- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Transformation et fonction publiques
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, puis tous les ans, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à évaluer l’impact de l’absence au travail en France. Ce rapport évalue notamment le coût total que celle-ci représente, l’opportunité d’établir un taux national national moyen de référence et enfin des voies et moyens mis en œuvre par les administrations et collectivités territoriales pour améliorer les conditions de travail des agents dans le but de diminuer l’absentéisme.
Dans le but de freiner la dépense publique de manière structurelle, cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement afin d’identifier les voies et moyens pour réduire le taux d’absentéisme en France. Plusieurs éléments rendent en effet nécessaire la publication d’un tel rapport et que celui-ci le soit de manière annualisée.
Premièrement, d’après une étude datée de novembre 2018, l’Institut Sapiens a évalué le coût de l’absentéisme à près de 108 milliards d’euros, soit 4,7% du PIB. Ce chiffre concerne tout à la fois les dépenses d’indemnisation liées aux arrêts de travail notamment mais aussi l’absence de production qui en découle.
L’étude de l’Institut Sapiens indique également qu’une part de l’absentéisme est incompressible et qu’en France, celle-ci se situerait autour d’un tiers du taux complet.
Ces chiffres, communément admis et confirmés par de nombreux organismes, ne sont pourtant pas des chiffres officiels. Ainsi, il conviendrait que le rapport demandé au Gouvernement puisse évaluer ce coût avec des données annualisées et que ce rapport puisse faire mention du taux d'absentéisme considéré comme incompressible en France.
Deuxièmement, il est à souligner que le chiffre évoqué en 2018 par l’Institut Sapiens est probablement en deçà du chiffre actuel.
Ainsi, pour exemple, dans un rapport daté de mai 2024, la Cour des Comptes indique que les dépenses d’indemnisation des arrêts de travail pour maladie du régime général sont passées de 7,7 milliards d’euros à 12 millards d’euros entre 2017 et 2022. En 2022, 8,9 millions d’arrêts de travail pour maladie indemnisés ont été dénombrés. En outre, la Cour précise que les indemnisations d’une durée supérieure à 6 mois ont représenté 6% des arrêts maladie mais 45% de la dépense. Autre précision, le motif des arrêts de travail n’est connu que pour 50% d’entre eux. Dans cette croissance, il est à noter la période de crise sanitaire liée à la Covid-19 avec une augmentation de 30% en 2020 qui a été suivie d’un reflux de 9% en 2021. Toutefois, une vive progression a à nouveau été constatée en 2022 (+19%). Outre la pandémie, d’autres facteurs expliquent l’augmentation mécanique des dépenses, tels que l’évolution des salaires, l’augmentation de la population active (+ 2,5% depuis 2017) ainsi que la démographie impliquant plus d’actifs âgés. Toutefois, ces seuls éléments ne permettent de justifier le taux d’absence nettement plus important en France par rapport aux pays comparables. Ainsi, la Cour des Comptes préconise notamment « une simplification de la réglementation, une lutte plus résolue contre les fraudes et les prescriptions de complaisance ainsi qu’une réduction de la charge pour la sécurité sociale ». Ce sont les raisons pour lesquelles il paraîtrait opportun que le rapport demandé au Gouvernement fasse mention des actions menées en ce sens.
Troisièmement, plusieurs études mentionnent un taux d’absentéisme nettement plus important dans la fonction publique (d’Etat, territoriale et hospitalière) que dans le secteur privé. Il serait de 17 jours/an en moyenne dans la première et de 10 jours/an en moyenne dans le second. Ainsi, il paraîtrait pertinent que le rapport demandé au Gouvernement puisse évaluer l’opportunité de rendre obligatoire dans le Rapport Social Unique (RSU) demandé aux administrations publiques et collectivités territoriales, de faire figurer, en rapport au taux identifié comme incompressible, le pourcentage d’absentéisme d’une part et sa valeur en euros. Ce chiffrage parait être un moyen utile d’évaluer les pertes et les investissements à faire, en matière de management ou encore de formation, pour les compenser. Certaines collectivités locales ont déjà procédé de la sorte et le résultat en est positif. Ces moyens pourront être utilement mis en oeuvre de manière autonome par les administrations et collectivités territoriales.
Quatrièmement, l’étude de l’Institut Sapiens estime que 99% de l’absentéisme évitable a pour cause, dans le privé comme dans le public, des défauts de management des personnes. Selon l’étude : « Ces dysfonctionnements managériaux, sources d’absentéisme, s’enracinent tout particulièrement dans six domaines qui sont les leviers de la qualité de vie au travail : les conditions de travail, l’organisation du travail, la communication-coordination-concertation, la gestion du temps, la formation intégrée et la mise en oeuvre stratégique (notamment les politiques de rémunération) ». Ainsi, il paraîtrait opportun que le rapport demandé au Gouvernement identifie et apporte des préconisations à destination notamment des administrations publiques et des collectivités territoriales, pour répondre à ces enjeux majeurs tout à la fois pour les conditions de travail des agents, l’attractivité de la fonction publique et, in fine, la qualité même du service public en France.