- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Le dernier alinéa du I de l’article 669 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque l’usufruit s’éteint par décès ou tout autre événement réunissant la pleine propriété, les droits de mutation sont exigibles sur la valeur de l’usufruit au moment de cette extinction, calculés selon les modalités en vigueur à cette date. »
Cet amendement vise à mettre fin aux montages fiscaux reposant sur les donations en nue-propriété dont le seul objectif est d’éviter l’impôt.
L’héritage joue aujourd’hui un rôle prépondérant dans la reproduction des inégalités. En France, la fortune héritée représente désormais 60% du patrimoine contre 35 % au début des années 1970. Alors que 50 % des Français auront hérité de moins de 70 000 euros tout au long de leur vie, les 0,1% les plus riches recevront un héritage 180 fois plus élevé, d’environ 13 millions d’euros.
Les contribuables dotés de patrimoines élevés échappent largement à la fiscalité sur l’héritage qui frappe principalement les classes moyennes. Les 0,1 % les plus riches ne paient que 10 % de droits de succession sur l’ensemble du patrimoine hérité alors que le taux marginal est de 45 % en ligne directe rétablissement de la justice fiscale impose de réformer l’impôt sur l’héritage pour le rendre plus progressif en ciblant les plus hauts patrimoines.
La donation avec réserve d’usufruit consiste à donner uniquement la « nue-propriété » d’un bien (mobilier ou immobilier), le donateur conservant l’usufruit du bien, c’est-à-dire le droit de l’utiliser et d’en tirer des revenus. L’avantage fiscal vient du fait que le montant des droits de mutation est établi à partir de la valeur de la nue-propriété, qui est considérée comme plus faible que la valeur de la propriété entière, avec un barème qui dépend de l’âge de l’usufruitier. Au décès du donateur, l’usufruit s’éteint au profit des donataires qui deviennent automatiquement pleins propriétaires, sans droit de mutation à acquitter en complément. Selon le CAE, la nue-propriété correspondait alors en moyenne à 60 % de la valeur que ces biens auraient eue s’ils avaient été donnés en pleine propriété. Si les biens donnés avaient tous été donnés en pleine propriété, la valeur des donations taxables aurait été 30 % plus élevée.
Le Conseil d’analyse économique (CAE) estimait en 2021 le gain de cette mesure à 2 à 3 Md€ à barème constant, en indiquant que “Les démembrements de propriété ne se fondent pas sur une justification économique forte, si ce n’est de bénéficier des exemptions dans le cadre des donations.”