- Texte visé : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, n° 325
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 2223‑42 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’impossibilité pour un médecin de se déplacer et lorsque le décès survient à domicile, un infirmier exerçant en pratique avancée ou par un infirmier dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article L. 4161‑1 du code de la santé publique peut délivrer des certificats de décès. »
II. – Le livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le dixième alinéa de l’article L. 4301‑1, il est inséré un d ainsi rédigé :
« d Les actes permettant de constater le décès d’une personne ; »
2° Après l’article L. 4311‑1, il est inséré un article L. 4311‑1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4311‑1-1 – Par dérogation aux dispositions du I de l’article L. 4301‑1, l’infirmière ou l’infirmier exerçant en pratique avancée habilités à délivrer des certificats de décès exerce cette compétence individuellement dans les conditions définies à l’alinéa 2 de l’article L. 2223‑42 du code général des collectivités territoriales. »
III. – L’article L. 162‑12‑4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l’article L. 162‑5-14‑2 sont applicables aux infirmiers dans les conditions définies à l’alinéa 2 de l’article L. 2223‑42 du code général des collectivités territoriales . »
Cet amendement vise à permettre aux infirmiers en pratique avancée ainsi qu’aux infirmiers
bénéficiant d’une délégation d’actes médicaux de pouvoir établir, au même titre que les
médecins, des certificats de décès en cas d’impossibilité pour le médecin de se déplacer et
lorsque le décès survient à domicile.
Depuis 2019, la législation a élargi la possibilité d’établir des certificats de décès, initialement
réservée aux médecins, aux médecins retraités, aux étudiants de troisième année de médecine ainsi
qu’aux praticiens à diplôme hors Union européenne (PADHUE). Pourtant, cette évolution ne
permet pas de répondre aux besoins présents sur le territoire concernant l’établissement des constats
de décès à domicile, plus particulièrement lorsque le décès intervient la nuit, en fin de semaine ou
en jours ouvrés.
Autrefois, lorsque les médecins de famille ne pouvaient se déplacer au domicile des défunts, cette
mission incombait au médecin d’état civil. Cependant, avec la disparition de cette profession au
début des années 2000, elle a été transférée aux médecins libéraux, comme en dispose l’article L.
2223-42 du code général des collectivités territoriales.
La démographie médicale actuelle complique la rédaction des constats de décès et cette
problématique touche tant les zones urbaines que les zones rurales. Or, l’enjeu éthique est important
: les familles ne devraient pas attendre cet acte, qui détermine pourtant tout le processus
d’inhumation et de deuil.
Le principal problème réside dans la répartition hétérogène des médecins sur le territoire national.
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a constaté
l’existence de zones fragiles ou sous-dotées vis-à-vis de l’accès à la médecine de premier recours,
c’est-à-dire l’accès un médecin généraliste. L’identification des zones fragiles s’appuie sur
l’indicateur d’Accessibilité potentielle localisée (APL), développé en 2012 et utilisé par l’ensemble
des Agences régionales de santé (ARS).
La raréfaction de la ressource libérale a conduit à une hausse de l’activité des médecins libéraux,
qui se voient de plus en plus contraints de limiter leurs interventions en dehors de leur cabinet. Il est
difficile pour un médecin de répondre à une demande d’établissement de constat de décès sur les
horaires de continuité des soins (CDS) (8h-20h) car cela le conduirait à cesser ses consultations.
Concernant les médecins de garde, le même écueil apparaît dans le cadre de la permanence des
soins ambulatoires (PDSA) (20h-8h), d’autant plus que l’établissement de certificats de décès ne
fait pas partie des missions des médecins de garde dans ce cadre.
L’article 119 de la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation du système de santé crée
l’article L. 4301-1 du code de la santé publique permettant aux auxiliaires médicaux de pouvoir
exercer « en pratique avancée : 1° Au sein d’une équipe de soins primaires coordonnée par le
médecin traitant ou d’une équipe de soins d’un centre médical du service de santé des armées
coordonnée par un médecin des armées ; 2° Au sein d’une équipe de soins en établissements de
santé, en établissements médico-sociaux ou en hôpitaux des armées coordonnée par un médecin : 3°
En assistance d’un médecin spécialiste, hors soins primaires, en pratique ambulatoire. »
Le professionnel agissant dans le cadre de la pratique avancée est responsable des actes qu’il réalise
dans ce cadre.
La pratique avancée vise à répondre aux nouveaux enjeux d’un système de santé en mutation.
L’IPA est un infirmier expérimenté et se distingue des infirmiers en soins généraux engagés dans un
protocole de coopération, par son champ de compétences élargi et une plus grande autonomie.
Comme en dispose le III de l’article L. 4301-1 du code de la santé publique, un IPA est un infirmier
expérimenté, d’au moins trois ans d’exercice, ayant obtenu son diplôme d’IPA (une année de
formation de tronc commun et une année centrée sur les enseignements en lien avec la mention
choisie). Actuellement, il existe trois mentions :
- les pathologies chroniques stabilisées et les polypathologies courantes en soins primaires ;
- l’oncologie et l’hémato-oncologie ;
- la maladie rénal chronique, la dialyse, la transplantation rénale.
L’article L. 4301-1 du code de la santé publique précise que les domaines d’intervention en pratique
avancée peuvent comporter : des activités d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage
; des actes d’évaluation et de conclusion cliniques, des actes techniques et de surveillance clinique
et para-clinique ; des prescriptions de produits de santé non soumis à prescription médicale
obligatoire, des prescriptions d’examens complémentaires et des renouvellements ou adaptations de
prescriptions médicales.
Un IPA participe à la prise en charge globale du patient, dont le suivi lui est confié par un médecin.
Un infirmier diplômé d’Etat (IDE) ne peut pas délivrer de certificat de décès, dans la mesure où
cette entreprise est considérée comme exercice illégal de la médecine.
Pour autant, l’article L. 4161-1 du code de la santé publique fixe le principe de délégation d’actes.
Le dernier alinéa dudit article prévoit que les dispositions relatives à l’exercice illégal de la
médecine ne s’appliquent pas aux personnes qui accomplissent, dans les conditions fixées par décret
en Conseil d’Etat pris après avis de l’Académie nationale de médecine, les actes professionnels dont
la liste est établie par ce même décret.
Aussi, certains actes peuvent être exercés par des infirmiers sur délégation du médecin dans
certaines conditions prévues par voie réglementaire. Ainsi, l’extension des prérogatives des
infirmiers diplômés d’Etat en matière d’établissement de certificats de décès serait rendue possible
après l’adoption d’un décret en Conseil d’Etat.
La délégation d’actes médicaux implique les professionnels de santé eux-mêmes à travers les
sociétés savantes, les institutions académiques et les ordres de santé. Aussi, l’intervention de la
Haute Autorité de santé à ce sujet sera nécessaire, afin de préciser les contours de cette nouvelle
disposition. Celle-ci pourrait notamment faire l’objet de recommandations de bonnes pratiques.
L’article L.2223-42 du code général des collectivités territoriales dispose que seul un médecin peut
établir un certificat attestant le décès d’un individu.
Ce document officiel permet d’attester que le décès ne suscite pas d’interrogation d’ordre médico-
légal et permet la prise en charge du corps par les sociétés de pompes funèbres. Il est complété par
tout professionnel inscrit à l’Ordre des médecins, sur la base du volontariat.
La loi n°2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 prévoit
que les médecins intervenant à domicile pour établir un constat de décès dans le cadre de la
permanence des soins perçoivent une indemnisation. Les textes d’application ont été publiés le 10
mai 2017.
Nonobstant, l’établissement des constats de décès reste un problème récurrent. La démographie
médicale actuelle ne permet pas aux praticiens médicaux de se déplacer dans un délai raisonnable.
Cela n’est pas acceptable tant d’un point de vue administratif que d’un aspect humain.