XVe législature
Session ordinaire de 2020-2021

Première séance du vendredi 06 novembre 2020

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Première séance du vendredi 06 novembre 2020

Présidence de M. Sylvain Waserman
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Projet de loi de finances pour 2021

    Seconde partie (suite)

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2021 (nos 3360, 3399).

    Culture

    M. le président

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    Nous abordons l’examen des crédits relatifs à la culture (no 3399, annexes 11 et 12 ; no 3459, tome I).
    La parole est à Mme Dominique David, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Cela devient presque un truisme, et l’on ne peut s’en féliciter : la culture est parmi les secteurs qui payent le plus lourd tribut à la crise. Et le reconfinement, s’il reste justifié par une situation sanitaire très dégradée, lui porte un nouveau coup, terrible. Dans notre pays, qui porte en étendard son exception culturelle et donne depuis les Lumières une place centrale à la culture comme facteur d’émancipation, cette situation, évidemment, nous oblige. Le secteur de la culture a été soutenu au printemps dernier ; il l’est aujourd’hui et continuera de l’être en 2021, « quoi qu’il en coûte ».
    Ce ne sont pas que des mots : le projet de loi de finances – PLF – démontre un engagement clair et sans faille de l’État pour le monde de la culture. Les trois programmes de mon rapport sont en hausse de 4,5 %, soit une augmentation de près de 100 millions d’euros à périmètre constant. À cette hausse significative s’ajoutent les 228 millions du plan de relance en 2021. C’est un effort considérable. Cette année, 400 millions de crédits de paiement de plus que l’année dernière sont consacrés à la culture, sans compter les dispositifs de droit commun et les soutiens d’urgence mis en place en 2020, comme le fonds de soutien au spectacle vivant et le fonds festivals.
    Entrons dans le détail. Pour le spectacle vivant et les arts visuels, le programme 131, « Création », ce sont 37 millions de plus dans le PLF 2021 pour soutenir les dépenses d’investissement, les réseaux artistiques dans le territoire ainsi que le fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle, le FONPEPS, qui passe de 17 à 22 millions. Et 2021 sera également – enfin, ai-je envie de dire – la première année de mise en œuvre du plan artistes-auteurs, pour une meilleure défense des intérêts des artistes, de leurs droits sociaux, de leur représentativité.
    Concernant le plan de relance, 168 millions seront ouverts en crédits de paiement pour la création : 82 millions pour venir en aide aux opérateurs publics qui dépendent pour certains fortement de leurs ressources propres, comme l’Opéra de Paris – mais c’est 60 % de l’enveloppe –, 53 millions pour les structures du spectacle vivant labellisées ou privées dans les territoires, 10 millions pour la transition écologique. Enfin, 33 millions permettront d’engager un grand plan de commandes publiques et de mesures d’urgence pour les jeunes artistes.
    Relance de la demande pour les créateurs, soutien aux réseaux artistiques dans les territoires, modernisation écologique des structures, aide à la structuration de l’emploi et défense des intérêts des artistes : le PLF 2021 traite tous les enjeux de la création.
    La priorité que le Président de la République entend donner à la transmission des savoirs et à la démocratisation culturelle s’illustre par l’effort consenti sur le programme 361. Ce programme, ce sont 750 millions d’euros, soit une hausse de 6 %. Une répartition plus claire des dépenses de fonctionnement du ministère et les dépenses pour la démocratisation culturelle sur deux programmes différents permettront de sanctuariser ces crédits. C’était impératif.
    La nouvelle délégation qui en aura la charge portera une attention particulière aux territoires. Je m’en félicite. Je pense notamment au suivi des festivals, qui devrait être renforcé. Le soutien financier mais aussi politique aux festivals est crucial : ils jouent un rôle structurant dans leur territoire. Très fragilisés, ils sont la proie de manœuvres de concentration qui risquent de s’accélérer à la faveur de la crise. Il nous faut les protéger, c’est une question de souveraineté culturelle. Je salue, dans ce contexte, la tenue des états généraux des festivals, qui participent de cette reconnaissance politique dont nos festivals ont tant besoin.
    Parmi les mesures nouvelles, 20 millions d’euros supplémentaires iront au pass culture. Ce dispositif, c’est vrai, a connu un démarrage difficile. L’expérimentation, dans des départements disséminés à travers tout le pays, n’a pas aidé à sa bonne identification. Mais le bilan s’améliore, le taux d’activation est en hausse permanente. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, la part du numérique, c’est moins de 30 % des achats des jeunes. Nous avons les moyens de généraliser le dispositif pour lui donner sa pleine puissance. Il faut le faire pour renforcer l’accès de nos jeunes à la culture et soutenir ainsi indirectement les acteurs culturels de nos territoires, qui souffrent tant.

    M. le président

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    La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Certains disent qu’un bon budget est un budget qui augmente. Dans ces conditions, madame la ministre de la culture, le budget du programme « Patrimoines » est un très bon budget : 1,36 milliard d’euros, 36 % d’augmentation, c’est du jamais vu. (Mme Maud Petit applaudit.)
    La commission des finances l’a approuvé et, comme rapporteur spécial, j’y ai donné un avis favorable alors que, comme vous le savez, depuis plus de vingt-cinq ans je combats dans cette assemblée le dérapage des dépenses publiques. Mais la crise sanitaire justifie cette augmentation car la culture est frappée de plein fouet. Notre patrimoine, les musées, les monuments historiques, nos grands établissements, Versailles, le Louvre, Pompidou, Orsay, subissent, comme les entreprises, une hémorragie de ressources – billetteries des visiteurs, location d’espaces, mécénat ou activités commerciales diverses. Or, depuis plus de vingt ans, la puissance publique a cherché à développer les ressources propres pour soutenir le financement du patrimoine national. C’est une bonne politique, qu’il faut absolument poursuivre, mais la crise sanitaire remet en cause ce modèle. Il est donc légitime que la puissance publique, à commencer par l’État, vienne à la rescousse et apporte son soutien à notre patrimoine, qu’il soit public ou privé.
    Le plan de relance trouve donc sa pleine application dans la sauvegarde de notre patrimoine. Les crédits normaux progressent de 4,5 %, à plus de 1 milliard, mais la mission « Plan de relance » apporte 344 millions d’euros supplémentaires en crédits de paiement en 2021, et, surtout, une autorisation d’engagement portée à 614 millions. Aux deux tiers, les crédits de relance viennent soutenir nos grands établissements patrimoniaux, en particulier ceux touchés par l’effondrement du tourisme international, comme le Louvre, Versailles ou Orsay. Ces grandes institutions culturelles subissent au total un choc de près de 300 millions d’euros, compensé par le plan de relance, ce qui leur permet de rester ouvertes et de continuer à investir, contrairement à certains pays où beaucoup d’institutions ont fermé, aux États-Unis et au Royaume-Uni par exemple.
    Le deuxième bloc de crédits de la relance concerne l’investissement, avec différentes enveloppes, d’un montant total de 280 millions sur deux ans. Je signale tout d’abord les aides aux collectivités locales propriétaires de musées ou de monuments historiques. De même, les crédits du plan cathédrales vont plus que doubler en deux ans. À l’occasion de ce plan, nous devons, nous, parlementaires, être très vigilants sur le suivi et l’évaluation. Il faut que ces crédits soient correctement utilisés. Il y aura des problèmes d’organisation pour poser en priorité les questions de sécurité et coordonner tous les intervenants, en liaison avec le clergé affectataire.
    Le grand projet présidentiel du quinquennat, Villers-Cotterêts, reçoit quant à lui 100 millions d’euros, soit le tiers du plan de relance. Ce n’est pas parce que les travaux dérapent, mais parce que les financements privés et le mécénat qui étaient prévus ne sont pas au rendez-vous, ce qu’on peut comprendre. Il faut donc que l’État compense.
    Le patrimoine non protégé va continuer à bénéficier du loto avec la mission Bern. L’édition 2020 devrait rapporter comme les autres années à peu près 20 millions d’euros. Vous avez de la chance, madame la ministre, car nous n’aurons pas cette année la polémique sur la compensation de la fiscalité du loto, puisqu’elle est d’ores et déjà acquise avec l’utilisation des crédits mis en réserve.
    Un mot sur l’Hôtel de la Marine, car je pense qu’il va être une grande réussite. Le montage est très intéressant. Le budget – 115 millions d’euros – a été tenu, avec 10 millions seulement de crédits publics et un emprunt de 80 millions gagé par des recettes commerciales, notamment les bureaux. Je vous invite à le visiter ; nous espérons l’ouvrir en avril prochain, si la crise le permet. C’est un monument dont le potentiel est considérable et qui permet aussi au Centre des monuments nationaux, le CMN, de jouer son rôle de péréquation. Au passage, madame la ministre, il faudra tenir bon sur l’établissement public national du Mont-Saint-Michel car, si nous voulons financer, par le biais du CMN, les petits monuments qui n’ont pas beaucoup de visiteurs, il faut que ceux qui en ont beaucoup puissent contribuer.
    Enfin, s’agissant du Grand Palais, projet énorme abondé par plus de 460 millions d’euros, une révision s’opère avec un double objectif : tenir le budget – c’est la moindre des choses – et tenir le délai imposé par les Jeux olympiques, puisque ce monument doit accueillir les épreuves de taekwondo et d’escrime.
    Je termine d’un mot sur Notre-Dame. La souscription a porté ses fruits, avec 340 000 donateurs et 830 millions d’euros récoltés, dont 230 millions sont déjà encaissés. Il faudra être parfaitement clair sur la nature des dépenses financées par les souscriptions, et je proposerai un amendement en ce sens. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

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    La crise sanitaire que nous traversons frappe très durement le monde de la culture : plus de spectacles, plus de touristes dans les musées et des pertes qui se comptent en milliards d’euros. Face à cette crise, l’État joue son rôle d’amortisseur. Pour le patrimoine, la culture et l’enseignement artistique, les autorisations d’engagement du plan de relance atteignent 1 milliard d’euros. Toutefois, une partie de ces crédits auraient pu être inscrits dans la mission « Culture » plutôt que dans la mission « Plan de relance ». C’est le cas des sommes destinées à combler les déficits des grands opérateurs ; ce sont des dépenses certes nécessaires et que j’approuve – car nous n’allons pas laisser couler Versailles ou l’Opéra de Paris –, mais ce n’est pas de la relance.
    Pour que l’action soit efficace, il faut que les crédits soient dépensés rapidement et sur l’ensemble du territoire. Je regrette que davantage de moyens ne soient pas consacrés à la restauration des monuments historiques des collectivités territoriales et des propriétaires privés.

    Mme Constance Le Grip

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    En effet !

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis

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    Seuls 40 millions d’euros sur deux ans sont prévus pour cela. C’est dommage car le bon entretien des monuments importe à tout le monde. Ainsi, Victor Hugo écrivait : « Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde. »
    C’est dommage aussi d’un point de vue économique, car ce sont des crédits qui peuvent être dépensés rapidement et qui sont répartis sur tout le territoire, où ils contribuent à l’activité du bâtiment et des métiers d’art. Dans ma circonscription, j’ai auditionné deux propriétaires de monument historique, ainsi que le maire d’une petite commune dont l’église pourrait s’effondrer. Ils espèrent tous des crédits pour démarrer leurs chantiers.
    En dehors du plan de relance, les crédits de la mission « Culture » s’élèvent à 3,2 milliards d’euros. En ce qui concerne le programme « Patrimoines », je souhaite m’attarder sur deux grands projets qui pèsent lourd dans la programmation pluriannuelle des crédits.
    Premièrement : Villers-Cotterêts. J’ai eu la chance de visiter ce chantier. Le château a été laissé dans un état de délabrement par la mairie de Paris, qui y logeait un EHPAD jusqu’en 2014.
    Je me réjouis que l’on entreprenne la rénovation de ce château de la Renaissance. Cependant, je suis frappée par la disproportion des moyens qui lui sont consacrés. Un investissement de 110 millions d’euros était annoncé pour le projet initial, or le plan de relance prévoit 100 millions supplémentaires, dont 25 millions pour compenser le fait que l’État n’a trouvé aucun mécène pour ce projet et 75 millions pour compenser le fait qu’il n’a trouvé aucun investisseur privé pour restaurer et exploiter les communs. Avouez que cela sème le doute sur l’ambition de ce grand projet présidentiel !
    Deuxième point : la rénovation du Grand Palais. Vous avez décidé, madame la ministre, de revoir les ambitions initiales de ce chantier pharaonique, et vous avez raison. Cependant, quel n’est pas notre étonnement de voir que le nouveau projet est présenté avec le même budget que l’année dernière, soit 466 millions d’euros.
    En ce qui concerne le spectacle vivant, l’État a mis en œuvre plusieurs dispositifs d’aide aux entreprises et aux salles de spectacle grâce au Centre national de la musique – CNM – et à l’Association pour le soutien du théâtre privé. J’insiste sur la nécessité de maintenir des aides d’urgence en 2021 tant que l’activité ne pourra pas reprendre de façon normale.
    Je me réjouis de l’adoption, en première partie du projet de loi de finances pour 2021, du crédit d’impôt pour le théâtre et j’espère que les cabarets pourront en bénéficier s’ils ne bénéficient pas du crédit d’impôt pour le spectacle vivant. J’observe cependant un déséquilibre frappant entre les moyens accordés au spectacle vivant et ceux consacrés aux arts plastiques. Certes, le spectacle vivant est plus directement touché par les mesures de confinement, de distanciation et de couvre-feu, mais les artistes plasticiens subissent l’annulation des expositions et n’ont pas d’assurance chômage.
    Enfin, le pass culture semble désormais relégué au second plan. Le confinement est malheureusement intervenu au moment où il devait être étendu à de nouveaux départements. En commission, Mme la ministre a déclaré envisager une possible réduction de la valeur du passe culture à 300 euros par jeune. Ces changements nuisent à la lisibilité du dispositif et compromettent sa réussite.
    Pour conclure, malgré ces différentes réserves, la commission des affaires culturelles a émis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Culture ». (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Maxime Minot

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    Bravo !

    M. le président

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    Nous en venons aux porte-parole des groupes.
    La parole est à Mme Sophie Mette.

    Mme Sophie Mette

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    Nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner le budget consacré à la culture au sein du projet de loi de finances pour 2021. Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés se réjouit des moyens sans précédent déployés pour ce secteur si durement touché par la crise. Ainsi, ce sont 138 millions d’euros qui viennent renforcer le budget de 2020, soit une augmentation de 4,5 %. L’effort ainsi consenti permettra de poursuivre, au cours de l’année à venir, la trajectoire de démocratisation et de diffusion de la culture à toutes et à tous, trajectoire que nous défendons avec conviction depuis le début de la législature.
    Rappelons que l’action résolue de notre majorité pour le secteur culturel a permis de développer de nombreuses initiatives depuis 2017. Il convient notamment de mentionner le soutien apporté à la politique patrimoniale grâce au loto du patrimoine ou encore la multiplication des Micro-Folies, qui a permis de rendre accessibles les œuvres partout sur le territoire. De même, le développement du pass culture, aujourd’hui en phase d’expérimentation, marque une avancée dans la diffusion de la culture pour les plus jeunes.
    En 2021, le déploiement de la culture à destination de l’ensemble de nos concitoyens, jeunes et aînés, citadins et ruraux, demeurera l’une de nos priorités. Cette ambition s’est vue renforcée par la crise sanitaire, qui a révélé la place de premier rang que nous accordons à la culture dans notre quotidien. Se rendre au musée, au cinéma, à un concert ou au théâtre est une habitude inhérente de notre vie de tous les jours, dont l’importance s’est révélée depuis que nous en sommes privés, c’est-à-dire depuis plusieurs mois maintenant.
    C’est parce que le secteur de la culture est si important que notre groupe veillera à ce que le budget pour 2021 apporte le soutien nécessaire aux différents acteurs culturels, que nous devons aider à faire face à l’épidémie. De fait, la crise sanitaire a frappé, et frappe encore, de plein fouet le monde culturel, qui se retrouve aujourd’hui dans une situation très précaire. Le chiffre d’affaires des divers secteurs culturels marchands connaît en 2020 une baisse d’activité de 25 % par rapport à 2019, tandis que les pertes nettes subies par les opérateurs s’élèvent à plus de 500 millions. Dans ce contexte, l’État a apporté un soutien massif en créant de multiples dispositifs mais, comme pour de nombreux autres secteurs, les effets de la crise sanitaire seront encore visibles l’année prochaine. Le projet de loi de finances pour 2021, loin de sacrifier le champ culturel, apporte ainsi une réponse à la hauteur de ces pertes alarmantes.
    Pour le secteur de la création, un soutien est prévu en faveur des lieux de production, tandis que des aides sont attribuées par le Centre national des arts plastiques – CNAP – aux galeries, aux éditeurs et aux producteurs audiovisuels. Cet effort participe ainsi de la politique d’aide aux artistes et aux entreprises de la création, à laquelle nous tenons car elle favorise la diversité des arts visuels. Il répondra, je l’espère, aux craintes des professionnels.
    Nous nous félicitons, par ailleurs, de la place particulière occupée par le patrimoine dans le budget de cette année. Des fonds d’une ampleur inédite sont mobilisés, non seulement en faveur de la restauration des monuments qui font notre histoire commune, mais aussi pour favoriser d’autres investissements essentiels, ceux des collectivités, qui connaissent bien le patrimoine, et ceux des opérateurs.
    En matière de démocratisation de l’accès à la culture, le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » se donne les moyens de ses ambitions avec une augmentation des fonds alloués à l’action 01 « Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle » et à l’action 02 « Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle ».
    En revanche, l’action 03 « Langue française et langues de France » ne bénéficie pas d’augmentation de crédits, avec une dotation maintenue à 3,2 millions. Les députés du groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés rappellent l’importance du soutien à la francophonie partout dans le monde. Notre langue porte avec elle nos valeurs humanistes. L’actualité nous rappelle cruellement à quel point nous en avons besoin.
    Je ne peux finir sans évoquer les efforts sans précédent prévus en faveur de la culture dans le plan de relance. Ces crédits supplémentaires permettront de relancer le secteur du patrimoine, de donner un nouvel élan à notre modèle artistique, mais aussi d’apporter le soutien nécessaire à l’emploi artistique face aux difficultés liées à la persistance de la crise sanitaire. Au nom du groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés, je salue ce budget juste et cohérent à la lumière des objectifs gouvernementaux. Nous voterons donc en faveur des crédits alloués à la mission « Culture » pour l’année 2021. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, LaREM et Agir ens.)

    Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture

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    Merci, madame Mette !

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory.

    Mme Michèle Victory

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    Cinémas et musées fermés, théâtres et discothèques fermés, librairies fermées, spectacles et festivals annulés : la liste est tristement longue. Ne nous le cachons pas, le monde de la culture est en grande souffrance. Déjà sonné par la première vague, le voilà au bord de la noyade avec le second confinement et ses arbitrages contestés sur la définition des biens essentiels. Étrange chose que ce pays de l’exception culturelle où l’on a tant de mal à admettre la place essentielle des biens culturels dans le quotidien de nos concitoyens…
    Pourtant, rappelons-le, les lieux de culture n’ont été source d’aucun cluster de contamination. Ils ont assumé leurs responsabilités, fait preuve d’inventivité et continué à se battre coûte que coûte pour soutenir leur filière, leurs artistes, leurs salariés, leurs indépendants et leurs intermittents.  
    Madame la ministre, vous avez montré votre attachement au secteur culturel en augmentant le budget de 5 % par rapport à 2020 et en présentant un plan de relance de 2 milliards, mais nous craignons que cela ne suffise pas face à la crise et à ses incertitudes. Si les pertes sont estimées aujourd’hui à 22 milliards, nous ne mesurons pas encore, et vous le savez, toute l’ampleur de la catastrophe. Quant au plan d’urgence, nous craignons qu’il soit davantage un plan de soutien qu’un véritable plan de relance. Le quatrième projet de loi de finances rectificative, le PLFR 4, devra de nouveau venir en soutien des secteurs sinistrés.
    Dans ce contexte, les députés du groupe Socialistes et apparentés tiennent à insister sur plusieurs points qui appellent de la vigilance. En premier lieu, notre inquiétude porte sur la reprise de l’activité culturelle en août 2021, déterminante pour les intermittents du spectacle, et sur les modalités de mise en œuvre de l’année blanche. Une année suffira-t-elle à sauver les 260 000 intermittents ?
    Nous nous préoccupons ensuite de la situation des collectivités. Ces relais essentiels de la diffusion culturelle ne bénéficient que de 40 millions dans le programme du fonds incitatif et partenarial sur les 2 milliards du plan de relance et de 2 millions de dotation pour l’appel à projets « quartiers culturels et créatifs ». Les efforts en direction des collectivités doivent être accentués et un équilibre recherché. Le soutien indispensable aux grands opérateurs ne doit pas se faire à leur détriment. Il passe notamment par le maintien des aides décentralisées en direction des directions régionales des affaires culturelles – DRAC – afin de maintenir les réseaux, les festivals et les résidences dont nos territoires ont besoin.
    Le maillage territorial est également assuré par nos écoles d’art territoriales, dont la plupart sont des établissements publics à caractère industriel et commercial – EPIC. Un soutien clair des politiques publiques est nécessaire en leur faveur, non seulement pour rééquilibrer les inégalités statutaires, mais aussi pour donner à l’enseignement supérieur public les moyens de jouer à armes égales avec les acteurs privés, de rappeler les enjeux et d’affirmer les ambitions de la France dans ce domaine. Les conservatoires font également partie de ce maillage et des éclaircissements sont nécessaires quant au soutien dont ils bénéficieront à l’avenir. Les services du ministère de la culture prévoient une réforme des conservatoires, mais le budget qui nous est présenté n’en dit rien.
    Les députés du groupe Socialistes et apparentés sont très attachés à l’accès à la culture et à sa démocratisation. La présence d’œuvres d’art dans l’espace public joue un grand rôle pour éviter le cloisonnement des lieux de culture et devrait être favorisée. Si le dispositif « 1 % artistique » a été pensé dans ce but, son efficacité est à revoir.
    De même, nous soutenons la poursuite d’actions fortes autour des politiques de démocratisation de la culture par le biais de l’éducation artistique et culturelle – EAC. Toutefois, nous restons mitigés sur les indicateurs de suivi utilisés pour juger de son efficacité. Le fait de permettre la rencontre entre une œuvre et un élève au moins une fois dans la scolarité peut-il s’assimiler à une entreprise de démocratisation de la culture ? Faire entrer l’art à l’école, bien sûr, mais en construisant de véritables parcours d’éducation artistique et culturelle ! Pour cela, nous devons diffuser les langages qui permettent la transmission et la compréhension des œuvres et rapprochent les publics les plus éloignés des belles choses du monde.
    Aussi, cette année encore, ne croyons-nous pas que les 57 millions dédiés au pass culture en 2021 atteindront leur cible. La plupart des enquêtes démontrent que cet outil n’est utilisé qu’à la marge par les élèves des milieux socioprofessionnels défavorisés. Il y a là comme un impensé de notre système éducatif qui, dans sa vision étriquée du temps scolaire, s’obstine à ne pas considérer les enseignements artistiques comme fondamentaux, capables de remédier aux difficultés d’apprentissage et de transformer les esprits.
    Notre groupe est par ailleurs très inquiet des milliers d’emplois artistiques qui sont menacés. Les 5 millions supplémentaires du budget du FONPEPS risquent fort de ne pas suffire à sauver tous les emplois. Un soutien plus fort est indispensable pour maintenir ces emplois faits de compétences multiples et consolider de manière pérenne ce tissu économique.
    Outre cette menace, les conditions de précarité qui pèsent sur les artistes-auteurs, interprètes et compositeurs sont injustifiables. Il est urgent de remettre à plat l’économie de ce secteur, dans laquelle, trop souvent, on ne tient pas compte du processus de création, mais du seul système de diffusion. L’inadaptation de la fiscalité et des droits sociaux aux réalités multiformes des artistes-auteurs ne peut perdurer. Les différents régimes et statuts ont d’ailleurs révélé leurs failles lors de la crise : les dispositifs mis en place par le Gouvernement ont peiné à les reconnaître et à les prendre en charge.
    Et puis il y a le secteur des métiers d’art, véritable richesse nationale qui, avec 0,56 million d’euros de crédits déconcentrés supplémentaires, a bien du mal à affronter la crise.
    Enfin, je veux évoquer les grands oubliés des plans de relance : les intermittents des secteurs du tourisme, de l’hôtellerie et de l’événementiel, soit plus de 20 000 personnes qui ne rentrent dans aucune case mais qui, pourtant, participent pleinement à l’économie et au dynamisme du monde culturel.
    Pour conclure, madame la ministre, le groupe Socialistes et apparenté reconnaît l’ampleur des efforts consentis. Une fois n’est pas coutume, parce que nous faisons le pari de la confiance et parce que nous soutenons votre action pour la culture, nous voterons en faveur du budget qui lui est consacré. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à M. Benoit Potterie.

    M. Benoit Potterie

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    Nous examinons ce matin, dans un contexte très particulier, les crédits du projet de loi de finances pour 2021 consacrés à la culture. Chacun sait la place singulière que joue la culture dans notre pays. Les débats de ces derniers jours sur la fermeture des librairies illustrent notre rapport particulier à la culture et aux œuvres de l’esprit. Nous sommes fiers de notre exception culturelle et nous avons raison de l’être. Notre pays sait pouvoir s’appuyer sur la beauté de ses monuments, qui mettent en valeur nos paysages, comme sur l’excellence de ses musées et la qualité de sa production artistique. Ces atouts culturels jouent un rôle essentiel dans l’attractivité de la France, qui demeure l’une des destinations touristiques les plus recherchées dans le monde.
    Depuis mars dernier, notre pays fait face à une crise sanitaire d’ampleur mondiale, qui a paralysé nos économies et bouleversé nos vies. Tous les secteurs sont touchés et durablement fragilisés. Le secteur culturel ne fait malheureusement pas exception.
    Face à cette situation, le Gouvernement et la majorité mobilisent depuis des mois des moyens exceptionnels pour combattre les effets du virus et protéger nos concitoyens. Pour la culture, il nous fallait agir sans tarder avec deux impératifs : protéger le secteur et refonder notre ambition culturelle.
    Cela passe par une action concertée susceptible de répondre aux inquiétudes de ceux qui font vivre et portent haut notre exception culturelle : les artistes-auteurs, les intermittents et l’ensemble des métiers du spectacle, dont la survie était menacée par l’annulation des concerts d’été et des festivals, mais aussi les musées, très pénalisés par les restrictions sanitaires.
    Le Gouvernement a déjà pris des mesures fortes en ce sens, des mesures ciblées telles que l’année blanche pour l’intermittence, pour un montant de 849 millions d’euros, ainsi que la mise en place d’aides transversales jusqu’à la fin de l’année 2020 : je pense à l’activité partielle, aux exonérations de charges ou au fonds de solidarité, pour un montant total de 3,3 milliards d’euros déjà engagés en loi de finances rectificative.
    Il faut ajouter à ces mesures les moyens du plan de relance annoncé en septembre dernier : il constitue un effort sans précédent pour éviter l’effondrement de notre économie et pour préparer l’avenir. Il comporte un volet ambitieux en matière culturelle, avec 2 milliards d’euros qui s’ajoutent aux crédits nouveaux alloués au ministère de la culture en 2021.
    En articulation avec ces priorités, les moyens de la mission « Culture » sont en hausse de 138 millions d’euros en 2021, pour atteindre un total de 3,2 milliards en crédits de paiement.
    Le groupe Agir ensemble salue également les nouvelles mesures de soutien annoncées fin octobre pour les filières du spectacle vivant et du cinéma ; elles s’élèvent au total à 115 millions d’euros débloqués dans le cadre du PLFR 4.
    C’était nécessaire au vu de l’impact très lourd, pour l’ensemble du secteur, des mesures qui ont été prises pour protéger le pays face à l’épidémie. Les difficultés sont connues. Les mesures de distanciation et le maintien d’une jauge maximale n’avaient permis qu’une reprise très partielle de l’activité, laquelle était loin de compenser les pertes subies lors du premier confinement du fait des fermetures administratives.
    Ces 115 millions d’euros nouveaux consacrés au spectacle vivant et aux cinémas viennent s’ajouter aux mesures d’urgence ciblées déjà prévues, en particulier la prolongation des droits pour les intermittents du spectacle jusqu’au 31 août 2021. Des fonds d’urgence pour le théâtre privé, pour le Centre national de la musique ou pour les festivals ont également été créés pour soutenir ces secteurs et compenser la baisse du nombre de spectateurs.
    Dans le même temps, un fonds d’urgence spécifique de solidarité de 5 millions d’euros a été mis en œuvre sous l’égide du ministère de la culture. Il permet de protéger les artistes non éligibles aux dotations déjà en place et qui ne bénéficient pas du statut d’intermittent du spectacle.
    L’État a donc joué et continuera de jouer pleinement son rôle pour sauvegarder notre secteur culturel.
    Madame la ministre, le groupe Agir ensemble soutient pleinement les engagements que vous avez pris aux côtés du monde de la culture. Les chantiers sont vastes pour protéger ceux qui font vivre notre exception culturelle. Ils sont essentiels car la culture, c’est ce que nous sommes ; son rôle est plus que jamais décisif dans notre société. C’est par elle que se matérialise la résilience d’un peuple, et c’est elle qui fonde en définitive la singularité de notre nation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Béatrice Descamps.

    Mme Béatrice Descamps

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    André Malraux avait raison d’affirmer que la culture était ce qui avait fait de l’homme « autre chose qu’un accident de l’univers ». Cette idée résonne encore aujourd’hui dans la politique culturelle française, qui voit notre pays investir généralement davantage dans ce domaine que nos voisins européens.
    La mission « Culture » traduit encore cette année son importance, avec des crédits en nette augmentation. Nous nous réjouissons que ce budget concerne tous les champs du secteur et qu’il soit ajusté à la situation actuelle. On ne saurait sous-estimer le rôle qu’occupe la culture dans notre société, partout sur le territoire, et je voudrais ici saluer et assurer de tout notre soutien tous les artistes et acteurs culturels de l’événementiel qui nous permettent de nous enrichir, de nous épanouir, et qui souffrent tellement en ces temps de crise sanitaire.
    Je souhaite m’arrêter un instant sur la cohésion sociale et territoriale encouragée par le pass culture, politique principale du programme présidentiel en matière culturelle. S’il se taille la part du lion dans les crédits de la culture – 59 millions d’euros lui sont dédiés –, la toute prochaine finalisation du pass verrait son enveloppe diminuer. Malheureusement, les perspectives sanitaires devraient laisser peu de place au spectacle vivant et aux concerts au sein de ce financement.
    Madame la ministre, comment rendre vertueux l’écosystème du pass culture, afin qu’il ne profite pas uniquement aux industries culturelles numériques ou à l’achat de livres scolaires en cette période de crise sanitaire, et qu’il permette un échange entre les artistes et les jeunes d’un même territoire ?
    Avant même le pass culture, c’est le contact entre les écoles et le milieu culturel qui m’inquiète. Selon les estimations, la fréquentation des lieux de culture par les écoles devrait continuer à diminuer en 2021, après avoir logiquement connu une forte baisse en 2020. Nous comprenons, en ce moment plus que jamais, que les questions sanitaires peuvent poser problème. Cependant, l’école est parfois le seul lieu d’accès à la culture pour certains élèves, et nous ne souhaitons pas qu’ils se retrouvent pénalisés par la crise. Le groupe UDI et indépendants proposera ainsi que des fonds soient débloqués pour aider nos élèves à ne pas perdre contact avec les lieux et les acteurs de la culture.
    Je crois fermement que la culture est plus qu’un secteur d’activité. Elle est une « nécessité vitale », pour reprendre les termes très justes employés par Éric de Chassey. Dès que l’on ferme un lieu culturel, écrit-il, « le préjudice n’est pas seulement économique […], il est aussi intellectuel, émotionnel et spirituel » pour l’ensemble des Français.
    La situation exceptionnelle que nous connaissons cette année est probablement amenée à se poursuivre en 2021, ce qui nous amène, madame la ministre, à nous interroger sur les concertations que nous devons mener avec les artistes et le public. Qu’adviendra-t-il de nos festivals de théâtre, de musique, de cinéma ? Dans tous les territoires, de nombreux acteurs de notre tissu culturel s’inquiètent des pertes de leur billetterie, lesquelles vont parfois jusqu’à menacer leur survie et, par effet boule de neige, celle de nombreux artistes et associations.
    L’exception culturelle et la richesse de l’Hexagone se traduisent aussi par plus de 45 000 édifices, qui réjouissent habituellement 12 millions de visiteurs lors des Journées du patrimoine, par exemple. Monuments classés ou inscrits, ces lieux de mémoire ont dû fermer à nouveau leurs portes depuis le reconfinement et n’ont que peu de perspectives pour le début d’année 2021. De nombreux monuments historiques seront ainsi privés de leur revenu, uniquement généré par l’accueil du public.
    En vertu d’un arrêté de Bercy, certains de ces monuments, en difficulté du fait de la pandémie, pourront bénéficier d’un prêt garanti par l’État. La somme de 42,8 millions d’euros supplémentaires débloquée pour le patrimoine va également dans le bon sens. Toutefois, je m’inquiète de la manière dont les travaux d’entretien, de protection et de rénovation pourront être financés. Seront-ils encore réalisables à la sortie de la crise, au vu des sommes conséquentes dépensées pour soutenir l’économie française ?
    Vous le savez, madame la ministre, j’accorde aussi une attention particulière aux arts plastiques, notamment aux écoles consacrées à cette pratique dans nos territoires. Je présenterai de nouveau des amendements vous proposant de soutenir l’enseignement supérieur et la recherche dans ce domaine, afin de pérenniser leurs fonds, leurs savoir-faire et leurs diplômes.
    Enfin, je voudrais évoquer le sort de nos 670 000 intermittents. Votre gouvernement a annoncé une année blanche pour eux ; ils peuvent compter sur les indemnités proposées jusqu’en août 2021. Mais, encore une fois, des inquiétudes se font sentir pour l’après, du fait de l’absence de visibilité et la perspective d’agendas vides.
    J’ai peu évoqué le plan de relance, mais son rôle sera bien entendu primordial, essentiel. Notre culture est en crise et souffre des doutes créés par la situation sanitaire. Tout en défendant quelques principes importants à nos yeux, le groupe UDI et indépendants votera en faveur de cet important budget de soutien. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – Mme Brigitte Kuster applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Dumas.

    Mme Frédérique Dumas

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    Cela ne fait désormais plus aucun doute : les secteurs de la culture seront parmi les plus fragilisés par la crise sanitaire et ses répercussions, et ils souffriront pour longtemps de ses conséquences désastreuses.
    Le confinement du printemps a déjà causé des dommages quasi irréversibles. La filière économique du patrimoine et de l’architecture enregistre une perte de chiffre d’affaires massive de 30 % sur l’année 2020.
    Pour le secteur de la création artistique, les pertes s’élèvent à plus de 7 milliards d’euros du fait de la fermeture des salles de spectacle et des lieux d’exposition, de l’annulation des tournées, des festivals, des foires et des salons, et de l’arrêt des commandes artistiques. Il faut affronter la réalité : certains acteurs ne se relèveront pas de ce nouveau confinement, surtout s’il devait durer.
    Faute de moyens humains et matériels, la politique de dépistage mise en place lors du déconfinement, « tester-tracer-isoler », a échoué. Elle s’est caractérisée par des protocoles de tests non harmonisés et inadaptés, une absence de priorisation, un manque d’intervention et de suivi social sur le terrain ; en outre, des expériences pilotes telles que celle menée par l’épidémiologiste Renaud Piarroux, riche de son expérience de la gestion des épidémies, n’ont pas été généralisées. On a privilégié le quantitatif et l’effet d’annonce sur le qualitatif et les interventions de terrain inspirées de ce qui a fonctionné ailleurs.
    Le personnel de la sécurité sociale arrive à saturation. La situation sanitaire s’aggrave, nous le savons bien, et les risques de tensions sur le système de santé s’accentuent. L’équilibre que l’on a voulu conserver entre économique et sanitaire ne tiendra pas la route.
    Le risque d’un jour sans fin pour les acteurs de la culture est désormais bien présent dans tous les esprits. Dans un tel contexte, les crédits de la mission « Culture » sont forcément attendus, aussi bien pour faire face à l’urgence que pour préparer l’avenir. La culture a besoin de temps long.
    Les crédits sont certes en augmentation, après transferts, de 138 millions d’euros par rapport à 2020. Nous saluons cette hausse d’environ 4,5 %. Ils s’ajoutent aux mesures d’urgence prises depuis le début de la crise, ainsi qu’à celles du plan de relance. Le groupe Libertés et territoires souhaitait saluer les initiatives prises par le Gouvernement, mais nous savons maintenant que ces dernières ne seront pas à la hauteur ni de l’urgence ni de la relance nécessaire, alors que la reprise que nous souhaitons toutes et tous s’éloigne jour après jour.
    Relevons néanmoins tout d’abord les efforts réalisés. Un effort très important a été consenti à l’égard du programme « Patrimoines », qui atteindra plus de 1 milliard d’euros. Le plan de relance, lui, consacre au patrimoine 345 millions d’euros en crédits de paiement en 2021.
    Nous incitons néanmoins le Gouvernement, comme nous l’avons fait l’an dernier, à accentuer le soutien en faveur des patrimoines de toutes tailles, et dans tous les territoires. Nous regrettons encore trop souvent que les grands projets les plus visibles soient toujours les premiers bénéficiaires. À ce titre, la restauration du château de Villers-Cotterêts et le projet dans son ensemble apparaissent disproportionnés, à un moment où chacun est invité à revoir ses ambitions à la baisse.
    Nous saluons bien sûr l’effort réalisé s’agissant du programme « Création » : il consiste en un accroissement de 37 millions d’euros, qui s’ajoutent aux aides inscrites dans le plan de relance. Mais il comporte des oublis notoires, d’autant que plus le temps de la crise sera long, plus l’amont de la chaîne sera en danger. En l’occurrence, nous appelons vivement à augmenter les moyens destinés aux créateurs et aux producteurs. Nous proposerons un amendement visant à abonder les nouvelles actions que vous avez créées – les actions 01 et 02 du programme 131 – de 10 millions d’euros supplémentaires pour les acteurs du spectacle vivant et de 5 millions d’euros supplémentaires pour les arts visuels.
    La filière en aval subit elle aussi le choc de plein fouet. L’objectif d’augmenter la fréquentation du public dans les lieux culturels est totalement remis en cause par la crise sanitaire. Lors de l’examen du PLFR 3, nous avions proposé une aide à l’équipement des salles pour la captation de spectacles vivants, permettant de conjuguer présence physique et distanciée. Il nous paraît essentiel de poursuivre dans cette voie, car cette solution permet à la fois de répondre à l’urgence – la diffusion de spectacles en dépit des fermetures ou des mesures de distanciation physique – et, au-delà de la crise sanitaire, de favoriser le renouvellement du public et la réduction des fractures.
    Nous réitérerons cette proposition lors de l’examen du PLFR 4, car il faut aider les salles à s’équiper. Beaucoup n’ont pas les capacités d’investissements nécessaires, mais si elles ne s’équipent pas dès maintenant, elles ne seront pas opérationnelles à temps.
    Enfin, le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sera porté à 590 millions d’euros. Malheureusement, l’une des principales actions financées est celle du pass culture. Or, malgré les engagements des ministres de la culture successifs et malgré nos demandes de rapport, aucune évaluation indépendante n’a été présentée ni même réalisée sur ce qui reste toujours une expérimentation.
    Depuis 2018, nous reconduisons chaque année des crédits importants pour le pass culture : 5 millions d’euros pour sa préfiguration, 34 millions en 2019, 10 millions de plus en 2020, et encore 20 millions supplémentaires en 2021 – oui, 20 millions d’euros ! À quoi vont-ils servir, particulièrement en période de confinement ? Sans recul, il ne nous paraît pas pertinent d’attribuer des financements aussi importants à un dispositif qui, par son essence même, n’a jamais réussi à atteindre ses objectifs de départ, à savoir l’accès à la culture pour tous et la réduction des fractures culturelles, quelles qu’elles soient.
    Le groupe Libertés et territoires estimait que les crédits de la mission « Culture » constituaient une première étape positive ; nous avions donc l’intention de les voter. Mais, du fait de l’ampleur de la crise sanitaire et de sa durée, nous savons d’ores et déjà qu’ils risquent d’être insuffisants et, pour certains, injustement répartis. De ce fait, nous nous abstiendrons. (Mme Constance Le Grip applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive.

    M. Michel Larive

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    Les grands oubliés de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2021 sont les artistes-auteurs. Or la crise sanitaire traversée par notre pays agit comme un révélateur et un accélérateur des difficultés rencontrées par nos créatrices et nos créateurs. La fermeture des lieux de diffusion et de création a entraîné une dégradation sans précédent de leur situation économique.
    Rappelons que cette situation de précarité grandissante – évaluée et documentée dans le rapport qu’a remis Bruno Racine rue de Valois en janvier 2020 – n’est pas nouvelle. La majorité des quelque 270 000 artistes-auteurs que compte la France vit en dessous du seuil de pauvreté, ce qui fait que nombre d’entre eux doivent conjuguer leur travail artistique avec un métier alimentaire. Tous sont confrontés aux aléas de revenus incertains.
    Cette situation alarmante s’explique par deux raisons principales : les artistes-auteurs ne sont pas considérés et traités comme une catégorie professionnelle à part entière par le ministère de la culture ; ils sont dépendants financièrement d’un système de production et de diffusion marchand.
    Il y a donc urgence à élaborer des politiques publiques spécifiquement tournées vers une amélioration du statut des artistes-auteurs de notre pays. Les créatrices et les créateurs exigent de nous des mesures fortes, rapides et adaptées à leurs revendications. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé, la semaine dernière, une proposition de loi visant à la création d’un centre national des artistes-auteurs.
    Je souhaite utiliser le temps de parole qui m’est aujourd’hui imparti à cette tribune pour détailler le dispositif prévu par mon texte. Ce centre gérerait un observatoire chargé du suivi statistique et qualitatif des différents métiers des artistes-auteurs, qui permettrait aux pouvoirs publics de mieux les connaître dans leur globalité et leurs particularités professionnelles.
    Le centre assurerait la publication d’un travail informatif regroupant toutes les règles relatives aux artistes-auteurs, mais aussi les opportunités les concertant, notamment les appels d’offres et les prix. Le but serait de créer un outil de référence nationale à destination des artistes-auteurs et de leurs partenaires économiques, ainsi que de l’administration publique.
    Le centre serait aussi un lieu de médiation pour dénouer les litiges entre les artistes-auteurs et les acteurs de l’aval – diffuseurs, éditeurs, producteurs. Il administrerait un pôle de négociations collectives, afin d’organiser le dialogue social entre les représentants des organisations professionnelles d’artistes-auteurs et ceux des circuits de diffusion. Des accords collectifs pourraient ainsi être adoptés et rendus obligatoires par Mme la ministre de la culture.
    Ma proposition prévoit également un dispositif de lutte contre les inégalités parmi les artistes-auteurs, en prenant en compte le sexe, la géographie et les origines sociales des créatrices et des créateurs.
    Les aides aux artistes comporteraient deux types de dispositifs, à commencer par un fonds de soutien à la création artistique, qui ne serait pas organisé en silos comme à présent, mais de manière globale, en prenant en compte l’ensemble de la population professionnelle des artistes-auteurs. Ma volonté est d’augmenter considérablement la part des aides à la création dans les aides déployées par le ministère de la culture.
    Le centre permettrait aussi de mettre en place un fonds d’aide d’urgence aux artistes-auteurs, afin d’endiguer les effets – qui se feront sentir pendant plusieurs années – de la crise sanitaire. Nous pourrions créer ici le guichet unique que les artistes-auteurs appellent de leurs vœux pour maintenir leur activité économique et survivre.
    Chers collègues, il ne saurait y avoir de diffusion artistique sans artistes-auteurs pour lui donner un sens. Notre responsabilité de décideurs politiques nous oblige à répondre au cri d’alerte de celles et ceux qui créent et participent amplement à l’émancipation de chacune et chacun par la culture. La création d’un centre national des artistes-auteurs constitue la première étape indispensable à une meilleure considération de nos créatrices et créateurs.
    J’appelle l’ensemble de la représentation nationale à se pencher sur ma proposition de loi et à voter en faveur de l’amendement que je défendrai un peu plus tard, permettant d’ouvrir la ligne budgétaire nécessaire à la mise en œuvre de ce dispositif.
    J’appelle également le Gouvernement à se saisir de mes propositions qui émanent d’un travail collaboratif avec bon nombre de professionnels de la création. D’où qu’elles viennent, les initiatives en faveur de nos artistes-auteurs sont d’une absolue nécessité. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Karine Lebon.

    Mme Karine Lebon

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    L’année 2021 aurait dû être une année charnière pour la culture : portés à 3,2 milliards d’euros, les crédits de cette mission atteignent enfin leur niveau de 2010. Ce rattrapage, que nous saluons, arrive cependant au moment même où le monde culturel est plus que durement frappé par la crise sanitaire, ce qui n’est pas sans conséquences sur l’appréciation que nous aurions pu faire de l’augmentation, à périmètre constant, de 4,6 % des crédits.
    Qu’il s’agisse du confinement, de la distanciation physique ou du couvre-feu, toutes les mesures sanitaires pour lutter contre la covid-19 ont eu des répercussions immédiates sur tous les secteurs et acteurs culturels, au point que l’écosystème de la culture s’en trouve entièrement bouleversé.
    Chaque fois, de manière très volontariste et quelles que soient les contraintes, les opérateurs culturels se sont adaptés et ont innové pour maintenir le lien entre les publics, les artistes et les œuvres, dans des conditions aussi optimales que possible. Mais force est de constater que l’interruption imposée par ce nouveau confinement risque d’être insurmontable pour nombre de secteurs déjà fragilisés.
    Ce budget ne peut pas être examiné en tant que tel. C’est en ayant bien à l’esprit les mesures transversales, le volet culturel du plan de relance et aussi votre amendement créant d’ultimes mesures exceptionnelles pour un montant de 115 millions d’euros, que je ferai quelques observations.
    La première est évidente : il faudra aller plus loin, aussi bien en termes de moyens que de durée d’application des dispositifs, tant la diminution du chiffre d’affaires du secteur culturel, déjà estimée à plus de 22 milliards d’euros, va encore s’aggraver.
    Pour le spectacle vivant, grande victime de cette crise sanitaire, les mesures d’urgence devront sans doute être maintenues durant toute l’année prochaine. La création artistique est très durement touchée par la fermeture des salles de spectacle et d’expositions, l’annulation des manifestations et l’application de jauges réduites. Pour de très nombreux secteurs et artistes, il s’agit désormais d’une question de survie.
    Tout porte à croire que l’année blanche dans l’intermittence devra être prorogée au-delà du mois d’août 2021, afin d’éviter que les artistes et les techniciens du spectacle ne soient confrontés, au sortir de cette crise, à une précarité encore plus redoutable.
    À cet égard, je vous remercie, madame la ministre, d’entendre une demande récurrente et désormais urgente des professionnels du spectacle de La Réunion : ils souhaitent la réouverture sur place d’une antenne Pôle emploi spectacle.
    Ma deuxième remarque porte sur la répartition des crédits affectés au secteur du patrimoine et de l’architecture, qui enregistre aussi des pertes économiques considérables – moins 30 %. Alors que vous avez déclaré être la ministre des artistes et des territoires, ni le plan de relance ni les crédits – pourtant en augmentation – inscrits au projet de loi de finances en faveur de ce programme, ne contribuent au nécessaire rééquilibrage entre Paris et les régions, entre les patrimoines urbains et les patrimoines ruraux.
    Le pass culture, qui occupe encore une place centrale dans le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », présenterait donc moins de fragilité que vous ne le craignez, madame la ministre. Cependant, cette évolution favorable n’est sans doute pas telle que nous puissions faire l’économie d’une refonte d’un dispositif qui n’atteint toujours pas son public cible, qui demeure sous-utilisé et trop méconnu.
    À l’inverse, les Micro-Folies – ces musées numériques permettant de rapprocher les collections et grandes représentations des lieux de vie et des citoyens – ont rapidement rencontré leur public. La multiplicité des possibilités et des expériences ne peut qu’encourager à accélérer la couverture de tout le territoire national. La promesse d’en créer 1 000 d’ici à 2022 est-elle toujours d’actualité ?
    Mon dernier point concerne les outre-mer. Tout d’abord, je déplore l’abandon de tous les projets en faveur de la promotion et la diffusion des cultures des outre-mer – le dernier en date étant probablement la Cité des outre-mer –, mais aussi celui des outils existants, que symbolise la fermeture de France Ô. Résultat : nous ne voyons toujours pas la meilleure visibilité des outre-mer.
    Quant à la presse ultramarine, elle a toujours été étonnamment exclue des aides prévues pour la presse nationale et régionale. Après France-Antilles, deux journaux réunionnais se trouvent en grande difficulté : Le Quotidien de La Réunion où une menace de licenciement plane sur 40 % du personnel ; Le Journal de l’île de La Réunion qui, hier, a de nouveau été placé en redressement judiciaire.
    Sur les 450 millions d’euros de crédits que la mission « Médias, livre et industries culturelles » a inscrits au titre des aides à la presse, 2 millions d’euros reviendront aux outre-mer. Nous saluons ce timide début, tout en souhaitant qu’il puisse contribuer à contrecarrer tout scénario qui serait catastrophique pour le pluralisme de l’information et la démocratie.
    Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne s’opposera pas à votre budget et s’abstiendra. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.)

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    La mobilisation exceptionnelle, dont nous avons été les témoins au cours des derniers jours en faveur des librairies, marque l’attachement viscéral de nos concitoyens à la culture et la place centrale que celle-ci occupe dans notre imaginaire national.
    Au printemps, lors de la première période de confinement, les Français se sont mis à chanter aux fenêtres ; ils se sont réfugiés dans la lecture, dans la musique et dans la fiction pour affronter l’épreuve du réel et retrouver l’espérance aux racines de la vie.
    À présent, les Français craignent que notre exception culturelle se noie dans la seconde vague de l’épidémie de coronavirus. Je voudrais les rassurer : le Gouvernement et la majorité sont pleinement mobilisés pour accompagner le secteur de la culture à l’épreuve de la crise.
    Les crédits inscrits au titre de la mission « Culture » sont en hausse de près de 4,5 % par rapport au projet de loi de finances initiale pour 2020.
    En premier lieu, je veux saluer la priorité donnée à la conservation et à la restauration des monuments historiques, dont les crédits sont en hausse de près de 4,22 % pour 2021. C’est une excellente nouvelle pour la culture dans les territoires.
    Contrairement à un musée ou un spectacle – où le public choisit de se rendre –, l’observation de l’environnement architectural immédiat est libre et gratuite ; elle s’impose à nous. Au-delà du sentiment de réflexion esthétique qu’il procure, le patrimoine est ainsi un excellent instrument de médiation culturelle, une passerelle vers l’histoire et une meilleure appropriation des cultures et des identités locales.
    Cette priorité donnée à la conservation et à la restauration des monuments historiques constitue aussi un important dispositif de soutien et de maintien de l’activité des TPE et PME du secteur des métiers d’art et de la restauration du patrimoine, qui sont très dépendantes de la commande publique.
    La crise sanitaire actuelle fait courir le risque d’une disparition de savoir-faire ancestraux qui sont nécessaires à la transmission de notre bien commun aux générations futures.
    Soulignons la montée en puissance du fonds incitatif et partenarial – FIP – en faveur des monuments historiques des petites communes : près de 5 millions d’euros de crédits de paiement supplémentaires lui ont été octroyés en 2021, ce qui témoigne d’une attention particulière portée à la ruralité.
    Cette mesure répond à une préoccupation des communes à faibles ressources, qui ont parfois des difficultés à boucler les tours de table financiers avec l’ensemble des acteurs – État, collectivités territoriales, partenaires privés –, notamment à la suite du désengagement de certains départements.
    À cet égard, je salue la politique volontariste de mon département de Charente-Maritime qui a décidé, dans le contexte actuel, d’augmenter de 400 000 euros sa contribution pour financer le patrimoine historique et les patrimoines de proximité, y compris non inscrits. Cela démontre, si besoin en était, que le patrimoine est l’affaire de toutes les institutions.
    Le FIP complète l’action engagée par le ministère de la culture pour valoriser la dimension patrimoniale des projets de revitalisation des centres anciens, notamment au sein des sites patrimoniaux remarquables – SPR –, dans le cadre du dispositif action cœur de ville, et bientôt dans celui du plan petites villes de demain.
    Rappelons que, dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative, nous avons modifié les conditions d’octroi du label de la Fondation du patrimoine, afin de les élargir aux immeubles situés dans des communes de moins de 20 000 habitants et non protégés en qualité de monuments historiques.
    Toutes ces mesures illustrent l’attention portée par la majorité au patrimoine situé dans l’ensemble des territoires, en particulier ceux où l’offre culturelle est limitée.
    Je voudrais également mettre l’accent sur le soutien accru à la création, signe que, même en temps de crise, le Gouvernement entend accompagner l’inventivité, l’innovation et la vitalité du secteur culturel.
    Je me réjouis en particulier de la hausse de 18 % des crédits de paiement du budget alloué à la création, la production et la diffusion des arts visuels.
    Je souhaite que ces crédits soient pour partie dédiés à l’accompagnement des artisans et des maîtres d’art, dont le chiffre d’affaires s’est effondré souvent au-delà de la limite de 80 %, notamment du fait de l’annulation de nombreux salons culturels et de l’érosion des commandes. La fragilisation de ce secteur économique, en raison de l’épidémie, fait planer la menace de la disparition de savoir-faire qui participent à notre dynamique de diffusion culturelle et à la renommée de notre pays à l’international.
    Enfin, je voudrais signaler le renforcement du soutien à la transition et l’innovation numérique : près de 1,5 million d’euros supplémentaires. La première période de confinement nous a montré combien le numérique était un important levier de démocratisation culturelle. C’est ainsi que le musée du Louvre a réinventé – avec succès – sa politique de consultation numérique : près de 10 millions de personnes ont visité son site au printemps, soit autant que de visiteurs physiques en une année.
    Le groupe de La République en marche votera donc pour les crédits de la mission « Culture ». Ceux-ci apportent une réponse proportionnée à la crise, tout en consacrant notre exception culturelle où la culture est un continuum de pratiques en amateur et professionnelles, aux entrées multiples et au chemin foisonnant. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Constance Le Grip.

    Mme Constance Le Grip

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    « La culture domine tout, elle est la condition sine qua non de notre civilisation », constatait déjà le général de Gaulle en 1965. Nous vous donnons acte, madame la ministre, comme je l’avais d’ailleurs déjà fait au nom du groupe Les Républicains lors de votre audition par la commission des affaires culturelles et de l’éducation, de l’augmentation de plus de 5 % du budget du ministère de la culture. Il convient aussi de constater, non sans satisfaction, que le Gouvernement prévoit de consacrer, dans le plan France relance, près de 2 milliards d’euros à la culture, dont plus de 1 milliard d’euros de crédits budgétaires dans le champ de la mission « Culture ».
    Toutefois, comme l’a d’ailleurs souligné la rapporteure pour avis Valérie Bazin-Malgras, une part importante de ces crédits n’est pas consacrée à des investissements, mais est destinée à combler les déficits d’exploitation de certains grands opérateurs de l’État – l’Opéra de Paris, le musée du Louvre ou le château de Versailles. Il est bien évidemment hors de question d’abandonner ces fleurons de la culture française, surtout lorsqu’ils font face à une crise profonde qui remet en cause leur modèle culturel et économique ; mais ces dépenses ne sont pas, à proprement parler, des dépenses d’investissement pour la relance du secteur de la culture : elles devraient plutôt figurer dans la mission « Culture ».
    Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des dispositifs d’aide et de soutien d’urgence créés par l’État – fonds de solidarité, prêts garantis par l’État, dispositif d’activité partielle –, même s’il a fallu, au début du premier confinement, beaucoup batailler pour que certaines catégories, particulièrement les auteurs, en bénéficient et ne soient pas laissées au bord du chemin. Je souligne également que les établissements publics comme le CNM, le Centre national du cinéma et de l’image animée – CNC – ou le CNAP ont pleinement joué leur rôle et ont su débloquer rapidement les mesures d’urgence. De la même façon, les OGC – organismes de gestion collective – ont répondu présents, ont su se montrer réactifs et ont bien rempli leur rôle.
    Spectacle vivant, théâtres, opéras, cabarets, danse, concerts, cinémas, festivals, musées, monuments historiques, salons et foires artistiques divers, bibliothèques, librairies : la liste est longue – trop longue – des sacrifiés de la culture, ceux que la poursuite de la crise sanitaire met au défi de survivre et de résister. Je veux rendre hommage ici à tous les acteurs des secteurs culturels, qui ont su déployer des trésors d’ingéniosité, de créativité et d’agilité pour résister, faire face et se réinventer afin de garder le lien avec leur public. C’était bien sûr avant le nouveau confinement, qui frappe si durement le secteur. Je dirai un mot des librairies, pour rappeler la tristesse qui s’est emparée de nombre d’entre nous lorsque nous avons réalisé qu’elles n’étaient pas considérées comme des commerces essentiels. Puisse le dispositif « je commande et j’emporte » – pour parler français – leur venir réellement en aide.
    Pour revenir au budget du ministère de la culture, les députés du groupe Les Républicains insistent sur la nécessité de maintenir certains dispositifs d’aide et de soutien tout au long de l’année 2021, car ils ont bien compris que la reprise des activités normales du secteur culturel n’est pas pour demain – c’est le moins que l’on puisse dire.
    Nous saluons, comme l’a fait Gilles Carrez, l’augmentation des crédits du programme « Patrimoines », mais nous aurions souhaité qu’une part plus importante en soit affectée à l’entretien et à la restauration du patrimoine appartenant à des propriétaires privés ou à des collectivités territoriales – la rapporteure pour avis Valérie Bazin-Malgras l’a souligné. De la même façon les 40 millions d’euros supplémentaires alloués aux détenteurs de patrimoine n’appartenant pas à l’État dans le cadre du plan de relance nous semblent quelque peu disproportionnés par rapport à l’enveloppe totale.
    Quant au pass culture, vous connaissez les réserves – pour ne pas dire plus – exprimées par les membres du groupe Les Républicains depuis le début du quinquennat : nous nous interrogeons toujours sur le coût total de ce dispositif, sur sa pertinence et sur son bien-fondé. Les phases d’expérimentation font apparaître des résultats mitigés, et nous ne voudrions pas que son existence nuise à des opérateurs historiques qui œuvrent dans le domaine de l’éducation artistique et culturelle.
    Je terminerai sur une note quelque peu amère, madame la ministre : nous avons appris hier, alors que le Sénat venait tout juste de terminer l’examen du projet de loi relatif au retour de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal, l’adoptant à l’unanimité, que l’État retournerait à Madagascar la couronne du dais de la reine malgache Ranavalona III, conservée jusqu’à présent au musée de l’Armée.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui !

    Mme Constance Le Grip

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    Ce prêt, dont nous avons découvert l’existence subitement, par voie de presse, s’effectue au mépris de la représentation nationale (M. Maxime Minot applaudit), dont nous estimons qu’elle est la seule autorisée à déroger au principe d’inaliénabilité des collections muséales françaises et à permettre ce type de retours – si ce terme est approprié. Il y a là, à nos yeux, un fait du prince que nous nous devons de dénoncer. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
    J’en terminerai en disant qu’au bénéfice de ces observations, et toutes choses égales par ailleurs, le groupe Les Républicains s’abstiendra sur le budget du ministère de la culture. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Frédérique Dumas applaudit également.)

    M. Maxime Minot

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre de la culture.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture

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    L’examen du budget pour 2021 se déroule, vous l’avez tous souligné, dans un contexte particulier pour le monde de la culture, très durement frappé par les mesures liées à la crise sanitaire – Mme Dominique David l’a parfaitement rappelé. L’augmentation exceptionnelle de 4,8 % du budget du ministère de la culture en 2021 manifeste la volonté du Gouvernement de conforter son rôle essentiel dans la vie démocratique, sociale et économique de notre pays. Cet effort budgétaire remarquable s’inscrit dans le prolongement de la mobilisation totale dont l’État a fait preuve dès le début de la crise sanitaire pour soutenir les acteurs culturels – je remercie Gilles Carrez de l’avoir souligné.
    Ainsi, comme Benoît Potterie l’a rappelé, le monde de la culture dans son ensemble a déjà bénéficié de plus de 5 milliards d’euros de mesures d’urgence, et tout spécialement de 940 millions d’euros pour l’année blanche de l’intermittence. Certains d’entre vous – je songe à Michèle Victory ou à Béatrice Descamps – ont évoqué la nécessité de poursuivre cet effort. Je vous confirme qu’il sera bien entendu maintenu si la nécessité s’en fait sentir.
    Pour permettre au secteur de se projeter dans l’avenir, j’ai obtenu que le volet culturel du plan France relance mobilise une enveloppe exceptionnelle de 2 milliards d’euros. Depuis la rentrée, 220 millions d’euros ont été mobilisés pour soutenir les salles de cinéma et de spectacle, qui furent confrontées à une baisse importante de leur activité en raison des mesures de distanciation physique puis de couvre-feu. Alors que débute une nouvelle période de confinement, je travaille à l’adaptation des dispositifs à la réalité des besoins des acteurs culturels.
    C’est dans ce contexte inédit qu’a été élaboré le budget de la mission « Culture » soumis à votre examen. En 2021, il connaîtra une hausse exceptionnelle de 4,6 % – 141 millions d’euros supplémentaires –, pour atteindre un montant total de plus de 3,2 milliards d’euros. Le budget de cette mission sera complété par 733 millions d’euros issus du plan France relance, qui seront déployés à périmètre équivalant pour cette première année d’exécution. Au total, ce sont donc près de 4 milliards d’euros qui seront consacrés l’an prochain au patrimoine, à la création, à la transmission et à la démocratisation culturelle. Ces moyens d’une ampleur historique – vous l’avez souligné presque unanimement – nous permettront d’engager une action ambitieuse de refondation de notre modèle culturel.
    Au-delà de la situation d’urgence à laquelle nous faisons face, il est primordial que nos politiques culturelles apportent une réponse aux défis majeurs qui s’imposent désormais à nous. Comme l’a montré l’enquête sur les pratiques culturelles des Français, dont je me suis emparée dès mon arrivée rue de Valois, il est indispensable d’engager une action résolue afin de réconcilier la culture patrimoniale et la culture numérique, qui sont trop souvent cloisonnées dans les usages de nos concitoyens. Les moyens inscrits dans chacun des programmes de cette mission budgétaire nous permettront d’œuvrer en ce sens.
    Le patrimoine bénéficiera effectivement, monsieur Gérard, d’un budget exceptionnel de 1,015 milliard d’euros – en hausse de 4,4 %, soit 43 millions d’euros, par rapport à 2020 –, auxquels s’ajouteront, en 2021, 345 millions d’euros issus du plan de relance. Ces investissements contribueront au développement de l’économie et renforceront l’attractivité et la cohésion des territoires. Vous avez raison de souligner que la protection du patrimoine, sa rénovation et sa mise en sauvegarde dépendent non seulement de l’État, mais aussi des collectivités territoriales – vous avez salué l’action de la Charente-Maritime, mais nous travaillons évidemment avec de nombreux départements. Ces crédits financeront notamment un plan de rénovation des musées territoriaux, doté de 52 millions d’euros sur deux ans – dont 6 millions d’euros venant du plan de relance – et des mesures de soutien aux archives et à l’archéologie, destinées aux équipements patrimoniaux dans les territoires.
    Nous déploierons également, dès l’an prochain, un vaste plan dédié aux cathédrales – il était temps ! La hausse des crédits budgétaires pérennes alloués à ces édifices, à laquelle Gilles Carrez faisait référence, permettra de porter le financement structurel annuel à 50 millions d’euros par an, auxquels s’ajouteront 40 millions d’euros annuels issus du plan de relance – soit un total de 180 millions d’euros sur deux ans. Ces moyens permettront de réaliser les travaux nécessaires de mise en sécurité et en sûreté des édifices, mais aussi d’accélérer les projets de restauration. Si le sujet de la cathédrale Notre-Dame de Paris ne s’inscrit pas dans cette discussion budgétaire, j’aurai l’occasion, monsieur Carrez, de donner toutes les explications utiles le concernant.
    Nous poursuivrons par ailleurs notre programme d’investissement en faveur des grandes institutions nationales, dans le domaine du patrimoine comme de la création, tandis que le plan de relance apportera aux opérateurs nationaux un soutien à la fois conséquent et indispensable. Les crédits prévus dans le PLF pour 2021 permettront de poursuivre les grands projets déjà engagés. Valérie Bazin-Malgras a appelé mon attention sur le cas du Grand Palais, dont j’ai effectivement choisi de réorienter le programme de restauration afin de mieux garantir la maîtrise des coûts comme des délais, mais les projets en cours concernent également le relogement à Pantin du Centre national des arts plastiques, auquel Sophie Mette est attachée, ou l’équipement des deux scènes de l’Opéra de Paris. En contrepartie de ce soutien, j’attends effectivement de ces institutions, madame Le Grip, qu’elles incarnent encore davantage la responsabilité nationale qui est la leur, en se rapprochant de nos concitoyens et en se développant dans tous les territoires.
    Le programme « Création » connaîtra lui aussi une forte augmentation en 2021 : celle-ci atteindra 4,5 %, soit 37 millions d’euros de mesures budgétaires nouvelles, auxquels s’ajouteront 320 millions d’euros issus du plan de relance. L’une des priorités consiste à mieux accompagner les établissements de création en région : 15 millions d’euros seront ainsi consacrés à la restauration et à la consolidation des marges artistiques des labels et au soutien aux compagnies artistiques, tandis que 3 millions d’euros iront aux arts visuels.
    Les moyens du Centre national de la musique vont être renforcés : 7,5 millions d’euros supplémentaires permettront d’assurer le respect de la trajectoire triennale fixée l’an dernier pour accompagner la montée en puissance du CNM, sans oublier qu’il pilotera une dotation exceptionnelle de 200 millions d’euros au service de l’ensemble de la filière musicale, allouée dans le cadre du plan de relance.
    Les salles de spectacle bénéficieront également de dispositifs fiscaux inscrit dans le PLF, à savoir la prorogation du crédit d’impôt pour les spectacles vivants, dont les critères sont assouplis, mais également la création d’un crédit d’impôt théâtre qui permettra de renforcer le dispositif que votre assemblée avait adopté dans le cadre du PLFR 3.
    En complémentarité avec le plan de relance, le PLF pour 2021 accentue notre soutien à l’emploi culturel à travers le renforcement du FONPEPS – plus 1 million d’euros – et une mobilisation de 2 millions d’euros afin de mettre en œuvre les premières mesures à destination des artistes-auteurs – j’ai bien entendu les propositions de Michel Larive pour ce secteur divisé, hélas, par des conflits importants.
    La mission « Culture » contient également le nouveau programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui représente 46 millions d’euros de crédits supplémentaires, soit une forte hausse de 8,5 %. Dominique David, vous avez salué la délégation générale que j’ai souhaité créer, sur ce thème, au sein du ministère. Elle assurera en effet un pilotage transversale de l’action du ministère pour l’accès à la culture dans les territoires en matière d’éducation ou de formation culturelle et artistique, en lien avec les autres ministères concernés, en particulier celui chargé de la cohésion des territoires et les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
    En complément de l’action que mène le ministère de la culture pour atteindre l’objectif du 100 % EAC – éducation artistique et culturelle –, les crédits du pass culture progresseront de 20 millions d’euros. Je souhaite faire évoluer cet outil car il doit mieux s’articuler avec la fin du parcours d’éducation artistique et culturelle, et contribuer véritablement à la diversification des pratiques culturelles des jeunes ; j’aurai l’occasion de m’en expliquer en réponse à vos questions et à vos amendements, mesdames, messieurs les députés. Notre politique d’accès à la culture dans tous les territoires bénéficiera également d’autres moyens : ainsi, l’an prochain, nous désignerons la première « capitale française de la culture », nouveau label qui distinguera tous les deux ans l’innovation culturelle et artistique ainsi que l’attractivité d’une ville ou d’un groupement de collectivités en ce domaine.
    Quant à l’enseignement supérieur culturel, il bénéficiera d’un accroissement budgétaire notable, à hauteur de 3,3 %. Nous améliorons ainsi les conditions d’études et de vie des 37 000 étudiants de nos écoles culturelles et artistiques, et renforçons les mesures d’accompagnement à la vie étudiante et à l’insertion professionnelle.
    Mesdames, messieurs les députés, telles sont, dans les grandes lignes, les priorités de la mission « Culture » pour 2021 dont les crédits sont soumis à votre vote. Les nouveaux moyens budgétaires mobilisés par cette mission témoignent, en ces temps difficiles, vous l’avez souligné, de notre confiance en l’avenir, de notre détermination à accompagner et à soutenir, dans notre pays, la vitalité de la vie culturelle, qui est en effet l’un des fondements de notre République. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et Dem.)

    M. le président

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    Nous en venons aux questions.
    La parole est à M. Alain David.

    M. Alain David

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    Nous, députés du groupe Socialistes et apparentés, avons déposé un amendement d’appel demandant la fixation d’un tarif postal unique pour l’envoi des livres. En effet, les éditeurs et les libraires indépendants, qui n’ont pas de structures de distribution, voient leurs maigres marges disparaître puisque le coût de l’expédition d’un livre dont le poids est compris entre 250 et 500 grammes peut atteindre jusqu’à 30 % de son prix total, quand les grandes plateformes de vente en ligne facturent parfois un seul centime d’euro les frais de port. En cassant les prix sur ces frais, elles attaquent la logique du prix unique du livre qui a permis le maintien d’une offre éditoriale diversifiée et d’un accès équitable à la culture sur tout le territoire.
    Nous avons donc noté avec satisfaction l’annonce conjointe, que vous avez faite hier avec le ministre de l’économie, des finances et de la relance, d’une prise en charge des frais d’envoi des livres commandés auprès des libraires indépendants pendant le reconfinement. Cette annonce est un premier pas. Mais elle ne résoudra que marginalement la grande difficulté dans laquelle le reconfinement  place les 3 500 librairies françaises, moteurs de la vitalité de nos quartiers, de nos villes et de nos villages, grâce notamment au modèle original et vertueux du prix unique du livre.
    Ainsi, au-delà de vos appels respectables, madame la ministre, à privilégier les acteurs indépendants de la filière du livre par rapport aux grandes enseignes, le Gouvernement envisage-t-il une taxation spécifique de ces grandes plateformes, qui ont été sans vergogne les grandes gagnantes de la crise sanitaire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR et FI.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je vous remercie, monsieur le député, de saluer l’action résolue que je mène, en collaboration avec mon collègue Bruno Le Maire, pour soutenir les libraires à travers cette opération que j’appelle « cliquer et emporter », et non « click and collect » – certains ayant appelé mon attention sur la défense de la francophonie : c’est donc l’occasion de remettre les choses d’aplomb. (Sourires. – Mmes Danielle Brulebois et Maud Petit applaudissent.)
    Sur les opérations d’envoi, il s’agit donc de mettre les libraires à égalité avec les plateformes. Je salue l’implication de La Poste qui, pour le transport et la livraison des livres, a pris une mesure tout à fait intéressante qui va permettre de diviser pratiquement par trois les frais dans les agglomérations. Je salue cette action concertée et en remercie les dirigeants de La Poste.
    Vous m’avez interrogée sur la taxation des grandes plateformes. Je rappelle que la France est très en avance dans ce domaine, mais chacun comprend bien la difficulté juridique que soulève votre suggestion car, si on taxe le commerce par correspondance, cela ne concernera pas que les grandes plateformes. On peut se demander s’il ne serait pas plus utile de développer l’équipement numérique et les pratiques qui vont avec et que partagent – on peut le regretter, mais il faut bien le constater – un certain nombre de nos concitoyens.
    Je remarque que nous allons faciliter l’accès à ces pratiques pour les commerces indépendants, en particulier pour les librairies, et au-delà de l’urgence puisque nous mettons en œuvre, dans le cadre du plan de relance, un plan librairies doté de 53 millions d’euros afin de moderniser et d’aider toute la filière du livre. En outre, le plan de relance prévoit 400 millions d’euros, au titre de ce que l’on appelle le PIA 4 – le quatrième programme d’investissements d’avenir – pour développer l’équipement numérique des librairies. Les pratiques que j’ai évoquées sont de plus en plus massivement adoptées par nos concitoyens et il faut y adapter le secteur pour lui permettre d’avoir accès aux équipements numériques.
    Mais je tiens à rappeler devant la représentation nationale qu’il n’y aura rien de mieux, dès que nous le pourrons, que de retourner dans les librairies, de discuter avec les libraires, d’échanger avec d’autres lecteurs – y compris les nôtres si on est auteur – et de choisir nos livres parce que la librairie est, comme une salle de spectacle, un lieu magique. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et UDI-I.  Mme Constance Le Grip applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Céline Calvez.

    Mme Céline Calvez

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    Madame la ministre, en février 2019, le Gouvernement lançait l’expérimentation du pass culture, promesse du Président de la République pour une démocratisation de l’accès des jeunes à la culture. Depuis le début de sa phase d’expérimentation, le dispositif a enregistré 115 000 comptes activés sur les 135 000 jeunes de 18 ans vivant dans les quatorze départements concernés, et plus de 610 000 réservations ont été effectuées en dix-huit mois.
    À l’heure où l’impact de la covid-19 sur le secteur culturel se chiffre à plusieurs dizaines de milliards d’euros, nous cherchons et trouvons tous les jours des solutions pour conforter notre modèle culturel ; des mesures d’urgence au plan France relance, nous avons à cœur de sauver la culture en France. Et si le pass culture devenait, lui aussi, un élément de relance de la culture ? Le livre, filière que vous venez d’évoquer, représente ainsi 55 % des réservations. Comment le pass culture, au regard de cette deuxième période de confinement, peut-il contribuer au maintien de l’activité des librairies et des éditeurs ?
    Par ailleurs, les perspectives sanitaires contraignant totalement, pour l’heure, la fréquentation physique des musées, des concerts et des spectacles vivants, comment le pass culture peut-il constituer un relais d’activité pour ces secteurs, aujourd’hui par le numérique et demain par tous moyens, et parvenir à ce que tous les acteurs professionnels saisissent les opportunités qu’offre ce dispositif ?
    Ainsi, madame la ministre, quel est le potentiel économique envisagé par le déploiement du pass culture ? Comment concilier une ambition pour la jeunesse et une contribution pérenne et structurelle pour tous les secteurs de la culture sur tout le territoire français ? Pouvez-vous nous en dire davantage sur une future généralisation du dispositif ?

    Mme Brigitte Kuster

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    Bonne question !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Merci à vous, Céline Calvez, de me poser cette question, qui me permettra de répondre, plus globalement, à certaines autres formulées dans les interventions liminaires.
    Le pass culture connaît chaque jour une dynamique croissante, et vous avez raison d’en souligner les chiffres : ce sont en effet désormais 115 000 jeunes, dans les quatorze départements d’expérimentation, qui sont inscrits sur la plateforme, et 610 000 réservations qui ont été effectuées.
     
    Au terme d’un bilan apaisé que j’ai souhaité mener dès mon arrivée à la tête de ce ministère, j’ai proposé de nouvelles orientations au Président de la République et au Premier ministre. Les arbitrages sont en cours. Il s’agit de permettre une généralisation de l’application à l’ensemble des jeunes de 18 ans sur tout le territoire,…

    M. Maxime Minot

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    Très bien !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    …tout en construisant une meilleure articulation avec le parcours éducation artistique et culturelle durant les dernières années de lycée. Le pass culture ne doit pas être quelque chose qui arrive brusquement à 18 ans : c’est un cheminement, un apprivoisement.

    Mme Danielle Brulebois

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    Excellent !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Le pass culture doit proposer à ses utilisateurs des parcours personnalisés, faire découvrir de nouvelles pratiques individuelles et collectives. Ainsi, nous réfléchissons à faire passer le montant du Pass à 300 euros – ce qui correspondrait d’ailleurs aux pratiques constatées –, tout en enrichissant l’offre disponible sur la plateforme, notamment par des offres gratuites. Le système actuel des sous-plafonds mérite certainement d’être à la fois simplifié et mieux adapté.
    Les jeunes utilisent le pass avant tout pour réserver des offres physiques, qui représentent 75 % des réservations, au premier rang desquelles les livres – ce que nous n’allons pas regretter… Plus de 300 000 livres ont ainsi été achetés par ce biais. Et vous avez raison de souligner que le pass culture a vraiment un rôle à jouer dans les circonstances actuelles pour maintenir l’accès aux livres et pour soutenir les librairies. Toutes celles qui proposent un service « cliquer et emporter » sont signalées comme telles sur l’application, et ses utilisateurs peuvent ainsi continuer à acheter des livres – le livre numérique est également proposé, même si son succès est moindre.
    Le pass culture a aussi un rôle à jouer dans la relance du secteur culturel dans son ensemble. C’est la raison pour laquelle des partenariats sont noués dans de nombreux secteurs, comme récemment avec celui du cinéma – Pathé Gaumont, CGR Cinémas, Cinéville –, outre des opérations spéciales avec des musées – le Palais de Tokyo par exemple. Le pass compte aujourd’hui plus de 4 000 lieux culturels référencés et, chaque mois, plus d’une centaine de nouveaux lieux proposent des offres très diverses.
    Je crois que le pass culture doit demeurer conforme à l’ambition initiale que vous avez rappelée : favoriser l’émancipation culturelle des jeunes à partir de 18 ans – et même bien avant. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

    M. le président

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    Nous en avons terminé avec les questions.

    Mission « Culture » (état B)

    M. le président

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    J’appelle les crédits de la mission « Culture », inscrits à l’état B.
    La parole est à M. Michel Larive, pour soutenir l’amendement no 2506.

    M. Michel Larive

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    Les députés du groupe La France insoumise proposent par cet amendement de venir en aide aux musées français. Les crédits alloués par le Gouvernement pour 2021 ne pourront en effet pas compenser les difficultés qu’ils rencontrent depuis le début de la crise sanitaire. Je rappelle qu’en juillet et en août, la fréquentation des musées a baissé de 70 %, voire plus. Les pertes dues au confinement n’ont donc pas pu être compensées, bien au contraire. Nous proposons de créer un fonds d’aide aux musées afin de soutenir leur activité l’année prochaine.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Monsieur Larive, ces 50 millions d’euros sont déjà disponibles dans le cadre des crédits du plan de relance. Les grands établissements nationaux, que j’ai évoqués dans mon intervention, bénéficient d’un soutien massif qui se chiffre en centaines de millions ; mais les musées de province sont également importants. En effet, c’est bien de parler des grandes institutions culturelles parisiennes, mais n’oublions pas le reste du pays ! Entre les crédits normaux et le plan de relance, ces musées bénéficieront d’une cinquantaine de millions sur deux ans, ce financement se situant dans la droite ligne des efforts engagés depuis quelques années. Je vous invite ainsi à visiter le musée Ingres-Bourdelle à Montauban, qui vient d’être rénové avec une aide d’État substantielle, ou, réalisation remarquable, le musée de Picardie à Amiens.

    M. Maxime Minot

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    Un des plus beaux musées de France !

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    En 2021, ces aides devraient concerner le musée Alpin à Chamonix et d’autres établissements intéressants. L’État consent donc un véritable effort pour les musées de province, je tiens à le souligner.
    Avis défavorable à l’amendement.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Même avis. En effet, Gilles Carrez l’a rappelé, les efforts sont considérables : 123 millions d’euros dans le plan de relance, dont 99 millions dès 2021, visent à soutenir la reprise de l’activité des musées nationaux.
    Je profite de cette interpellation pour rappeler le caractère stérile du débat incessant entre les grands opérateurs nationaux et les régions. Les grands musées ont un rôle d’animation, de tête de pont et de centre de ressources pour l’ensemble de la structure muséale de notre pays : certains d’entre eux se déploient dans les régions au travers d’activités très puissantes – prêts d’œuvres ou gestion d’une série de musées de province, par exemple. Donc, de grâce, arrêtons cette opposition stérile entre les grands opérateurs nationaux et la province – j’aime ce terme, comme celui de « région », si l’on se rattache à une autre école.
    Quoi qu’il en soit je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive.

    M. Michel Larive

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    Je ne suis pas du tout d’accord avec vous sur la stérilité de l’opposition entre les budgets des musées de province et ceux des grands opérateurs muséaux, car ceux-ci captent la grande majorité des crédits affectés aux musées.
    Pour ce qui est du plan de relance, j’attends le vote du PLFR 4 : nous verrons alors si les 50 millions dont vous parlez, monsieur Carrez, sont bien là ; pour l’heure, nous sommes dans l’expectative.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Non, nous ne sommes pas dans l’expectative.

    M. Michel Larive

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    Aujourd’hui, nous examinons le budget qui nous est proposé, loin de ces supputations.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    Aujourd’hui, l’immense majorité des musées de province – puisque l’on reprend ce vocable, en usage autrefois – dépendent des collectivités territoriales. L’aide de l’État se traduit donc, comme l’a souligné Mme la ministre, par des aides à l’investissement pour la rénovation et la mise aux normes de réserves ou d’espaces d’exposition, par l’accompagnement des expositions et de la diffusion. Mais les budgets dédiés sont bien là, en forte augmentation ; quant aux frais de fonctionnement, ils reviennent aux collectivités.
    Aujourd’hui, la circulation des œuvres est bien plus importante qu’il y a une vingtaine d’années : les grandes têtes de pont rayonnent sur l’ensemble du territoire à travers les prêts et les dépôts des collections nationales, mais aussi étrangères grâce aux collaborations internationales qu’elles ont développées. J’ai donc un peu de mal à comprendre pourquoi vous voulez augmenter la contribution de l’État, alors qu’elle augmente déjà dans ce budget de manière significative. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive.

    M. Michel Larive

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    Je remercie M. Gérard de valider mes propos ! (Sourires.)

    (L’amendement no 2506 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive, pour soutenir l’amendement no 2558.

    M. Michel Larive

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    Nous souhaitons supprimer le pass culture et en attribuer les fonds à un nouveau programme intitulé « Démocratisation de la culture ».
    Le PLF 2021 propose une montée en puissance du pass culture, pour permettre à celui-ci de toucher 200 000 jeunes, soit doubler son public. Dans une enquête publiée en novembre 2019, le site de Mediapart révèle que « le livre arrive en tête des dépenses du pass mais se dirige surtout vers les classiques programmés dans le cadre scolaire, suivi de la musique, dont les trois quarts vont vers la plateforme de streaming Deezer ». De plus, les jeunes bénéficiaires n’ont en moyenne dépensé que 100 euros sur les 500 attribués, expliquait Damien Cuier, président de la SAS – société par actions simplifiée – chargée de la gestion du pass culture, le 23 octobre 2019, devant le Conseil national des professions du spectacle.
    L’utilité du dispositif pose de plus en plus question. Nous pensons que les crédits qui lui sont alloués devraient plutôt servir à une véritable démocratisation de la culture.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Je reconnais que les débuts du pass culture ont été difficiles, mais il fallait tout inventer : créer l’application, mettre l’ensemble des acteurs autour de la table, les convaincre de concevoir des offres spécialement pour les jeunes, parfois même de les rendre gratuites ; il fallait surtout communiquer auprès des jeunes pour promouvoir le dispositif. Des progrès restent à faire, mais les résultats ne sont pas aussi catastrophiques que vous le dites. Sans revenir sur les explications détaillées de Mme la ministre en réponse à une question posée plus tôt, je pense que vous en faites un symbole politique parce que ce projet de démocratisation de la culture est une promesse du Président de la République. Pourtant, dans le contexte actuel, c’est un formidable outil de relance.
    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive.

    M. Michel Larive

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    Dans le cadre de l’examen, en commission des finances, des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », dont je suis rapporteur pour avis, on a également proposé la création d’un pass jeunesse. Dans les discussions que nous avons eues avec différents interlocuteurs, Tony Estanguet et la secrétaire du Secours populaire ont exprimé la même préoccupation : ce pass devrait être conçu dans une optique éducative plutôt qu’hyper-consumériste. Car c’est bien ce qui se passe avec le pass culture, qui n’est qu’un chèque pour acheter, sans volet éducatif.
    Disons-le crûment : les grandes plateformes se gavent suffisamment pour qu’on leur apporte un financement supplémentaire.

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Il n’y a pas que le président Macron qui a déclaré faire de la démocratisation de la culture une priorité. Nombreux sont les présidents de la République et les ministres de la culture qui l’ont fait. Reste à déterminer si les politiques publiques, déployées depuis quarante à cinquante ans avec cette – sincère – ambition fonctionnent. Malheureusement, elles ont plutôt connu des échecs.
    À la création du pass culture, nous avions exprimé nos réserves, y compris parce que des dispositifs similaires avaient été mis en place dans d’autres pays, voire dans certaines collectivités françaises. Aujourd’hui, on constate que ces réserves se confirment, en matière de système d’achat et de revente, mais aussi de public avantagé. Le Gouvernement souhaite, dans ce budget, consacrer davantage de crédits au pass culture, mais nous voudrions comprendre si ces 20 millions vont servir à élargir un dispositif dont les manquements sont avérés ou bien à le réorienter en tenant compte des réserves que nous avions exprimées dès le départ. Pour le moment, nos doutes ne sont pas levés.

    Mme Constance Le Grip

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    C’est le moins qu’on puisse dire !

    M. le président

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    La parole est à Mme Géraldine Bannier.

    Mme Géraldine Bannier

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    En tant que présidente du groupe d’études sur le livre et l’économie du livre et du papier, je me permets une remarque : il est étonnant de dire que le pass culture n’a pas de visée éducative tout en soulignant – et en déplorant – qu’il cible les classiques programmés dans le cadre scolaire. On sait que les enseignants ont parfois des difficultés à faire acheter des livres, notamment des classiques, aux élèves ; mais n’opposons pas la littérature classique et celle qui ne l’est pas : lire est important, et il faut lire de tout. Je ne comprends pas cette attaque contre les classiques du programme scolaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. Michel Larive

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    Qui attaque les classiques ?

    Mme Constance Le Grip

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    Personne ne les a attaqués !

    M. le président

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    La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

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    On pointe les plateformes qui se gaveraient, mais si l’on parle de Deezer, les quatre cinquièmes des 600 collaborateurs de cette entreprise travaillent en France. Deezer est une société française, qui paie ses impôts en France et qui a le mérite d’accompagner la consommation – ce n’est pas un gros mot – légale des produits culturels, au moment où la lutte contre le piratage reste une priorité.
    Certes, il faut souhaiter que, peu à peu, grâce à la nouvelle politique menée par Mme la ministre, on aille vers la médiation et la pratique. En effet, le pass culture donne également accès à des cours de danse, de musique ou de dessin, et il faut encourager cette orientation. Il faut accompagner et surveiller la montée en puissance du dispositif, comme nous le faisons en commission des affaires culturelles, mais sans montrer du doigt la plateforme Deezer, qui fait aussi la fierté de la France et qui respecte la réglementation en vigueur. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Kuster.

    Mme Brigitte Kuster

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    Je n’avais pas prévu de m’exprimer sur le pass culture maintenant car je défendrai tout à l’heure un amendement visant à en diminuer l’enveloppe budgétaire au profit du patrimoine, mais l’augmentation de 20 millions d’euros prévue dans le budget ne peut que nous interpeller au moment où l’on constate les failles du dispositif que nous avions pointées dès le début. En effet, l’expérimentation dans quatorze départements montre que le pass est bien loin d’être utilisé à 100 %.
    Vous envisagez, à juste titre, de réduire le montant du pass culture, mais tout en décidant d’en augmenter le budget. En commission des affaires culturelles, nous avons demandé un rapport qui ferait le point sur son utilisation et son articulation avec les pass culture territoriaux proposés par certaines collectivités – départements, voire régions. Nous sommes tous mobilisés en faveur de la culture et présents pour en débattre le budget ; nous partageons tous la volonté de démocratiser la culture et à y favoriser l’accès.
    Mais nous nous inquiétons de l’utilisation du pass : malgré la promotion qu’on vient de nous faire de Deezer, le pass culture devrait amener les jeunes vers des territoires culturels qu’ils ne connaissent pas encore ; c’est cet objectif que privilégie le groupe Les Républicains. Décider d’augmenter le budget de 20 millions d’euros alors que l’expérimentation n’a pas marché dans quatorze départements paraît pour le moins surprenant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory.

    Mme Michèle Victory

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    Je partage complètement le constat qui vient d’être fait. Il ne s’agit pas de dire que nous sommes contre cet outil, mais de comprendre pourquoi il ne fonctionne pas comme nous le souhaiterions. Comme je l’ai souligné en introduction et comme le montrent les données, on manque la cible du dispositif que les élèves les plus en difficulté ont du mal à s’approprier. Pour avoir été prof en lycée professionnel, je sais qu’on n’arrive pas à créer, chez ces jeunes, le désir de se servir du pass culture. S’il faut le maintenir, il faut l’améliorer. En tout état de cause – mais vous l’avez mentionné –, il ne saurait remplacer d’autres mesures visant à redonner aux jeunes l’envie et le goût des autres cultures.

    (L’amendement no 2558 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l’amendement no 1098.

    Mme Béatrice Descamps

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    Nous sommes tous convaincus, ici, que la culture crée en nous des émotions ; elle nous aide à nous construire, à nous ouvrir sur le monde, à nous épanouir. La culture, plus que jamais, est un vecteur de cohésion sociale et l’école doit la rendre accessible à tous. Elle recouvre certes la pratique artistique et culturelle, mais aussi les rencontres et les confrontations avec les artistes et la découverte des lieux d’art. Dans certains territoires, l’école demeure le seul accès à la culture. Pour qu’elle offre aux enfants un socle de culture générale, il faut lui en donner les moyens – telle est la visée de l’amendement.
    Il s’agit d’un projet que j’ai beaucoup défendu, en tant que directrice d’école, comme en tant qu’élue chargée de la culture dans une petite commune. Je me suis souvent battue pour trouver des crédits, car je suis persuadée que c’est par l’école que tout doit passer. De plus, cette année, une telle mesure atteindrait un double objectif, en aidant nos acteurs culturels à continuer à exister.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Défavorable. Je suis d’accord sur l’importance de donner la priorité à l’éducation artistique et culturelle mais les crédits nécessaires sont déjà largement inscrits dans le PLF pour 2021, avec 7,2 millions supplémentaires pour, notamment, consolider le développement des contrats territoire-lecture ou poursuivre la dynamique de l’été culturel. Il n’y a pas de pénurie de crédits. En 2020, la difficulté a plutôt été de consommer la totalité des crédits de l’EAC, à cause notamment de la crise sanitaire.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Défavorable. La rapporteure spéciale a excellemment expliqué que les crédits dédiés à l’éducation artistique et culturelle étaient déjà au rendez-vous dans ce PLF.
    S’agissant du pass culture, qui est en gestation, je suis la première à reconnaître qu’il a encore des défauts. La généralisation constitue une réponse, la seule possible pour améliorer certains aspects, en particulier la communication. L’expérience est décortiquée, et je me tiens évidemment à la disposition de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour en discuter lors d’une réunion.
    Vous avez raison de souligner l’importance d’articuler le dispositif avec les expériences régionales. Je le dis d’autant plus volontiers que j’ai été vice-présidente chargée de l’aménagement du territoire de la région qui a inventé le pass culture, sous l’égide d’Olivier Guichard – mon grand âge me donne le privilège d’évoquer quelques souvenirs personnels !

    Mme Stella Dupont

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    Ah, les Pays de la Loire !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Eh oui, les Pays de la Loire ont inventé le pass culture, je n’y peux rien ! C’était il y a presque cinquante ans ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.) Je crois fondamentalement à l’utilité de ce genre d’outils. Les pratiques culturelles des Français ont changé. On ne peut pas confondre l’éducation artistique et culturelle avec le pass culture, qui repose sur l’autonomie des citoyens. Ceux-ci choisissent ce qu’ils veulent : cela ne veut pas dire qu’on ne les guide pas ou qu’on ne les informe pas, mais leur démarche est autonome, et elle doit être encouragée en ce qu’elle participe aussi d’un projet politique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Béatrice Descamps.

    Mme Béatrice Descamps

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    Ma proposition concernait justement l’éducation artistique et culturelle, non le pass culture. Tout à l’heure, madame la ministre, vous avez dit que tout ne commence pas à 18 ans ; j’attends beaucoup de votre engagement en faveur du cheminement, et je vous en remercie.

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Dumas.

    Mme Frédérique Dumas

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    Je reviendrai sur le sujet à l’occasion d’un amendement. Cela fait trois ans que nous posons des questions sur ce thème ! Madame la ministre, vous venez de dire que le pass culture est un projet politique visant à favoriser l’autonomie. Or nous savons tous que l’éducation artistique et culturelle est indispensable au développement de l’autonomie. Comment voulez-vous que l’obtention à 18 ans d’un pass culture favorise l’autonomie, si aucun travail n’a été fait en amont ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je n’ai jamais dit ça !

    Mme Frédérique Dumas

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    Le pass culture favorise l’autonomie de ceux qui ont les moyens de cette autonomie !

    (L’amendement no 1098 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive, pour soutenir l’amendement no 2647.

    M. Michel Larive

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    Comme je l’ai expliqué dans mon propos liminaire, cet amendement fait écho à la proposition de loi que j’ai déposée la semaine dernière. Il est urgent de créer un centre national des artistes-auteurs – CNAA –, qui répondrait à une aspiration forte des professionnels de la création. Madame la ministre, vous avez affirmé m’avoir entendu. Chers collègues, je vous incite donc à voter l’ouverture des crédits nécessaires à cette mesure.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Le plan artistes-auteurs entrera en vigueur en 2021 : je vous accorde qu’il était temps. Le PLF pour 2021 prévoit 20 millions d’euros de crédits pour donner suite au rapport Racine. Il s’agit de défendre les intérêts des artistes, leurs droits sociaux et leur représentativité.
    Vous soutenez la création d’un centre national des artistes-auteurs, mais les artistes-auteurs ne composent pas une masse informe ; on y trouve aussi bien des écrivains, des sculpteurs, des peintres ou des musiciens que des traducteurs, par exemple. Tous n’ont pas les mêmes besoins, les mêmes préoccupations ni les mêmes exigences. Je ne suis pas certaine que votre proposition réponde à une attente de leur part. La priorité, cette année, me paraît être de les accompagner pour traverser la crise. L’avis est donc défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je suis très mobilisée sur le sujet. Le plan artistes-auteurs doit d’abord répondre à des situations d’urgence, notamment concernant les dysfonctionnements constatés par les Unions de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales – URSSAF – et le versement des prestations sociales. Ces problèmes ne relèvent pas de mon ministère, mais de celui des solidarités et de la santé, et plus spécifiquement de la direction de la sécurité sociale. Croyez cependant que je me mobilise sur le sujet afin d’obtenir des solutions avant la fin de 2020, car il est intolérable que des personnes ne reçoivent pas les prestations sociales auxquelles elles ont droit. Il faut régler ces dysfonctionnements en urgence, et cela ne requiert aucune structure nouvelle.
    Ensuite, comme la rapporteure spéciale l’a indiqué, des moyens nouveaux ont été dégagés. Selon moi, votre proposition, à laquelle je me rallierai peut-être dans quelque temps, mérite d’être analysée. Il faut bien avouer que le milieu est très divisé – traversé de conflits armés, si je puis dire. En effet, les intérêts sont très divers. Si certains et certaines réclament une structure unique, beaucoup d’entre elles et d’entre eux n’y souscrivent pas. Faire représenter certains artistes-auteurs du milieu littéraire par un sculpteur ou un photographe susciterait des réactions épidermiques violentes – c’est le moins que l’on puisse dire. Je mène une concertation approfondie, laissons-lui le temps d’aboutir. Je me suis fixé des échéances brèves pour une meilleure protection des artistes-auteurs.
    Votre amendement me semble donc prématuré ; aussi je vous demande de bien vouloir le retirer.

    M. le président

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    La parole est à Mme Constance Le Grip.

    Mme Constance Le Grip

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    Il y a quelques mois, Pascal Bois et moi-même avons été co-rapporteurs d’une mission flash relative au statut des auteurs pour la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Il s’agissait de savoir s’il fallait créer un statut des auteurs et ce qui devait advenir des conclusions du fameux rapport Racine. Des nombreuses consultations et concertations que nous avons menées, nous avons conclu que la création d’un centre national des artistes-auteurs, c’est-à-dire d’un grand machin supplémentaire, n’était certainement pas souhaitable, encore moins prioritaire.
    Des questions urgentes se posent en effet, comme Mme la ministre vient de le dire, sur les prestations sociales ou la prise en charge des régimes de retraite : le ministère de la culture et celui de la solidarité et de la santé s’emploient à y répondre. En revanche, ce serait une mauvais idée d’amalgamer dans une grande structure, dont on ignore qui la piloterait, combien elle coûterait et à quoi elle servirait, des personnes dont les profils, les intérêts et les parcours de vie diffèrent fortement.
    Il est bon, parfois, de faire le service après-vente de nos rapports, missions d’information et autres missions flash ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Maxime Minot

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    Très juste !

    M. le président

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    Absolument !
    La parole est à M. Michel Larive.

    M. Michel Larive

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    Il existe une nomenclature qui détaille qui sont les artistes-auteurs : il faut seulement se renseigner. Le secteurs concernés sont, je crois, au nombre de dix-sept, ou un peu plus. Le monde artistique n’est pas responsable de la division qui règne en son sein : celle-ci tient à la façon dont il est géré par la puissance publique.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Ça va encore être de ma faute !

    M. Michel Larive

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    La puissance publique travaille en silos et divise les secteurs d’activité, alors que la question de la création est transversale. De même que lors de l’examen de la proposition de loi déposée à l’occasion de notre niche en 2019, vous confondez création et diffusion. Vous m’opposez des subventions et des aides ponctuelles, elles ont leur intérêt, mais ce sont des aides à la diffusion. Il n’existe aucun dispositif pérenne d’aide à la création, hormis des actions ponctuelles, qui sont le fait des collectivités territoriales plutôt que de l’État, lequel sélectionne les grands acteurs, ceux qui ont déjà été repérés, sans aller chercher les acteurs de terrain, qui ont besoin de ces subsides.
    Vous soulevez le problème, grave, de la protection sociale des artistes-auteurs. À cet égard, le CNAA constituerait un outil efficace, un guichet unique pour voir un peu plus clair dans le maquis des prestations sociales.

    M. le président

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    Veuillez conclure, s’il vous plaît.

    M. Michel Larive

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    La précarité est le fil rouge qui relie l’ensemble des artistes-auteurs, quel que soit leur domaine d’activité : 70 % d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté ; ils sont obligés d’avoir un autre job pour vivre. Ça, c’est la réalité, et dans tous les secteurs artistiques !

    (L’amendement no 2647 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Alain David, pour soutenir l’amendement no 2534.

    M. Alain David

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    Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés, auquel Mme Valérie Rabault est particulièrement attachée, vise à augmenter de 33 millions d’euros les crédits de soutien aux établissements d’enseignement supérieur et à l’insertion professionnelle, afin de les ramener à leur niveau de 2017. En effet, l’augmentation de 8 millions d’euros proposée dans le présent budget ne suffit pas à compenser les baisses votées par la majorité dans les trois précédentes lois de finances.
    Ainsi, entre 2017 et 2020, les crédits alloués aux établissements d’enseignement supérieur et à l’insertion professionnelle ont diminué de 41 millions d’euros, soit une baisse de 15 %. Nous estimons qu’un soutien accru doit être apporté aux établissements d’enseignement supérieur et aux efforts en matière d’insertion professionnelle, particulièrement dans la période actuelle où l’épidémie de covid tend à accroître les difficultés.
    L’amendement prévoit donc d’augmenter de quelque 33 millions les crédits de l’action 01 « Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle » du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » et de diminuer du même montant ceux de l’action 07 « Fonctions de soutien du ministère » du programme 224.
    En réalité, les députés Socialistes et apparentés ne souhaitent pas réduire les moyens consacrés aux fonctions de soutien du ministère, mais les règles de recevabilité les contraignent à prévoir un tel transfert. Dans les faits, nous demandons au Gouvernement de lever le gage.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Avis défavorable. Comme vous l’avez souligné, les établissements du réseau enseignement supérieur culture – ESC – bénéficient cette année de crédits supplémentaires. Ils font par ailleurs l’objet d’un soutien continu, même quand celui-ci est coûteux. Je rappelle que le coût moyen d’un étudiant est sensiblement plus élevé dans ces écoles que dans l’enseignement supérieur général. Par ailleurs, ces établissements pourront bénéficier, au titre du plan de relance, d’une aide aux dépenses d’investissement, de même qu’ils pourront profiter de l’enveloppe consacrée à la rénovation thermique.

    (L’amendement no 2534, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements, nos 1095, 2530 et 2617, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 1095 et 2530 sont identiques.
    La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l’amendement no 1095.

    Mme Béatrice Descamps

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    Nous souhaitons revenir sur la situation de nos écoles supérieures d’art et design publiques qui délivrent des diplômes nationaux et qui se sont réformées pour intégrer pleinement le système de l’enseignement supérieur. Elles mènent des actions de recherche à travers des programmes et des troisièmes cycles financés par le ministère de la culture. Reste que ce financement est resté au stade d’amorce : sous-dimensionné, il ne comprend pas de part pérenne, les fonds n’étant attribués que via un appel à projet.
    L’enveloppe consacrée à la recherche, répartie entre les actions 01 et 04, n’a pas évolué depuis de nombreux exercices. Elle s’élève à 1 million d’euros, soit en moyenne 18 000 euros par école, un montant insuffisant pour financer le fonctionnement des unités de recherche, la production, la diffusion et la valorisation des projets, au point que la validité des diplômes nationaux est en péril.
    L’amendement vise donc à attribuer 3 millions à l’action 04 « Recherche culturelle et culture scientifique et technique » du programme 361.

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l’amendement no 2530.

    Mme Michèle Victory

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    Mme Descamps l’a très bien défendu. J’ajoute seulement que nous sommes très attentives à cette question. Ces amendements sont presque d’appel : il faut reparler des écoles d’art et éclaircir leur situation. Si celles-ci ne reçoivent que 18 000 euros en moyenne pour financer leurs unités de recherche, c’est parce nous n’avons toujours pas résolu le problème de leur statut et que nous balançons entre différents systèmes.
    Si l’on souhaite que la place de la création française soit reconnue dans l’enseignement artistique et culturel, que les établissements d’enseignement puissent se battre contre les écoles privées, très nombreuses dans le domaine de l’art, et que la France défende ce projet au point de devenir leader, ce qui paraîtrait logique, nous devons prendre des décisions fortes.
    Le sujet s’articule avec le débat précédent – même s’il est ici question du « haut » de la formation. Tout à l’heure, je me suis peut-être fait mal comprendre quand j’ai évoqué ceux qui commencent dans la pratique culturelle. Le maillon manquant, quand on parle d’éducation artistique et culturelle – EAC –, c’est l’école : l’enseignement artistique n’y est toujours pas considéré comme fondamental. Or, pour commencer une pratique artistique, il faut avoir des clés et posséder un langage permettant d’accéder à la compréhension des œuvres.
    Je ne pense pas que l’EAC puisse le faire seule. Ces questions ne dépendent pas strictement de votre ministère, madame la ministre, mais l’ensemble mérite d’être repensé. Il faudrait que, dès l’école, puis au collège et au lycée, on dispense un enseignement artistique qui donne les clés de la compréhension. Un professeur de musique ne peut rien faire quand il ne voit qu’une heure par semaine des classes de trente élèves.

    M. le président

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    La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l’amendement no 2617.

    Mme Béatrice Descamps

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    Cet amendement de repli tend au moins à pérenniser l’enveloppe de 1 million d’euros, ce qui n’est pas considérable, en augmentant de 520 000 euros les crédits de l’action 04 « Recherche culturelle et culture scientifique et technique » du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui ne consacre actuellement que 480 000 euros au soutien de la recherche en art au sein du réseau des écoles nationales et territoriales supérieures d’art.
    Je sais que votre ministère prépare une analyse poussée des besoins en matière de recherche culturelle dans nos territoires afin d’envisager, l’an prochain, une augmentation des budgets. Cependant, voilà plusieurs années que les écoles d’art et de design de nos territoires demandent une revalorisation des fonds qui leur sont accordés pour la recherche. Il me semble important de faire dès aujourd’hui en leur faveur un geste par ailleurs limité : l’amendement ne porte que sur un faible montant.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Je partage votre constat sur la nécessité d’augmenter les moyens alloués à la recherche dans l’enseignement supérieur culture, mais cela suppose d’augmenter les moyens humains dans les établissements afin de permettre aux enseignants d’obtenir des décharges. C’est d’ailleurs ce que je proposerai à travers un amendement dédié aux écoles d’architecture. La réforme du statut de professeur associé et de chargé d’enseignement est également en cours. L’année 2021 devrait permettre certaines avancées.
    Sur le fond, depuis la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine ou LCAP, se dégage une vraie ambition de développer la recherche pour l’enseignement supérieur culture. Le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, que j’ai pu auditionner, exprime son enthousiasme à l’égard de toutes les actions menées dans les communautés de recherche. Faut-il davantage de moyens ? La question doit aussi lui être posée. En attendant, je vous suggère de retirer l’amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Même avis. Ces sujets complexes méritent une concertation approfondie avec le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, mais aussi avec les collectivités territoriales qui accueillent ces écoles. Une telle concertation n’étant pas menée, j’ai le sentiment que ces amendements constituent une forme de coup de chapeau pour lancer le débat. Or il faut vraiment partir d’un état des lieux et chiffrer les besoins. Dans ce contexte particulier, j’émets par conséquent un avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Béatrice Descamps.

    Mme Béatrice Descamps

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    Non, madame la ministre, nous ne sommes pas là pour lancer un débat, ce qui est fait depuis bien longtemps. L’an dernier, nous avons eu exactement les mêmes échanges. Du côté du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, on nous a assuré que notre amendement était bon et l’on a reconnu la réalité des besoins. On nous a toutefois conseillé de nous adresser au ministère de la culture. Celui-ci a lui aussi constaté les besoins, mais nous a renvoyés au ministère de la recherche. De ce fait, rien ne s’est passé pendant un an.
    J’étais persuadée que, grâce aux amendements que nous avions déposés dans le cadre de la LPPR – loi de programmation de la recherche 2021-2030 –,  nous avions commencé quelque chose.
    Quoi qu’il en soit, nos amendements ne constituent en rien un point de départ. Dans notre esprit, nous pouvions franchir une étape importante. Ces 520 000 euros, j’y croyais vraiment.

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory.

    Mme Michèle Victory

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    Madame la ministre, nous n’avons pas envie d’être désagréables avec vous, mais vous nous dites qu’il faut lancer une concertation. Voilà dix ans qu’elle a été menée. France urbaine a rendu une étude assez complète. Au terme d’une mission flash, Fabienne Colboc et moi-même avons remis l’an dernier un rapport à votre prédécesseur. Sur cette question, il y avait quatre pistes possibles. On nous avait promis que les choses avanceraient. Certes, ce n’est pas vous qui nous aviez répondu, mais le dossier traîne depuis dix ans. Peut-être faut-il passer par une voie interministérielle, car nous sommes à la croisée de politiques qui concernent à la fois la culture, la recherche et les collectivités territoriales, et certains enjeux peuvent être compris différemment selon qu’ils sont pris en compte par les collectivités ou les ministères. En tout cas, la situation est urgente. Nous vous demandons vraiment de prendre les choses en main.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    Je comprends les interventions de Mme Descamp et de Mme Victory. C’est un vrai sujet, que je les remercie de poser. Nous l’avons abordé en commission et je suis à leur disposition pour en débattre. À mon sens, il faut arrêter de raisonner à partir de l’institution. Mieux vaudrait le faire à partir des formations dispensées non seulement dans les écoles d’art, mais dans les écoles d’histoire de l’art ou celles, plus techniques, d’architecture. En réfléchissant sur les formations, on verra que des passerelles peuvent être créées dans les ministères. C’est là-dessus qu’il faut travailler : c’est une question de méthode plus que d’objectifs.
    Pour citer un exemple, dans le cadre de la formation des conservateurs restaurateurs, l’École nationale du patrimoine vient de créer un doctorat par le projet avec l’Université de Cergy-Pontoise. Il s’agit bien d’une collaboration entre deux ministères et deux institutions qui construisent un parcours spécifique pour un métier en partie technique et en partie intellectuel. On fera monter nos conservateurs restaurateurs en compétence en faisant dialoguer deux univers qui ne se parlaient pas.
    Pour avancer, le mieux est non de déposer un amendement sur une mission budgétaire, mais de mener une réflexion de fond et de lancer des appels à projet, ce qui se pratique déjà. Ce qui manque aujourd’hui, ce sont les projets coconstruits par différents ministères qui croisent leur champ de compétence. Nous reviendrons tout à l’heure sur l’architecture. En attendant, bien qu’il reconnaisse l’importance du sujet, le groupe LaREM ne votera pas l’amendement.

    (Les amendements identiques nos 1095 et 2530 ne sont pas adoptés.)

    (L’amendement no 2617 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour soutenir l’amendement no 2286.

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis

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    Cet amendement vise à permettre la prise en charge des frais d’inscriptions des étudiants boursiers dans les écoles d’art territoriales, en attribuant 2,5 millions supplémentaires à l’action 01 « Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle » du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », pour que les écoles supérieures d’art territoriales puissent exonérer les étudiants boursiers des frais d’inscription. Ces 2,5 millions d’euros sont calculés pour un taux d’élèves boursiers de 45 %, soit 4 275 étudiants, et pour un montant moyen de frais d’inscription de 600 euros. Ce montant sera prélevé sur le programme 175 « Patrimoines », action 01 « Monuments historiques et patrimoine monumental », au titre du financement des travaux du Grand Palais. En effet, l’État a renoncé aux aspects les plus pharaoniques de ce projet sans revoir à la baisse le budget global des travaux.

    M. le président

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    Sur l’amendement no 1900, qui sera appelé dans un instant, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    L’exonération que vous réclamez ne dépend pas seulement de l’État, mais aussi des collectivités territoriales. Je profite de l’occasion pour rappeler que le ministère de la culture porte une attention particulière aux élèves boursiers de l’ESC. Les bourses sur critères sociaux – dont le total s’élève à 25 millions d’euros, soit une hausse de 3 millions d’euros par rapport à 2020 – sont calculées sur le même modèle que celles de l’enseignement supérieur. La commission n’ayant pas examiné l’amendement, c’est à titre personnel que j’émets un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Votre amendement soulève deux questions, auxquelles je dois répondre.
    La première porte sur les travaux du Grand Palais. À première vue, on pourrait penser que les 466 millions d’euros inscrits pour ces travaux correspondent aux crédits initialement prévus et qu’aucune économie n’est réalisée.

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis

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    Oui !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    En réalité, le projet initial – que vous avez qualifié, comme d’autres avant vous, de pharaonique – prévoyait un montant de travaux très supérieur, allant de 550 à 580 millions d’euros, soit au moins une centaine de millions d’euros supplémentaires. En outre, certains travaux n’avaient pas été envisagés alors, en particulier ceux que rend nécessaire la dégradation massive des façades du Grand Palais, notamment des statues et des éléments architecturaux qui s’y trouvent. Si vous avez le plaisir de déambuler le long du Grand Palais,…

    Mme Constance Le Grip

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    C’est à moins d’un kilomètre d’ici ! (Sourires.)

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    …vous constaterez que tous ces éléments sont recouverts de filets, afin de protéger les promeneurs. Le montant des crédits méritait donc d’être actualisé.
    Par ailleurs, 30 millions des 466 millions inscrits correspondent à une réserve de précaution. Nous sommes donc passés de 580 à 436 millions. En ramenant le montant des travaux à 466 millions, nous avons réduit l’enveloppe financière de manière très substantielle, de plus d’une centaine de millions.
    Autrement dit, on ne peut pas du tout considérer les crédits du Grand Palais comme une réserve d’argent dans laquelle on pourrait se servir pour financer telle ou telle action, aussi légitime puisse-t-elle être.
    Je précise que le Grand Palais a une surface supérieure à celle du château de Versailles et qu’il s’agit d’un élément architectural structurant du paysage parisien. De plus, un certain nombre de manifestations sportives doivent s’y dérouler lors des Jeux olympiques. Nous avons donc à la fois une contrainte de calendrier et un chantier architectural à mener de la meilleure façon. Je suis à votre disposition pour vous présenter ces travaux en détail.
    En ce qui concerne la seconde question, celle des bourses et de l’aide aux étudiants, je suis absolument d’accord avec Mme la rapporteure spéciale. Dans ce projet de loi de finances, une enveloppe de 4,8 millions d’euros de mesures nouvelles est consacrée à l’amélioration des conditions de vie et d’étude des étudiants, lesquelles sont d’ailleurs parfaitement conformes à celles des autres étudiants de l’enseignement supérieur. En outre, je le rappelle, le plan de relance comprend une enveloppe très importante, de 70 millions d’euros, en faveur de l’enseignement supérieur culture.
    Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis

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    Il serait tout de même bon que les élèves boursiers des écoles relevant du ministère de la culture soient exonérés de frais d’inscription, comme tous les autres boursiers.
    Dans la mesure où vous souhaitez revoir le projet de rénovation du Grand Palais, madame la ministre, ne conviendrait-il pas de confier cette rénovation au secteur privé, comme cela a été fait pour l’hôtel de la Marine, afin de réduire substantiellement le budget et de dégager de l’argent public qui permettrait de financer autre chose dans notre pays ?

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory.

    Mme Michèle Victory

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    Notre groupe soutient l’amendement de Mme la rapporteure pour avis. Tout ce qui touche à la vie étudiante est important. Il apparaît que les boursiers ne sont pas traités de la même manière dans les différentes écoles relevant du ministère de la culture. Certaines d’entre elles ont pris la décision d’exonérer leurs étudiants de frais d’inscription. Dans d’autres, en revanche, les bourses sont versées avec beaucoup de retard. Il conviendrait d’avoir une vision globale de la situation et de rendre les choses plus homogènes, afin que tous les étudiants bénéficient des mêmes possibilités.

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Kuster.

    Mme Brigitte Kuster

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    Pour ma part, je n’entrerai pas dans le débat mettant en balance les bourses étudiantes et les travaux du Grand Palais.
    Je vous remercie, madame la ministre, des précisions que vous avez apportées concernant ces travaux. Je défends le Grand Palais, non pas parce que je suis une élue de Paris, mais parce que je suis consciente de ce qu’il représente pour la France. Le bâtiment avait déjà fait l’objet de travaux importants, grâce à l’un de vos prédécesseurs, Jacques Toubon. Si celui-ci ne s’était pas battu, le Grand Palais n’existerait plus en l’état.
    Les montants que vous avez évoqués peuvent effectivement paraître pharaoniques et donner le vertige – même à nous –, d’autant que la facture sera peut-être finalement de 500 millions plutôt que de 450. La commission des affaires culturelles avait prévu cette semaine un déplacement au Grand Palais, qui a évidemment été annulé. Vous venez de proposer de présenter les travaux de manière plus détaillée devant la commission, de même que vous avez évoqué tout à l’heure la possibilité de venir débattre avec nous du pass culture. Cette proposition est toute à votre honneur, et je vous en remercie. J’espère qu’elle ne restera pas lettre morte et que nous pourrons disposer de ces informations très importantes. Nous avons soif de mieux comprendre les mesures sur lesquelles nous nous prononçons ; elles sont parfois examinées en quelques minutes dans l’hémicycle. Je soutiens bien évidemment le chantier du Grand Palais.

    (L’amendement no 2286 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Sur l’amendement no 1770, je suis saisi par le groupe Libertés et territoires d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme la rapporteure spéciale, pour soutenir l’amendement no 2524.

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Il vise à ouvrir 10 postes supplémentaires – 10 équivalents temps plein – dans les écoles nationales supérieures d’architecture. La réforme engagée en 2018 vise à soutenir la recherche dans les ENSA. Pour cela, il est nécessaire d’y créer un nombre substantiel de postes, afin d’accorder des décharges aux enseignants-chercheurs.
    En 2017, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de la culture s’étaient entendus sur un protocole. Il semblerait que le premier ait tenu ses engagements en créant 30 postes en 2016 et 2017. C’est en tout cas ce que la ministre Frédérique Vidal a répondu lorsque j’ai présenté un amendement à ce sujet sur la mission « Recherche ». Pour sa part, le ministère de la culture a créé 45 postes de 2017 et 2019, conformément à ses engagements, puis son effort s’est interrompu : aucun poste n’a été créé en 2020 et seuls 5 postes sont ouverts dans le projet de loi de finances pour 2021. Ce chiffre est assez éloigné de l’engagement pris : le ministère de la culture aurait dû créer 15 postes en 2021 pour respecter la trajectoire fixée par le protocole.
    Il s’agit plutôt d’un amendement d’appel, madame la ministre, vous invitant à relancer la dynamique interministérielle à ce sujet. Afin de financer la création de ces 10 postes, je propose de transférer 700 000 euros de l’action 01 du programme 131 « Création » à l’action 07 du programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture ». L’objectif n’est évidemment pas de réduire les crédits consacrés à la création, mais il me fallait satisfaire aux exigences de la LOLF.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Madame la rapporteure spéciale et auteure de l’amendement, le ministère de la culture a rempli son rôle. Sur les 75 postes créés, 45 l’ont été par lui et 30 par le ministère chargé de l’enseignement supérieur. Je défends ma maison, car le sentiment le plus fréquent est que c’est nous qui traînons dans ce domaine ; telle n’est pas la réalité en l’occurrence.
    La réforme des ENSA introduite en 2018, que vous avez évoquée, est très positive. Elle a pour but de consolider l’architecture dans le paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche, en renforçant l’autonomie ainsi que l’ancrage territorial et professionnel des écoles et en créant deux nouveaux corps d’enseignants-chercheurs.
    Le ministère de la culture a engagé un effort important, que je viens de souligner. Il le poursuivra en 2021, en créant 5 postes supplémentaires. Cinq postes seulement, me direz-vous ? Dans le contexte de grande contrainte que nous connaissons en matière d’emploi public, ces 5 postes constituent un signal fort. Il a d’ailleurs fallu mener une négociation musclée pour les obtenir, comme vous pouvez l’imaginer.
    J’ajoute que les ENSA bénéficieront de 39 millions d’euros dans le cadre du plan de relance pour leur rénovation immobilière. Enfin, une mission de l’inspection générale des affaires culturelles a été lancée pour dresser un bilan ; il s’agit désormais de construire une trajectoire parfaitement soutenable.
    Je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, je serai obligée de donner un avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    Je profite de l’examen de cet amendement pour lancer un cri d’alarme concernant la situation de l’architecture dans notre pays. Nous avons besoin des architectes, et nous devons piloter une vraie politique architecturale, celle-ci étant actuellement éclatée entre quatre ministères, voire cinq, si l’on tient compte de la dimension recherche.
    Les architectes sont à même d’apporter des solutions innovantes, notamment en matière de rénovation. Il est urgent que l’on en prenne conscience, car nous sommes en train de perdre des savoir-faire et des talents, qui partent travailler à l’étranger, tout cela en raison d’un manque de coordination des politiques publiques intéressant l’architecture.
    Il convient effectivement de soutenir la recherche. J’entends tout à fait vos arguments, madame la ministre. Vous indiquez que le ministère de la culture joue son rôle ; il faut que les autres acteurs suivent et que l’on soutienne l’architecture. C’est une force de notre pays ; c’est le patrimoine de demain ; c’est l’innovation, notamment dans le cadre des plans Action cœur de ville et Petites villes de demain.

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure spéciale.

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Je retire l’amendement.

    (L’amendement no 2524 est retiré.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour soutenir l’amendement no 1900.

    M. Maxime Minot

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    Ah !

    Mme Brigitte Kuster

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    Cet amendement a trait au pass culture. Son examen pourrait être l’occasion de nous fournir des explications complémentaires.
    Dans la loi de finances pour 2020, il est précisé que la phase d’expérimentation, dans les quatorze départements concernés, durera jusqu’en février 2022. Or le budget n’a jamais été dépensé dans son intégralité : d’après un premier bilan, le taux d’utilisation du pass culture dans ces quatorze départements s’est établi à 74 % et seuls 16 millions des 29 millions d’euros supplémentaires alloués par la loi de finances pour 2020 ont été consommés. On peut donc s’étonner que, pour 2021, vous prévoyiez d’augmenter encore, de 20 millions d’euros, les crédits du pass culture.
    Par ailleurs, le groupe Les Républicains constate – je pense que vous serez d’accord – que nous avons un problème en matière de patrimoine privé. Les deux rapporteurs spéciaux, Gilles Carrez et Valérie Bazin-Malgras, l’ont relevé tout à l’heure, et Constance Le Grip, qui est particulièrement impliquée dans le groupe d’études sur le patrimoine, qu’elle copréside et dont j’ai l’honneur d’être membre, le confirme. Nous souhaitons donc mettre l’accent sur le patrimoine privé.
    C’est pourquoi nous proposons de reporter l’augmentation de 20 millions prévue pour le pass culture – je répète que je ne comprends pas cette augmentation au vu de la consommation actuelle des crédits – sur le programme « Patrimoines ». Le patrimoine privé sera très heureux de récupérer cette somme. À cet égard, j’ai une pensée particulière pour M. Stéphane Bern, qui est notre ami commun. (Mme Constance Le Grip applaudit.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Nous avons déjà abondamment débattu du pass culture. Dans un contexte de crise économique, c’est une chance pour les jeunes.

    Mme Brigitte Kuster

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    Nous n’avons pas dit le contraire !

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Il leur donne les moyens d’accéder à la culture à un moment où les familles peuvent connaître une situation difficile.
    C’est aussi une chance pour les enseignants – nous avons beaucoup parlé de l’éducation artistique et culturelle. C’est un outil qui leur permet de faire découvrir la culture, s’ils veulent bien s’en emparer.
    C’est enfin une chance pour les acteurs culturels, car il finance indirectement leurs activités.
    Je donne donc, bien évidemment, un avis défavorable. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme Constance Le Grip

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    Tout cela n’a aucun rapport avec l’amendement !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je tiens à vous redire ma disponibilité pour être auditionnée par la commission des affaires culturelles aussi souvent que vous le souhaiterez. Et puisque les renseignements me sont demandés, voici, in extenso, les chiffres dont je dispose s’agissant du pass culture ; la fourniture d’un rapport ne me paraît pas nécessaire.
    Après une première expérimentation dans cinq départements – Finistère, Bas-Rhin, Seine-Saint-Denis, Hérault et Guyane – un total de quatorze départements sont, depuis juin 2019, concernés par le déploiement du pass culture. Participent désormais à l’expérimentation les autres départements de la région Bretagne, où le pass est un grand succès, le Val-de-Marne, le Vaucluse, le Doubs, les Ardennes, la Nièvre et la Saône-et-Loire.
    Les résultats que je m’apprête à vous donner sont arrêtés au 20 octobre 2020, mais ils évoluent tous les jours. Dans les quatorze départements participant à l’expérimentation, le taux de participation s’élève à 81 % : 110 000 des 135 000 comptes éligibles ont été activés. Le taux d’utilisation apparaît, quant à lui, en forte progression, atteignant les 71 %, avec 78 160 comptes actifs. En moyenne, sur une période de neuf mois, 128 euros par utilisateur ont été dépensés.
    Au total, 4 253 lieux culturels participent à l’opération, regroupant près de 2,5 millions d’offres. Parmi celles-ci, les livres, avec 58,2 % des réservations, sont les plus demandés, devançant la musique – 15,3 % des réservations – et l’audiovisuel – 10,3 % des réservations. Il s’agit, à 64,1 %, de biens physiques, contre 26,1 % de biens numériques et 9,8 % d’événements. Notons que ces chiffres battent en brèche l’idée communément admise selon laquelle le numérique se serait taillé la part du lion dans les dépenses du pass culture.
    S’agissant du patrimoine, je souhaite d’abord saluer l’action de mon ami Stéphane Bern qui, grâce à la nouvelle édition du loto du patrimoine, aura permis la collecte de 20 millions d’euros, somme qui pourrait atteindre – rêvons un peu – les 30 millions d’euros cette année.
    Il convient également d’insister sur l’extraordinaire effort en faveur du patrimoine qui est accompli dans le PLF pour 2021 et dans le plan de relance. Certes, les chiffres ne sont en rien comparables, car les crédits du programme « Patrimoine » s’élèvent à 1,015 milliard d’euros, dont plus de 170 millions d’euros seront consacrés aux monuments qui n’appartiennent pas à l’État, ce qui constitue un soutien significatif. J’ajoute que, depuis trois ans, ces crédits alloués aux monuments privés ont généré un effet de levier de 2.
    Quant au plan de relance, il prévoit la somme de 40 millions d’euros en faveur des monuments historiques n’appartenant pas à l’État, montant qui, selon nos estimations, pourrait générer 120 millions d’euros de dépenses, car les propriétaires privés bénéficieront d’importantes déductions fiscales et les collectivités, de la récupération de la TVA.
    Loin de moi la volonté de minimiser les mérites de Stéphane Bern, mais les fonds issus du loto du patrimoine apparaissent donc comme l’accompagnement d’un effort massif de l’État en faveur du patrimoine.
    Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur l’amendement.

    M. le président

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    Un grand nombre de députés souhaitent intervenir. Veuillez donc être concis afin que nos débats se poursuivent à un rythme raisonnable.
    La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis

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    Je suis bien consciente que le patrimoine privé a besoin de budgets supplémentaires ; nous sommes bien d’accord sur ce point. Mais, pour ma part, ce n’est pas sur la ligne budgétaire du pass culture que j’aurais pris ces crédits, mais sur celle relative aux travaux de rénovation du Grand Palais.

    M. le président

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    La parole est à Mme Maud Petit.

    Mme Maud Petit

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    Je souhaite porter la voix des outre-mer en rappelant qu’en Guyane, le pass culture est un formidable outil d’accès à la culture, notamment pour les jeunes, qui en sont souvent éloignés. Plutôt que de le remettre en question, nous sommes d’ailleurs presque certains qu’il conviendra de le renforcer, en y donnant accès à un plus jeune âge ou en en accroissant le montant. Je le répète, le pass culture est très efficace en outre-mer. (Mme Bénédicte Peyrol applaudit.)

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Kuster.

    Mme Brigitte Kuster

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    Les 20 millions d’euros que je propose de consacrer au patrimoine ne seraient pas retirés aux crédits actuellement alloués au pass culture, mais correspondraient à l’augmentation que l’on prévoit de leur conférer pour 2021 et 2022. En effet, ce sont respectivement 84 et 104 millions d’euros que l’on envisage d’allouer à cette opération au cours des deux années à venir, et ce en l’absence d’un bilan réellement exhaustif de l’expérimentation et alors que le confinement réduit les possibilités de se rendre au spectacle ou dans un musée. Je le répète, notre volonté n’est pas d’amputer le pass culture, mais simplement de ne pas l’augmenter, afin de dédier ces fonds supplémentaires au patrimoine.
    Par ailleurs, vous avez insisté, madame la rapporteure spéciale, sur la nécessité de démocratiser l’accès à la culture. Or je n’ai jamais dit l’inverse ! Les membres de la commission des affaires culturelles que nous sommes en sont tous convaincus. Depuis le début, nous défendons le pass culture. Mais il convient aussi d’adopter une logique pragmatique dans la répartition des crédits disponibles. Si vous apparteniez à notre commission, madame la rapporteure spéciale de la commission des finances, vous comprendriez de quoi nous parlons. Notre objectif est à la fois d’améliorer le pass culture et d’accroître les crédits dédiés au patrimoine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Je vous remercie, madame la ministre, de nous avoir communiqué ces chiffres. Vous nous assurez également de vouloir poursuivre la discussion avec nous : c’est effectivement nécessaire, car ces chiffres ne disent rien, ou presque, de la concrétisation de l’ambition de démocratisation culturelle. Vos chiffres nous disent quels types de biens culturels sont consommés, mais pas par qui. Or vous savez bien que pour évaluer une politique culturelle et, en l’occurrence, l’ampleur de la démocratisation qu’elle permet, il nous faut croiser ces données quantitatives avec des données démographiques et sociologiques. Dans le cas contraire, nous n’aurions pas assez d’informations pour juger de son efficacité.
    Cela étant, les chiffres que vous nous donnez disent tout de même quelque chose d’important : les biens consommés sont principalement des livres, des contenus audiovisuels et de la musique, ce qui signifie que le pass culture a peu d’effet sur ce qui est déjà très peu consommé par les jeunes, à savoir les spectacles ou les expositions.

    Mme Constance Le Grip

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    C’est vrai !

    Mme Elsa Faucillon

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    Ces chiffres alimentent donc nos réserves, puisqu’ils démontrent que le processus de démocratisation n’est même pas engagé. Il faut donc évaluer le dispositif avant de le généraliser, car le risque est de poursuivre un programme qui ne part pas dans la bonne direction.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    Il convient de lever une ambiguïté, car il y a eu une confusion similaire lors de nos débats en commission. Que recouvrent les aides de l’État au patrimoine et à la restauration des monuments, notamment privés ? Comme l’a rappelé Mme la ministre, l’État intervient massivement en faveur du patrimoine protégé, c’est-à-dire inscrit au titre des monuments historiques, qu’il soit public ou privé. Il existe, par ailleurs, un patrimoine privé non protégé pour lequel la troisième loi de finances rectificative pour 2020, grâce à une proposition de la sénatrice Dominique Vérien, a prévu l’extension du label de la Fondation du patrimoine, lequel donne droit à des déductions fiscales. Notons que celles-ci ne sont pas négligeables et qu’elles permettent aux propriétaires privés de monuments non protégés de restaurer leurs bâtiments.
    Je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’augmenter l’enveloppe consacrée au patrimoine privé non protégé. Le soutien dont il fait l’objet, qu’il s’agisse des aides de l’État ou des dispositions fiscales, est suffisant. (Mme Bénédicte Peyrol applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Larive.

    M. Michel Larive

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    Sophie Mette et moi-même avons effectué une mission flash sur le loto du patrimoine pour laquelle nous avons auditionné M. Bern. Celui-ci avait soulevé de très grandes réserves quant à la part effective du produit accordé au patrimoine par la Française des jeux. En effet, dans la mesure où seulement 10 % des mises reviennent à la Fondation du patrimoine, le gain attendu cette année – qui, selon vos dires, madame la ministre, serait de 30 millions d’euros – signifie que le loto du patrimoine rapporte en réalité 300 millions. À cet égard, M. Bern nous avait dit que, s’agissant d’une opération plutôt tournée vers le grand public, nous aurions pu prévoir qu’une part plus importante de son produit profite au patrimoine – d’autant que la Française des jeux est désormais privatisée et qu’il n’est plus possible de faire varier cette part.
    En tout état de cause, il est dommage de devoir nous reposer sur un jeu d’argent pour œuvrer en faveur du patrimoine national. C’est une action publique dont le ministère de la culture devrait seul avoir la responsabilité.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 1900.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        94
            Nombre de suffrages exprimés                85
            Majorité absolue                        43
                    Pour l’adoption                10
                    Contre                75

    (L’amendement no 1900 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Dumas, pour soutenir l’amendement no 1770.

    Mme Frédérique Dumas

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    Selon vous, madame la ministre, le fait que 110 000 comptes ont été activés pour un total de 135 000 jeunes volontaires prouve l’efficacité du pass culture. Mais, comme l’a rappelé Mme Faucillon, ces données quantitatives ne suffisent pas. Pour nous assurer qu’un dispositif a atteint ses objectifs, nous avons évidemment besoin de données qualitatives.
    Si l’objectif poursuivi est bien de réduire les fractures et de favoriser l’émancipation par la culture, il importe de connaître le profil des volontaires qui participent à l’expérimentation depuis trois ans pour savoir s’il est atteint – et je doute que ce soit le cas. De la même manière, il nous faudrait aussi savoir avec précision ce qui a été consommé, au-delà des catégories générales que sont les livres ou la musique.
    Par ailleurs, vous nous avez dit, madame la rapporteure spéciale, qu’il avait fallu, avec le pass culture, tout inventer. Or je vous rappelle que toutes les collectivités, particulièrement les régions, avaient déjà essayé un tel dispositif.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

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    Mais non !

    Mme Frédérique Dumas

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    Je suis désolée, mais j’ai été conseillère régionale d’Île-de-France, où nous avions lancé le chèque culture. Pourquoi ce type de mesure a-t-il souvent été abandonné ? Parce qu’il ne fonctionnait pas !
    Lors de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron, j’ai participé au groupe de travail dédié à la culture et je me suis toujours opposée au pass culture. Celui-ci avait été annoncé par le futur président à la suite de son lancement en Italie par Matteo Renzi, qui avait fait de ce dispositif une réponse politique aux attentats terroristes de 2015. Mais nous avons repris cette initiative sans jamais réfléchir aux moyens de l’élaborer en fonction des besoins du terrain. Si elle ne sert qu’à ceux qui ont déjà pour habitude de consommer des biens culturels, voire qui en ont les moyens, je ne crois pas que nous pourrons dire que son objectif est atteint.
    Pourtant, vous prévoyez 20 millions d’euros supplémentaires en 2021, année pendant laquelle nous savons qu’il sera plus difficile de se rendre sur des sites culturels. S’ajoutent à ce problème ceux posés par la fracture territoriale en matière de numérique – qu’il s’agisse de l’offre de réseaux ou de leur usage – et par l’inégal accès à la culture selon les territoires : s’ils ne sont pas résolus, la démocratisation culturelle que vous annoncez – et à laquelle vous nous accusez d’être opposés si nous ne sommes pas en faveur du pass culture – ne se traduira pas dans la réalité.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Avis défavorable. Nous avons suffisamment traité le sujet.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Avis défavorable. Je me suis déjà longuement expliquée.

    M. le président

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    La parole est à Mme Virginie Duby-Muller.

    Mme Virginie Duby-Muller

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    Pour rebondir sur les propos de notre collègue Frédérique Dumas, je rappelle que le pass culture était une promesse de campagne du président Emmanuel Macron, qui voulait le rendre disponible via une plateforme numérique financée par l’État, les diffuseurs et les GAFA ; autant dire que nous sommes loin du compte. Comme l’a excellemment rappelé ma collègue Brigitte Kuster, la phase d’expérimentation a mis en évidence une sous-consommation des crédits. Quelques chiffres : au 11 septembre dernier, 93 000 jeunes sur les 135 000 concernés avaient activé le pass dans les départements test, et c’est en Bretagne que le projet a remporté le plus d’adhésion. Ne serait-il pas utile de réaliser une étude d’impact du dispositif avant de le généraliser ? (Mme Constance Le Grip applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Dumas.

    Mme Frédérique Dumas

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    Je précise que l’amendement vise à basculer 15 millions d’euros de crédits du pass culture vers le soutien à la création et à la diffusion du spectacle vivant et des arts visuels, qui en ont bien besoin en ce moment.

    Mme Elsa Faucillon

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    Tout à fait !

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 1770.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        92
            Nombre de suffrages exprimés                92
            Majorité absolue                        47
                    Pour l’adoption                19
                    Contre                73

    (L’amendement no 1770 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l’amendement no 1096.

    Mme Béatrice Descamps

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    Les scènes nationales sont un poumon de la création et de la vie artistique du pays. Comme de nombreux acteurs du milieu de la culture, elles ont été très affectées par la crise sanitaire, et notamment par les annulations de spectacles entraînant le remboursement des billets. Cet amendement est destiné à appeler l’attention sur leurs difficultés.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Je profite d’avoir la parole pour répondre aux propos condescendants tenus tout à l’heure par Mme Kuster. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Oui, je suis commissaire aux finances, mais je ne me considère pas seulement comme une comptable ; je suis rapporteure spéciale du budget de la culture que nous examinons actuellement, et c’est à ce titre que j’ai répondu. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Je n’accepte donc pas ce genre de remarque.
    Madame Descamps, 15 millions d’euros supplémentaires sont déjà prévus dans le projet de loi de finances pour les réseaux subventionnés dans les territoires et 30 millions sont prévus pour les labels dans le plan de relance. Les structures subventionnées sont, du fait de leur modèle économique, un peu moins dépendantes des recettes de billetterie ; elles ont par ailleurs bénéficié de l’activité partielle et des autres mesures de droit commun. Leurs pertes sont importantes et significatives, mais vous comprendrez que la priorité soit donnée aux structures non subventionnées. Avis défavorable.

    (L’amendement no 1096, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis, pour soutenir l’amendement no 2287.

    Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis

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    Il vise à transférer 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement du programme 361 vers le programme 175. En effet, les crédits de l’action 02, « Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle », s’élèvent à 222 millions ; leur utilisation est présentée de façon très floue avec des dispositifs multiples et diffus. Ces 10 millions d’euros pourraient être mieux employés à soutenir l’entretien et la rénovation des monuments historiques appartenant à des petites communes ou à des propriétaires privés. C’est pourquoi l’amendement propose de les affecter à l’action 01, « Monuments historiques et patrimoine monumental », du programme 175. (M. Maxime Minot applaudit.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Je suis favorable à l’amendement de notre collègue. Il s’agit plutôt d’un problème de réaffectation des crédits au sein du programme 175, mais la loi organique relative aux lois de finances oblige Mme Bazin-Malgras à présenter un transfert de crédits d’un programme à un autre.
    Pourquoi cette proposition ? Parce que l’État n’est propriétaire que de 3 % des monuments historiques ; les collectivités locales, de 50 % ; 44 % sont entre des mains privées. Même si un effort important est fait pour le patrimoine appartenant aux collectivités locales et au privé, nous pouvons encore l’accentuer, et ce serait une bonne chose que d’ajouter une dizaine de millions aux 40 millions déjà prévus. Le fond incitatif créé il y a deux ans pour aider au financement du patrimoine dans les petites communes fut une très bonne initiative, mais elle ne suffit pas. Par ailleurs, il y a peut-être un problème de consommation des crédits, dont nous reparlerons à l’occasion de l’amendement de M. Gérard, du fait du manque d’accompagnement des travaux en maîtrise d’ouvrage.
    Je profite de l’occasion, madame la ministre, pour dire un mot du Grand Palais. J’y suis allé dès septembre 2017 pour comprendre les travaux lors d’une longue réunion organisée avec la présidente de l’époque, Sylvie Hubac. À ce moment, tout le monde s’interrogeait déjà sur deux points : les terrassements considérables prévus pour accueillir la logistique, et la rue centrale qui devait partir des Champs-Élysées pour aller jusqu’à la Seine. Nous avions un doute sur le budget et je l’avais signalé dans mon rapport en appelant vos prédécesseurs à la vigilance. L’évolution du projet me paraît bonne puisqu’elle supprime les terrassements et conserve les espaces existants.
    En revanche, votre réponse m’a un peu inquiété, madame la ministre. Il faut se tenir aux 460 millions d’euros. Nous n’avons plus le droit au moindre dépassement,…

    Mme Constance Le Grip

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    Non, en effet !

    M. Gilles Carrez, rapporteur

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    …d’autant que la quasi-totalité des crédits publics du ministère sont déjà disponibles ; le reste du financement se fera par emprunt, avec 150 millions d’emprunt venant s’ajouter aux 100 millions du PIA, le programme d’investissements d’avenir. Cet emprunt ne pourra être remboursé que si les recettes commerciales sont au rendez-vous, et j’espère que nous adopterons pour le Grand Palais la même démarche que celle qui avait été retenue pour l’hôtel de la Marine, dont le cas a été exemplaire.

    Mme Constance Le Grip

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    Voilà !

    M. Gilles Carrez, rapporteur

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    Madame la ministre, il faut que vous soyez très vigilante, et nous sommes là pour vous y aider ; le travail parlementaire consiste aussi à évaluer et à suivre ce chantier hors normes. J’ajoute enfin que, si nous ne réalisons pas ces travaux, nous serons obligés de fermer le Grand Palais pour raisons de sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    Merci, monsieur le rapporteur spécial. Pour la clarté de nos débats, était-ce l’avis de la commission ou un avis à titre personnel ?  

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    C’est un avis personnel car l’amendement n’a pas été examiné en commission.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je ne vois pas ce qui vous a inquiété dans mes propos sur le Grand Palais, monsieur le rapporteur spécial. Au contraire, ils devraient vous rassurer, car je suis le sujet avec grande attention. La réserve de précaution de 30 millions d’euros est justement là pour assurer que l’enveloppe budgétaire sera bien respectée. De plus, nous avons annulé plusieurs aléas de ce projet qui, outre son caractère pharaonique sur le plan financier, présentait également une dangerosité du fait des travaux d’excavation prévus pour créer une plateforme logistique en sous-sol du Grand Palais – celui-ci étant situé au bord de la Seine, les travaux d’excavation étaient une mise en péril supplémentaire du bâtiment, qui n’avait pas besoin de cela.
    Vous avez rappelé la maquette budgétaire de la restauration du Grand Palais : 150 millions d’emprunt, 25 millions de mécénat de Chanel ; j’ajoute le risque qu’auraient fait encourir les atermoiements sur ces aspects financiers si je n’avais pas pris de décision ferme. Je reste à votre disposition pour répondre plus finement à toute question relative au Grand Palais, bâtiment qui représente, ainsi que l’a souligné Mme Kuster, un élément patrimonial de première grandeur dans le paysage parisien. Mais, si nous n’agissons pas maintenant, la mort du Grand Palais est programmée.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Nous en sommes bien conscients.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    On se dit parfois que l’on peut attendre ; cette fois, vraiment pas.
    En ce qui concerne l’amendement no 2287, je rappelle que l’action 02 du programme 361 vise à compenser les inégalités géographiques d’accès à l’offre culturelle dont la réduction constitue un objectif prioritaire. Le niveau des crédits alloués à l’entretien et à la conservation des monuments historiques a atteint un niveau exceptionnel de 270 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 116 millions en crédits de paiement, et nous apportons un soutien significatif aux monuments historiques qui ne sont pas la propriété de l’État. Nous sommes dans une France décentralisée, que je sache, où chacun prend ses responsabilités : il n’y a pas d’un côté un État aux recettes plantureuses et, de l’autre, des collectivités territoriales sans aucune marge budgétaire. Ce n’est pas vrai.

    Mme Danielle Brulebois

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    Cela s’appelle la décentralisation !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Nous allouons plus de 170 millions par an aux monuments historiques non-État sur le programme « Patrimoines », soit 70 % des crédits monuments historiques déconcentrés, avec un effet de levier considérable que l’on évalue à 2 au minimum. Je rappelle par ailleurs que le plan de relance prévoit 40 millions en faveur des monuments historiques « non-État », qui pourraient générer 120 millions d’euros de travaux.
    Il y a aussi un véritable problème de consommation des crédits. Lorsque les monuments historiques sont possédés par une collectivité territoriale ou des propriétaires privés, la subvention de l’État ou d’une autre collectivité n’atteint évidemment pas 100 % des travaux engagés. Par conséquent, souvent, les propriétaires privés ou les petites communes, même quand on les aide de façon substantielle, n’arrivent pas à engager les travaux et les enveloppes budgétaires ne sont pas consommées. Il n’y a pas de problème de financement : plutôt que d’augmenter les subventions, il conviendrait de réfléchir entre nous à la manière d’assumer les travaux. Je ne vois pas quel avantage il y aurait à augmenter structurellement cette ligne budgétaire. Une petite commune rurale dont l’église est en danger ne dépensera pas nécessairement l’argent nécessaire, même si la part de la subvention apportée par l’État est augmentée.

    M. le président

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    La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    Je ne comprends pas, madame la ministre, pourquoi vous parlez de la non-consommation des enveloppes budgétaires. Je me renseignerai auprès de ma DRAC pour savoir ce qu’il se passe mais la réalité est que sur le terrain, nous ne parvenons pas à obtenir de crédits.

    M. Michel Larive

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    En effet.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    De nombreuses communes voient en effet leur église se dégrader sans pouvoir financer les travaux. S’il y a un problème de consommation des crédits, je ne sais pas où il se situe.

    (L’amendement no 2287 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l’amendement no 1643.

    M. Raphaël Gérard

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    Cet amendement d’appel va nous permettre de prolonger la discussion qui a eu lieu à l’instant. Madame la rapporteure pour avis, vous dites ne pas constater de problème de sous-consommation des crédits sur le terrain. Je ne suis pas tout à fait d’accord et je vous renvoie au rapport de la mission flash sur le soutien au patrimoine immobilier protégé, qu’Emmanuelle Anthoine et moi-même avions eu le plaisir de présenter devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
    Nous y avions identifié les points de blocage, concernant notamment l’assistance à maîtrise d’ouvrage – cet amendement vise à y remédier.
    Celle-ci peut être prise en charge à titre dérogatoire par les services de l’État, comme madame la ministre l’a rappelé en commission. Il conviendrait aussi de rappeler cette faculté à l’ensemble des services déconcentrés du ministère, pour qu’il y soit plus souvent fait recours.
    Dans le rapport, nous avions également souligné les difficultés à boucler les tours de table, qui tiennent à de nombreuses raisons. En particulier, la multiplicité des financeurs – État, région, parfois département, comme c’est le cas dans ma circonscription, et fondation privée – rend difficile de réunir les financements durant un même exercice budgétaire, si bien qu’il faut reporter les crédits, et ainsi de suite.
    La question fondamentale est celle de l’accompagnement des communes et de certains propriétaires privés en la matière pour qu’ils sachent qui solliciter.
    L’amendement vise à créer un fonds pour l’assistance à maîtrise d’ouvrage, qui serait confié aux services déconcentrés du ministère. Ce n’est toutefois pas la seule réponse possible. Dans le Grand Est ou la Bretagne, cette assistance pourrait être assurée par la région, et donc être complètement décentralisée, tout en gardant évidemment un lien avec les services concernés de l’État et du département. Dans d’autres territoires, le département pourrait s’en charger. Chez moi, au sein de l’EPCI – établissement public de coopération intercommunale – de la Haute Saintonge, qui regroupe 129 communes, un agent est chargé d’accompagner les communes et de les mettre en relation avec les services de l’État et du département ainsi que les financeurs potentiels.
    Travaillons ensemble, réfléchissons. Emmanuelle Anthoine et moi-même avons formulé des propositions en conclusion de la mission flash. Il faut maintenant que tous se saisissent du sujet. Il n’y a pas mieux placé que le ministère de la culture pour animer cette discussion, et permettre d’avancer.
    Nous en parlons depuis longtemps, les constats sont posés. Il faut désormais passer à l’action. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Monsieur Gérard, cet amendement prolonge effectivement la discussion que nous venons d’avoir avec la ministre. Vous avez tout à fait raison, une des explications des difficultés à consommer les crédits est liée à la maîtrise d’ouvrage. Jusqu’à il y a une dizaine d’années, en effet, les DRAC étaient autorisées à l’assurer pour les travaux sur les monuments historiques appartenant non pas à l’État mais à des propriétaires privés ou aux communes, notamment les petites. Or, suite à une réforme adoptée depuis, les DRAC ne peuvent aujourd’hui intervenir qu’en appui, en assistance à la maîtrise d’ouvrage, ce qui rend les opérations plus difficiles.
    Il me semble qu’il est possible de financer des études d’assistance à maîtrise d’ouvrage dans le cadre du fonds incitatif et partenarial pour les monuments historiques situés dans les communes à faibles ressources – mais il faut le vérifier.
    Les études financées par la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre des opérations du programme action cœur de ville – j’ai visité quelques sites – peuvent aussi prendre en compte l’assistance à maîtrise d’ouvrage.
    Madame la ministre, j’appelle votre attention sur un point. Vous avez la chance, avec les DRAC, de bénéficier de services déconcentrés de grande qualité. Le ministère de la culture, qui gère l’essentiel des crédits d’investissements dans le patrimoine, est l’un de ceux où l’attribution des crédits est la plus déconcentrée, la plus proche du terrain. Il faudra donc étudier ces questions de près, et peut-être lancer une mission orientée dans le sens des propositions de M. Gérard, afin d’aider de manière plus efficace la maîtrise d’ouvrage. Rassembler les financements et ordonnancer les travaux, ce n’est pas évident pour des propriétaires privés qui n’ont pas forcément beaucoup de moyens ou de temps, ou des petites communes.
    M. Gérard pose une vraie question. Je souhaite que le ministère l’étudie.
    J’ai bien compris que cet amendement était d’appel. Monsieur Gérard, si je suis tout à fait d’accord avec vous sur le fond, je ne crois pas qu’il soit utile de créer un fonds spécifique sur ce sujet. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je vous remercie, monsieur Gérard ; votre engagement sur ces enjeux est bien connu et pertinent.
    Je rappelle, comme vous-même et le rapporteur spécial venez de le faire, que la question de l’assistance à maîtrise d’ouvrage est primordiale, non seulement pour que les crédits soient consommés, mais aussi pour assurer des travaux de restauration des monuments historiques de qualité.
    Les services de l’État peuvent déjà apporter une assistance à maîtrise d’ouvrage aux propriétaires de monuments historiques pour leurs travaux de restauration ; de nombreuses petites communes utilisent ce mécanisme.
    L’assistance est souvent gratuite. C’est le cas lorsque le propriétaire ne dispose pas de ressources suffisantes, ou que le projet est particulièrement complexe. Elle peut aussi être payante.
    Lorsque les propriétaires, notamment les petites communes souhaitent avoir recours à une assistance à maîtrise d’ouvrage publique ou privée payante, son coût peut être inclus dans le montant des travaux de restauration soutenus financièrement par l’État ; il fait partie du budget prévu pour la restauration. La création d’un fonds spécifique ne me paraît donc pas pertinente.
    Cela étant, il serait utile qu’à côté de l’assistance de l’État, les collectivités territoriales développent une offre dans ce domaine. Je signale qu’elle existe déjà, notamment pour les études préalables pour travaux, dans certains départements, qui n’ont pas attendu nos sollicitations.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Tout à fait !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Elle doit être généralisée et les collectivités territoriales doivent adopter une démarche dynamique en la matière.
    Je vous demande, monsieur le député, de retirer l’amendement. Nous pourrons toutefois réfléchir à cette question tout à fait fondamentale de l’assistance à maîtrise d’ouvrage, comme vous-même et monsieur le rapporteur spécial le demandez. Sur ce sujet aussi, travaillons ensemble !

    M. le président

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    Maintenez-vous l’amendement, monsieur Gérard ?

    M. Raphaël Gérard

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    Je le retire ; vous avez compris qu’il était d’appel. Je suis à votre disposition, madame la ministre, pour poursuivre cette discussion.

    (L’amendement no 1643 est retiré.)

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Je souhaite intervenir, monsieur le président !

    M. le président

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    Je suis désolé, monsieur Rebeyrotte, mais poursuivre la discussion sur des amendements retirés serait contraire au règlement, et peu respectueux de nos débats.

    M. Maxime Minot

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    Ce n’est pas nous qui avons voté le nouveau règlement !

    M. le président

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    Sur l’amendement no 2098, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l’amendement no 2531.

    Mme Michèle Victory

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    Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à financer la création de maisons communes art et culture dans les régions. La demande émane de l’UFISC – l’Union fédérale d’intervention des structures culturelles.
    Dans sa diversité, le champ culturel a besoin d’outils de structuration dans les régions, pour définir des stratégies territoriales, instaurer des espaces de décision, et contribuer à la « coconstruction », comme on dit maintenant, des politiques culturelles.
    Contrairement aux opérateurs publics ou privés dont nous nous occupons d’habitude, ces structures concernent les travailleurs indépendants ou de toutes petites entreprises ; elles peuvent aussi être issues d’initiatives citoyennes associatives, ce qui nous semble particulièrement intéressant.
    Ces maisons communes art et culture ont vocation à regrouper tous les acteurs, de façon intersectorielle. Cette transversalité leur permet de prendre en considération l’ensemble des écosystèmes culturels, pour les structurer. Leur travail peut s’articuler, évidemment, avec les processus et instances existants, par exemple les CTC – Conseils des territoires pour la culture –, et avec les élus.
    Elles constituent un lieu où toutes les initiatives citoyennes peuvent s’organiser, et où organiser les pratiques culturelles autour des métiers, des petites entreprises et des travailleurs indépendants. La démarche nous paraît sacrément intéressante !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Les structures culturelles seront soutenues dans le cadre du plan de relance ; les tiers-lieux et les ateliers de fabrique artistique, qui réunissent de nombreux acteurs, bénéficieront ainsi d’une enveloppe de 30 millions d’euros, dans les secteurs du théâtre, de la danse et du cirque.
    Dans la crise que nous traversons, il vaut mieux donner la priorité au soutien aux structures et acteurs qui existent déjà – les artistes, les auteurs, les compagnies et les théâtres, labellisés ou non.
    Avis défavorable, à titre personnel.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Avis défavorable. Aidons plutôt les structures qui existent déjà, étant donné la situation très difficile de certaines d’entre elles, avant d’en imaginer de nouvelles.

    (L’amendement no 2531 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 2098.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Il vise à supprimer tout risque de polémique – on se souvient, de celle, déplaisante, apparue il y a quelques mois – concernant l’utilisation des dons au titre de la souscription nationale pour les travaux de restauration de Notre-Dame.
    La loi que nous avons adoptée le 29 juillet 2019 est explicite. Elle indique que la souscription nationale finance exclusivement les travaux de restauration et de conservation de la cathédrale.
    En conséquence, le fonctionnement de l’établissement public chargé des travaux de conservation et de la restauration de Notre-Dame de Paris ne peut pas être financé par cette souscription. On ne saurait trahir la confiance des donateurs si l’on veut qu’ils continuent à donner.

    Mme Constance Le Grip

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    Tout à fait ! Il y a un grand malaise !

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Le présent amendement reprend donc la principale proposition formulée par la Cour des comptes dans son rapport du 30 septembre sur la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris, celle de financer directement sur crédits budgétaires cet établissement public.
    Madame la ministre, dès votre arrivée au Gouvernement, vous avez cherché à éteindre – et vous avez eu raison – ce début de polémique, en indiquant clairement que le loyer de 213 000 euros des locaux de l’établissement public, situés dans la cité Martignac, à côté d’ici, serait pris en charge directement par le ministère.
    La doctrine du ministère est constante depuis toujours : tous les établissements publics culturels bénéficient d’une subvention pour charges de service public, à leur création – sauf peut-être celui de Chambord, parce qu’il dispose de recettes propres suffisantes.
    Il faut absolument montrer que le ministère assure le financement du fonctionnement de ce nouvel établissement public. Nous rencontrerons sinon des problèmes concernant l’utilisation des fonds, j’en suis certain ; la Cour des comptes les a bien mis en évidence. Cet amendement vise à vous en prémunir, madame la ministre.
    En outre, l’établissement public assure la maîtrise d’ouvrage non seulement pour les travaux sur la cathédrale, mais aussi pour ses abords, qui ne sont pourtant pas concernés par la souscription, chers collègues parisiens.
    Enfin, la maîtrise d’ouvrage pour le mobilier et les œuvres de la cathédrale est assurée par la DRAC d’Île-de-France mais pas par l’établissement public.
    Pour tout un ensemble d’arguments juridiques, techniques, mais aussi et surtout pour des raisons politiques et de confiance, je plaide pour que cet amendement soit adopté.
    Madame la ministre, je propose ici le montant de 6,7 millions, mais je suis tout à fait ouvert à vos corrections si vous estimez que la somme doit être inférieure.
    C’est vous rendre service, et nous rendre service à tous, en nous permettant de garder la confiance des donateurs, que d’inscrire clairement que cet établissement, comme tous ceux qui lui sont similaires, bénéficiera d’une subvention pour charges de service public. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
    Je précise que l’amendement n’a pas été examiné en commission.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    J’ai évidemment lu avec intérêt les observations de la Cour des comptes pour m’étonner d’ailleurs qu’y figurent un certain nombre de recommandations qui avaient déjà été honorées, que ce soit le récolement des biens mobiliers, la comptabilité analytique, la réflexion sur l’avenir de l’établissement public.
    Je ne vois pas non plus l’intérêt de déclencher une enquête administrative, alors que le ministère a évidemment sollicité une enquête judiciaire pour retrouver ceux qui sont à l’origine du sinistre de Notre-Dame.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Je n’ai pas abordé cet aspect.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    J’ai donc trouvé les observations de la Cour un peu décalées… mais je ne serai pas plus désagréable. (Sourires sur les bancs du groupe LaREM.)
    Je veux être en revanche parfaitement claire sur un point – et vous invite à vous référer aux propos de Franck Riester, qui a été tout aussi clair lors de la création de l’établissement public : les opérations de maîtrise d’ouvrage et de conduite des travaux ne sont pas détachables du fonctionnement d’un établissement dont c’est la mission statutaire. Ces opérations sont essentielles à la bonne réalisation des travaux comme à la tenue des délais, et les donateurs n’ont jamais été trompés sur cette affaire, les déclarations de l’État ayant été parfaitement transparentes.
    La bonne information du public sur le déroulement du chantier, comme celle des donateurs qui doivent concrétiser leurs promesses, nécessite aussi que des dépenses – une part marginale de la souscription, de l’ordre de 5 millions d’euros par an – soient affectées à la communication. Là encore, comme je l’ai vérifié, tout cela a été clairement indiqué au Parlement par mon prédécesseur.
    L’État veille, dans le cadre de sa mission de tutelle, comme il le fait d’ailleurs pour tous les opérateurs, à l’équilibre des dépenses de fonctionnement et de personnel de l’établissement. Il a été décidé que le ministère de la culture prendrait en charge le loyer des locaux de l’établissement public, ce qui est conforme aux engagements.
    Certes, le ministère de la culture pourrait prendre en charge les 6,7 millions d’euros mais, à un moment où plusieurs parmi vous s’inquiètent de l’insuffisance du financement affecté au patrimoine régional et à une mauvaise irrigation des territoires qui seraient défavorisés par rapport à Paris, ponctionner 6,7 millions d’euros pour alimenter un bâtiment qui n’en a nul besoin et dont le financement a été assuré, me paraît paradoxal.

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Kuster.

    Mme Brigitte Kuster

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    En tant que présidente de la mission d’information sur Notre-Dame, je voudrais d’abord remercier Gilles Carrez pour cet amendement fondamental, qui tend à apporter une clarification nécessaire.
    À cet égard, madame la ministre, vos propos ne me rassurent nullement. Cela n’a rien à voir avec l’enquête administrative mais avec l’affectation des dons, sur laquelle nous avons besoin d’une transparence totale, si l’on ne veut pas décourager les donateurs.
    Nous avons auditionné, entre autres, le général Georgelin, et il est bien précisé que les salaires et le loyer d’un établissement public n’ont pas à être pris en compte par les donateurs. Sur cette question du loyer, il me semble que vous n’avez pas été assez précise. Au nom de quoi le loyer d’un bâtiment qui appartient à l’occurrence à Matignon, si mes informations sont bonnes, devrait-il être financé par des donateurs ? Soit l’État fait une croix sur ce loyer, soit le ministère de la culture le prend en charge.
    Quant à nos demandes relatives au patrimoine régional, elles n’ont absolument rien à voir avec ce dont nous discutons. Vous ne pouvez pas employer cet argument.
    Les choses doivent être clairement dites ce matin : l’argent des donateurs n’a pas à financer ni un loyer ni des salaires, dont à ce jour, nous attendons d’ailleurs toujours la grille pour connaître avec précision les rémunérations des uns et des autres.

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur spécial.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    En premier lieu, et je vous l’ai dit, le montant de 6,7 millions d’euros peut sans doute être réduit si nous limitons les financements au loyer et aux salaires, mais nous n’avons pas réussi à obtenir les données comptables de l’établissement.
    Ensuite, si nous avons créé, dans le cadre de la loi, une commission de suivi de l’utilisation de la souscription, à laquelle participent notamment le président de la commission des finances et celui de la commission des affaires culturelles, c’est précisément pour contrôler que les dons sont exclusivement utilisés pour financer les travaux de restauration prévus par la loi.
    Nous devons être très attentifs à conserver la confiance des donateurs, d’autant qu’à ce jour, seule une partie des promesses de dons faites par les entreprises a été versée – de l’ordre de 100 à 200 millions.
    Si nous voulons que le reste des promesses se matérialise, il est indispensable d’être transparents.

    Mme Brigitte Kuster et Mme Constance Le Grip

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    Absolument !

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Le terme est quelque peu galvaudé, mais en l’occurrence il correspond à une nécessité, si nous voulons, dans l’intérêt de tous, éviter une nouvelle polémique, après la polémique sur le loyer, que vous avez réussi à éteindre. (Mme Virginie Duby-Muller et M. Maxime Minot applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    Il n’y a de polémiques que celles que l’on crée  Oh ! » sur les bancs du groupe LR)

    M. Maxime Minot

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    Ça y est, ça commence…

    M. Raphaël Gérard

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    J’insiste sur le fait que, derrière les salaires, il y a des compétences, et je vois difficilement comment concevoir un chantier sans les compétences qui vont avec et qui sont employées au bon endroit. Et je confirme ce qu’a dit la ministre : à l’époque, Franck Riester, avait été extrêmement clair.
    Certes, le risque est de perdre la confiance des donateurs, mais cette confiance ne se consolidera que grâce à la compétence des personnes à la manœuvre pour faire avancer le chantier ; sans ces compétences, nous ne pourrons pas tenir les délais.
    Prenons l’exemple de l’échafaudage et des procédés qu’il a fallu développer pour le démonter, ce qui était la condition sine qua non pour démarrer le chantier de consolidation de l’édifice à proprement parler. Cela a requis des compétences sans lesquelles nous n’en serions pas où nous en sommes aujourd’hui.
    Je ne vois donc pas comment il est possible de distinguer entre les différents salaires, et les intégrer en totalité dans le budget de l’établissement public me paraît une bonne mesure.

    Mme Constance Le Grip

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    Cela n’a pas de rapport !

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 2098.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        88
            Nombre de suffrages exprimés                80
            Majorité absolue                        41
                    Pour l’adoption                14
                    Contre                66

    (L’amendement no 2098 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l’amendement no 2533.

    Mme Michèle Victory

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    Cet amendement vise à augmenter de 5 millions d’euros la hausse du Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle – FONPEPS –, géré par le ministère de la culture. Ce fonds devait, à l’origine, être doté d’une enveloppe budgétaire de 90 millions d’euros qui n’a jamais été atteinte.
    La crise mettant en péril de nombreuses petites structures et de nombreux emplois, il apparaît nécessaire d’accroître les soutiens aux emplois artistiques, très fragilisés. Il conviendrait notamment de faire évoluer les critères d’accès au FONPEPS et de l’ouvrir notamment aux acteurs de l’art visuel, qui ont du mal à en bénéficier.
    Plus globalement, il faudrait simplifier les procédures et réduire les délais de paiement, pour préserver la trésorerie des associations ou des petites structures. Enfin, nous préconisons d’effectuer les contrôles a posteriori. C’est à une clarification des règles d’utilisation et des objectifs de ce fonds ainsi qu’à une hausse de ces moyens que nous appelons, afin de préserver l’emploi culturel.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    J’avais moi-même défendu l’an dernier un amendement visant à augmenter le FONPEPS. Il ne faut cependant pas perdre de vue que cette année l’effort a été très substantiel, puisqu’on est passé de 17 à 22 millions d’euros. Le dispositif a par ailleurs été très simplifié, et l’an dernier, la totalité de l’enveloppe a été consommée.
    Il y a en effet du retard dans le traitement des dossiers, et j’espère que cela va pouvoir se résoudre, mais l’enveloppe de 22 millions me paraît suffisante. Nous verrons dans les années à venir s’il faut l’augmenter. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    La lutte contre la précarité de l’emploi est évidemment importante, mais l’augmentation de 5 millions d’euros que nous avons consentie représente déjà un effort substantiel et correspond aux besoins que nous avons identifiés. Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Michèle Victory.

    Mme Michèle Victory

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    Nous reconnaissons évidemment l’effort qui a été fait, mais je tiens à insister également sur le besoin de formation de ces professions. Il est important que ces artistes puissent continuer à innover, et l’on constate, à cet égard, un important manque de moyens – je pense en particulier au théâtre et aux scènes régionales.

    (L’amendement no 2533 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de quatre amendements, nos 2646, 2648, 2641 et 2642, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
    La parole est à Mme Sophie Mette, pour les soutenir.

    Mme Sophie Mette

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    Nous proposons une nouvelle répartition des crédits de la culture afin d’apporter un soutien à l’architecture et aux espaces protégés et, plus particulièrement à la revitalisation des centres anciens dans les petites villes, c’est-à-dire les villes de moins de 20 000 habitants, qui sont souvent en dessous des radars.
    Restaurer l’activité des centres-bourgs demande des actions fortes sur l’habitat, afin notamment de résorber la vacance et l’insalubrité, mais aussi sur le maintien des commerces et des services de proximité – poste, cinémas… –, sur l’offre d’équipements adaptés, l’offre culturelle et touristique – à travers notamment l’animation culturelle et la valorisation du patrimoine bâti ou paysager –, sur la mobilité, l’accessibilité, le développement économique ou la desserte numérique.
    Conforter la présence de centres-bourgs, dynamiques et animés dans les campagnes et les zones périphériques passe ainsi par une action complète et combinée sur tous les leviers susceptibles, d’une part, d’améliorer la qualité de vie des habitants des centres-bourgs mais aussi des bassins de vie, et, d’autre part, de réduire la désertification de ces mêmes villes et des territoires ruraux environnants.
    Il s’agit ainsi de contribuer à la cohésion sociale des territoires, à leur mise en valeur et à leur attractivité en poursuivant une politique ambitieuse.
    Afin de dégager des fonds, l’action « Fonctions de soutien du ministère » doit être rationalisée, pour tout ce qui touche notamment à l’immobilier, et ministère doit s’engager dans un processus de réduction des coûts mais aussi de dépenses de fonctionnement.
    En redéployant ces crédits, nous n’entravons donc pas la transmission du savoir. Au contraire ces amendements protègent notre patrimoine et assurent à tous un accès au savoir, en proposant un redéploiement des crédits alloués aux dépenses d’investissement et de fonctionnement.
    Ils participent de l’accompagnement des petites communes, sur lequel vous avez insisté tout à l’heure. J’ajoute que la mission sur le patrimoine que vous avez évoquée tout à l’heure, madame la ministre, ne pourra que servir nos petites communes.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    La commission des finances n’a pas examiné ces amendements. À titre personnel, je pense que ce redéploiement n’est pas utile. En revanche, vous abordez un sujet important : dans le programme 175, il faut absolument prêter une plus grande attention aux questions concernant l’architecture – M. Raphaël Gérard l’a dit tout à l’heure –, les espaces protégés et le traitement des espaces publics. Pour bien mettre en valeur un monument historique, il faut s’intéresser à son environnement ; cette problématique concerne surtout les petites villes.
    J’ai eu l’occasion de visiter plusieurs des 222 opérations du programme action cœur de ville, notamment celles de Gien et de Romorantin, qui sont par ailleurs des sites patrimoniaux remarquables. La mise en valeur du patrimoine est doublement intéressante : du point de vue de la préservation du patrimoine bien sûr, mais aussi parce que l’attractivité des monuments concourt à la revitalisation des centres-villes.
    Ces dernières années, notamment au titre de ma participation à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts j’ai pris contact à plusieurs reprises avec les responsables du programme action cœur de ville afin d’appeler leur attention sur la dimension patrimoniale de plusieurs sites : plus de la moitié des 222 opérations correspondent en effet à des sites patrimoniaux remarquables.
    D’ailleurs, dans le cadre des études financées par la Caisse des dépôts concernant l’expertise et la coordination, complexe, de ces opérations, la dimension patrimoniale est bien prise en considération. Je suis tout à fait d’accord avec vous, madame Mette, cette dimension doit être prioritaire pour les directions régionales de l’action culturelle.

    M. le président

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    J’en conclus que c’est un avis défavorable à titre personnel.

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    Oui, je l’ai dit.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je partage l’avis du rapporteur : l’animation des centres-villes a une dimension patrimoniale et une dimension économique. Le ministère de la culture est pleinement engagé dans la revitalisation des centres historiques en voie de désertification. Avec les collectivités territoriales, elles aussi très actives dans ce domaine, nous menons une politique de protection et de mise en valeur de 900 sites patrimoniaux remarquables. C’est un des leviers permettant à l’État de contribuer à la revitalisation des centres anciens.
    Dans le cadre du programme action cœur de ville, 90 % des 222 villes sélectionnées sont concernées par un espace protégé au titre du code du patrimoine. Le ministère de la culture est donc très impliqué dans son application. Nous participons également au plan petites villes de demain ; dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative pour 2020, les conditions d’octroi du label de la Fondation du patrimoine ont été assouplies, notamment pour inclure les immeubles situés dans les communes de moins de 20 000 habitants et non protégés au titre des monuments historiques.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    De façon plus générale, l’effort financier en faveur du patrimoine et de l’architecture dans le PLF pour 2021 a vocation à soutenir le développement des territoires. Je vous demande de retirer les amendements : j’approuve leur philosophie, mais je les considère satisfaits.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Gérard.

    M. Raphaël Gérard

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    La question n’est plus celle du redéploiement au sein de la mission, nous disposons désormais de tous les outils ; Mme la ministre vient de les rappeler et nous les avons déjà énumérés plusieurs fois. Dans le programme action cœur de ville, 120 villes ont déjà un SPR – site patrimonial remarquable ; dans trente-trois autres, un SPR est en cours de création.
    Je me réjouis du plan petites villes de demain, parce que dans l’excellent rapport d’Yves Dauge, qui est à l’origine de la réflexion sur la redynamisation des centres bourgs, celui-ci recommandait de se concentrer sur les villes de moins de 20 000 habitants. Grâce à son travail, l’action publique est corrigée. Il faut lui maintenant laisser le temps nécessaire.
    Il est très important que le ministère de la culture trouve sa juste place dans les programmes action cœur de ville et petites villes de demain, afin d’apporter à chaque projet une spécificité, de l’animation et du dynamisme économique. C’est pourquoi nous devons tous être derrière la ministre de la culture. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Mette.

    Mme Sophie Mette

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    Je retire les amendements.

    M. Maxime Minot

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    Quelle perte de temps !

    Mme Sophie Mette

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    Je pense toutefois qu’avec une meilleure communication à destination des territoires ruraux, les communes auraient davantage recours à ces actions pour développer leurs centres-villes démunis.

    (Les amendements nos 2646, 2648, 2641 et 2642 sont retirés.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l’amendement no 2064.

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    L’amendement est le même que celui que j’avais défendu l’an dernier, en première et en deuxième lecture du projet de loi de finances. Il concerne les sociétés de musique dans toute leur diversité, dont les batteries fanfares, les orchestres d’harmonie, les bagads bretons et autres structures musicales de ce type. Le 17 décembre 2019, l’Assemblée avait décidé la création d’un fonds de soutien en leur faveur, que votre prédécesseur, madame la ministre, s’était engagé à doter de 3 millions d’euros. Nous reprenions ainsi une des propositions de l’agenda rural, à l’élaboration duquel notre collègue Daniel Labaronne a participé, et dont Édouard Philippe a annoncé l’application le 25 septembre 2019.
    Lorsque le secrétaire d’État chargé de la ruralité est venu dans ma circonscription, le 24 septembre 2020, il a eu la chance de bénéficier d’un magnifique concert organisé spécialement pour sa venue et de se rendre compte de l’utilité de ces structures.
    Avec plus de 500 000 musiciens, les sociétés de musique sont populaires au sens noble du terme, et présentes absolument partout. Le sujet ne concerne pas seulement la députée du Nord que je suis, puisqu’il existe également des orchestres d’harmonie à Aix-en-Provence ou Narbonne. Et ces derniers ne sont pas non plus propres au milieu rural : ceux de Seine-Saint-Denis font un travail absolument remarquable, complémentaire de celui des conservatoires.
    Ces structures sont également intergénérationnelles. L’assemblée de musiciens amateurs qui a accueilli Joël Giraud comptait parmi ses membres aussi bien Jean-Marie Leblanc, ancien directeur du Tour de France, qui joue encore de la clarinette, qu’un jeune âgé d’une dizaine d’années. Connaissez-vous d’autres structures capables de réunir chaque semaine des personnes d’âge aussi varié ?
    Leur existence fait la fierté des territoires. Elles entretiennent le lien social et apportent de la vie ; bien souvent, l’offre culturelle territoriale repose sur elles.

    M. le président

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    Veuillez conclure.

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Enfin, bien que certaines existent depuis parfois plus de 150 ans, elles n’ont rien d’obsolète et ne se contentent pas de retravailler des compositions anciennes ; elles mettent aussi en valeur la musique du septième art, celle d’Hans Zimmer, de John Williams ou d’Ennio Morricone, qui nous a malheureusement quittés l’été dernier.

    M. le président

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    Merci, chère collègue.

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Bref, elles jouent un rôle absolument essentiel et ont besoin de notre soutien ; c’est pour ça que je vous en parle aujourd’hui. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

    M. le président

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    Sur l’amendement no 2573, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
    Sur les crédits de la mission « Culture », je suis également saisi par le groupe La République en Marche d’une demande de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Sur le fond, je partage votre souci de soutenir la culture dans les territoires et d’être attentifs aux équilibres territoriaux. Je sais aussi qu’un engagement avait été pris l’année dernière par le ministre de la culture. Mais entre-temps, la crise, qui frappe fortement la culture, est passée par là. La priorité n’est sans doute pas au soutien de structures qui, en raison du confinement, ont faiblement consommé leurs crédits en 2020. À titre personnel, demande de retrait.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Madame Cattelot, nous connaissons votre engagement réitéré en faveur des fanfares. Je rappelle que 200 000 euros sont d’ores et déjà consacrés chaque année à leur soutien. Ces derniers mois, cet argent est loin d’avoir été consommé ; on comprend pourquoi. Par ailleurs, l’engagement de mon prédécesseur avait été pris dans d’autres circonstances. À l’évidence, devant le désastre que subit le secteur culturel, en particulier les professionnels pour lesquels l’engagement d’une vie permet de payer le loyer et la nourriture, il ne me semble pas que le soutien aux fanfares puisse être un objectif prioritaire.
    Je partage cependant la préoccupation des parlementaires au sujet de la pratique amateur. Nous voulons soutenir l’animation des territoires, raison pour laquelle j’ai créé au ministère une délégation transversale dédiée aux territoires, à la transmission et aux pratiques culturelles.
    Dans ce domaine, il faut avoir une approche équilibrée. Depuis plusieurs semaines, nous travaillons avec la ministre de la cohésion des territoires à l’élaboration d’un plan de soutien. Il se traduira par le renforcement de la pratique amateur, avec 1 million sur deux ans ; le doublement de l’enveloppe dédiée aux fanfares dans le cadre du fonds d’encouragement des initiatives artistiques et culturelles des amateurs, pour atteindre 80 000 euros ; un soutien consolidé aux fédérations, avec 340 000 euros sur deux ans ; des aides dédiées aux fanfares en milieu rural, gérées par les DRAC, à hauteur de 500 000 euros sur deux ans. Grâce à tous ces dispositifs, les structures musicales pourront ainsi, dès l’année prochaine, bénéficier d’un soutien financier de l’État. Au total, l’aide que le Gouvernement apportera aux fanfares s’élèvera, sur deux ans, à 2 millions d’euros.

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Le Fur.

    M. Marc Le Fur

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    Je soutiens l’amendement de Mme Cattelot, qui vise à rappeler non seulement l’engagement du ministre de la culture, mais le vote intervenu dans l’hémicycle en décembre. Que ce vote n’ait pas connu d’effet contrevient aux règles les plus élémentaires de la vie parlementaire.
    Quelles sont les structures concernées ? Il ne s’agit pas simplement des fanfares, des batteries de fanfares et des orchestres d’harmonies, mais aussi des bagads – j’y suis sensible, vous le comprendrez. Ces structures sont très enracinées, non seulement dans le monde rural, mais aussi dans des villes petites, moyennes et grandes. Elles associent en effet des générations différentes, ce qui est très rare et très bien.
    Mes chers collègues, je vois quelques sourires moqueurs sur les bancs du groupe La République en marche (Vives protestations sur les bancs du groupe LaREM. – De nombreux députés du groupe désignent leur masque) ; cela ne me surprend pas, connaissant votre logique.

    Mme Danielle Brulebois

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    Cessez de nous agresser !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Ne jouez pas de la grosse caisse !

    M. le président

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    Mes chers collègues, je vous en prie ! Il est vrai qu’au travers des masques, les sourires sont difficiles à voir, mais j’en appelle à la sérénité de nos débats.
    Poursuivez, monsieur Le Fur.

    M. Marc Le Fur

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    J’invite également les uns et les autres à retrouver la plus grande sérénité.

    M. Maxime Minot

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    Prenez donc de la camomille !

    M. Marc Le Fur

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    Je vous rappelle, mes chers collègues, que ces ensembles musicaux, vous les croiserez le 11 novembre devant les monuments aux morts où, comme les années précédentes et comme les prochaines années, elles seront mobilisées pour animer les cérémonies patriotiques. Nous avons aujourd’hui l’occasion, non de leur faire un cadeau, mais de confirmer le vote déjà intervenu en leur faveur. C’est ce que propose l’amendement, auquel je souscris totalement.

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot.

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Je suis ravie, madame la ministre, que vous preniez l’engagement formel de mettre sur la table 2 millions d’euros, comme vous venez de l’annoncer devant la représentation nationale.

    Plusieurs députés LR

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    Si l’amendement est retiré, nous le reprenons !

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Je précise que Joël Giraud s’est fortement mobilisé sur ce dossier. Comme je l’ai montré en citant les exemples de Narbonne, d’Aix ou de la Seine-Saint-Denis, ces sociétés musicales ne sont pas qu’un fait rural mais aussi un fait urbain, et partout elles favorisent le lien social. Elles ne sont pas spécialement fragiles, mais ce sont des structures populaires, composées de musiciens amateurs disposant de peu de moyens et qui, bien souvent, payent eux-mêmes leurs instruments. J’espère donc vraiment que ces 2 millions d’euros, au-delà du soutien aux fédérations, permettront de financer une action publique directe, dont vous pourrez vous prévaloir, de sorte que l’ensemble de ces amateurs sachent que c’est grâce à vous qu’ils auront pu renouveler leurs instruments, leurs pupitres et leurs partitions.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Il n’est pas question de mépriser ces structures. J’ai moi-même salué leur action, devant les monuments aux morts ou pour l’animation des fêtes… J’espère seulement que, si ces crédits servent à acheter des instruments, il s’agisse d’instruments français. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    Je crois comprendre que l’amendement a été retiré. Comme il a aussitôt été repris, je le mets aux voix. 

    (L’amendement no 2064 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Mette, pour soutenir l’amendement no 2649.

    Mme Sophie Mette

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    Il propose une nouvelle répartition des crédits de la culture afin de mieux soutenir le patrimoine linguistique.
    Les langues régionales sont une partie intégrante de notre culture, de notre histoire et de notre patrimoine, comme l’indique l’article 75-1 de la Constitution. Elles contribuent à la vitalité de nos territoires en participant à la valorisation de nos traditions et favorisent la transmission d’une mémoire et d’une culture. Mais elles sont en danger. Selon l’UNESCO, l’école comme l’ensemble des politiques culturelles devraient être des relais de leur diffusion. Il convient donc de favoriser la pratique des langues régionales et d’augmenter, dans ce but, les crédits de l’action « Langue française et langues de France ».

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Dès 2021, des pactes linguistiques seront proposés aux collectivités territoriales sur le modèle de celui signé avec la région Hauts-de-France, afin de valoriser les langues régionales parlées sur les territoires concernés et mener des actions de sensibilisation auprès du public. Dans la perspective des états généraux du multilinguisme dans les outre-mer, qui se tiendront en 2021, une proposition sera notamment faite aux collectivités territoriales de La Réunion. Un portail numérique innovant sera également ouvert, l’observatoire des langues, point d’accès unique aux informations et données disponibles, notamment sur les langues de France et les autres langues parlées sur notre territoire. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je suis personnellement très attachée à la promotion des langues régionales et des langues de France. J’ai d’ailleurs voulu écrire les dialogues de mon dernier ouvrage en breton, c’est vous dire si l’attachement à ma langue d’origine est puissant.
    La rapporteure spéciale a rappelé les différentes actions envisagées : pactes linguistiques, états généraux du multilinguisme, ouverture prochaine d’un portail numérique. J’espère que les difficultés liées à la situation sanitaire seront aplanies au moment où se tiendront ces états généraux, où je souhaite me rendre personnellement pour marquer mon attachement à la fois à l’outre-mer et au patrimoine incomparable que représentent les langues régionales et les langues de France.

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Le Fur.

    M. Marc Le Fur

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    Je voterai l’amendement de notre collègue et la remercie de l’avoir déposé. Je suis un peu surpris par la réponse de la rapporteure spéciale. Il ne s’agit pas seulement de l’outre-mer mais aussi de bien des régions métropolitaines qui sont attachées à leurs langues très diverses. On parle souvent de l’alsacien et du breton mais il y a aussi le flamand, l’occitan, le corse, le basque – la liste est longue. Ce sont nos richesses, et vous l’avez parfaitement dit, madame la ministre, mais j’en appelle à Corentine, si j’ose dire, à la Gourinoise qui sommeille en vous,…

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Elle ne sommeille pas, elle est très réveillée ! (Sourires.)

    M. Marc Le Fur

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    …car si j’approuve vos propos, je constate que vous ne souscrivez pas aux demandes concrètes attachées à l’amendement, ce que je regrette. Nous avions là l’occasion de manifester un soutien à ce qui constitue un morceau de notre culture, très clairement identifié dans notre Constitution, à l’article 75-1. Je vous y renvoie, c’est un des aspects positifs de la réforme de 2008 voulue par le Président Sarkozy.

    (L’amendement no 2649 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2573.

    M. Jean-Hugues Ratenon

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    Il prévoit qu’un budget soit consacré à l’ouverture et à l’enrichissement de formations en langues, civilisations et cultures créoles. Plus de 10 millions de personnes pratiquent le créole couramment. Bien que des classes d’option créole aient été ouvertes depuis plusieurs décennies dans les outre-mer, le taux d’inscrits diminue chaque année. Nous pensons que cela n’est pas dû à un manque d’intérêt des ultramarins pour leur propre culture mais à la discrimination existante. En effet, beaucoup estiment que l’étude de cette langue n’a aucune valeur au sein du milieu professionnel, voire universitaire. Pourtant, la création du CAPES en 2002 et de l’agrégation de créole en 2019 prouve le contraire. Je salue au passage la réussite du Réunionnais Francky Lauret, devenu début juillet le tout premier agrégé en langues de France, option créole. (M. Michel Larive, Mme Maud Petit et Mme Maina Sage applaudissent.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Vous l’avez rappelé, l’enseignement du créole est proposé dans la plupart des établissements scolaires des territoires d’outre-mer. L’ouverture en 2019 d’une agrégation de créole devrait conforter la place du créole à l’université. En outre, l’organisation à La Réunion, en octobre 2021, des états généraux du multilinguisme dans les outre-mer aura pour objectif de mettre en place une politique linguistique favorable à un multilinguisme équilibré.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à Mme Maud Petit.

    Mme Maud Petit

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    En tant que membre de la commission des affaires culturelles, en tant que martiniquaise et vice-présidente de la délégation outre-mer, je souhaite rappeler que la valorisation des langues régionales est aussi la valorisation de la culture générale et qu’elle permet de lutter contre les discriminations. L’année dernière, j’ai présenté un rapport sur les discriminations en outre-mer, avec Cécile Rilhac et Josette Manin ; une de ses recommandations, la troisième, est le renforcement de l’enseignement des langues de la France, bien évidemment dans le respect des valeurs de la République. Même si je regrette que la ligne choisie ne soit pas celle qui convienne le mieux et qu’il ne s’agisse en outre que du créole, à titre personnel et pour le symbole, je voterai cet amendement.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.

    M. Jean-Hugues Ratenon

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    J’ai d’autres arguments susceptibles de vous convaincre : l’accès difficile aux œuvres créoles et aux documents de base comme les dictionnaires ou les grammaires complique l’étude de ces langues et de ces cultures ; comme l’ont montré Évelyne Adelin et Mylène Lebon-Eyquem, chercheuses en langue créole, rien ne concourt à l’élaboration d’une politique linguistique spécifique aux outre-mer ; et aucune véritable promotion de la langue créole n’a été faite, ni aucun encouragement pour le système éducatif sur le terrain. Cet amendement permettrait de faire un premier pas vers une meilleure considération du créole parmi les langues enseignées dans notre pays.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 2573.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        97
            Nombre de suffrages exprimés                95
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                33
                    Contre                62

    (L’amendement no 2573 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix les crédits de la mission « Culture ».

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        97
            Nombre de suffrages exprimés                79
            Majorité absolue                        40
                    Pour l’adoption                76
                    Contre                3

    (Les crédits de la mission « Culture » sont adoptés.)
    (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Après l’article 54

    M. le président

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    J’appelle maintenant les amendements portant article additionnel après l’article 54, rattachés à la mission « Culture ».
    La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l’amendement no 2571.

    M. Jean-Hugues Ratenon

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    Les territoires d’outre-mer sont soumis à des conditions climatiques qui diffèrent de celles de l’Hexagone. La conservation du patrimoine culturel matériel présent dans ces territoires est devenue un objet de réflexion tant leur entretien et leur rénovation sont complexes. Je pense, à La Réunion, aux lazarets ou encore à la prison Juliette-Dodu.
    Afin de sauvegarder et de préserver ces richesses culturelles, certains territoires d’outre-mer doivent avoir recours à des spécialistes extérieurs, parfois internationaux – provenant d’Afrique, d’Inde, de Chine… Mais faire appel à une expertise extérieure a un coût important et rend difficile la rénovation d’œuvres, de bâtiments, et ce malgré l’ingéniosité dont font preuve certains départements, dont témoignent la mise en place des réseaux de professionnels du bâti à La Réunion par le biais des Entretiens du patrimoine de l’océan Indien ou la suppression des climatiseurs dans certains musées, rompant avec les normes appliquées dans l’Hexagone.
    Les particularités liées au caractère ultra-périphérique de ces territoires requièrent des dispositifs particuliers, plus coûteux. C’est la raison pour laquelle nous demandons un rapport afin de déterminer le coût réel des pratiques adaptées à l’environnement et aux spécificités de chacun de ces territoires.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Gilles Carrez, rapporteur spécial

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    D’une manière générale, je ne suis pas favorable aux rapports. Je donnerai donc un avis défavorable, à titre personnel car l’amendement n’a pas été examiné par la commission. Mais en tant que rapporteur spécial, je suis très attentif à ce que l’outre-mer prenne toute sa part dans le programme 175, car il le mérite.
    À La Réunion, il y a 26 immeubles classés et 168 immeubles inscrits. Dans tous les domaines, qu’il s’agisse de la protection du patrimoine ou des fouilles archéologiques de l’Institut national de recherches archéologiques préventives, l’INRAP, des crédits considérables sont utilisés en outre-mer, et c’est une très bonne chose. En Guadeloupe, sous la précédente législature, le Mémorial ACTe, un musée remarquable, a été financé par l’État à hauteur de plusieurs dizaines de millions d’euros. Nous veillerons donc tous à ce que l’outre-mer, dont le patrimoine monumental et historique est très important, bénéficie pleinement des crédits de protection et de valorisation du patrimoine.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Il n’est évidemment pas question de nier l’importance du patrimoine de l’outre-mer, dont la conservation et la restauration soulèvent en effet des difficultés bien spécifiques. Le recours à des spécialistes extérieurs est parfois nécessaire et résulte de la recherche constante d’une parfaite adéquation entre les travaux exigés, les procédures de conservation et la capacité professionnelle des entreprises concernées. Il importe avant tout que la conservation soit effectuée dans les meilleures conditions. Je ne vois pas l’utilité d’un rapport sur le sujet. Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.

    M. Jean-Hugues Ratenon

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    Monsieur le rapporteur, madame la ministre, afin d’exercer toute notre vigilance sur l’entretien du patrimoine culturel de l’outre-mer, un rapport est indispensable. La situation actuelle n’est pas satisfaisante et la conservation de nos monuments mérite des études approfondies. Je maintiens donc l’amendement.

    M. le président

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    La parole est à Mme Maina Sage.

    Mme Maina Sage

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    Je tiens à remercier notre collègue Jean-Hugues Ratenon pour son précédent amendement : pour moi qui viens de la Polynésie française, le bilinguisme est également une évidence. Je crois, comme notre collègue, que sa promotion est nécessaire, notamment pour favoriser la cohésion sociale.  
    En revanche, je ne soutiendrai pas l’amendement no 2571 , même si j’en comprends l’idée. Permettez-moi de partager avec vous l’expérience de la Polynésie, monsieur Ratenon, où de très beaux partenariats ont été développés. Il y a une dizaine d’années, nous avons restauré l’une des plus belles églises de Polynésie, la première construite dans notre territoire. Nous avons travaillé à ce projet de rénovation avec les Compagnons de France pendant plusieurs années. Ce type de partenariat est source d’enrichissement réciproque. L’exposé sommaire de votre amendement est un peu à charge alors qu’il faut au contraire développer ce type de démarche.
    Permettez-moi, pour terminer, d’appeler votre attention, chers collègues, sur un rapport rendu il y a trois ans par la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer – CNEPEOM –, malheureusement supprimée par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP. Dans le cadre de l’élaboration de ce rapport, j’ai piloté la thématique « L’accès à la culture outre-mer » avec l’objectif de promouvoir les lieux culturels. Un travail important doit être conduit pour protéger le patrimoine. Madame la ministre, vous avez mon soutien dans cette entreprise.
    Le présent amendement pourrait cependant se révéler contre-productif et nuire au développement de partenariats permettant d’améliorer la protection du patrimoine de l’outre-mer. Je voterai donc contre.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 2571.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        81
            Nombre de suffrages exprimés                76
            Majorité absolue                        39
                    Pour l’adoption                21
                    Contre                55

    (L’amendement no 2571 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Dumas, pour soutenir l’amendement no 1771.

    Mme Frédérique Dumas

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    L’enjeu essentiel de l’émancipation et de la démocratisation de l’accès à la culture mérite bien un rapport ! Je rappelle, à titre de comparaison, qu’avant de toucher le moindre centime d’euro – mes collègues sont témoins ! –, le Centre national de la musique a fait l’objet de trois missions et de deux rapports complets : un rapport de préfiguration de M. Roch-Olivier Maistre, à la demande de la ministre de la culture de l’époque, dont les conclusions ont été rendues en 2018 ; une mission confiée ensuite aux députés Émilie Cariou et Pascal Bois, à la demande du Premier ministre – pas moins ! –, afin de concrétiser financièrement l’existence de cet organisme : enfin, une mission confiée à Catherine Rugieri pour déterminer l’architecture des dispositifs d’aide. Tout cela pour commencer à toucher de l’argent !
    Le pass culture, quant à lui, a reçu 78 millions d’euros depuis 2018, sans jamais avoir fait l’objet d’aucun rapport ni d’aucune mission ! Afin de nous assurer de la pertinence des sommes engagées au regard des objectifs visés, nous jugeons un rapport indispensable. Nous avons bien noté vos propositions d’amélioration et d’optimisation du dispositif, madame la ministre, et nous espérons qu’elles seront prises en compte, car elles vont dans le bon sens. Un rapport complet sur le pass culture n’en reste pas moins nécessaire afin de vérifier son efficacité et, si celle-ci était démontrée, de nous engager à le déployer.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Cet amendement n’a pas été examiné par la commission, je ne puis donc que vous donner mon avis personnel. Nous avons déjà expliqué pourquoi l’expérimentation n’avait pas pu être menée entièrement et pourquoi il est nécessaire de généraliser le dispositif pour lui assurer une pleine puissance. Nous n’avons pas suffisamment de recul aujourd’hui pour qu’un rapport puisse être rédigé. Je vous invite à formuler de nouveau cette proposition dans deux ans.

    Mme Constance Le Grip

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    Deux ans !

    Mme Dominique David, rapporteure spéciale

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    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Je me suis déjà exprimée sur le pass culture, qui nous a beaucoup mobilisés, à juste titre. Je le répète, je suis à la disposition des députés pour leur apporter toutes les informations nécessaires.
    Permettez-moi, en revanche, de répondre à l’interpellation de Mme Le Grip tout à l’heure sur un tout autre sujet : le retour à Madagascar de la couronne ornant le dais de la reine malgache Ranavalona III. L’accusation de fait du prince me paraît tout à fait étrange ! Le dossier est à l’étude depuis plusieurs années. Si vous vous en souvenez, je l’ai d’ailleurs évoqué devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation en dressant la liste des demandes que nous avons reçues. Rien n’a été caché ! Il s’agit d’ailleurs d’une simple convention de dépôt et non d’une restitution. Étant donné la procédure dérogatoire, au cas par cas, que nous entendons appliquer, il n’y aura de restitution qu’à la condition qu’une loi soit adoptée par le Parlement. Madagascar a demandé que cet objet patrimonial, hautement symbolique, lui soit retourné dans le cadre de célébrations nationales. Mais, mesdames et messieurs les députés, pas de mépris, je vous en prie !

    M. Philippe Gosselin

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    Il n’y en a pas !

    Mme Constance Le Grip

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    Je n’ai rien dit sur les Malgaches !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Madagascar attribue une haute valeur symbolique à la couronne ornant le dais de la reine malgache Ranavalona III et a demandé à disposer de l’objet dans le cadre d’une fête nationale. Il s’agit donc d’un prêt et aucunement d’un fait du prince. Pour que la restitution soit validée, elle devra être soumise au Parlement dans le cadre d’un projet de loi. Revenons à la raison !(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Constance Le Grip.

    Mme Constance Le Grip

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    Les députés du groupe Les Républicains soutiendront l’amendement de notre collègue Frédérique Dumas. Il est bon que la représentation nationale soit informée dans le détail du fonctionnement d’un dispositif en disposant des orientations, des chiffres et des ventilations le concernant.

    M. Philippe Gosselin

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    Ça s’appelle la transparence !

    Mme Constance Le Grip

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    Nous avons besoin d’une véritable évaluation du pass culture, dont Mme la ministre a elle-même souligné qu’il faisait l’objet de crédits actuellement sous-consommés et qui est pourtant abondé de crédits supplémentaires.
    Madame la ministre, j’ai bien entendu votre réponse à mon interpellation et je veux à mon tour vous répondre, car vous avez utilisé un mot – « mépris » – qui sera noté dans le compte rendu de la séance et que je ne peux cautionner : je n’ai à aucun moment prononcé de paroles désagréables ou méprisantes à l’encontre du peuple malgache ! Je voulais simplement vous alerter sur les sentiments contrastés que nous avons ressentis après avoir appris par la presse qu’un avion transportait la couronne ornant le dais de la reine malgache Ranavalona III à Madagascar alors même que l’Assemblée a débattu, il y a quelques mois, du cadre législatif nécessaire aux opérations de restitution. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

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    Il n’y a pas de restitution !

    M. Philippe Gosselin

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    Il faut nommer les choses !

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Dumas.

    Mme Frédérique Dumas

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    Madame la rapporteure spéciale, vous nous dites que vous ne pouvez pas répondre à cet amendement car il n’a pas été examiné par la commission, mais nous le présentons depuis trois ans ! J’ose espérer que vous avez déjà eu l’occasion de l’examiner. Le sujet n’est, en outre, pas bien compliqué…
    Vous expliquez que l’expérimentation ne fonctionne pas et que le pass culture doit être généralisé pour être évalué. Voilà un argument pour le moins intéressant ! À quoi sert donc, dans ces conditions, une expérimentation ?
    Vous concluez, avec magnanimité, que nous obtiendrons le rapport que nous demandons dans deux ans ! Savez-vous que tous les ministres de la culture de la législature nous ont donné cette même réponse ? C’est toujours trop tôt, il faut attendre l’année prochaine ! Pour vous, c’est carrément dans deux ans et après la généralisation du pass culture, soit l’aveu de l’échec de l’expérimentation…
    Nous ne vous demandons qu’un rapport, un rapport nécessaire. Je le répète, avant de toucher le moindre euro, le Centre national de la musique a fait l’objet de deux rapports et de trois missions. L’enjeu est important et justifie que vous répondiez favorablement à notre demande. Ou bien c’est que vous ne voulez pas nous donner les informations que nous demandons…

    (L’amendement no 1771 n’est pas adopté.)

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Nouvelle lecture du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière ;
    Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2021 :
    Examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public » et de la mission « Cohésion des territoires ».
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures dix.)

    Le Directeur du service du compte rendu de la séance
    de l’Assemblée nationale
    Serge Ezdra