encore cracher un peu de la colère des hospitaliers. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Eh oui ! On en est là ! On en est là dans les établissements de santé, où monte une colère que vous semblez sous-estimer, une colère profonde, viscérale des salariés qui se consacrent à ce travail essentiel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
Maîtrise de la dépense publique
M. le président
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Monsieur le Premier ministre, le projet de loi de finances rectificative que vous venez de nous présenter met fin aux dernières illusions que vous entreteniez sur votre sérieux budgétaire : vous ne réduisez pas la dépense publique. Le projet d’économiser 1,5 milliard que vous annonciez en décembre pour financer les mesures d’urgence économiques et sociales est purement et simplement abandonné. Après vos renoncements concernant la maîtrise de la dette, qui atteint 99 % de la richesse nationale, et après vos renoncements concernant la maîtrise des comptes publics, alors que le déficit se creuse cette année pour la première fois depuis dix ans, c’est un renoncement de plus, un renoncement de trop.
S’agissant de la maîtrise des effectifs de l’État, alors que vous promettiez une réduction de 50 000 postes d’agents, vous ne parviendrez même pas à réaliser 10 % de cet objectif sur la totalité du quinquennat. Vous prévoyez même des créations de postes supplémentaires dans ce PLFR, alors que l’État emprunte déjà pour pouvoir payer ses fonctionnaires. Quel ménage pourrait assumer une telle situation ?
Par ailleurs, alors que vous vous étiez engagé dans la loi à respecter une trajectoire de baisse du déficit structurel, vous ne tenez même pas cet engagement. Où est le respect de la parole publique ? Où sont les efforts budgétaires que vous nous promettiez, monsieur le Premier ministre ?
Hélas, ces renoncements ne seront pas sans conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages. Les Français doivent savoir que les mesures d’urgence que vous avez votées à la suite du mouvement des gilets jaunes sont financées à crédit, hélas, et qu’en conséquence elles se traduiront inévitablement par de nouvelles hausses d’impôts demain.
Vous le savez très bien, monsieur le Premier ministre, sans baisse de la dépense, toutes les baisses d’impôts que vous annoncez sont illusoires et non durables. Quand allez-vous le prendre en compte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics
Madame Louwagie, nous travaillons ensemble, en commission des finances, et je suis désolé que nous ayons aujourd’hui cet échange sur des chiffres qui ne sont pas partagés, puisque nous vous proposerons 1 milliard d’économies dans le cadre du PLFR qui sera discuté dans quelques heures à l’Assemblée nationale. Le déficit est conforme à ce qui était prévu dans la loi de finances de l’année dernière : alors qu’il y a eu entre-temps le grand débat et les gilets jaunes, nous avons tenu les objectifs de dépense et de déficit. Et vous aurez constaté que les baisses d’impôt sont au rendez-vous – je me demande d’ailleurs si, dans votre circonscription, quand vos concitoyens vous remercient de voir leur taxe d’habitation baisser, vous leur répondez que vous n’avez pas voté cette baisse d’impôt ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. David Habib
Je n’en ai pas rencontré un seul qui soit venu me dire une telle chose !
M. Pierre Cordier
Et pour la hausse de la CSG, ils vous remercient ?
M. Gérald Darmanin, ministre
Nous tenons les comptes de la nation, nous baissons les impôts, nous faisons face à l’urgence sociale, et réjouissons-nous, madame Louwagie : 500 000 emplois supplémentaires ont été créés depuis que le Président de la République a été élu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. Pierre Cordier
Démago !
M. le président
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Au-delà de votre réponse, monsieur le ministre, la comparaison au niveau européen est un instant de vérité puisque la France présente le plus haut niveau de dépenses publiques en Europe.
Plusieurs députés du groupe LR
Eh oui !
Mme Véronique Louwagie
Notre déficit public, en 2020, sera deux fois plus élevé que celui de la zone euro et notre dette continue d’augmenter…
M. le président
Merci, madame Louwagie.
La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre
Je regrette, madame Louwagie, que vous ne parliez que de chiffres. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Mme Véronique Louwagie
Jusqu’à nouvel ordre, on a le droit de choisir ses questions !
M. Gérald Darmanin, ministre
Faisons preuve d’un peu de cœur et parlons de la vie des Français. Cette majorité a-t-elle baissé la taxe d’habitation de 80 % des Français qui gagnent moins de 2 500 euros par moi ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe LaREM.) Cette majorité va-t-elle permettre la plus grande baisse de l’impôt sur le revenu, à partir de janvier prochain, grâce d’ailleurs à la retenue de l’impôt à la source, dont vous n’avez jamais voulu ? (Mêmes mouvements.) Cette majorité va-t-elle pouvoir mettre en œuvre à la fois la prime défiscalisée pour les travailleurs, la participation à l’intéressement à l’initiative de Bruno Le Maire et un travail très important pour la dépendance, pour le maintien du niveau des retraites et pour l’accompagnement social, qu’il s’agisse des adultes handicapés ou de la prime d’activité qui monte à 10 milliards ?
Sortez de vos tableaux Excel, madame Louwagie, et regardez le cœur des Français ! (Sourires. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe LR.)
M. Pierre Cordier
Démagogie éhontée ! Vous faites des milliards de déficit de plus que Hollande !
Mme Véronique Louwagie
Les Français ne sont pas dupes !
Conseil national consultatif des personnes handicapées
M. le président
La parole est à M. Thierry Michels.
M. Thierry Michels
Madame la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, le Gouvernement a choisi, en 2017, de faire du handicap l’une de ses priorités. Deux ans plus tard, nombreuses sont les avancées réalisées afin de rendre notre société plus inclusive pour tous ses citoyens. Je salue en particulier les progrès dans le domaine de l’éducation, de la formation et du travail pour une meilleure inclusion des personnes handicapées, ou, plus récemment, la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés votée dans cet hémicycle.
Rien pour nous sans nous : les personnes en situation de handicap sont les plus à même de décider de ce qui est bon pour elles. D’où la volonté, exprimée dans l’un des chantiers de la conférence nationale du handicap 2018-2019, de renforcer leur pleine implication dans les politiques qui les concernent.
Vous nous avez confié, madame la secrétaire d’État, à Mme Carine Radian, membre du Conseil national consultatif des personnes handicapées, et à moi-même la responsabilité de travailler sur ce sujet. Nos propositions, reflet d’une large consultation et d’une coconstruction avec toutes les parties prenantes, vous ont été remises dans un rapport intitulé : « Vers la pleine citoyenneté des personnes handicapées ». Vous avez partagé, lors de la dernière session plénière du Conseil, début octobre, vos premiers arbitrages. Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, éclairer la représentation nationale sur les orientations que vous avez décidé de retenir ?
M. le président
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées
Je vous remercie, monsieur Michels, pour votre intérêt et le travail que vous avez accompli avec Carine Radian afin de renforcer, toujours et encore, la participation des personnes handicapées dans notre société et dans nos politiques publiques. Rien pour eux sans eux : ce ne sont pas que des mots ; c’est une conviction forte, c’est un levier fondamental pour l’amélioration de nos politiques publiques.
En préparation de la prochaine conférence nationale du handicap, j’ai dédié un chantier à la recherche des moyens de faire du CNCPH une instance encore et toujours plus légitime et plus forte, au sein de laquelle la diversité sera davantage organisée, la parole des personnes, mieux recueillie, et le lien avec les territoires, source majeure d’innovation sociale, renforcé. Le CNCPH rénové sera un accélérateur de la coconstruction des politiques publiques, grâce à l’expertise indéniable des personnes, des associations qu’il représente et plus largement des acteurs de la société civile – syndicats, parlementaires, collectivités locales notamment.
C’est dans ce sens que j’ai annoncé, lors de la réunion du CNCPH du 22 octobre, de nouvelles orientations, en m’appuyant largement sur vos préconisations, dont je salue la qualité. Oui, le handicap est une force car il rassemble et fédère de façon transpartisane les énergies et les contributions. Le futur CNCPH sera installé fin janvier 2020, et je sais que tout le monde est au travail dans cette perspective. Ce jour est lancé un appel à manifestation d’intérêt pour candidater pour le nouveau CNCPH, avec la signature d’une charte, contenant des engagements.
Je vous remercie d’avoir bien voulu continuer de porter ce projet en animant le comité de recommandations, qui pourra analyser les candidatures. Vous me donnez l’occasion par ailleurs de me faire l’écho dans cet hémicycle du choix du futur président du CNCPH, Jérémie Boroy, un homme engagé, lui-même en situation de handicap, un militant de l’accessibilité universelle, un entrepreneur qui a mis ses compétences au service des pouvoirs publics. Oui, comme ils le disent tous : jamais rien pour nous sans nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le président
La parole est à M. Thierry Michels.
M. Thierry Michels
Je vous remercie pour cette réponse détaillée et encourageante, madame la secrétaire d’État. Je pense pouvoir m’exprimer, au nom de mes collègues présents sur tous les bancs, en faveur de notre engagement commun au service de la société inclusive. Nous sommes avec vous pour relayer l’appel à candidatures dans tous nos territoires. Il est en effet essentiel que le CNCPH que vous appelez et que nous appelons de nos vœux soit le plus représentatif possible, car c’est dans les territoires que l’on peut constater les effets concrets de l’action publique et l’améliorer si nécessaire, et c’est dans les territoires que se développent les bonnes pratiques qui nous enrichissent et que nous devons généraliser.
Maladie de Lyme
M. le président
La parole est à M. Vincent Descoeur.
M. Vincent Descoeur
Madame la ministre des solidarités et de la santé,…
M. Pierre Cordier
Elle n’est pas là !
M. Vincent Descoeur
…je souhaite vous faire partager les interrogations de mes collègues de tous les bancs de cette assemblée qui participent aux travaux du groupe d’études sur la maladie de Lyme, que je copréside avec ma collègue de la majorité Nicole Trisse. À cette heure, de nombreux malades atteints de la maladie de Lyme, mais aussi les personnes souffrant de symptômes leur laissant craindre qu’elles sont atteintes, se retrouvent en errance thérapeutique et désespèrent d’obtenir des réponses à leurs nombreuses interrogations.
Mme Bérengère Poletti
Tout à fait !
M. Vincent Descoeur
Leur prise en charge comme le traitement de la maladie mais aussi et, c’est plus inquiétant, les recommandations de la Haute Autorité de santé, divisent la communauté scientifique, ce qui ajoute au désarroi des personnes qui souffrent et des associations qui les représentent, alors que, dans le même temps, le nombre de nouveaux cas recensés ne cesse d’augmenter : 67 000 pour la seule année 2018.
Nous n’avons pas la prétention de trancher un débat scientifique mais il est de notre devoir de relayer les préoccupations de nos concitoyens. C’est dans cet esprit que nous avons proposé, la semaine dernière, que soient inscrits au PLF pour 2020 les crédits nécessaires à la recherche contre cette maladie…
M. Michel Herbillon et M. Marc Le Fur
Très bien !
M. Vincent Descoeur
…sur les tests de dépistage, dont la fiabilité fait débat, sur les formes sévères voire persistantes de la maladie ou encore sur les co-infections. C’est le sens des amendements au PLF que nous avons déposés et qui ont été malheureusement rejetés après un avis défavorable du Gouvernement (Huées sur les bancs du groupe LR.)
Ma question est simple : pourquoi refusez-vous d’abonder le plan Lyme et d’octroyer les crédits nécessaires à la recherche, à l’heure où de nombreux pays se saisissent de la question ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs des groupes MODEM et LT.)
M. le président
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé
Je vous remercie pour votre question, monsieur Descoeur, et salue votre investissement dans ce dossier en tant que coprésident du groupe d’études maladie de Lyme, aux côtés de Mme Nicole Trisse. Le Gouvernement est sensible à la situation que vous décrivez ; nous avons d’ailleurs eu l’occasion d’en débattre la semaine dernière. Nous comprenons les difficultés des familles confrontées à l’errance diagnostique et avons pleinement conscience qu’il est indispensable de progresser dans la connaissance des maladies vectorielles. La fracture qui traverse la communauté scientifique témoigne de la nécessité d’aller plus loin.
Le ministère des solidarités et de la santé mène plusieurs actions en ce sens. En matière de prévention, des documents d’information élaborés par le ministère et les agences sanitaires sont mis à la disposition du public et des intervenants depuis quelques années. En parallèle, l’agence Santé publique France sensibilise chaque été plusieurs dizaines de milliers de correspondants. Par ailleurs, le plan national de prévention et de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmissibles par les tiques a permis d’instaurer des parcours de soins qui contribuent à lutter contre l’errance médicale des patients.
Mme Marie-Christine Dalloz
C’est faux, madame la secrétaire d’État !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État
Conformément à la gradation classique des soins, ces parcours sont organisés en trois niveaux : la médecine ambulatoire ; des centres de compétences répartis sur le territoire ; cinq centres de référence, dont la liste a été arrêtée cet été. Ces deniers ont pour mission d’animer le réseau de prise en charge des patients, de lancer des actions de recherche clinique et de proposer une réponse experte à des malades se trouvant dans une situation complexe. Pour leur part, les agences régionales de santé sont chargées d’identifier des centres de compétences. Enfin, la Haute Autorité de santé poursuit l’actualisation des recommandations, avec les organisations professionnelles de santé et les associations de malades. La prise en charge pluridisciplinaire offrira une vraie réponse aux patients.
M. Marc Le Fur
Mais vous avez refusé les crédits nécessaires !
M. Maxime Minot
Ah bravo !
M. le président
La parole est à M. Vincent Descoeur.
M. Vincent Descoeur
Je vous remercie de vos remerciements, mais j’aurais préféré que vous accédiez à notre demande. Je vous exhorte d’écouter le désarroi des malades, avant qu’ils ne cèdent au désespoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs des groupes MODEM et LT.)
Précarité étudiante
M. le président
La parole est à Mme Michèle Victory.
Mme Michèle Victory