- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2023, n° 273
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par :
L’article 209 du code général des impôts est complété par un XI ainsi rédigé :
« XI. – Toute personne morale ayant une activité en France est imposable à hauteur du ratio de son chiffre d’affaires réalisé sur le territoire national ramené à son chiffre d’affaires mondial, le calcul de ces chiffres d’affaires national et mondial incluant également le chiffre d’affaires des entités juridiques dont elle détient plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote. Cette imposition garantit que le taux d’imposition de la part des bénéfices mondiaux imposée en France sera égal à 25 %.
« 1. Le calcul de l’assiette d’imposition est corrigé en fonction de la comparaison entre les deux ratios suivants :
« a) Le ratio du chiffre d’affaires réalisé en France par rapport au chiffre d’affaires mondial, le calcul de ces chiffres d’affaires national et mondial incluant également le chiffre d’affaires des entités juridiques dont elle détient plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote ;
« b) Le ratio du bénéfice réalisé en France par rapport au bénéfice mondial, le calcul de ces bénéfices national et mondial incluant également le bénéfice des entités juridiques dont elle détient plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote.
« Si le ratio calculé au a s’avère inférieur, avec un écart d’au moins 0,05, au ratio calculé au b, l’administration fiscale corrige le montant des bénéfices déclarés par la personne morale en France, de façon à ce que le ratio calculé au même b devienne égal au ratio calculé au a.
« 2° Pour la détermination de l’impôt dû sur l’assiette corrigée en application du 1, l’administration fiscale :
« a) Calcule l’écart en pourcentage entre le montant total des impôts sur les bénéfices acquittés à l’échelle mondiale et le montant total qui résulterait d’une taxation à 25 % de l’ensemble des bénéfices à l’échelle mondiale ;
« b) Applique un coefficient de majoration à l’impôt dû en France égal au pourcentage calculé au a.
« 3. Les dispositions du 1 ne sont pas applicables si la différence entre les ratios mentionnés aux a et b du 1 résulte de transactions qui ne peuvent être regardées comme constitutives d’un montage artificiel dont le but serait de contourner la législation fiscale française. »
Cet amendement vise à taxer les multinationales à hauteur de leur bénéfice réellement réalisé en France, comme le proposent l’association Attac et l’économiste Gabriel Zucman. Pour la France, le détournement des recettes publiques est estimé entre 80 et 100 milliards d’euros par an. Autant d’argent qui manque à nos services publics ou aux investissements. La lutte contre l’évasion fiscale massive constitue donc non seulement un défi financier de premier plan, mais aussi un enjeu d’égalité devant la loi et de cohésion sociale. En effet, l’inefficacité de l’action de l’État témoigne d’une complaisance à l’égard des « criminels en cols blancs », qui nuit largement à la légitimité du système fiscal français pour la majorité des contribuables.
La sous-déclaration fiscale des entreprises multinationales en France, en raison du transfert artificiel des bénéfices dans les paradis fiscauxs, occasionne à elle seule un manque à gagner de 36 milliards d’euros pour la France en 2015, d’après une étude du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII). Pour y mettre un terme, nous pouvons engager des initiatives unilatérales comme un impôt universel sur les sociétés transnationales qui échappent au fisc, afin que les entreprises paient l’impôt sur les sociétés correspondant à leur activité en France, quelle que soit la localisation de leur siège. Pour ce faire, l’administration fiscale calculera la différence entre l’impôt que devrait une entreprise si tous ses bénéfices mondiaux avaient été taxés à 25 % et les impôts effectivement payés par l’entreprise. La différence s’appelle le « déficit fiscal ». La France récupérera la part de ce « déficit fiscal » qui lui revient : ainsi, si l’entreprise effectue 10 % de ses ventes en France, la France en récupérera 10 %, qu’elle soit localisée en Irlande, au Luxembourg ou aux Seychelles.