- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Relations avec les collectivités territoriales
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
L’article 64 est une atteinte forte à la libre administration, les ressources prélevées étant fléchées sur un nouveau Fonds de péréquation. Cette atteinte à la libre administration est en outre pérenne, contrairement aux contrats de Cahors ou à la baisse des dotations qui étaient bornés dans le temps ;
Le texte complexifie la péréquation en créant un nouvel étage à la péréquation, et en l’additionnant aux fonds existants dont les objectifs sont pourtant différents ;
Se pose aussi la question de la rétroactivité de la mesure, si le prélèvement est mis en place dès cette année, son calcul du prélèvement reposera donc sur les résultats 2024. L’article 64 dans son alinéa III indique en effet que « Le prélèvement mentionné (…) est égal, pour l’ensemble des collectivités territoriales et leurs groupements, à l’écart, s’il est positif, entre d’une part, le solde de référence (…) et, d’autre part, le solde effectivement réalisé au cours de l’année précédente ».
Ce dispositif, s’il est mis en œuvre dès cette année, signifie qu’il repose sur le solde de 2024 : les collectivités locales ont donc voté leur budget 2024 alors que la mesure n’existait pas. Si le prélèvement intervient sur les budgets 2025, les exécutifs locaux n’ont donc pas pu tenir compte de la mesure au moment de l’élaboration de leurs budgets 2024. Leurs décisions sur les budgets 2024 auraient donc pu être différentes s’ils avaient su que l’évolution de leurs dépenses serait susceptible de donner lieu à un prélèvement. Et rien ne figurait sur ce prélèvement en loi de programmation des finances publiques 2023-2027 : le dispositif de pénalité avait même été retiré du texte par le Gouvernement de l’époque.
Au-delà, l’AMF chiffre à 8,75 Md€ les restrictions de recettes seraient imposées aux collectivités locales et se décomposent de la façon suivante :
3 Md€ obtenus par un prélèvement sur certaines collectivités dont les dépenses atteignent 40 M€ et qui ne sont pas bénéficiaires du FPIC. Ce prélèvement sera conditionné au niveau de dépassement du solde des collectivités territoriales en 2024 par rapport à celui inscrit en loi de finances 2024, c’est-à-dire celles dont les dépenses de fonctionnement auront dépassé 4,7% en 2024. Le prélèvement correspondra au dépassement de cet objectif, dans la limite de 2% des recettes réelles de fonctionnement.
1,2 Md€ par le gel du montant de la fraction de TVA
0,8 Md€ via la réduction du taux du FCTVA : le dispositif s’appliquerait dès les versements 2025. On peut se poser la question de la rétroactivité d’une telle mesure puisque le PLF prévoir que le taux réduit s’applique aux versements 2025. A noter que le commentaire du PLF prévoir 0,8 Md€ d’économies mais que le détail de l’article du PLF prévoit 0,3 Md€ et non pas 0,8 Md€.
0,487 Md€ de réduction des dotations
0,5 K€ en raison du gel de la DGF dont 0,350 K€ pour le bloc communal
1,5 Md€ de réduction du Fonds vert.
1,3 Md€ pour rééquilibrer la CNRACL : l’objectif est une réduction du déficit de la CNRACL par une hausse de 4 points du taux de cotisation retraites, pour les collectivités et les hôpitaux, soit 2,3Md€ dont 1,3 Md€ pour les collectivités locales
47 M€ au titre de la suppression du fonds de soutien des activités périscolaires
60 M€ au titre du relèvement de 20% à 30% du taux d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des terres agricoles.
S’ajoutent la réduction des cofinancements des différentes opérateurs en raison du plafonnement des taxes qui leurs sont affectées : le PLF 2025 perpétue en effet le mécanisme de plafonnement annuel de certaines ressources affectées introduit par l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 afin de les faire participer au redressement des finances publiques par le biais d’une modération ou d’une réduction de leurs dépenses (voir infra)
8,75 Md€ représentent en un an plus de 75% de la baisse des dotations, laquelle s’était en outre échelonnée sur 4 ans. C’est plus de 20% de l’épargne brute des collectivités locales. L’effort semble donc surdimensionné.
A un an de la fin du mandat, certaines dépenses correspondant à des projets déjà engagés ne pourront être réduites. Pour éviter d’accroître la pression fiscale, les collectivités locales pourraient être amenées à augmenter l’emprunt à due concurrence des pertes de recettes. Dans ce cas, ces restrictions pourraient conduire à une augmentation du besoin de financement des collectivités locales en 2025, et à un recours supplémentaire à l’emprunt pour compenser les pertes de ressources et permettre le financement des projets déjà engagés.
La baisse des dotations avait été mise en œuvre dès la première année du mandat, obligeant à intégrer cette perte de ressource dans le projet du mandat. En raison de leur mise en œuvre à la fin du mandat et non en début de mandat comme pour la baisse des dotations, ces mesures pourraient donc aggraver le déficit public.
Enfin, l’AMF rappelle que l’effort des collectivités locales à la réduction du déficit existe déjà via le gel puis la baisse des dotations. Ainsi, depuis 2010, le bloc communal enregistre plus de 71 Md€ de pertes cumulées sur la DGF.