- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
I. – Le 2° du II de la section I du chapitre IV du titre IV de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un article 1028 quinquies ainsi rédigé :
« Art. 1028 quinquies – I. – Les opérations réalisées par les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, portant sur tout ou partie des actifs d’une société afférents à des biens ou droits mentionnés à l’article L. 143‑1 du code rural et de la pêche maritime, ne sont pas soumises au régime fiscal des plus et moins-values privées et professionnelles qui leur serait normalement applicable, dès lors que ces opérations sont mises en œuvre pour des motifs qui se rattachent exclusivement à leur mission prévue au 1° du I de l’article L. 141‑1 du même code.
« II. – Le I n’est applicable que si le ou les bénéficiaires des opérations précitées sont dépourvus de lien capitalistique ou d’affiliation avec les membres de la société dont les actifs sont cédés. »
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Cet amendement propose de mettre en place un régime fiscal de faveur pour permettre aux Safer d’intervenir plus efficacement sur le marché sociétaire, qui représente aujourd'hui environ 20 % de la valeur du marché foncier agricole, tandis que les sociétés exploitent près des deux tiers de la surface agricole utile en France. L’objectif est de faciliter l’acquisition et la rétrocession par les Safer d’actifs agricoles détenus par des sociétés (biens mobiliers, immobiliers ou parts sociales), sans que ces opérations soient soumises à la fiscalité sur les plus-values professionnelles. Cette mesure ne présente pas de coût pour les finances publiques puisqu’il s’agit de permettre à des opérations d’être réalisées dans le futur, le régime fiscal les empêchant de l’être actuellement.
La limitation des possibilités d’intervention de la Safer est source d’irritants dans les territoires ruraux car elle aboutit à des transactions incohérentes avec nos objectifs de renouvellement des générations agricoles. Les avantages fiscaux font partie des conditions essentielles au fonctionnement des Safer dont la trésorerie ne permet pas de supporter le stockage, le portage, en plus des différents frais afférents aux interventions. Celles-ci ne doivent de même pas être sources d’alourdissement significatif du coût de vente aux agriculteurs acheteurs.
Dans plusieurs affaires récentes, la Safer n'a pas pu procéder au démembrement d'exploitations agricoles pour en attribuer les différentes parties à plusieurs jeunes agriculteurs. La revente par lots aurait généré des plus-values imposables trop élevées en raison de la réévaluation des actifs, nécessairement répercutés sur le prix de vente qui dépasse alors largement les prix du marché. La Safer se voit donc contrainte de ne pas intervenir ou de céder l'intégralité de l’exploitation à un seul acquéreur, ce qui est contraire à l’objectif de diversification et freine l’installation de jeunes agriculteurs.
Le régime fiscal proposé exonérerait ces opérations de la fiscalité des plus et moins-values professionnelles, à condition que celles-ci soient exclusivement destinées à remplir les missions agricoles définies à l'article L. 141-1 du code rural, telles que l'installation et le maintien d'exploitations agricoles. Cela permettrait aux Safer de remettre sur le marché des terres agricoles, et non des parts de sociétés, à des prix conformes aux pratiques locales. Dans un contexte où les structures sociétaires agricoles deviennent de plus en plus importantes et complexes en termes de gouvernance et de gestion, ce régime fiscal faciliterait la libération de terres agricoles détenues par des sociétés. Cela répondrait aux objectifs de la politique agricole (article L. 1 du code rural), en facilitant l'accès au foncier, en soutenant la transmission des exploitations, et en encourageant l'installation de jeunes agriculteurs.
En somme, cette mesure vise à redynamiser le marché foncier agricole en surmontant un frein fiscal majeur, tout en soutenant une meilleure transition générationnelle dans le secteur agricole. Elle a été travaillée sur la base de retours d’expérience de la fédération nationale des Safer et de la Safer Nouvelle-Aquitaine.