- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
I. – L’article 1655 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après la deuxième phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « En cas de transfert du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel à une société, l’article 151 octies du code général des impôts s’applique.
2° Après la deuxième phrase du deuxième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « En cas de transfert du patrimoine affecté de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée à une société, l’article 151 octies du code général des impôts s’applique. »
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Le présent amendement vise à modifier l’article 1655 sexies du CGI afin de prévoir la neutralité fiscale en cas de transfert du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel (EI) ou du patrimoine affecté de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) vers une société.
Une partie de l’amendement concerne la neutralité fiscale appliquée au transfert de patrimoine professionnel de l’EIRL vers une société.
En effet, dans la doctrine fiscale antérieure, applicable au 30 juillet 2011, l’administration fiscale distinguait la cession réalisée au profit d’une personne morale ou au profit d’une personne physique. Elle s’analysait, selon les cas, comme une transmission d’activité d’une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) ou comme la transmission de parts d’une EURL. Ces précisions n’ont cependant pas été reprises dans la doctrine fiscale actuelle.
Actuellement, la cession à titre onéreux d’une EIRL à une personne morale ou à une personne physique emporte cessation d’activité au sens de l’article 201 du code général des impôts (CGI). Ainsi, pour les EIRL ayant opté pour l’impôt sur les sociétés, qu’il s’agisse d’un apport ou d’une cession réalisée au profit d’une société, cela conduit nécessairement aux conséquences fiscales d’une dissolution et liquidation de l’EIRL, avec un principe d’imposition de l’EIRL sur les plus- values qu’elle a réalisées et une imposition du boni de liquidation dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Cette position est très pénalisante pour les entrepreneurs qui souhaitent pouvoir faire évoluer leur mode d’exercice en passant d’une entreprise individuelle à une société.
De plus, cette position est paradoxale car elle entraîne une disparité de traitement entre les EIRL ayant opté pour l’impôt sur les sociétés et celles ayant opté pour l’impôt sur le revenu. En effet, ces dernières peuvent bénéficier du régime optionnel de report d’imposition prévu à l’article 151 octies du CGI, ce qui n’est pas le cas des EIRL ayant opté pour l’impôt sur les sociétés.
Or, l’article 1655 sexies du CGI dispose qu’un entrepreneur individuel qui exerce son activité dans le cadre d’une EIRL puisse déjà opter pour l’assimilation à une EURL. Par conséquent, si l’EIRL est transformée en véritable EURL et qu’il ne s’agit plus simplement d’une assimilation, cette opération devrait être neutre fiscalement, sous réserve qu’il ne soit porté aucune modification aux valeurs d’inscription. Aujourd’hui, les positions des centres des impôts locaux diffèrent sur le sujet, entraînant une inégalité de traitement entre les entrepreneurs sur le territoire national. Ainsi, dans la continuité de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, qui vise à accompagner l’extinction des EIRL, le présent amendement vise à permettre d’appliquer le régime optionnel de report d’imposition prévu à l’article 151 octies du CGI pour les EIRL ayant opté pour l’impôt sur les sociétés.
L’autre partie de l’amendement concerne la neutralité fiscale appliquée au transfert de patrimoine professionnel de l’EI vers une société.
Comme dans le cas des EIRL, les entrepreneurs individuels ayant opté pour l’impôt sur le revenu peuvent bénéficier du régime optionnel de report d’imposition prévu à l’article 151 octies du CGI, ce qui n’est pas le cas des EI ayant opté pour l’impôt sur les sociétés.
Le transfert de patrimoine professionnel d’une EI à l’impôt sur les sociétés vers une société est donc considéré comme une liquidation de l’EI, avec les conséquences fiscales que cela implique.
Pourtant, l’article L. 526-27 du code de commerce dispose que tout entrepreneur individuel exerçant en EI peut céder son patrimoine professionnel sans procéder à la liquidation de celui-ci. Mais, ces dispositions ne se retrouvent pas au sein du Bulletin officiel des impôts consacré aux entrepreneurs individuels (BOI-BIC-CHAMP-70-10) et du CGI. Par exemple, les paragraphes 430 et 530 du BOI-BIC-CHAMP-70-10 évoquent les cas d’assimilation et de liquidation d’une EI vers une société, sans préciser le cas de la transmission universelle de patrimoine professionnel entre ces deux structures.
Il apparaît donc que les dispositions des textes fiscaux ne suivent pas celles pourtant énoncées au sein du code de commerce et issues de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante. Le présent amendement vise donc à corriger cette carence et à permettre aux EI souhaitant transférer leur patrimoine professionnel vers une société de bénéficier du régime optionnel du report d’imposition prévu à l’article 151 octies du CGI.